Pourquoi assumer qu’il y aura élection en 2024? Le « coup des Banquiers d’Amérique » de 1934, revisité

Pourquoi assumer qu’il y aura élection en 2024? Le « coup des Banquiers d’Amérique » de 1934, revisité

Plus tôt cette semaine, ex-Président Donald Trump a annoncé son intention de se présenter aux élections de 2024, une décision évidente considérant son taux de support au sein des candidats potentiels républicains de 49% (comparé à un 25% pour DeSantis) et le fait qu’aucun autre compétiteur ne se mérite un taux dépassant la barre des 7%.

Il ne suffit que de deux jours pour que la Loi sur l’Autorisation de la Défense Nationale de 2022 (HR-4350) soit adopté par la Chambre des Représentants, donnant au Président actuel un contrôle total sur l’armée dans toute opération domestique avec insistance particulière sur une cible nommée « les extrémistes domestiques » aux États-Unis.

Évidemment, la tenure sénile, chambranlante et politiquement compromise de Biden au pouvoir n’en tient plus qu’à un fil, et rappelle à la mémoire de certains l’incendie du Reichstag de 1933 fournissant alors au régime récemment élu d’Hitler l’excuse parfaite lui permettant d’imposer une série « d’actes d’autorisation » tyranniques.

Avec la tempête de crises parfaite convergeant maintenant sur notre monde assiégé (effondrement économique, crise énergétique, crise alimentaire, danger combiné de guerres civiles et globales), la possibilité très réelle que les jours d’élection tirent à leur fin doit être considérée de façon sérieuse. Malgré la multitude de têtes bavardes qui jappent à propos des élections de 2024 comme s’il s’agissait d’un match de football, la réalité et le récit honnête de l’Histoire peignent une image complètement différente des coups d’État militaires dirigés par les banquiers aux USA tant qu’à l’étranger.

Afin de mieux comprendre ce danger et de s’assagir par rapport à la façon d’en éviter sa reproduction, je vous propose une revisite des efforts de l’état profond international à imposer une dictature fasciste sur les Américains et même à renverser le gouvernement élu de Franklin Roosevelt avec l’aide d’un coup d’État militaire financé par JP Morgan en 1932-1934.

La Solution Économique Fasciste Miracle de 1932

Les années 1932-1934 furent une période de l’histoire voyant le monde s’effondrer dans une profonde dépression, durant laquelle les peuples de l’Europe et de l’Amérique se faisaient dire par les médias que le seul remède gît dans la « solution économique miracle » d’un nouveau système de gouvernance connu sous le nom de « fascisme ».

Cette « solution économique fasciste » pris pied en Europe avec la montée rapide du nazisme ainsi que du Corporatisme de Franco & Mussolini, dans une région qui deviendra plus tard Vichy, en France. Au sein du Canada anglais, la Ligue pour la Reconstruction Sociale (League for Social Reconstruction – LSR) était prête à prendre pouvoir en 1932, et le Canada francophone fut rapide à endosser le parti politique d’inspiration nazie d’Adrien Arcand. La classe dirigeante britannique menée par la famille royale apportait soutient complet au nazisme, et l’Union Fasciste Britannique de Sir Oswald Mosley vivait une montée fulgurante. Tous ces mouvements venaient avec leurs propres saveurs distinctives, mais étaient toutefois réunis sous l’attirance d’une philosophie gouvernementale froide et utilitaire, un amour fervent pour l’eugénisme (la « science » raciste du contrôle de population) et une forte dépendance à l’argent de la ville de Londres & Wall Street.

Aux États-Unis, cependant, les choses ne se déroulaient pas aussi bien.

L’Ascension de Franklin Roosevelt

Même si l’élite financière de Wall Street avait abandonné le système quatre ans plus tôt, la population n’avait toujours pas été suffisamment brisée à son essence pour accepter le fascisme en tant que solution ultime que lui vantait pourtant le TIME Magazine avec grande conviction. Au contraire, le peuple choisit d’élire un des rares candidats antifascistes de l’époque en 1932, quand Franklin Roosevelt fit son entrée sous un thème de restauration de la Constitution, visant également à retirer pouvoir des mains des prêteurs d’argent.

Lors de son adresse inaugurale le 4 Mars 1933, FDR déclare : « Les pratiques des changeurs d’argent sans scrupules se révèlent inculpées par le tribunal de l’opinion publique, rejetées par le cœur et l’esprit des hommes. C’est vrai qu’ils ont essayé, mais leurs efforts sont maintenant imprégnés dans le moule d’une tradition dépassée. Face à l’échec du crédit, ils n’ont su que proposer des prêts supplémentaires. Dépouillés de l’appât du gain par lequel inciter notre peuple à suivre leur leadership illégitime, ils ont recouru à plusieurs formes d’exhortations, pleurnichant à ravoir une confiance perdue. Ils ne connaissent que les règles d’une génération d’égoïstes. Ils ne possèdent aucune vision, et lorsque la vision manque, le peuple périt. Les changeurs d’argent ont fui leurs hauts-sièges dans le temple de notre civilisation. Puissons-nous maintenant restaurer ce temple aux anciennes vérités. La mesure de cette restauration ira en fonction de l’étendue des valeurs sociales que nous appliquerons, celles-ci plus nobles que de guères profits monétaires. »

Durant les fameux 100 jours de FDR, une guerre totale est déclarée contre les « royalistes économiques » qui avaient pris contrôle de la nation. Audits et enquêtes sont menés sur les banques, prenant forme notamment de la Commission Pecora qui verra les plus grandes maisons financières ayant dépensé des milliards pour soutenir les partis politiques fascistes d’Europe complètement démantelées, pendant que la spéculation est ramenée au pied par l’acte Glass-Steagall. Simultanément, une nouvelle systématique bancaire est dévoilée, celle-ci nettement plus alignée avec les traditions constitutionnelles de l’Amérique, soit une forme de crédit productif couplé à des projets publics long-terme qui créent de vrais emplois et augmentent les pouvoirs productifs nationaux du travail.

À ce jour, plusieurs demeurent complètement ignorants qu’avant même son inauguration du 4 Mars 1933, Franklin Roosevelt a tout juste échappé à une tentative d’assassinat en Floride, durant laquelle 5 personnes furent atteintes par balle en plus du maire de Chicago à l’époque, qui succombera de ses blessures 3 semaines plus tard. Quelques jours après la mort du maire, l’assassin Giuseppe Zingara est hâtivement étiqueté en tant que « tireur solitaire » et exécuté sans aucune enquête sérieuse sur ses connexions franc-maçonniques. Tout ceci ne s’avéra que précurseur à une bataille encore plus importante qu’allaient lancer les financiers de Wall Street dans le but de renverser la présidence un peu plus tard la même année. Ces efforts ne seront contrés que par l’intervention courageuse d’un marine patriote du nom de Smedley Darlington Butler.

Qui était le Général Butler?

Né en 1881 au sein d’une famille de Quakers patriotes, Smedley Butler gravit rapidement les rangs de l’armée pour devenir la figure militaire la plus décorée de l’histoire des USA, un record qu’il détient à ce jour avec plusieurs médailles d’honneur, une médaille de service distinguée de l’armée ainsi qu’une médaille Bruvet du Corps des Marines, pour en nommer quelques-unes.

À la fin des atrocités de l’abattoir humain de masse orchestré par les Britanniques, communément appelé la Première Guerre Mondiale, le général était devenu patriote-activiste, faisant le tour de l’Amérique pour dénoncer les financiers privés au volant de l’économie nationale qui carburait à la guerre. S’adressant aux vétérans en août 1933, il déclare:

« J’ai passé 33 ans en tant que bourreau de haute classe oeuvrant pour Big Business, Wall Street et les banquiers. En résumé, j’étais un affairiste (racketteur) pour le capitalisme… J’ai aidé à purifier le Nicaragua au service de la maison bancaire internationale des frères Brown en 1909-1912. J’ai aidé à faire du Mexique et plus spécifiquement Tampico un endroit sécuritaire pour les intérêts pétroliers américains en 1916. J’ai contribué à transformer Haïti et Cuba en un territoire profitable pour les gens de la National City Bank. J’ai aidé à la mutinerie d’une demi-douzaine de républiques en Amérique Centrale au profit de Wall Street. En Chine, j’ai fait en sorte que Standard Oil mène à terme ses objectifs sans obstacles… J’avais toute une « rackette » dans les mains. J’ai été récompensé avec des honneurs, des médailles, des promotions. Peut-être ai-je donné quelques indices à Al Capone. Le plus qu’il a su faire pour nous, c’est d’opérer sa propre « rackette » dans trois villes différentes. Les Marines, tant qu’à eux, étaient en opération sur trois continents… »

Malgré ces critiques très ouvertes du capitalisme de connivence, l’élite de Wall Street a simplement supposé que « chaque homme a son prix », et que Butler était probablement indigné de ne pas avoir reçu sa juste part du gâteau.

Le Putsch de Wall Street est lancé

Les financiers avaient besoin de quelqu’un comme Butler pour canaliser la rage des vétérans en grève de la Première Guerre Mondiale à travers les USA, eux s’étant battus pour la somme bonus qu’on leur avait promise quelques années plus tôt, mais qu’ils ne recevront bien sûr jamais dû à l’effondrement de 1929. La force d’une centaine de milliers de combattants chevronnés mécontents était exactement ce qu’il fallait pour détrôner Roosevelt. Le leadership se faisant rare, général Butler représentait l’homme pour la tâche. Il était un héros de guerre perçu comme quelqu’un d’honnête, en plus d’être adoré par les vétérans. Le candidat parfait!

Sous la direction de Grayson Prevost Murphy de chez JP Morgan, deux représentants de la Légion Américaine (Commandant Bill Doyle et vendeur d’obligations Gerald MacGuire) approchent Butler en juillet 1933, lui confiant la tâche de rassembler les vétérans de la Légion et commencent à lui glisser quelques indices concernant le complot d’un coup d’État de grande envergure. Butler devient méfiant, mais décide de jouer le jeu afin de découvrir jusqu’à quelle hauteur dans l’échelle de pouvoir ce plan remonte exactement (1).

Au fil des mois qui suivent, Butler découvre que l’élite financière américaine centrée autour de John Pierpont Morgan Jr., les Harrimans, les Melons, les Warburgs, les Rockefellers et les Dupont sont au cœur du complot. Ces hommes se servent de leurs agents, tels que Gerald MacGuire, John W. Davis & Thomas Lamont (contrôleurs du Parti Démocratique, les deux occupant d’ailleurs des postes administratifs au sein de la maison bancaire Morgan), Robert Sterling Clark (héritier de la fortune des machines à coudre Singer), Grayson Prevost Murphy et Prescott Bush (banquier d’investissement de la famille Harriman).  Tous ces personnages étaient bien connus comme étant les « investisseurs » du fascisme européen, propriétaires des plus grande plateformes médiatiques incluant Fortune et Time Magazine (tous deux ayant fait la promotion de Mussolini pendant des années) ainsi que maîtres en contrôle des leviers de l’industrie.

Heureusement, la Commission Pecora de 1932-1934 expose publiquement ces forces en tant qu’architectes de la grande dépression, rendant leur capacité à obtenir la sympathie et le support populaire assez difficile.

Soulignant les trouvailles de son comité, Pecora écrit publiquement : « Sans aucun doute, ce petit groupe de hauts-placés financiers, en contrôle des sources même de l’activité économique, détient plus de pouvoir réel que tout autre groupe similaire aux États-Unis d’Amérique ».

Butler sonne l’alarme

Le moment venu, Butler sonne l’alarme en approchant le Comité spécial sur les activités anti-américaines (le comité McCormack-Dickstein) qui ouvre une enquête le 20 novembre 1934. Contrairement au Comité sur les activités anti-américaines qui a bâti sa réputation en détruisant des vies de patriotes sous la chasse aux sorcières communiste du McCarthyisme, cette version antérieure était alignée avec FDR et dédiée uniquement au repérage des activités Nazies en Amérique.

Initialement sceptique quant aux affirmations du général, le comité arrive à tout valider au cours d’une enquête d’un mois durant, puis rendent publiques leurs conclusions à FDR et au Congrès le 29 décembre 1934. Les témoignages du journaliste Paul Comly French se révèlent alors partie cruciale des audiences, ce dernier ayant été engagé par Butler pour agir comme intermédiaire entre lui-même et les banquiers.

Butler informe le comité que MacGuire lui avait dit qu’« aucun changement constitutionnel ne serait nécessaire pour autoriser un autre officiel du cabinet, quelqu’un pour prendre en charge les détails de l’agence—les enlever de sur les épaules du Président » et que « nous allions faire avec lui la même chose que Mussolini a fait avec le roi d’Italie ».

Quand French demande à MacGuire comment le coup d’État aiderait à résoudre le problème du taux de chômage, MacGuire répond : « Nous avons besoin d’un gouvernement fasciste pour sauver la nation des mains des Communistes… C’est le plan qu’Hitler a utilisé lors de la déportation de toute la main d’œuvre vers les camps de labeur—le travail forcé. Ceci va résoudre le problème de façon immédiate ».

Alors que les transcriptions complètes n’aient jamais été rendues publiques, Butler a réussi à transmettre son message à la population en racontant son histoire au plus grand nombre de journalistes possible, puis en enregistrant un message au peuple en 1935 qui devrait être écouté dans son intégralité afin de bien lui rendre justice.

Les suites de l’exposition

Cette exposition, jumelée aux conclusions de la Commission Pecora ainsi qu’à l’assassinat loupé donne à FDR l’ammunition nécessaire pour forcer l’état profond à se soumettre (du moins pour quelques temps). Comme je le souligne dans mon récent article, le combat de FDR pour mettre un frein à la dictature des banquiers centraux s’étale en fait des premiers jours de sa présidence jusqu’à son dernier souffle, le 14 avril 1945.

Incroyablement, après la publication du rapport en 1934 (ayant passé par un « assainissement » et une rédaction tout d’abord), le comité fut dissous (pour être reformé par la suite sous un mandat fasciste) et les milliers de pages de transcriptions ont été enfouies pendant des annéespour être rendues publiques à nouveau au 21e siècle. Leur contenu peut être consulté ici avec témoignages censurés en rouge.

Les comploteurs du coup n’ont perdu aucun temps à former une nouvelle organisation le 22 août 1934, se nommant la Ligue Américaine de la Liberté (American Liberty League) qui passera la prochaine décennie à saboter le New Deal de FDR. Ce groupe a déployé tout effort possible dans la promotion d’une alliance américaine avec les puissances de l’Axe (jusqu’à l’attaque de Pearl Harbor en 1941), a financé largement l’eugénisme, et après la mort de FDR, a agit en tant que force conductrice derrière l’état policier du McCarthyisme en Amérique durant la guerre froide. Sans comprendre cette opération de l’état profond en plein cœur de l’establishment américain, il est impossible de donner un sens au dualisme manichéen qui a détruit la vision de FDR pour un monde de coopération entre états souverains.

Cette organisation a également mis au monde des groupes de réflexion comme l’American Enterprise Associationl’Heritage Foundation et l’Institut CATO qui, petit à petit, permit d’intégrer l’école économique autrichienne au sein de la droite américaine. Quiconque souhaite comprendre ce qui a créé le monstre Frankenstein appelé le « néo-conservatisme » durant les derniers 60 ans ne se rendrait pas très loin sans comprendre le rôle de l’American Liberty League et de sa progéniture infernale.

Aujourd’hui, un nouvel effondrement systématique d’une bulle de dérivés de 1.5 quadrillions de dollars comporte des similarités à la crise de 1929, et d’autres à l’hyperinflation du Weimar en 1929. Alors que le coronavirus pourra ou non être utilisé pour déclencher cette éruption, une chose est certaine : l’éventualité d’un nouveau coup fasciste & une guerre d’envergure doivent être plus que jamais pris au sérieux.

Matthew Ehret

Article original en anglais :

New Documentary: Why Assume There Will be Another Election? The 1934 Bankers Coup Revisited 8 septembre 2022

Traduit de l’anglais par Jean-Philip Carrier

Note :

(1) La Légion était une tout autre bête que l’organisation bénigne d’anciens vétérans qu’on connait aujourd’hui, puisqu’elle fut en fait fondée par du capital provenant de Wall Street en 1919, et fut dirigée à ses débuts comme une machine fasciste. Commandeur de Légion Alvin Owsley l’a dit explicitement en 1929 lorsqu’il affirme : « Si besoin est, la Légion Américaine est prête à protéger les institutions de ce pays ainsi que ses idéaux, de la même manière que les Fascistes ont traité les forces destructives menaçant l’Italie. N’oubliez pas que les Fascistes sont à l’Italie d’aujourd’hui ce que la Légion Américaine est aux États-Unis ».

Matthew Ehret est rédacteur en chef de la Canadian Patriot Review et chercheur principal à l’Université Américaine à Moscou. Il est auteur de la série « L’Histoire non racontée du Canada » ainsi que de la trilogie « Le Clash des Deux Amériques ». En 2019, il a co-fondé la Rising Tide Foundation, basée à Montréal.


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Source : Lire l'article complet par Mondialisation.ca

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