Avec lui disparaît le dernier des premiers négationnistes…
Négationniste historique, l’Allemand Udo Walendy est décédé jeudi 17 novembre 2022 à l’âge de 95 ans. Peu connu en France, c’était un nazi authentique qui avait juste eu le temps de servir dans l’armée allemande à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Engagé dans l’apologétique nazie dès le milieu des années 1960, puis dans le négationnisme à partir des années 1970, Udo Walendy fut l’un des auteurs les plus prolifiques en textes pro-nazis et négationnistes toutes langues confondues. Il a travaillé avec toutes les générations et toutes les nationalités de négationnistes et fut aussi actif politiquement dès 1964 et jusque dans les années 2000 au sein du Nationaldemokratische Partei Deutschlands (NPD), une formation néonazie.
L’historienne Stéphanie Courouble Share fournit des informations sur son activité négationniste dans son excellent ouvrage Les Idées fausses ne meurent jamais (Editions Le Bord de l’eau, 2001). Avec Walendy disparaît le dernier des premiers négationnistes.
Ci-après, une adaptation en français de sa notice biographique parue en 2010 dans l’ouvrage dirigé par Wolfgang Benz, Handbuch des Antisemitismus Judenfeindschaft in Geschichte und Gegenwart*. Notre adaptation s’écarte légèrement de la version originale et la complète (notamment avec des éléments empruntés à l’ouvrage paru en 2002 Handbuch Rechtsradikalismus**) :
Walendy, Udo Bruno [Pseudonyme : Richard Harwood] (né le 21 janvier 1927, mort le 17 novembre 2022]
Publiciste et ancien haut responsable du NPD, Udo Bruno Walendy a été, des années 1960 aux années 1990, un acteur important sur la scène internationale du négationnisme.
Walendy est né d’une mère auteure de livres pour enfants et d’un père membre du service consulaire. Durant les dernières années de la guerre, il a d’abord été auxiliaire de la défense antiaérienne, puis dans le service du travail du Reich et enfin dans la Wehrmacht.
Après avoir terminé l’école de journalisme d’Aix-la-Chapelle, Walendy a étudié les sciences politiques à Berlin-Ouest et a obtenu son diplôme en 1956. Après avoir brièvement travaillé, entre autres, dans la formation des adultes, il a fondé en 1963 à Vlotho (Weser) la « Maison d’édition pour la recherche sur le folklore et l’histoire contemporaine », dans laquelle son premier livre Wahrheit für Deutschland – Die Schuldfrage des Zweiten Weltkriegs a été publié la même année. Cet ouvrage niait toute responsabilité allemande dans le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale et minimisait déjà les crimes nazis.
Au plus tard à partir de 1958, Walendy publia des travaux préparatoires dans le mensuel d’extrême-droite Nation Europa sous au moins un pseudonyme (Udo). D’abord encore membre de la CDU (parti chrétien-démocrate), Walendy a adhéré au NPD peu après sa création, a été président de l’arrondissement de Herford à partir de 1965 et s’est présenté la même année aux élections du Bundestag. De 1967 à 1973, il a fait partie du comité directeur fédéral du parti et s’est à nouveau présenté au Bundestag en 1969. De 1971 à 1973, il a été président du NPD en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Au sein du NPD, l’ambitieux Walendy appartenait à l’aile radicale et était un adversaire identifié du chef du parti, Adolf von Thadden.
À partir du début des années 1970, Walendy se concentra de plus en plus sur la Shoah, qu’il relativisa et justifia dans son premier livre en tant que « solution finale pour les Juifs », mais qu’il ne contestait pas encore.
En 1975, il a publié l’édition allemande de la brochure Six millions de morts le sont-ils réellement ? Enfin la vérité du néonazi et négationniste britannique Richard Verrall qui utilisait le pseudonyme de Richard Harwood. Walendy en publia peu après une version remaniée sous sa propre signature comme premier numéro de sa série de revues Historische Tatsachen et utilisa plus tard lui-même le pseudonyme de Richard Harwood.
Dans les années qui suivirent, Walendy publia de nombreux ouvrages négationnistes volumineux, dont une nouvelle édition du Mensonge d’Auschwitz, de Thies Christophersen, qui fut cependant interdite. En 1979, il participe à l’assemblée constitutive de l’organisation négationniste américaine Institute for Historical Review (IHR) et entre aussitôt dans le comité de rédaction de l’organe de l’IHR Journal of Historical Review aux côtés de néonazis et négationnistes américains et européens, tel Robert Faurisson. Il témoigne en 1985 et 1988 en faveur du néonazi germano-canadien Ernst Zündel, inculpé au Canada. Il a immédiatement publié le frauduleux Rapport Leuchter rédigé dans ce contexte, qui nie les meurtres commis dans les chambres à gaz d’Auschwitz et de Majdanek.
La maison d’édition de Walendy a également publié un livre de Willi Krämer, collaborateur du ministère nazi de la propagande du Troisième Reich.
Walendy s’efforce de déconstruire la conscience publique de la réalité historique reconnue du meurtre de masse des Juifs, en prétendant accomplir un travail scientifique ; il tente d’éviter dans une large mesure les déclarations antisémites et négationnistes trop flagrantes.
Néanmoins, il ne parvient pas toujours à éviter la caricature aussi bien négationniste qu’antisémite. Ainsi lorsqu’il parle d’un document clé tel que le procès-verbal de la conférence de Wannsee comme d’une « falsification d’après-guerre dans le sens des intérêts juifs », lorsqu’il affirme que la « juiverie mondiale » a déclaré la guerre à l’Allemagne hitlérienne, ou que la « légende de l’extermination des juifs » et les « contes de chambres à gaz » auraient abouti à des paiements faramineux à Israël et à des « droits de propriété et de pouvoir ». Il s’agit là évidemment de vulgaires mensonges classiques et tous réfutés.
La série de publications négationnistes Historische Tatsachen, en particulier, autour de laquelle se déroulaient des rencontres de lecteurs sur plusieurs jours, faisait régulièrement l’objet de procès, d’interdictions et de confiscations. Les Historische Tatsachen compteront 115 numéros entre 1975 et 2011 (plus de 4000 pages). Walendy, tout en continuant à y écrire, a cependant passé le relais de la responsabilité des Historische Tatsachen en 1997 (à partir du numéro 69) à l’organisation néonazie belge Vrij Historisch Onderzoek (VHO) des frères Verbeke (associés au négationniste allemand Germar Rudolf). Walendy a été condamné en 1996 à 15 mois de prison pour incitation à la haine et dénigrement de la mémoire de personnes décédées, puis à nouveau à 14 mois un an plus tard, à la suite de quoi le NPD de Rhénanie-du-Nord-Westphalie a placé Walendy en tête de sa liste régionale pour les élections au Bundestag de 1998.
Après une interdiction d’exercer en tant qu’éditeur, Walendy a cédé en 1999 à son épouse Margarete sa maison d’édition, dans laquelle il vendait non seulement ses propres écrits, parfois teintés d’ésotérisme, mais aussi de l’apologétique nazie publiée par des tiers.
Udo Walendy s’est produit au sein de toutes les organisations nazies qu’a pu compter l’Allemagne d’après-guerre jusque dans les années 2000 et dans toutes les manifestations négationnistes possibles. Par exemple le 23 mars 1991, Walendy faisait partie des orateurs lors d’une « veillée » de 300 militants négationnistes, organisée par le néonazi Ewald Althans devant le Deutsches Museum à Munich, aux côtés des négationnistes Fred Leuchter, Jürgen Rieger, David Irving et d’autres. Ses activités en tant qu’auteur et éditeur ont fait de lui l’une des personnalités centrales de l’extrémisme de droite allemand.
Pour des raisons de santé notamment, l’activisme négationniste et le rôle de Walendy ont fortement diminué depuis les années 1990 et ses activités se sont de plus en plus limitées à des conférences devant des cadres du NPD et à des articles dans la Deutsche Stimme. En novembre 2007, Walendy est devenu président de l’« Association pour la réhabilitation des personnes persécutées pour avoir contesté l’Holocauste », interdite six mois plus tard, et largement influencée par Horst Mahler.
* Wolfgang Benz (dir.), Handbuch des Antisemitismus Judenfeindschaft in Geschichte und Gegenwart, Band 2/2, Personen L–Z, Berlin: de Gruyter, 2010.
** Thomas Grumke & Bernd Wagner (dir.), Handbuch Rechtsradikalismus. Personen – Organisationen – Netzwerke vom Neonazismus bis in die Mitte der Gesellschaft, Opladen: Leske + Budrich, 2002.
Source: Lire l'article complet de Conspiracy Watch