Darmanin ou le sens de la mission…
La Bornstein fait son discours de rentrée à Tourcoing, la ville de Darmanin marquée par la désindustrialisation, le chômage (15 % officiellement, le double sûrement), la pauvreté (18 % officiellement, 50 % en réalité), les Restos du Cœur, bref, les dommages collatéraux de la politique néolibérale française, quand le politique est inféodé au Marché.
C’est donc les mains étrangement propres que notre Premier ministre, qui ne se sent aucune responsabilité dans ce délitement social, vient donner des leçons de bonne votation aux électeurs présents, du moins ceux qui croient encore au vote. La main lourde du Marché vient expliquer aux nouveaux pauvres qu’il ne faut pas voter « extrême droite » parce que c’est mal, et que c’est le Mal.
« Aujourd’hui la question de l’extrême droite et de sa progression dans nos démocraties est au cœur de nos réflexions. Et comme vous tous ici, je ne me résoudrai jamais à ce que l’extrême droite accède au pouvoir dans mon pays. »
Traduction de la saillie : je n’accepterai jamais que les patriotes français accèdent au pouvoir dans leur pays.
La Bornstein débarque à Tourcoing pas seulement pour faire la leçon aux victimes de sa politique antisociale, mais aussi pour marquer à la culotte (même si c’est lui qui l’a invitée) le très ambitieux ministre de l’Intérieur, qui se sent pousser un destin à la Sarkozy. Car Tourcoing, c’est le fief du nouvel Iznogoud, qui l’a réélu aux municipales de 2020 avec 61 % des voix au premier tour… mais avec 75 % d’abstention !
En parlant d’extrême droite, Bornstein vise au premier chef Marine Le Pen, mais aussi son concurrent en interne, qui n’attend qu’un faux pas pour monter sur la 2e marche de la République. Pour se rendre populaire, il pique, comme Sarko en 2005-2007, les thèmes populaires du RN (pour les abandonner une fois élu).
Pour ces macronistes, l’avantage d’un nouveau prolétariat constitué par une population d’origine immigrée, au chômage ou pas, c’est qu’il n’a pas forcément envie de voter patriote : il vote en général à gauche, ce qui permet de piéger et neutraliser toute révolte populaire (voir notre article sur Mélenchon en renvoi).
Oui mais voilà, concentrer trop d’immigrés dans une terre de subventions (Roubaix-Tourcoing, c’est la star de l’ANRU) comme cet ancien bassin minier, c’est créer des problèmes sociaux et politiques insurmontables : ça revient à faire monter conjointement LFI et le RN, ce qui place le bloc bourgeois du centre, celui de Macron, dans un étau puissant. Au bout d’un moment, l’ingénierie sociale néolib montre ses limites.
Bienvenue dans l’ultracynisme bornsteinien
Le trimaran politique français, formé d’un bloc bourgeois flanqué des deux populismes, et surtout séparant les deux populismes (rendus irréconciliables par le pouvoir des loges), n’a rien fait avancer pour un peuple qui souffre du néolibéralisme depuis 40 ans. Ce trimaran permet de scinder la colère, de la maintenir dans les marges et de marginaliser la majorité de la population, c’est-à-dire les classes populaire et moyenne.
« Oui Gérald, comme tu l’as dit, il faut respecter et prendre au sérieux ce que ressentent les employés, les ouvriers et beaucoup de salariés, d‘artisans, de commerçants, d’agriculteurs, et de fonctionnaires. Ils ont trop souvent le sentiment que la République ne les entend pas quand ils expriment leur crainte de déclassement, pour eux comme pour leurs enfants. Ce sentiment qu’ils sont exclus tout à la fois de la richesse et des aides, avec des espoirs réduits de promotion sociale. Et je crois que la première chose que l’on doit à chacun, c’est de la reconnaissance et de la considération. »
Ce système ne peut pas tenir avec de telles tensions, sauf si la répression augmente encore d’un cran. C’est pourquoi les hommes forts du bloc bourgeois depuis 20 ans sont les ministres de l’Intérieur (Sarko, Valls, Cazeneuve, Nunez derrière le piètre Castaner, Darmanin), qui prennent leurs ordres directement du pouvoir profond. Concrètement, Macron embauche 10 000 FDO pour les années à venir, alors qu’il a lourdé 15 000 infirmières.
Plutôt que de lutter contre la pauvreté, qui est son effet secondaire, le bloc bourgeois lutte contre les pauvres.
Source: Lire l'article complet de Égalité et Réconciliation