L’omni-président est de retour. Au Qatar, il a multiplié les intrusions dans la sphère sensible de l’équipe de France. D’où vient cette manie de vouloir en faire trop ? Récupération politique ? Pas seulement.
Les amis de Didier Deschamps s’inquiètent pour son avenir, voyant l’ombre de plus en plus nette de Zidane pour lui succéder à la tête des Bleus ? A tort. Son vrai concurrent, vous pouvez vous frotter les yeux, s’appelle Emmanuel Macron. Durant la dernière séquence du Mondial au Qatar, on l’a vu partout. Dans les vestiaires, haranguant les joueurs avec la conviction d’un coach sud-américain, sur les plateaux de télévision, distillant sa science du jeu, son amour du maillot et puis, suprême intrusion, à la fin de la finale perdue contre l’Argentine, sur la pelouse encore bouillonnante de ce match épique, il a joué le chef d’une cellule psychologique imaginaire, se jetant sur les joueurs, encore dans leur bulle de désespoir, les entourant de ses bras de grand consolant, tel Saint Vincent de Paul penché sur les nécessiteux.
Image saisissante d’observer ce président à la recherche de chaleur humaine, tel un supporter fanatisé. Les Bleus semblaient un peu abasourdis par ce perturbateur à la prévenance débordante. Avec ce président surdoué, on a toujours un moment de sidération, pour ne pas dire de grande gêne, devant ce festival d’embrassades. Bien sûr, impossible de ne pas évoquer la récupération politique voulue par l’Elysée, histoire de faire remonter la cote du chef de l’Etat dans les sondages. Quelques points gagnés ne nuiraient pas au projet de loi sur la réforme des retraites. Tous les présidents l’ont fait, avec plus ou moins de succès. Mais chez Emmanuel Macron, il y a autre chose.
Sa passion du football n’est pas feinte. Au début, dès les premiers jours de son premier quinquennat, on se souvient de son opération de com au cours de laquelle on le voit allant jusqu’à s’entraîner avec les joueurs de l’OM, son club de cœur. Macron serait-il un joueur de foot manqué ? Qui aurait pu croire qu’un ex-banquier de chez Rothschild avait un rêve secret, celui de taper dans un ballon comme des milliers de gamins de banlieue ? En finir avec cette image de premier de la classe, de président des riches. Pourquoi pas. Chaque être humain a sa face cachée, ses rêves enfouis. Mais cet homme – c’est sans doute plus fort que lui – en fait toujours trop. Comme un ailier survitaminé, il déborde, sort du cadre, en rajoute, surjoue son rôle de bon pote de Dédé et des Bleus.
Une étreinte de pieuvre
Lors de la cérémonie de remise des médailles, là encore, il s’est jeté comme un mort de faim sur Didier Deschamps et sa troupe. Ce dernier tenta de se libérer de cette étreinte interminable et hors sujet. Une étreinte de pieuvre, celle d’un politique insatiable voulant toujours ramener la lumière sur lui, avec une faim de glouton. Bien sûr, le choc de la défaite pourrait justifier ces gestes d’empathie, de solidarité, face à l’échec, envers des sportifs exténués par les efforts surhumains qu’ils ont effectués durant un mois.
Depuis sa réélection, en juin dernier, les oracles politiques s’interrogent sur ce que pourrait bien faire ce Président-douzième homme, en 2027, alors qu’il ne pourra plus se représenter. La réponse est toute trouvée : devenir entraîneur ou président d’un club de foot. Marseille, peut-être ?
Une chronique signée Serge Raffy
Source : L’Obs
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