Ouzbékistan et Karakalpakstan : une tentative de révolution de couleur venue d’Occident ?
Par Guilherme Wilbert pour le Saker Blog
Source : thesaker.is, 4 juillet 2022
Traduction : lecridespeuples.fr
L’Ouzbékistan, un pays relativement petit coincé entre le Turkménistan enclavé au sud et le Kazakhstan au nord, subit une refonte de l’État et connait une vague de protestations [sanglantes] que certains analystes qualifient d’ « ingérence étrangère » dans ce qu’on appelle le Karakalpakstan.
Le Karakalpakstan est une région relativement souveraine au sein de l’Ouzbékistan. Relativement parce qu’elle partage avec l’Ouzbékistan le droit de veto sur ses décisions « étatiques » (le territoire n’est pas un pays de facto). Selon la constitution du Karakalpakstan, les relations avec les Ouzbeks sont régies par des traités et des accords, et les différends sont en théorie résolus par « conciliation ». Il s’avère que le droit de sécession de la région est limité par le droit de veto des lois ouzbèkes. Plus précisément, l’article 74, chapitre XVII de la Constitution ouzbèke stipule que « la République du Karakalpakstan a le droit de faire sécession de la République d’Ouzbékistan sur la base d’un référendum national organisé par le peuple de la région. »
La région devait être autonome avec une tentative de l’Ouzbékistan d’essayer d’imiter le modèle de la fédération russe, qui a également des républiques dotées de certaines autonomies, mais parce qu’elles sont ethniquement différentes des Russes en général. Dans le cas du Karakalpakstan, cela fonctionne presque de la même manière puisque sur près de 2 millions de personnes dans la région aujourd’hui, on estimait en 2007 qu’au moins 400 000 personnes faisaient partie de l’ethnie karakalpak et que les Ouzbeks étaient 400 000 avec les Kazakhs, qui sont un peu plus de 300 000 dans la région. On se rend donc compte de l’imbroglio culturel au sein de la région… Ce qui en fait des victimes parfaites d’éventuelles révolutions de couleur.
Récemment, au début du mois, d’importantes manifestations ont éclaté dans le territoire qui tente de faire sécession de l’Ouzbékistan en raison d’une proposition constitutionnelle ouzbèke de retrait du statut d’autonomie de la région.
Le secrétaire de presse du président du pays, Sherzod Asadov, a déclaré sur Telegram samedi dernier que l’état d’urgence dans la région autonome devait être appliqué jusqu’au 2 août pour tenter de contenir les esprits de la population de la région.
Le président du pays est arrivé dans la région samedi dernier pour une visite et a promis qu’il ferait respecter les amendements constitutionnels qui autorisent la région à avoir un statut autonome.
Mais toutes les protestations ne sont pas toujours légitimes et soutenues par la population régionale.
Je dois vous rappeler qu’en janvier de cette année, le Kazakhstan, qui fait partie du front oriental de la Russie, a également connu une tentative de révolution colorée qui a nécessité l’appel aux casques bleus de l’OTSC (Organisation du traité de sécurité collective), une alliance militaire également connue sous le nom de traité de Tachkent entre la Russie, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan [qui s’est retiré de l’organisation en 2012], l’Arménie, le Tadjikistan, le Kirghizstan et le Belarus. Cela a permis de sauver la poursuite du mandat du président kazakh Tokayev.
Voir Révolution de couleur au Kazakhstan
Et il a été prouvé lors de ces protestations qu’il y avait plusieurs interférences étrangères au point que le président du pays a dû faire appel à des armées amies pour maintenir l’ordre social dans le pays. Cela pourrait aboutir à une révolution de couleur pro-occidentale dans un pays historiquement allié à la Russie.
La tactique des Occidentaux consistant à diviser pour mieux régner est bien connue, et ils l’ont essayée dans plusieurs régions du monde, que ce soit au Soudan, qui est aussi devenu le Sud-Soudan après plusieurs conflits interreligieux et ethniques dans la région, fomentés avec l’aveuglement de la communauté internationale, ou dans l’ex-Yougoslavie, qui a été dissoute en petits États que nous connaissons jusqu’à aujourd’hui après une intervention de l’OTAN. Les exemples ne manquent pas.
La question reste de savoir si ce qui se passe actuellement en Ouzbékistan est quelque chose qui a à voir avec un soulèvement populaire spontané et authentique, qui pourrait effectivement être considéré avec un regard favorable, ou si cela a à voir avec des puissances étrangères et l’ingérence pour faire de l’Ouzbékistan un pays encore plus petit, en supposant que dans une éventuelle indépendance du Karakalpakstan, le gouvernement serait presque 100% certainement pro-occidental : cette hypothèse rend évident qu’un mouvement qui se revendique de l’autodétermination des peuples, et toute la discussion à ce sujet aujourd’hui, ne seraient en fait qu’une dissolution territoriale d’un pays déjà petit, sous le parrainage des agents habituels.
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