Par Alfred McCoy − Le 28 avril 2023 − Source Naked Capitalism
Sur les cendres d’une guerre mondiale qui a tué 80 millions de personnes et réduit de grandes villes en décombres fumantes, l’Amérique s’est levée comme un légendaire Titan grec, indemne et armée d’une puissance militaire et économique extraordinaire, pour gouverner le monde. Au cours des quatre années de combat contre les dirigeants de l’Axe, à Berlin et à Tokyo, qui ont fait rage sur toute la planète, les commandants américains – George Marshall à Washington, Dwight D. Eisenhower en Europe et Chester Nimitz dans le Pacifique – savaient que leur principal objectif stratégique était de prendre le contrôle de l’immense masse continentale eurasienne. Qu’il s’agisse de la guerre du désert en Afrique du Nord, du débarquement en Normandie, des batailles sanglantes à la frontière entre la Birmanie et l’Inde, ou de la campagne d’exploration des îles du Pacifique, la stratégie des Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale consistait à limiter l’influence des puissances de l’Axe à l’échelle mondiale, puis à leur arracher ce continent.
Ce passé, apparemment lointain, continue de façonner le monde dans lequel nous vivons. Ces généraux et amiraux légendaires ont bien sûr disparu depuis longtemps, mais la géopolitique qu’ils ont pratiquée à un tel prix a encore de profondes implications. De même que Washington a encerclé l’Eurasie pour gagner une grande guerre et l’hégémonie mondiale, Pékin est aujourd’hui impliqué dans une reprise beaucoup moins militarisée de cette quête de pouvoir mondial.
Et pour être franc, ces jours-ci, le gain de la Chine est la perte de l’Amérique. Chaque mesure prise par Pékin pour consolider son contrôle sur l’Eurasie affaiblit simultanément la présence de Washington sur ce continent stratégique et érode ainsi sa puissance mondiale autrefois formidable.
Après quatre années chargées à assimiler ces leçons de géopolitique en sirotant le café du matin et les capsules de bourbon, la génération des généraux et amiraux américains du temps de la guerre avait compris, intuitivement, comment réagir à une potentielle alliance entre les deux grandes puissances communistes qu’étaient Moscou et Pékin.
En 1948, après avoir quitté le Pentagone pour Foggy Bottom, le secrétaire d’État George Marshall a lancé le plan Marshall de 13 milliards de dollars pour reconstruire une Europe occidentale déchirée par la guerre, jetant ainsi les bases économiques de la formation de l’alliance de l’OTAN un an plus tard. Après un déménagement similaire du quartier général des Alliés à Londres en temps de guerre vers la Maison Blanche en 1953, le président Dwight D. Eisenhower a contribué à compléter une chaîne de bastions militaires le long du littoral pacifique de l’Eurasie en signant une série de pactes de sécurité mutuelle – avec la Corée du Sud en 1953, Taïwan en 1954 et le Japon en 1960. Pendant les 70 années qui ont suivi, cette chaîne d’îles a constitué la charnière stratégique de la puissance mondiale de Washington, essentielle à la fois pour la défense de l’Amérique du Nord et pour la domination de l’Eurasie.
Après s’être battus pour conquérir une grande partie de ce vaste continent pendant la Seconde Guerre mondiale, les dirigeants américains de l’après-guerre savaient certainement comment défendre leurs acquis. Pendant plus de 40 ans, leurs efforts incessants pour dominer l’Eurasie ont permis à Washington de prendre le dessus et, en fin de compte, de remporter la victoire sur l’Union soviétique dans le cadre de la guerre froide. Pour contraindre les puissances communistes à l’intérieur de ce continent, les États-Unis ont entouré ses 6 000 miles de cotes de 800 bases militaires, de milliers de chasseurs à réaction et de trois armadas navales massives – la 6e flotte dans l’Atlantique, la 7e flotte dans l’océan Indien et le Pacifique et, un peu plus tard, la 5e flotte dans le golfe Persique.
Grâce au diplomate George Kennan, cette stratégie a été baptisée “endiguement“, ce qui a permis à Washington de rester les bras croisés pendant que le bloc sino-soviétique implosait à la suite de maladresses diplomatiques et de mésaventures militaires. Après la rupture entre Pékin et Moscou en 1962 et l’effondrement de la Chine dans le chaos de la révolution culturelle de Mao Zedong, l’Union soviétique a tenté à plusieurs reprises, mais sans succès, de sortir de son isolement géopolitique – au Congo, à Cuba, au Laos, en Égypte, en Éthiopie, en Angola et en Afghanistan. Dans la dernière et la plus désastreuse de ces interventions, que le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev a fini par qualifier de “plaie saignante“, l’Armée rouge avait déployé 110 000 soldats pour neuf années de combats brutaux en Afghanistan, subissant une hémorragie d’argent et d’hommes qui allait contribuer à l’effondrement de l’Union soviétique en 1991.
Dans cette période grisante de victoire apparente en tant qu’unique superpuissance de la planète Terre, une jeune génération de responsables de la politique étrangère de Washington, formés non pas sur les champs de bataille mais dans des groupes de réflexion, a mis un peu plus d’une décennie à laisser cette puissance mondiale sans précédent commencer à s’évanouir. Vers la fin de la guerre froide, en 1989, Francis Fukuyama, un universitaire travaillant dans l’unité de planification politique du département d’État, a acquis une renommée instantanée parmi les initiés de Washington avec son expression séduisante “la fin de l’histoire“. Il affirmait que l’ordre mondial libéral de l’Amérique allait bientôt balayer l’ensemble de l’humanité dans une marée sans fin de démocratie capitaliste. Comme il l’a dit dans un essai souvent cité, “le triomphe de l’Occident, de la démocratie capitaliste et de l’économie de marché est en marche : “Le triomphe de l’Occident, de l’idée occidentale, est évident… dans l’épuisement total des alternatives systémiques viables au libéralisme occidental… comme dans la propagation inéluctable de la culture occidentale consumériste“.
En plein milieu de cette rhétorique triomphaliste, Zbigniew Brzezinski, un autre universitaire dégrisé par son expérience du monde, réfléchissait à ce qu’il avait appris sur la géopolitique pendant la guerre froide en tant que conseiller de deux présidents, Jimmy Carter et Ronald Reagan. Dans son livre « The Great Chessboard » (1997), Brzezinski proposait la première étude américaine sérieuse de géopolitique en plus d’un demi-siècle. Ce faisant, il mettait en garde contre la profondeur de l’hégémonie mondiale des États-Unis, même à l’apogée de la puissance unipolaire, qui est intrinsèquement “superficielle“.
Pour les États-Unis et, a-t-il ajouté, pour toutes les grandes puissances des 500 dernières années, l’Eurasie, qui abrite 75 % de la population et de la productivité mondiales, a toujours été “le principal enjeu géopolitique“. Pour perpétuer sa “prépondérance sur le continent eurasien” et préserver ainsi sa puissance mondiale, Washington devra, a-t-il prévenu, contrer trois menaces : “l’expulsion de l’Amérique de ses bases offshore” le long du littoral du Pacifique ; l’éjection de son “perchoir à la périphérie occidentale” du continent fourni par l’OTAN ; et enfin, la formation d’une “entité unique affirmée” dans le centre tentaculaire de l’Eurasie.”
Pour justifier le maintien de la centralité de l’Eurasie après la guerre froide, Brzezinski s’est largement inspiré des travaux d’un universitaire britannique oublié depuis longtemps, Sir Halford Mackinder. Dans un essai datant de 1904 qui a donné naissance à l’étude moderne de la géopolitique, Mackinder observait que, pendant les 500 dernières années, les puissances impériales européennes avaient dominé l’Eurasie depuis la mer, mais que la construction de chemins de fer transcontinentaux déplaçait le centre de contrôle vers le vaste “cœur” intérieur de l’Eurasie. En 1919, au lendemain de la Première Guerre mondiale, il a également affirmé que l’Eurasie, avec l’Afrique, formait une énorme “île mondiale” et a proposé cette formule géopolitique audacieuse : “Qui domine le Heartland commande l’île mondiale ; qui domine l’île mondiale commande le monde“. Manifestement, Mackinder était en avance d’une centaine d’années dans ses prédictions.
Mais aujourd’hui, en combinant la théorie géopolitique de Mackinder et la vision de Brzezinski sur la politique mondiale, il est possible de discerner, dans la confusion du moment, quelques tendances potentielles à long terme. Imaginons la géopolitique à la Mackinder comme un substrat profond qui façonne des événements politiques plus éphémères, de la même manière que le lent grincement des plaques tectoniques de la planète devient visible lorsque des éruptions volcaniques percent la surface de la terre. Essayons maintenant d’imaginer ce que tout cela signifie en termes de géopolitique internationale aujourd’hui.
Au cours des décennies qui ont suivi la fin de la guerre froide, le contrôle croissant de la Chine sur l’Eurasie représente clairement un changement fondamental dans la géopolitique de ce continent. Convaincus que Pékin jouerait le jeu mondial selon les règles américaines, les responsables de la politique étrangère de Washington ont commis une erreur stratégique majeure en 2001 en l’admettant au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). De l’avis de deux anciens membres de l’administration Obama, “tout le long de son spectre idéologique, la communauté de la politique étrangère américaine partageait la conviction sous-jacente que la puissance et l’hégémonie américaines pouvaient facilement modeler la Chine à la convenance des États-Unis… Toutes les parties du débat politique se sont trompées“. Un peu plus d’une décennie après son adhésion à l’OMC, les exportations annuelles de Pékin vers les États-Unis ont presque quintuplé et ses réserves de devises étrangères sont passées de 200 milliards de dollars à un montant sans précédent de 4 000 milliards de dollars en 2013.
En 2013, s’appuyant sur ces vastes réserves de liquidités, le nouveau président chinois, Xi Jinping, a lancé une initiative d’infrastructure d’un montant de mille milliards de dollars afin de transformer l’Eurasie en un marché unifié. Alors qu’un réseau de rails et d’oléoducs en acier commençait à sillonner le continent, la Chine a entouré l’île mondiale tricontinentale d’une chaîne de 40 ports commerciaux – du Sri Lanka dans l’océan Indien, autour de la côte africaine, à l’Europe, du Pirée, en Grèce, à Hambourg, en Allemagne. En lançant ce qui est rapidement devenu le plus grand projet de développement de l’histoire, dix fois plus important que le plan Marshall, Xi consolide la domination géopolitique de Pékin sur l’Eurasie, tout en répondant aux craintes de Brzezinski concernant la montée en puissance d’une “entité unique affirmée” en Asie centrale.
Contrairement aux États-Unis, la Chine n’a pas consacré beaucoup d’efforts à l’établissement de bases militaires. Alors que Washington en entretient encore quelques 750 dans 80 pays, Pékin ne possède qu’une base militaire à Djibouti, sur la côte est de l’Afrique, un poste d’interception des signaux sur les îles Coco du Myanmar, dans le golfe du Bengale, une installation compacte dans l’est du Tadjikistan et une demi-douzaine de petits avant-postes dans la mer de Chine méridionale.
En outre, alors que Pékin se concentrait sur la construction d’infrastructures eurasiennes, Washington menait deux guerres désastreuses en Afghanistan et en Irak dans une tentative stratégiquement inepte de dominer le Moyen-Orient et ses réserves de pétrole (au moment même où le monde commençait à abandonner le pétrole au profit des énergies renouvelables). En revanche, Pékin s’est concentré sur l’accumulation lente et furtive d’investissements et d’influence dans toute l’Eurasie, de la mer de Chine méridionale à la mer du Nord. En modifiant la géopolitique sous-jacente du continent par le biais de cette intégration commerciale, Pékin acquiert un niveau de contrôle jamais atteint au cours des mille dernières années, tout en libérant de puissantes forces de changement politique.
Après une décennie d’expansion économique ininterrompue de Pékin en Eurasie, les bouleversements tectoniques du substrat géopolitique de ce continent ont commencé à se manifester par une série d’éruptions diplomatiques, chacune effaçant un autre aspect de l’influence américaine. Quatre des éruptions les plus récentes peuvent sembler, à première vue, sans rapport entre elles, mais elles sont toutes motivées par la force implacable du changement géopolitique.
Tout d’abord, l’effondrement soudain et inattendu de la position américaine en Afghanistan a contraint Washington à mettre fin à 20 ans d’occupation en août 2021 par un retrait humiliant. Dans le cadre d’un jeu de pression géopolitique lent et furtif, Pékin a signé des accords de développement massifs avec toutes les nations environnantes d’Asie centrale, laissant les troupes américaines isolées dans cette région. Pour assurer le soutien aérien indispensable à l’infanterie, les chasseurs à réaction américains étaient souvent contraints de voler à 2 000 miles de leur base la plus proche dans le golfe Persique – une situation insoutenable à long terme et dangereuse pour les troupes sur le terrain. Alors que l’armée afghane formée par les États-Unis s’effondrait et que les guérilleros talibans pénétraient dans Kaboul à bord de Humvees capturés, la retraite chaotique des États-Unis en signe de défaite devenait inévitable.
Six mois plus tard, en février 2022, le président Vladimir Poutine massait une armada de véhicules blindés chargés de 200 000 soldats à la frontière de l’Ukraine. À en croire Poutine, cette “opération militaire spéciale” visait à saper l’influence de l’OTAN et à affaiblir l’alliance occidentale – l’une des conditions posées par Brzezinski pour l’éviction des États-Unis de l’Eurasie.
Mais Poutine s’est d’abord rendu à Pékin pour courtiser le soutien du président Xi, une tâche apparemment ardue compte tenu des décennies de commerce lucratif entre la Chine et les États-Unis, d’une valeur hallucinante de 500 milliards de dollars en 2021. Pourtant, Poutine a obtenu une déclaration commune selon laquelle les relations entre les deux pays étaient “supérieures aux alliances politiques et militaires de l’époque de la guerre froide” et une dénonciation de “la poursuite de l’expansion de l’OTAN“.
En l’occurrence, Poutine a obtenu ce résultat à un prix périlleux. Au lieu d’attaquer l’Ukraine dans les glaces de février, alors que ses chars auraient pu manœuvrer hors route en direction de Kiev, la capitale ukrainienne, il a dû attendre la fin des Jeux olympiques d’hiver de Pékin. Les troupes russes ont donc envahi le pays en mars, dans la boue, laissant ses véhicules blindés coincés dans un embouteillage de 40 miles sur une seule autoroute, où les Ukrainiens ont facilement détruit plus de 1 000 chars. Face à l’isolement diplomatique et aux embargos commerciaux européens, alors que l’invasion défaite dégénérait en une série de massacres vengeurs, Moscou a transféré une grande partie de ses exportations vers la Chine. Les échanges bilatéraux ont ainsi rapidement augmenté de 30 % pour atteindre un niveau record, tout en réduisant la Russie à une pièce de plus sur l’échiquier géopolitique de Pékin.
Puis, le mois dernier, Washington s’est retrouvé diplomatiquement marginalisé par une résolution tout à fait inattendue du sectarisme qui a longtemps défini la politique du Moyen-Orient. Après avoir signé un accord d’infrastructure de 400 milliards de dollars avec l’Iran et fait de l’Arabie saoudite son principal fournisseur de pétrole, Pékin était bien placé pour négocier un rapprochement diplomatique majeur entre ces rivaux régionaux acharnés, l’Iran chiite et l’Arabie saoudite sunnite. En l’espace de quelques semaines, les ministres des affaires étrangères des deux pays ont scellé l’accord par un voyage profondément symbolique à Pékin – un rappel doux-amer de l’époque, encore récente, où les diplomates arabes faisaient la cour à Washington.
Enfin, l’administration Biden a été stupéfaite ce mois-ci lorsque le dirigeant prééminent de l’Europe, le Français Emmanuel Macron, s’est rendu à Pékin pour une série de discussions intimes en tête-à-tête avec le président chinois Xi. À l’issue de ce voyage extraordinaire, qui a permis aux entreprises françaises de remporter des milliards de dollars de contrats lucratifs, Macron annonçait “un partenariat stratégique global avec la Chine” et a promis qu’il ne “s’inspirerait pas de l’agenda des États-Unis” concernant Taïwan. Un porte-parole de l’Élysée a rapidement publié une clarification pro forma indiquant que “les États-Unis sont notre allié, avec des valeurs partagées“. Malgré cela, la déclaration de Macron à Pékin reflète à la fois sa propre vision à long terme de l’Union européenne en tant qu’acteur stratégique indépendant et les liens économiques de plus en plus étroits de ce bloc avec la Chine
Si l’on projette ces tendances politiques dans une décennie, le sort de Taïwan semble, au mieux, incertain. Au “Chock and awe” des bombardements aériens, mode par défaut du discours diplomatique de Washington en ce siècle, Pékin préfère une pression géopolitique furtive mais constante. En construisant ses bases insulaires en mer de Chine méridionale, par exemple, elle a avancé progressivement – d’abord en draguant, puis en construisant des structures, ensuite des pistes d’atterrissage, et enfin en plaçant des missiles antiaériens – évitant ainsi toute confrontation sur sa capture fonctionnelle d’une mer entière.
N’oublions pas que Pékin a construit sa formidable puissance économique, politique et militaire en un peu plus d’une décennie. Si sa puissance continue de croître dans le substrat géopolitique de l’Eurasie, ne serait-ce qu’à une fraction de ce rythme effréné, pendant une autre décennie, elle pourrait être en mesure d’exercer sur Taïwan une pression géopolitique habile, comme celle qui a poussé les États-Unis à quitter l’Afghanistan. Qu’il s’agisse d’un embargo douanier, de patrouilles navales incessantes ou d’une autre forme de pression, Taïwan pourrait tomber tranquillement dans l’escarcelle de Pékin.
Si une telle manœuvre géopolitique devait prévaloir, la frontière stratégique des États-Unis le long du littoral du Pacifique serait brisée, ce qui pourrait repousser la marine américaine vers la “deuxième chaîne d’îles“, celle allant du Japon à Guam – le dernier des critères de Brzezinski pour le véritable déclin de la puissance mondiale des États-Unis. Dans ce cas, les dirigeants de Washington pourraient à nouveau se retrouver assis sur la proverbiale ligne de touche diplomatique et économique, se demandant comment tout cela a bien pu arrivé.
Alfred McCoy est historien et éducateur. Il est professeur d’histoire à l’université du Wisconsin-Madison et auteur de « To Govern the Globe : World Orders and Catastrophic Change ».
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.
Adblock test (Why?)
Source : Lire l'article complet par Le Saker Francophone
Source: Lire l'article complet de Le Saker Francophone