Le 13 novembre, le ministre israélien des Finances du gouvernement Netanyahou, Bezalel Smotrich, qui exerce également des responsabilités au ministère de la Défense, dirigeant du parti religieux Mafdal, suprémaciste, chargé des colonisations illégales en Cisjordanie, sera à Paris pour participer à une soirée de gala en tant qu’invité de l’association « Israël is forever ».
Depuis l’attaque du 7 octobre 2023, la France revendique haut et fort son amitié pour Israël et son droit à la légitime défense. Or, ce pays se livre à une guerre contre le peuple palestinien, commettant des actes diamétralement opposés aux principes fondateurs de la République française, de la charte des Nations unies et du droit international, actes qui ont amené la Cour internationale de justice (CIJ) à évoquer, le 26 janvier 2024, un risque plausible de génocide et à ordonner à Israël « de cesser immédiatement toutes ses opérations militaires et de faciliter l’accès à l’aide humanitaire ».
Si l’on admet, comme Charles De Gaulle, que « la France doit être l’amie des peuples, non des régimes qui les gouvernent », il eût été de notre devoir de faire pression sur cet ami pour le ramener à la raison, dans son propre intérêt comme dans celui de l’humanité. Nous ne l’avons pas fait, alors même que des citoyens israéliens appellent courageusement le monde à faire pression sur leur propre gouvernement pour qu’il cesse ses crimes de guerre et obtenir un cessez-le-feu, dans l’intérêt même d’Israël.
La France semble prisonnière d’intérêts à court terme autant que de son histoire coloniale qui, dans cette région du Moyen-Orient, s’est illustrée par les désastreux accords Sykes-Picot. Faute de rompre avec cet héritage, elle ne peut faire entendre une voix claire et indépendante, créant les conditions d’un juste équilibre dans le monde, à une heure où toute la région risque de s’enflammer, entraînant, de proche en proche, un conflit nucléaire mondial.
Elle laisse se créer un amalgame par son soutien de fait au régime d’extrême droite de Netanyahou, dont personne ne peut ignorer, dans les allées du pouvoir, le pedigree plus que douteux. Faut-il rappeler qu’il a été élevé dans les conceptions promues par Vladimir Zeev Jabotinsky (dont son père, Bension Netanyahou, était le secrétaire), fondateur de l’Union mondiale sioniste révisionniste, parti représentant une droite nationaliste radicale et suprémaciste, ayant entretenu des liens avec Mussolini et même avec le régime nazi, et revendiquant la violence pour coloniser la Palestine ? Cette mouvance radicale est le terreau ayant produit des organisations telles que l’Irgoun, responsable, avec la Haganah et le Lehi, de nombreux attentats terroristes contre la population palestinienne et bras armé de la politique de nettoyage ethnique dès le début.
Aujourd’hui, l’ONU décrit comme « apocalyptique » la situation dans le nord de Gaza, qu’Israël a déclaré zone militaire, la population de la zone de Jabaliya étant la cible permanente de bombardements et de combats au sol. L’ensemble de la population palestinienne du nord de Gaza est confrontée à un risque imminent de mourir de maladie, de famine et de violence. L’arrivée au compte-gouttes de l’aide humanitaire aggrave la crise, avec des pénuries, volontairement entretenues, de nourriture, d’eau potable et de médicaments.
Le bilan humain depuis le début de la guerre se monte au moins à 43 000 tués, auxquels s’ajoutent les blessés et mutilés (sans compter les corps restant ensevelis sous les décombres). Toutefois, une étude du Lancet parue le 10 juillet 2024 estimait à 186 000 (selon une fourchette basse) le nombre réel de morts, en comptant les décès indirects par dénutrition et maladies provoquées par un environnement infecté. Quatre mois après la parution de cette étude, et les combats n’ayant pas cessé, on peut estimer qu’au moins 10 % de la population de Gaza a été décimée, sans parler de la destruction complète des infrastructures et de la volonté explicite d’éliminer un peuple, avec son histoire et sa culture.
Enfin, l’assaut mené par le régime de Netanyahou contre le Liban, pays avec lequel la France entretient depuis longtemps des liens étroits, loin d’avoir provoqué une réaction légitime et un soutien fort et concret de la part de notre pays, n’a suscité que des déclarations tièdes et sans engagement réel.
Au sein du gouvernement Netanyahou, Bezalel Smotrich est non seulement l’un des piliers de cette politique sanguinaire, mais il joue un rôle clef dans la politique de nettoyage ethnique. Ainsi, dès février 2023, il avait été chargé de la plupart des compétences relatives à la colonisation de la Cisjordanie occupée, mission où il s’est montré particulièrement cruel.
D’autre part, en août 2024, le haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk, s’est dit « choqué et consterné » par les propos de Bezalel Smotrich, affirmant qu’« il serait justifié et moral de laisser mourir de faim 2 millions de Palestiniens à Gaza pour libérer des otages », des propos « qui incitent également à la haine contre des civils innocents ». Jeremy Laurence (porte-parole du Haut-Commissariat aux droits de l’homme) rappelait alors que le fait d’affamer des civils comme méthode de guerre est un crime de guerre.
Dans ce contexte, la venue en France d’un ministre d’un gouvernement étranger officiellement suspecté de génocide et de crimes de guerre ne se réduit pas à une simple provocation. Elle place de facto la France en posture de complice. A cet égard, la déclaration du ministère des Affaires étrangères, alléguant que M. Smotrich se rend à Paris dans le cadre d’un déplacement privé et qu’aucun contact gouvernemental n’est prévu à cette occasion, n’est tout simplement pas recevable.
Ceux qui ont interdit l’espace aérien français à Evo Morales, alors président de Bolivie, laisseront-ils fêter à Paris la politique criminelle de Netanyahou ?
La France doit déclarer Bezalel Smotrich persona non grata et lui interdire l’entrée sur le territoire national.
D’autres appels à la mobilisation
Appel de la Ligue des droits de l’homme (LDH), signé par l’Association France Palestine solidarité (AFPS), LDH (Ligue des droits de l’Homme), Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), Confédération générale du travail (CGT), Fédération syndicale Unitaire (FSU) ;
Lettre ouverte de l’Association France Palestine Solidarité au préfet de Paris Laurent Nunez concernant le Gala de l’association Israël is for ever en présence de Bezalel Smotrich ;
Site du PCF : Smotrich doit être persona non grata en France.
Paris Luttes Info : « Israël is forever » : le gala de la honte ne doit pas se tenir. Manifestation du jeudi 7 novembre à 19h Place du Trocadéro.
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir