Monsieur le Premier ministre,
Le 2 octobre dernier, vous vous êtes engagé à vous mettre davantage à l’écoute de la population.
Nous, partenaires et acteurs du milieu de l’éducation, réitérons, haut et fort, que le projet de loi no 23 (PL 23) n’est pas du tout ce dont le réseau a besoin. Vous conduisez le système d’éducation dans la mauvaise direction. Vous vous inspirez de pays où les élèves performent moins bien qu’ici. En pleine pénurie de personnel, il faut plutôt répondre aux besoins pressants sur le terrain.
Le PL 23 créera l’Institut national d’excellence en éducation (INEÉ) qui, tel que présenté, prônera une école de pensée unique et minoritaire de la recherche, celle des données dites probantes.
L’INEÉ dictera les pratiques des enseignantes et enseignants, au détriment de leur autonomie professionnelle et de leur expertise, alors même que nous vivons une grande dévalorisation du personnel dans le réseau.
Comme les données seraient centralisées dans les mains du ministre et que les indicateurs de réussite proviendraient essentiellement des résultats des élèves, une pression accrue se ferait assurément sentir sur le personnel, une des dérives de ce qu’on appelle la gestion axée sur les résultats.
Le Québec s’est doté d’instances indépendantes pour améliorer la qualité de l’éducation, notamment, le Conseil supérieur de l’éducation, qui éclaire les parlementaires et la population en donnant des avis sur les grands enjeux québécois, et le CAPFE, qui s’assure de la qualité de la formation en enseignement. Elles seraient remplacées par l’INEÉ, lequel est inféodé au ministre.
Le PL 23 permettra à tout un chacun de choisir, à la place du personnel enseignant, ses activités de formation continue. Cela défait complètement ce que son prédécesseur, pourtant issu du même parti, lui avait concédé de bonne foi dans le projet de loi no 40.
Plutôt que de valoriser le talent, l’esprit d’initiative et le jugement professionnel du personnel scolaire, le PL 23 mettrait en place un système de surveillance à grande échelle. De plus, nous craignons les dérives de l’offre de services éducatifs à distance, sachant que les meilleurs services sont ceux offerts au sein de l’école.
C’est un projet de loi idéologique qui est loin de répondre aux besoins urgents en éducation. Il risque même d’empirer la situation en centralisant les décisions, en éliminant les contre-pouvoirs, en instrumentalisant le personnel et en lui retirant son autonomie, en accentuant les problèmes de gouvernance et en éloignant l’école de sa mission fondamentale. Vous êtes en train de déconstruire ce qui fait pourtant notre force.
Nous sommes nombreux à penser que le projet de loi no 23 causera plus de problèmes en éducation qu’il n’apportera de solutions. Il faut travailler autrement. Vous vous êtes récemment engagés à être plus à l’écoute. Tiendrez-vous parole?
Plusieurs organisations et chercheurs ont endossé cette déclaration, notamment :
- La Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ);
- La Centrale des syndicats du Québec (CSQ);
- La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ);
- La Confédération des syndicats nationaux (CSN);
- L’Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec (APEQ-QPAT);
- Debout pour l’école;
- Je protège mon école publique;
- La Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS-CSQ);
- La Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPECSQ);
- La Fédération du personnel de l’enseignement privé (FPEP-CSQ);
- Le Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ);
- De nombreux chercheurs mobilisés sur la question.
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