Il faut avoir lu les récits historiques sur la Shoah du Dr Viktor Frankl pour découvrir comment des humains normaux passent en peu de temps d’une capacité de jugement adéquate à une situation, à une capacité de jugement complètement tarie. En cela, le thème sur « la banalité du mal » que développa Hannah Arendt nous interpelle tous.
« L’apathie, l’insensibilité aux émotions et le sentiment que plus rien ne le touchait constituaient les symptômes de la seconde phase des réactions psychologiques du prisonnier. … Cette insensibilité était en quelque sorte une coquille dans laquelle il entrait chaque fois que c’était nécessaire. »
« Découvrir un sens à sa vie »,
par Dr Viktor E. Frankl, 1959,
Éditions de l’Homme, 2021, p. 36
Cette réaction d’apathie, d’insensibilité est actuellement celle des sociétaires des Caisses Desjardins qui ont baissé les bras devant l’effronterie de la direction du Mouvement Desjardins de dénaturer jusqu’à ses dernières ficelles tout le tissu coopératif de l’oeuvre magistrale de Dorimène et Alphonse Desjardins.
Depuis les 30 dernières années, depuis ce triste passage des longues années de Claude Béland à la présidence de Desjardins, moult sursauts d’indignation ont semé par-ci par-là des tentatives de faire arrêter cette déchéance politique, légale et administrative de l’esprit coopératif des fondateurs des Caisses populaires. Mais tel un rouleau compresseur, le poids à la fois capitaliste et communiste rendit amorphes toutes ces réactions d’indignation des sociétaires. La quasi-totalité des sociétaires devint tels des prisonniers, des otages d’une conscription puissante qui ordonne la soumission à l’autorité dirigeante.
Monique F. Leroux, de la hauteur de son poste suprême au Mouvement Desjardins, ordonna en 2010 deux règlements de régie interne (RRI) qui mirent fin à toutes « insubordinations » des otages : le règlement 4.6 (saine conduite d’un membre) obligea tous les otages sociétaires à ne pas prononcer de « paroles offensantes » à l’encontre de la direction de Desjardins.
RRI 4.6 : Saine conduite
Un membre de la Caisse ne doit pas se conduire d’une manière offensante.
Une conduite est considérée comme « offensante » lorsqu’elle se manifeste par des comportements, paroles, actes ou gestes hostiles qui portent atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique d’un employé, d’un dirigeant, d’un membre de comité ou d’un membre de la Caisse ou qui sont néfastes à l’environnement dans lequel la Caisse exerce ses activités.
Et pour rendre exécutoire ce règlement coercitif du silence imposé, le RRI 4.7 sanctionna de réprimande, de suspension ou, plus exactement, d’EXCLUSION, les otages sociétaires pris en flagrant délit d’oser critiquer le changement à 180 degrés la direction de la coopérative financière :
RRI 4.7 : Réprimande, suspension ou exclusion
En cas de non-respect de l’article 4.6, le conseil d’administration donne au membre au moins un avertissement verbal ou écrit pour lui permettre de s’amender, sauf si des dérogations répétées ou la gravité de la conduite reprochée justifient le conseil d’agir sans cet avertissement. Si le défaut persiste, s’il y a des dérogations répétées ou une inconduite grave, le conseil d’administration peut alors suspendre ou exclure le membre en respectant la procédure prévue par la Loi.
En 8 ans, depuis 2011, j’ai subi à 6 reprises l’exclusion des Caisses où j’étais sociétaire depuis souvent des décennies. Ma faute : avoir posé des questions dérangeantes aux dirigeants de mes Caisses en assemblée générale annuelle.
Ainsi, le silence et sa loi mafieuse pénétrèrent insidieusement, mais officiellement l’esprit des coopératrices et coopérateurs afin qu’ils poursuivent sans dire mot l’oeuvre maintenant truquée des fondateurs des Caisses populaires.
Aujourd’hui, en ce 9 novembre 2022, les sociétaires des Caisses Desjardins sont officiellement des clients d’une institution financière accrochée au train des banques capitaliste, toutes soumises aux accords de la finance mondialisée et leurs agences de notation financières européennes et américaines.
Sous de beaux vocables de « solidarité » de « coopération » de « mutualité », etc., tous les otages sociétaires suivent le pas de l’oligarchique direction en se croyant maîtres de leur destinée financière. L’autonomie a donné sa place à cette direction toute puissante qui dirige seule à sa manière les économies et les trop-perçus qui appartiennent aux otages. Des dons, commandites, subventions bien ciblés viennent ponctuellement dorer l’image bienveillante de Desjardins à ce peuple asservi, maintenant endormi, silencieux, presque mort.
L’oeuvre de Claude Béland est accomplie et les dirigeants se sauvent maintenant avec la cagnotte, autorisés sont-ils à cette fin depuis 2005, par la Loi des coopératives de services financiers du Québec et Alban D’Amours, à se rémunérer grassement (plus de 150. $/l’heure; chiffre de 2015), avant même ces dons (ristournes « à la collectivité »), et avant, évidemment, les miettes restantes en vraies ristournes aux otages sociétaires.
Chez Desjardins plus que jamais, tous les sociétaires sont des otages égaux, n’ayant même plus une voix, un vote, n’étant même plus un membre une voix : ils sont tous des clients ordinaires, puisque leur parole est sous surveillance, et leur personne est en danger d’exclusion.
Les sociétaires sont tous des otages, prisonniers de cette fausse coopérative où tous doivent obéir à la minorité dirigeante sous menace d’exclusion arbitraire et radicale : aucun appel possible, aucune défense en personne permise vis-à-vis ses accusateurs, les dirigeants de la Caisse. Si l’autorité vous juge offensant dans vos propos ou comportements à l’encontre de l’institution, elle vous condamnera à l’exclusion en votre absence et vous serez « OUT » en moins de deux semaines!
Aujourd’hui, plus personne ne prendra la défense d’un otage, individu ostracisé qui aura osé critiquer la direction du tout-puissant Desjardins.
Au Québec, le financier Desjardins garde à vue bien des consciences: journaux coopératifs, gouvernements conciliants, Commission des droits de la personne, Autorité de marchés financiers, agences de notation internationale en passant par des analystes économiques réputés. Autrefois, c’était l’Église qui gérait le peuple et ses pensées; aujourd’hui c’est la financière multimillionnaire Desjardins.
Évidemment, nous ne sommes plus au temps du goulag d’Alexandre Soljenitsyne; la soumission a pris des nuances afin de soutirer en douce de l’otage sociétaire ses ressources financières, les seuls qui intéressent l’autorité collaborative et coopérative.
Ce qu’on voit aujourd’hui, ce sont des dons aux ministères de la Santé, de l’Éducation, aux municipalités et leurs infrastructures, à des coopératives de Santé, à des cliniques médicales privées, à des centres sportifs et sociaux, l’organisation de spectacles où des humoristes bien connus font rire les otages sociétaires qui en redemandent, naturellement! Et Desjardins comptabilise ces dépenses en ristournes à la collectivité!
C’est l’exploitation de la crédulité d’antan de laquelle les sectes et religions ont su bâtir leurs cathédrales et lieux de culte. Desjardins en est rendu le maître d’oeuvre : une exploitation servile de l’otage sociétaire, devenu la proie d’une finance plus que jamais dominatrice, puissante, qui « achète » tout, même les consciences.
Je fais donc appel à tous les otages sociétaires des Caisses, afin qu’un renversement du discours toxique s’opère et que leur voix redeviennent la voie du vrai coopératisme démocratique et non plus cette mixture indigeste du capitaliste-communiste qui étouffe de sa dictature la vraie idéologie coopérative bien réfléchie par Dorimène et Alphonse Desjardins. Les ristournes aux membres doivent s’orchestrer en totalité vers ces personnes, et que l’on cesse de dilapider le fruit de la coopération des sociétaires vers des collectivités de tous genres, aussi nobles soient-elles.
Otages sociétaires, faites entendre votre voix et votre vote, dénoncez les actuels abus de pouvoir d’une autorité qui s’octroie ce qui ne lui appartient pas, qui se croit légitimée de vous faire taire sous menace d’exclusion; dénoncer ces dons, commandites, subventions, ces avantages-membres et collectifs Desjardins qui n’en sont pas, car ils vont au seul profit de quelques minorités privilégiées de tout acabit.
Desjardins n’est pas une entreprise philanthropique : c’est une coopérative d’épargne et de crédit au service de ses membres et non pas une patente caritative pour sauver le monde sur le dos de ses otages sociétaires. Les sociétaires des Caisses Desjardins ne sont pas plus au service des collectivités que les clients des banques le sont auprès du gouvernement.
Membres Desjardins, relevez la tête et osez dire NON, osez dénoncer ce qui sont de flagrants abus de confiance, des détournements des fonds au bénéfice de privilégiés par votre exploitation indécente des personnes coopératrices que vous êtes.
Cela a assez duré: il faut sortir de votre torpeur, de votre apathie. Desjardins doit redevenir une vraie coopérative au service de tous ses membres ou cesser de leurrer tout le monde de sa fausse étiquette de coopération et de coopérative.
Tous les otages sociétaires Desjardins doivent sortir de leur coquille d’indifférence dont parle le Dr Frankl en début de ce texte; ils doivent briser les murs de cette prison où ils vivent mort-nés depuis maintenant le milieu des années 1990.
« Qui ne dit mot consent » : il faut dire NON, un NON fort à l’actuelle falsification, contrefaçon et avilissement du coopératisme par les dirigeants du Mouvement Desjardins.
Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec