Qui mène vraiment l’attelage USA-Israël ?

Qui mène vraiment l’attelage USA-Israël ?

Qui dirige vraiment l’attelage infernal des USA et d’Israël dans les guerres en Asie occidentale aujourd’hui ? Et-ce que les USA sont vraiment le patron d’Israël et l’utilisent pour empêcher l’unité des pays arabes voire pour renverser la République islamique d’Iran ? Ou est-ce que Israël, grâce au puissant lobby implanté aux USA depuis au moins la seconde guerre mondiale, mène les présidents successifs des USA par le bout du nez pour  »vider » les territoires palestiniens occupés et ensuite les annexer ?

Notre amie Jocelyne Chassard a récemment découvert, grâce à Profession Gendarme, le professeur d’université étasunien John Mearsheimer, spécialiste des relations internationales. Il appartient à la tradition de la Realpolitik, le réalisme politique dans les relations entre les états du monde et dans la politique étrangères des États-Unis. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont La Tragique politique des grandes puissances paru en 2003.

Il est convaincu que c’est l’état d’Israël qui mène la politique des Etats-Unis en Asie occidentale, essentiellement grâce à l’influence du lobby sioniste et des groupes d’influence comme AIPAC ou les sionistes chrétiens.

L’autre thèse est défendue par Gilbert Doctorow, un citoyen étatsunien qui habite aujourd’hui à Bruxelles en Belgique : il a fait des études d’Histoire, a travaillé depuis 1965 dans le milieu des affaires en URSS puis en Russie et en Europe de l’Est ; il a présidé le Prix littéraire Booker de Moscou de 1998 à 2002. Depuis 2008, il publie des analyses de géopolitique dans La Libre Belgique. Il a rassemblé ses articles dans 4 livres, dont le dernier en 2017 s’intitule : Les Etats-Unis ont-ils un futur ?

Il pense que Israël est un état-nervi des Etats-Unis en Asie occidentale et qu’il sert les intérêts de la puissance hégémonique des USA : s’emparer des ressources naturelles de la région, empêcher l’unité des pays arabes, empêcher que l’Iran devienne une puissance régionale.

Jocelyne Chassard a traduit deux extraits de deux entrevues avec John Mearsheimer et Gilbert Doctorow, les 3 et 8 octobre 2024, où les deux hommes expliquent leur thèse.

Elle a traduit l’expression « proxy wars » par « guerres par procuration » et le mot « proxy » ou « proxies » par « état-nervi ». Le mot « nervi » vient de l’argot marseillais, il signifie voyou, homme de main chargé des basses besognes, voire même tueur à gages.

En prime, elle nous offre une déclaration percutante, le 5 février 2024, du colonel étatsunien Lawrence Wilkerson, ancien militaire et ancien chef de cabinet du secrétaire d’État (ministre des Affaires étrangères) Colin Powell, sur la  »menterie » invétérée des dirigeants israéliens (voir en bas de page) !

Vidéo publiée sur Youtube le 15 octobre 2024 :

1ère thèse : Israël dirige la politique étrangère des USA en Asie occidentale grâce à son puissant lobby et à son réseau d’influence : John Mearsheimer le 3 octobre 2024.

Juge Andrew Napolitano : Professeur Mearsheimer, st-ce que vous décririez comme imprudente l’attitude du Premier ministre Netanyahou ces derniers jours, avec la décision d’assassiner le secrétaire général du Hezbollah Hasan Nasralla et la décision d’envahir le Liban au sol ?

John Mearsheimer : Selon moi ce qu’il fait au Liban est imprudent. […] La décapitation de Nasralla ne va pas produire d’effets positifs sur l’issue du conflit. Cette idée des Israéliens que décapiter le Hezbollah est une manière de gagner cette guerre au Liban, ce n’est pas sérieux. Cela fait longtemps que Israël décapite des chefs palestiniens et des chefs du Hezbollah et ça ne produit rien, ça n’a aucune conséquence significative. Et de plus, cette invasion terrestre du Sud-Liban, c’est le moyen garanti pour échouer. Le Hezbollah ne pas pas disparaître ! Toute cette histoire de remodeler le Moyen-Orient après l’assassinat de Nasralla vendredi dernier, Israël et ses supporteurs se sentaient pousser des ailes, et quelle super occasion c’était de pouvoir redessiner le Moyen-Orient, tout ce qu’on avait à faire c’est de continuer à taper avec un gros bâton et tout finirait en beauté !

C’est tout simplement du délire : ils ne vont pas résoudre le problème au Liban, le Hezbollah ne va pas disparaître, le Hamas n’a pas disparu… Au fait, nous n’avons pas parlé de ce qui se passe à Gaza mais vous savez bien qu’Israël n’a pas vaincu le Hamas, ils n’ont même pas récupéré leurs otages…

Et donc on revient à l’Iran, on est en pleine escalade et Dieu sait où cela va finir !

Donc, de mon point de vue, toute cette série d’actions que mène Netanyahou est remarquablement insensée et nous, les États-Unis, nous restons avec lui.

Juge Andrew Napolitano : Ce matin le professeur Gilbert Doctorow a exprimé une position que je n’avais pas encore entendue et j’ai immédiatement pensé à vous car j’ai pensé que vous ne seriez pas d’accord. Il prétend que l’Iran serait un état vassal des États-Unis dans une guerre contre la Russie et que Israël serait un état vassal des États-Unis, utilisé pour tuer les Arabes au Moyen-Orient. Je l’ai contredit en arguant qu’il mettait le carrosse avant les chevaux pour cette union entre les USA et Israël mais il est resté sur sa position. Peut-être qu’il nous regarde en ce moment car il sait que vous êtes un des principaux opposants à cette thèse, à moins que je ne l’ai mal compris ou que je vous aie mal compris. Donc en gros il affirme que ce sont Biden et Co. qui contrôlent Netanyahou plutôt que Netanyahou et Co. ne contrôlent Biden.

John Mearsheimer : Oui, c’est une thèse qu’on entend souvent et c’est la thèse qu’on m’a opposée lorsque j’ai écrit avec Steve Walt, d’abord un article et puis un livre sur le lobby israélien en 2008.

En fait j’ai correspondu avec Noam Chomsky et Norman Finkelstein – et j’ai un grand respect pour tous les deux sur ce sujet : ils sont d’accord avec la thèse de Gilbert Doctorow et cette thèse a beaucoup d’autres partisans dans le pays.

Je crois qu’ils se trompent complètement : si vous regardez les relations entre les États-Unis et Israël sur le temps long, il y a énormément de preuves que les deux pays ont été en désaccord sur beaucoup de points – pas toujours, parfois ils ont eu un intérêt commun à poursuivre la même politique. Mais à plusieurs reprises dans l’histoire des relations entre Israël et les États-Unis, nous avons poussé dans un direction et eux dans une autre : et je pense qu’il est très largement prouvé que Israël a gagné presqu’à chaque fois, peut-être pas dans les premiers temps mais presque à chaque fois. Et c’est à cause du pouvoir de leur lobby.

Vous n’avez qu’à regarder ce qui s’est passé quand Benjamin Netanyahou a fait un discours devant le Congrès récemment [le 24 juillet 2024], ainsi que ses précédentes apparitions devant le Congrès : les membres du Sénat ou de la Chambre des représentants se comportent comme des toutous, et vous devez vous demander pourquoi c’est comme ça ? Est-ce que ce pays exécute nos ordres et suit une politique qui est dans l’intérêt national des États-Unis ? Moi, je ne le pense pas.

Juge Andrew Napolitano : Pourquoi est-ce qu’on s’est écrasés quand des avions de chasse israéliens ont attaqué et détruit le USS Liberty en 1967, ce navire de surveillance en haute mer, et que 34 marins américains sont morts et 300 autres blessés ?

John Mearsheimer : Le pouvoir du lobby, purement et simplement ! Et s’il y a eu un président qui était le prisonnier de ce lobby, c’était Lyndon B. Johnson, il n’y a aucun doute là-dessus. John Kennedy a été un casse-pieds pour le lobby… Mais JFK a été assassiné et remplacé par Lyndon Johnson. Et je pense que c’est Johnson le principal responsable du fait de regarder ailleurs quand Israël a atteint la dissuasion nucléaire. Kennedy avait à cœur de ne pas permettre à Israël d’avoir des armes nucléaires…

Juge Andrew Napolitano : Je sais que votre domaine c’est la philosophie politique et vous êtes un réaliste, vous n’êtes pas un psychologue, mais pourquoi croyez-vous que des gens comme John Bolton, Lindsay Graham, Josh Hawley, Tom Cotton, voudraient juste tuer des Arabes, soit par les USA directement soit par le bras d’Israël ?

John Mearsheimer : Je ne sais pas. Il n’y aucun doute qu’ils s’engagent à fond pour que les États-Unis utilisent leurs forces militaires dans le monde entier, et si cela implique de tuer des milliers d’Arabes, des milliers de Palestiniens, ou de regarder Israël le faire, ça ne leur pose aucun problème. Cela s’explique en partie, selon moi, parce qu’ils divisent le monde en deux camps : les Bons et les Méchants. Nous sommes les bons, les Israéliens sont les Bons et tous les Autres, entre guillemets, sont les Méchants.

Juge Andrew Napolitano : Je vais vous faire écouter ce qu’a dit John Bolton hier : il parlait de la possibilité que les Iraniens mettent des armes nucléaires dans les missiles qu’ils ont déjà, que ces missiles soient équipés ou non.

John Bolton, le 2 octobre 2023 : « Il est probable que le programme nucléaire de l’Iran pourrait être ciblé, et ceci pour plusieurs raisons. D’abord le premier ministre israélien Netanyahou, plus que tout autre personnalité politique en Israël, a compris que c’était LA menace existentielle pour Israël. Je crois que les gens doivent comprendre que, avec environ 300 missiles balistiques tirés par l’Iran sur Israël depuis avril 2024, ils peuvent craindre que le prochain missile qui les visera contienne une arme nucléaire dans la tête de l’ogive, et ça c’est une bonne raison pour résoudre ce problème nucléaire maintenant. »

John Mearsheimer : Je dirais 2 ou 3 choses. D’abord les Iraniens peuvent développer des matières fissiles en quelques semaines, il n’y a pas de doute ; mais transformer cette matière fissile en bombe et équiper des missiles balistiques qui puissent l’envoyer sur des pays éloignés, moi je pense que ce n’est pas une tâche facile et ça devrait leur prendre deux ans ou plus…

Juge Andrew Napolitano  : Si je vous ai fait écouter John Bolton, c’est pour savoir si ce genre d’argument – bien sûr que ça a de l’écho à Tel Aviv mais à Washington ?

John Mearsheimer : Ça peut avoir de l’écho à Washington jusqu’à un certain point. C’est vrai qu’au premier abord l’idée de s’en prendre aux capacités nucléaires de l’Iran est séduisante, et les gens comme Bolton disent : « Allez, on y va, on s’occupe de cette menace une bonne fois pour toutes et après on sera tranquilles, on n’aura plus à s’en préoccuper ! » Mais ce n’est pas vrai ! Il est évident que, au moment où je vous parle, les États-Unis avec Israël (Israël tout seul ne pourrait pas le faire, je pense) peuvent attaquer et détruire une grande partie des capacités nucléaires de l’Iran. Mais presque toutes les personnes que je connais pensent que l’Iran sera capable de reconstituer ses capacités et il le fera de telle sorte que nous ne pourrons pas l’attaquer de nouveau. Et au final ils pourront avoir l’arme nucléaire et ils seront devenus fous furieux. Et ce que vous devez vous demandez c’est : voulez-vous vivre dans un monde pareil ?

Rappelez-vous que John Bolton faisaient partie de ceux qui voulaient sortir de l’Accord-cadre sur le nucléaire iranien signé en 2015 : [Trump l’a dénoncé] et le résultat c’est que l’Iran a suffisamment d’uranium enrichi pour avoir en 2-3 semaines de la matière fissile suffisante pour une bombe. Et ça ne serait pas arrivé si nous étions restés dans l’accord et si nous avions amélioré nos relations avec l’Iran ! Mais c’est l’inverse qui s’est passé, en grande partie sous la pression d’Israël et de ses alliés aux États-Unis, i.e. des gens comme John Bolton…

Juge Andrew Napolitano : Et le président Trump a cédé à cette pression… [le 8 mai 2018]

John Mearsheimer : Exactement, c’est lui qui a fait chose absurde.

Juge Andrew Napolitano  : Si les USA aident Israël et font ce que John Bolton désire, est-ce que la Russie va entrer militairement en jeu et si la Russie entre en jeu est-ce que la Chine suivra ?

John Mearsheimer : Je ne pense pas que la Chine le fasse. Et pour la Russie, ce n’est pas clair ce que feraient les Russes… Je ne pensent pas que les Russes s’engageraient militairement : ce serait trop dangereux et en plus ils ont fort à faire avec la guerre en Ukraine et la dernière chose qu’ils veulent c’est une guerre avec les États-Unis à cause de l’Iran. C’est évident qu’ils aideraient l’Iran en lui fournissant des armes et tout le soutien diplomatique possible.

Mais encore une fois, il faut voir les relations internationales sur un temps long. Que les Russes aident l’Iran dans le conflit actuel, c’est une chose. La question est : qu’est-ce que cela signifie sur le long terme ? Je pense que les Russes vont se donner beaucoup de mal pour aider les Iraniens, et si les Iraniens décident de se doter de l’arme nucléaire, les Russes regarderont probablement de l’autre côté. Il y a eu une période où les Russes travaillaient avec les États-Unis pour que l’Iran n’ait pas l’arme nucléaire : la preuve, c’est l’Accord-cadre de 2015 que nous avons négocié ensemble et les Russes ne voulaient pas que l’Iran ait l’arme nucléaire..

Juge Andrew Napolitano  : Mais pour revenir à la thèse du Pr. Gilbert Doctorow : Israël se bat contre l’Iran, et l’Iran se bat contre Israël, nous soutenons Israël et la Russie soutient l’Iran.. ; est-ce que c’est une guerre par procuration des États-Unis contre la Russie par l’intermédiaire de leur « proxies » Israël et Iran ?

John Mearsheimer : Cela devient très difficile de qualifier ce qui se passe au Moyen-Orient de guerre par procuration, en grande partie à cause du très haut niveau d’implication des États-Unis envers Israël. De ce qu’on voit c’est presque comme s’ils opéraient ensemble à Gaza, opéraient ensemble au Liban, et contre les Houthis et contre l’Iran. Nous sommes de plus en plus fortement entraînés dans ce conflit et par conséquent ça devient de plus en plus difficile de prétendre que Israël est notre « proxy ». Les deux états sont liés au plus haut niveau.

2ème thèse : Israël est utilisé comme un état-nervi par les États-Unis pour servir leurs intérêts en Asie occidentale, notamment pour contrer l’Iran Gilbert Doctorow le 8 octobre 2024.

1. Les guerres sans fin et guerres par procuration.

L’économiste et historien Michael Hudson a compris pourquoi les Etats-Unis allaient abandonner la politique des “boots on the ground” (ingérence territoriale directe par des militaires étatsuniens) et choisir les “proxy wars”, les guerres par procuration où ce sont les forces armées des états-nervis qui combattent sur le terrain pour servir les intérêts des USA.

C’est une des conséquences de la guerre du Vietnam que je n’avais pas beaucoup considérée : c’est la décision d’arrêter la conscription et de former une armée professionnelle parce que ce n’était plus possible de maintenir une nation en armes. L’idée de “nation en armes” est devenue politiquement explosive et empoisonnée : c’est ce qui a fait tomber le président Lyndon Johnson et, à la fin des années ‘1970, le président Nixon avait parfaitement compris qu’il n’y aurait plus de conscription.

Le résultat fut de faciliter le passage à l’idée des guerres sans fin (forever wars) : d’un côté les Etats-Unis ne sacrifieraient plus le sang de leurs soldats dans des guerres parce que ce seraient les soldats des états-nervis qui ont leurs propres comptes à régler et dans certains cas cela coïncide avec les intérêts des USA. Et d’un autre côté le financement de ces guerres ne viderait pas la bourse des contribuables étatsuniens puisque ce serait la Chine et d’autres pays qui paieraient en achetant les bons du trésor étatsuniens.

Par conséquent, à la fin des années ‘1970, la plus grande leçon de la guerre du Vietnam a été de concevoir les guerres sans fin, et elles ont pu commencer après 1991 puisque les USA ne devaient plus se soucier de contenir l’URSS et qu’ils se sont crus être la seule superpuissance.

2. La volonté des USA de neutraliser l’Iran.

D’autres personnes m’ont fait connaître un rapport qui date de 2009 et qui voulait repenser la politique des USA envers “la Perse”, pour dire l’Iran.

C’était un long rapport, il fait 170 pages et il a été produit par l’Institut Brookings, qui est un des laboratoires d’idées du Parti Démocrate. Et ce rapport a formulé explicitement comment Israël devrait et pourrait être utilisé pour attaquer les centres de recherche nucléaire de l’Iran. Et cela épargerait aux USA de se confronter directement à l’Iran dans une guerre pour l’empêcher d’obtenir l’arme nucléaire et le neutraliser.

Ce rapport de l’Institut Brookings était bien connu et je remercie ceux qui me l’ont fait connaître parce que cela permet, en regardant vers le passé récent, de confirmer ce que je dis aujourd’hui sur les guerres par procuration que mènent les Etats-Unis pour cogner partout au Moyen-Orient et pour renverser l’Iran.

L’Iran est la Némésis des Etats-Unis depuis 1979, depuis la prise d’otages à l’ambassade des Etats-unis à Téhéran [le 4 novembre 1979] par le nouveau gouvernement révolutionnaire qui venait de prendre le pouvoir avec l’ayatollah Khomenei.

Depuis lors, l’Iran a toujours été comme une arrêtte de poisson dans la gorge des USA car il a empêché la domination totale des étatsuniens sur la région. Il y a eu des hauts et des bas parce que, par exemple, les USA se sont débrouillés pour provoquer une guerre sanglante de 8 ans, entre 1980 et 1988, entre l’Iran et l’Irak, pour les empêcher de devenir trop puissants dans la région. Eh bien l’Iran est un grand pays de 90 millions d’habitants et si sa croissance a été retardée dans le passé, ça ne l’a pas empêché de se reconstruire et il est en train de grandir à nouveau, du point de vue économique et militaire, notamment dans le groupe solidaire des BRICS. Et donc il est devenu un opposant dangereux pour l’hégémonie des USA au Moyen-Orient et dans le monde entier.

Donc les USA seraient très heureux si c’était Israël qui passait à l’acte et réaliser son propre rêve de rabaisser l’Iran et d’affirmer sa propre suprématie militaire au Moyen-Orient : les deux intérêts vont ensemble.

3. Les  »faucons » néo-conservateurs au pouvoir à Washington.

Il y a encore un autre élément qui m’a été apporté par le colonel Lawrence Wilkerson, qui a été le chef de cabinet du général Colin Powell quand Powell était le Secrétaire d’Etat (= ministre des Affaires étrangères). Lawrence Wilkerson est un homme qui a travaillé aux plus hauts niveaux de la diplomatie et de la défense des USA.

J’ai été très content de la réponse qu’il a faite quand on lui a demandé ce qu’il pensait de ma remarque sur les Etats-Unis comme le chien qui agite directement la queue d’Israël. Sa réponse a été très prudente : une telle interprétation ne caractérisait pas la totalité du gouvernement fédéral, mais il a reconnu que certains membres du gouvernement voyaient les choses exactement de cette façon. Et il a mentionné Victoria Nuland, le clan des néo-conservateurs qui, selon lui, sont toujours bien calés dans les postes les plus importants de la politique étrangère des USA et qui, toujours selon lui, n’ont jamais été traduits en justice.

Donc nous pensons la même chose : ces gens sont des criminels de guerre et auraient dû être traduits en justice. Mais dans le clan des néo-conservateurs, personne n’a jamais payé le prix des conséquences réelles désastreuses, sur le terrain, pour les pays que les USA ont envahis qu’ils se sont évertués à punir, ou pour les dégâts qu’ils ont causé dans notre pays, que ce soit la richesse ou l’énergie.

4. Le double langage de la diplomatie étatsunienne.

Ce serait une erreur de croire que la politique étrangère des USA est dirigée par une institution unitaire : il y a différents courants et il y a deux courants qui se détachent nettement. Il y a le courant de l’idéalisme et en face il y a le courant réaliste, celui de la Realpolitik.

Dans le premier courant vous avez les gens qui clament haut et fort que la politique étrangère des Etats-Unis doit être menée en fonction des valeurs : une politique étrangère basée sur les valeurs. Et parmi ces valeurs il y a le besoin d’encourager la démocratie libérale, l’économie de marché et les droits humains. Cette idéologie remonte au président Woodrow Wilson, lorsqu’il a fait entrer les USA dans la Première guerre mondiale : il a prononcé le discours des 14 points, disant que cette guerre serait la dernière des guerres et qu’on allait créer une organisation de toutes les nations pour empêcher les conflits. Ce fut la Société des Nations, dont les USA étaient absents parce que Wilson n’a pas réussi à persuader ses compatriotes que c’était une clé essentielle de leur sécurité et de la paix. En tout cas c’est Wilson qui a donné son nom à cette vision idéaliste et aujourd’hui c’est celle de ceux qui veulent une politique étrangère basée sur des valeurs.

En face, l’autre vision de la politique étrangère, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du gouvernement, est vraiment très minoritaire. On connaît surtout l’école de la Realpolitik grâce à Henry Kissinger, qui en fut le porte-parole et le pratiquant le plus important.

La Realpolitik n’a pas tellement la cote avec le public, les gens n’aiment pas trop ce sur quoi elle est fondée, c’est-à-dire les intérêts particuliers du pays. Vous pouvez connaître vos intérêts seulement si vous connaissez le monde réel, mais vous pouvez être le champion de certaines valeurs même si vous ne connaissez rien au monde réel. Et le résultat final du modèle éducatif aux Etats-Unis pour ce qui est des relations internationales, c’est que les gens ne connaissent rien au monde réel.

Il y a quelques centres de recherche pour la Realpolitik aux USA et John Mearsheimer se situe à l’épicentre : il est l’héritier de la tradition étatsunienne de la politique réaliste qui a été fondée par Hans Morgenthau, lui aussi de l’université de Chicago. C’est pourquoi je suis très décu que M. Mearsheimer, en tant que représentant de la Realpolitik, trahisse ses propres collègues en niant que Israël soit utilisé comme un état-nervi pour servir les intérêts des USA au Moyen-Orient.

Le point essentiel pour moi c’est que ce que nous voyons aujourd’hui au Moyen-Orient, et c’est vraiment tragique, c’est une Realpolitik menée par des gens qui privilégient les intérêts des Etats-Unis, mais le spectacle médiatique est assuré par Anthony Blinken et Co. Ces gens sont relayés par le Financial Times ou le New York times et tout le monde croit que ce sont des grands principes qui structurent la politique étrangère des USA, mais c’est de la foutaise. C’est juste un écran de fumée.

Déclaration du colonel Lawrence Wilkerson le 5 février 2024 sur la  »menterie » invétérée des dirigeants israéliens :

https://www.instagram.com/reel/C29p4GGLrzZ/?ysclid=m2a7ymjjy8220476912

Laissez-moi commencer par cet avertissement : jamais, jamais, jamais je ne fais confiance à des personnalités israéliennes. J’ai participé au gouvernement assez longtemps pour savoir que les Israéliens sont des menteurs patentés. Dans le domaine du renseignement, dans le domaine de la propagande, c’est sûr, et chez leurs dirigeants politiques, ce sont des menteurs invétérés. Je vais le répéter : ce sont des menteurs !

Et donc vous ne pouvez pas croire quelque chose qui vient de Jérusalem : tout est de la propagande.” (5 février 2024)

Entretien original du 3 octobre 2024 avec John Mearsheimer : https://www.youtube.com/watch?v=fe3d_G1Lif0

Entretien original du 8 octobre 2024 avec Gilbert Doctorow : https://www.youtube.com/watch?v=4l6yhN3Uq8Q

Source: Lire l'article complet de Profession Gendarme

À propos de l'auteur Profession Gendarme

L'Association Professionnelle Gendarmerie (APG) a pour objet l’expression, l’information et la défense des droits et intérêts matériels et moraux des personnels militaires de la gendarmerie et de toutes les Forces de l'ordre.Éditeur : Ronald Guillaumont

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Recommended For You