par Alexandre Lemoine
La France quitte les pays « sans perspectives » du continent noir en renforçant la coopération avec les pays qui en ont.
Le président français Emmanuel Macron prépare une tournée en Afrique du 1er au 5 mars en visitant le Gabon, l’Angola, la République du Congo et la République démocratique du Congo. Le chef de l’État français a parlé de la nouvelle stratégie des relations avec l’Afrique. Elle consiste à réduire la présence militaire directe dans la région. Avec une préférence pour le « soft power », pour l’application efficace duquel la France doit, selon Emmanuel Macron, ne pas essayer de corriger tous les problèmes de l’Afrique et ne pas espérer atteindre plus qu’elle ne peut atteindre.
La tournée du dirigeant français se déroule sur fond de changements au Sahel, frontalier du Sahara. Un deuxième pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Niger, Mali, Tchad, Mauritanie) renonce déjà au soutien de la France au profit de la Russie après un coup d’État.
Le Mali était le premier, suivi du Burkina Faso. Peu de temps avant le départ de M. Macron, le dernier soldat français du groupe opérationnel Sabre a quitté ce pays. Ce groupe combattait les groupuscules djihadistes contrôlant une grande partie du pays. L’armée locale ne parvient pas à faire face aux extrémistes. Le capitane Ibrahim Traoré à la tête du Burkina Faso, qui a rompu les relations avec la France, ne cache pas qu’il compte sur le soutien de Moscou dans la lutte contre les djihadistes.
Le locataire de l’Élysée a décidé d’expliquer pourquoi les troupes françaises avaient quitté sans rechigner le Burkina Faso, tout comme elles avaient quitté le Mali plus tôt. Il s’avère que cela faisait partie de la nouvelle stratégie française en Afrique, qui sera définitivement mise en œuvre dans les mois à venir. Selon M. Macron, les troupes françaises y resteront, mais en effectifs réduits. « Nous allons plus former, plus équiper et mieux accompagner, parce que ce sera sur la base d’une demande exprimée », a-t-il déclaré.
Et de poursuivre : « Notre modèle ne doit plus être les bases militaires telles qu’elles existent aujourd’hui : demain, ce seront des bases écoles avec des effectifs français et africains ».
Le chef de la Ve République a mis en avant que la nouvelle stratégie n’avait rien à voir avec l’expérience bien connue de différents pays consistant à utiliser des sociétés militaires privées, qui agissent de facto avec l’aval des autorités locales sans leur être subordonnées dans la pratique.
La nouvelle politique africaine proclamée par Emmanuel Macron est une variante de la politique du balancier utilisée auparavant par plusieurs pays européens. La France quitte les pays où sa présence est trop chère, alors que les bénéfices ne sont pas évidents. Tout en renforçant la coopération avec les États de la région les plus importants sur le plan politique et économique. L’itinéraire de la tournée du président français n’a pas été choisi au hasard : le Gabon riche en pétrole, qui est le pays africain francophone affichant le développement le plus dynamique, l’Angola en plein développement, et la République démocratique du Congo, un pays clé de la ceinture de cuivre d’Afrique abritant plus de 60% des réserves mondiales de cobalt.
La France développera activement ses relations avec ces pays, a laissé entendre le président français. Dans son discours, M. Macron a souligné qu’il fallait traiter l’Afrique comme un partenaire équitable et mettre l’accent non pas sur l’aide, mais sur les investissements. « L’Afrique ne doit pas être une cour intérieure ni une arène de compétition », a-t-il indiqué.
Le dirigeant français a annoncé la préparation d’une loi-cadre, qui « sera proposée dans les prochaines semaines pour fixer la méthodologie et les critères pour procéder à de nouvelles restitutions d’œuvres réclamées par les pays africains ». Une grande action de ce genre a été organisée pour la première fois en 2021 : la France avait alors rendu en partie à l’Allemagne des objets d’art et des artefacts pillés pendant les campagnes coloniales.
Au Sahel, la Ve République conserve un grand contingent militaire au Tchad et au Niger. Mahamat Idriss Déby, fils du président tué dans des affrontements, a pris le pouvoir au Tchad en 2021. Il a été mis au pouvoir par les militaires ayant dissous le parlement. Au final, la plus prometteuse est la présence au Niger avec ses riches réserves d’uranium, dont la production et le transport sont mis en place depuis longtemps. C’est ce qui distingue ce pays de nombreux autres de la région possédant des réserves de minerais mais où leur exploitation commerciale se heurte à de nombreuses difficultés.
L’Élysée cherche une nouvelle approche en Afrique depuis plusieurs années. Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy en parlaient déjà. Sachant que les Français soutenaient souvent des régimes autoritaires dont les dirigeants possèdent des biens immobiliers et des comptes en France. Certes, cela aide dans une certaine mesure à renforcer les relations entre l’ancienne métropole et ses anciennes colonies. Cependant, le passé difficile empêche de mener avec succès une nouvelle politique. Or, il est évidemment désagréable pour la France de perdre son influence et observer l’activation de la Russie et de la Chine.
source : Observateur Continental
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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