Lu dans une interview de Marine Le Pen : « Je ne me sens absolument et définitivement aucun point commun avec la collaboration avec l’Allemagne nazie, et je me permets de vous informer que le chef du réseau FFI du Morbihan vient de témoigner que J.-M. Le Pen, à seize ans, a cherché à entrer dans la Résistance, que ceci lui a été refusé en raison de son jeune âge et du fait qu’il était déjà orphelin de guerre » (Le Point.fr, 10 avril 2007.)
Cette histoire de Le Pen empêché de résister est contestée par des résistants (1). Par contre, sont indéniables les amitiés de Le Pen, père et fille, avec du « beau linge » tendance vert-de-gris.
Le 19 juin 2022, dans un village du Limousin, au second tour des élections législatives, Sabrina Minguet a obtenu 317 voix et près de 39 % des suffrages exprimés.
Le village est Oradour-Sur-Glane où, le 10 juin1944, un détachement du 1er bataillon du 4e régiment de Panzergrenadier « Der Führer » appartenant à la division blindée SS « Das Reich » a assassiné 643 habitants, hommes, femmes, enfants. Il s’agit du plus grand massacre de civils commis en France par les armées allemandes. Les hommes ont été mitraillés, les femmes et les enfants brûlés vifs dans l’église.
Il y a eu très peu de rescapés. Parmi eux, Camille Senon que j’ai eu la chance de connaître quand j’étais postier à Paris et militant de la CGT. Elle fut secrétaire du syndicat CGT des chèques postaux, puis une des dirigeantes de la fédération postale CGT.
Camille Senon, parallèlement à son activité de militante syndicale et politique, au Parti communiste, s’est investie dans les associations des familles de victimes du nazisme. Membre de l’Association des familles des martyrs d’Oradour-sur-Glane, elle a été longtemps active dans l’Association des familles de fusillés et massacrés de la Résistance, dont elle deviendra présidente, dans l’Association du Souvenir des Fusillés du Mont Valérien, et à la direction de la Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes (Fédération nationale DIRP).
Camille Senon a été décorée des palmes académiques, de l’Ordre national du Mérite, de la Légion d’honneur (chevalier, puis officier). Mais quand, le 17 mai 2016, Manuel Valls a voulu la nommer commandeur dans cet ordre, elle a refusé publiquement en lui disant : je suis « solidaire des luttes menées depuis deux mois par les salariés, les jeunes, une majorité de députés et de Français contre la loi travail que vous venez d’imposer par le 49-3. »
Sabrina Minguet, qui a obtenu 317 voix et près de 39 % des suffrages exprimés, le 19 juin 2022, au second tour des législatives à Oradour-sur-Glane était candidate du Rassemblement national de Marine Le Pen.
Le Rassemblement national est le nouveau nom du Front national, légué à Marine Le Pen, avec une partie du manoir de Montretout à Saint-Cloud, par Jean-Marie Le Pen, son père. Lequel a déclaré en 2005, dans le journal Rivarol : « L’occupation allemande n’a pas été particulièrement inhumaine, même s’il y eut des bavures, inévitables dans un pays de 550 000 kilomètres carrés ».
Parmi les figures marquantes du Front national, parmi les premiers militants dont quelques cofondateurs, on trouve :
Léon Gaultier, ancien lieutenant Waffen SS, qui a fondé la maison d’édition du Front national (le SERP) avec Le Pen.
Gilbert Gilles, ancien adjudant Waffen SS, ancien membre de l’OAS, qui a été chargé de mission au Front national.
Pierre Émile Bousquet, Waffen-SS au sein de la Division Charlemagne, premier trésorier du Front national dont il dépose les statuts avec Jean-Marie Le Pen.
Victor Barthélemy, ancien de la Légion des Volontaires Français contre le Bolchevisme (LVF), qui a été un des fondateurs du Front national.
Paul Malaguti, membre du Parti Populaire Français (collaborateur), qui a été condamné à mort par contumace à la Libération, et qui a été cadre du Front national.
Roland Gaucher, collaborateur, condamné à cinq ans de prison à la Libération, qui a été un des fondateurs du Front National.
André Dufraisse, qui a été membre du PPF (Parti Populaire Français de Jacques Doriot collaborateur) et de la LVF (Légion des Volontaire Français contre le Bolchevisme), engagé sous uniforme allemand, membre du bureau politique puis secrétaire de la fédération Front national de Paris.
François Brigneau, ancien milicien, membre du RNP (Rassemblement national populaire) de Marcel Déat (ministre du Travail dans le gouvernement de Vichy), fondateur du journal Présent et éditorialiste à National Hebdo (organe officiel du Front national).
Alain Jamet, 1er Vice-Président du Front National, membre du Comité central. Il était en 1965 « Délégué départemental du Comité Tixier-Vignancour ».
Jean-Louis Tixier-Vignancour qui a été secrétaire général adjoint à l’information du Gouvernement de Vichy. Il était le parrain de la première fille de Jean-Marie Le Pen, Marie-Caroline. L’ancien animateur de sa campagne pour les présidentielles était Jean-Marie Le Pen.
Bon, ça, c’est pour le père, c’est l’héritage. La fille veut faire croire qu’elle le renie. Mais, chassez le naturel kaki, il revient à la vitesse d’un panzer. Un exemple ?
Le 27 janvier 2012, le jour anniversaire de la commémoration de la Shoah, dans le palais de la Hofburg à Vienne, là même où Adolf Hitler prononça l’annexion de l’Autriche à l’Allemagne en 1938, Marine Le Pen a dansé au bal des corporations estudiantines qui sont le vivier des hauts cadres du parti fasciste autrichien FPÖ. En 1987, une association réunissant plusieurs de ces organisations étudiantes avait ainsi proposé Rudolf Hess, le successeur désigné de Hitler, comme candidat au prix Nobel de la Paix.
Bon, il est permis, grâce au procès, gagné par Jean-Luc Mélenchon, de dire que Marine Le Pen est fasciste.
89 députés imprégnés de cette idéologie sont entrés dans l’hémicycle. Avec la complicité et les voix des députés macronistes, le Rassemblement National obtient deux postes clés à l’Assemblée Nationale : les députés Sébastien Chenu et Hélène Laporte ont en effet été élus vice-présidents. Pour sauver l’honneur de l’Assemblée nationale, il a fallu que Charles de Courson (député centriste de la 5e circonscription de la Marne), qui aurait pu être élu président de la commission des finances à la place d’Eric Cocquerel, retire sa candidature avant le 3e tour alors que LR et le RN de Marine Le Pen étaient en train de s’allier pour le faire élire. C’était plus que n’en pouvait accepter ce fils de résistant, petit-fils de l’un des députés ayant refusé de voter les pleins pouvoirs à Pétain.
Que dire à Sabrina Minguet et à ses 317 électeurs d’Oradour-Sur-Glane ? Que la bêtise, l’ignorance, la méchanceté n’excusent pas tout ? Que c’est par eux que le fascisme reviendra ? Sous la bannière de la cheffe fasciste ? Qu’ils auront à rendre des comptes ? Que du haut de ses 97 ans, Camille Senon les méprise ou les plaint ?
Et moi, combien d’articles ai-je écrit, jusqu’à un livre en collaboration avec mon fils Frédéric et qui s’intitule « Marine Le Pen amène le pire » (2014, éditions Golias, préface de Paul Ariès).
Ne fais-je, n’ai-je fait ici depuis si longtemps que labourer la mer, selon le mot de Bolivar, un jour de lassitude ?
Maxime VIVAS
NOTE.
(1 Selon Raymond Casas (ancien FFI), Le Pen aurait tenté d’intégrer les FFI en novembre 1944. Si cette tentative est avérée, on notera qu’elle intervient 5 mois après le débarquement de Normandie (6 juin 1944), 4 mois après la Libération de Vannes, chef lieu du Morbihan (6 août 1944), 3 mois après la Libération de Paris (fin août 1944).
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir