Entretien annuel du Secrétaire Général du Hezbollah, Sayed Hassan Nasrallah, avec la chaîne TV iranienne arabophone Al-Alam, le 8 février 2022.
Suivi du briefing de Maria Zakharova sur la situation en Syrie.
Source : video.moqawama.org
Traduction : lecridespeuples.fr
Transcription :
[Voir la traduction de l’extrait précédent ici]
Journaliste : En ce qui concerne le Yémen, Eminent Sayed, il y a un développement avec les frappes contre l’intérieur des Emirats de la part de l’armée yéménite, des Comités populaires et du mouvement Ansar Allah, et ce qui est remarquable dans ce développement, c’est que cela a en quelque sorte suscité l’indignation du monde entier, avec une condamnation internationale, régionale et (des pays) arabes, etc. A vos yeux, à quoi ripostaient ces frappes, et est-ce qu’elles auront une influence sur la trajectoire de l’agression contre le Yémen ?
Hassan Nasrallah : Naturellement, et je vais dire des choses que le monde entier sait, le mouvement Ansar Allah n’avait pas frappé les Emirats depuis de longues années, 7 ans et dans un mois et demi ou deux mois, ça aurait fait 8 ans. Ils ont annoncé – les porte-parole officiels de l’armée yéménite, des Comités populaires et d’Ansar Allah – que puisque les Emirats étaient redevenus partie prenante de l’agression, s’ingérant et soutenant (des groupes armés), et participant (ouvertement) à la guerre contre nous, ils avaient riposté. Ces ripostes se poursuivront, selon la logique d’Ansar Allah, tant que l’action qui provoque cette réaction se poursuivra. Ainsi, il est facile pour les Emirats de régler ce problème : s’ils font ce qu’ils avaient fait durant les années passées, à savoir cesser leur participation à la guerre (et c’est ce que dit Sayed Abd-al Malik al-Houthi, ce n’est pas moi qui m’exprime, la décision est entre leurs mains ; je ne fais que répéter ce qu’ils ont dit dans les médias), si les Emirats cessent leur ingérence (au Yémen) et se retirent de la (coalition saoudienne) de guerre, personne au Yémen n’aura plus de querelle avec eux, ni l’armée yéménite, ni les Comités populaires, ni Ansar Allah. C’est aussi simple que ça.
Journaliste : Pourquoi les Emirats sont-ils revenus dans la guerre ? Ils s’étaient retirés. A votre avis, quelle est la cause de leur entrée en guerre à nouveau ? Est-ce une décision spontanée ou y ont-ils été poussés ?
Hassan Nasrallah : Ils y ont évidemment été poussés. Nous n’avons pas assez de temps pour analyser (en détail) toute la situation, mais la question de Ma’reb, qu’il s’agisse de la ville ou de ses alentours, (est sur le point d’être résolue) car tout est tombé entre les mains de l’armée yéménite et des Comités populaires, à l’exception de la ville elle-même. Les Américains ont clairement annoncé – qu’il s’agisse des représentants officiels ou des analystes – que si Ma’reb tombe, ça signifie que les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite ont (définitivement) perdu la guerre. Telle est l’équation. Il est donc interdit que la ville de Ma’reb tombe (aux mains de la résistance yéménite qui l’encercle), que la ville de Ma’reb soit libérée. La pression a donc commencé.
Toute la pression militaire, les bombardements aériens quotidiens ont échoué à modifier l’équation sur le terrain. Il y a une brigade appelée la Brigade des Géants, qui était positionnée sur les côtes – la région de Hudeida–, dont l’allégeance, le commandement, le financement et l’obédience étaient Emiratis. Il semble qu’il ait été demandé aux Emirats de ne plus être attentistes, car les Saoudiens et leurs alliés au Yémen ne parviendront pas à tenir Ma’reb. Il faut que de nouvelles forces entrent dans l’équation. La Brigade des Géants s’est donc retirée des côtes, et a été positionnée dans la province de Chabwa où elle a ouvert un front contre Ansar Allah pour alléger la pression sur Ma’reb et peut-être aussi s’avancer plus tard vers Ma’reb.
Ce qu’a également déclaré Ansar Allah, c’est que les Emiratis ne se sont pas contentés de faire intervenir leurs proxies, ils l’ont armée, équipée, financée, et ont mêmes fait entrer leurs propres forces dans la bataille de Chabwa avec leurs drones et forces aériennes. Et c’est cela qui a provoqué la réaction (d’Ansar Allah qui a ciblé le territoire des Emirats).
C’est donc le besoin américain et saoudien sur le terrain, du fait de leur échec à Ma’reb qui les a amenés à faire intervenir la force émiratie, qui était présente au Yémen et pouvait rééquilibrer l’équation en leur faveur, afin d’empêcher la grande victoire que représenterait la prise de Ma’reb. Il est possible que les Emirats aient estimé que même s’ils intervenaient, Ansar Allah ne riposterait pas de cette manière, peut-être qu’ils avaient une lecture fausse de la situation régionale et des relations régionales. J’ai dit auparavant que les lectures erronées entrainent parfois des résultats erronés. Ils se trompent toujours en considérant que lorsque Ansar Allah décide d’ouvrir un nouveau front, de riposter, de signer un accord ou de se retirer, il demande la permission à l’Iran, ou doit se conformer à ses directives. Ce n’est pas vrai. C’est une décision prise (exclusivement) par les dirigeants d’AnsarAllah. Je te confirme que tous les alliés, amis et soutiens, moralement et politiquement, d’AnsarAllah, l’Iran en premier lieu, ont eu connaissance de ces frappes dans les médias, comme les Emiratis.
Journaliste : Le résultat est qu’aujourd’hui, il y a une protection américaine (des Emirats). Washington a déclaré qu’ils enverraient des renforcements, le destroyer USS Cole, des F-22, etc., pour protéger les Emirats. Ne considérez-vous pas que cette position américaine peut avoir une influence sur l’issue de la guerre du Yémen ?
Hassan Nasrallah : Cela n’est qu’un indicateur de l’ampleur de la peur, de la confusion et même de la terreur des Emirats. Depuis des décennies, les Etats-Unis ont tout fourni aux Emirats (et aux Saoudiens) : navires, missiles, forces aériennes, technologies, techniques, etc. Pas seulement les Etats-Unis, mais aussi le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne… Ils n’y a pas une seule entreprise d’armements (occidentale) auprès de laquelle ils ne se sont pas fournis en armes. Mais malgré tout ça, dès la première confrontation, les Emirats ont appelé le monde entier à leur secours ! Cela indique à quel point ils sont faibles et impuissants.
Nous avons un proverbe au Liban, je ne sais pas s’il est utilisé ailleurs : « Qui a une maison en verre ne lance pas de pierres aux gens. » Ce proverbe s’applique ici. J’ai déclaré jadis, et cela a fâché les Emirats, que leurs villes sont en verre, leur pays est en verre. Si ton pays est en verre, pourquoi vas-tu risquer ta vie dans une telle guerre ? Dès le début, et jusqu’à ce jour, AnsarAllah déclarent qu’ils n’ont de base aucun différend, aucune aspiration avec les Emirats, et ne les attaquent que pour riposter à leur agression. Il leur suffit de cesser leur agression et de se retirer du Yémen, et AnsarAllah n’aura plus aucune affaire avec eux. Seule une retraite peut protéger les Emirats ; qu’ils cessent de s’ingérer dans les affaires des autres pays arabes, c’est tout.
Journaliste : Eminent Sayed, venons-en à la Syrie. Le Hezbollah est entré en Syrie pour combattre le terrorisme et protéger le Liban, et il a réussi. Jusqu’à quand le Hezbollah restera-t-il en Syrie ? Y a-t-il un délai fixé avant son retrait ?
Hassan Nasrallah : En Syrie, on peut dire que la grande guerre, la guerre mondiale, la guerre régionale est terminée, avec la grâce de Dieu, et n’est pas parvenue à porter ses fruits. Mais la situation en Syrie a encore besoin de vigilance, de protection. Au nord de la Syrie (autour d’Idlib), il y a encore des dizaines de milliers de combattants de groupes armés, dont des groupes extrémistes et takfiris. Ils représentent toujours une menace. Le front est calme du fait de la présence de l’armée syrienne et de ses alliés, ainsi que de la Turquie, il y a une équation entre la Turquie et la Russie, etc. Tout cela a entrainé le calme, une sorte de trêve tacite. Mais ce champ de bataille reste ouvert, la question du nord n’est pas résolue, la menace persiste. La question de l’Est de l’Euphrate persiste – les forces américaines y sont présentes, et le monde entier en connait la raison : elles pillent le pétrole et le gaz syriens. Cela montre à quel point leur avidité est insatiable, ces (prétendus) puissants Etats-Unis. L’Est de l’Euphrate est donc si brillant à vos yeux ? Laissez-le à la Syrie ! Ils pillent le pétrole et le gaz à l’Est de l’Euphrate, c’est tout ce qu’ils font.
A nouveau, depuis quelques mois, et le dernier incident est celui qui s’est produit à Al-Hasaka, il y a le projet de raviver Daech en Syrie et en Irak. Il y a des incidents qui se produisent en Irak, de même qu’en Syrie, ce qui s’est produit à la prison Al-Sina’a, tout cela n’est pas innocent. Jusqu’à présent, des centaines de combattants de Daech, dont des grands dirigeants, n’ont pas pu être capturés : peut-être qu’ils ont quitté la région, peut-être même que ce sont les forces américaines qui les ont exfiltrés, comme cela s’est déjà produit. Donc les dangers persistent.
Aujourd’hui, par exemple, j’ai vu dans les médias avant notre interview que les services de renseignement russes ont des informations selon lesquelles les Américains veulent rouvrir le contact avec des groupes extrémistes à Damas et Lattaquié. Et c’est tout à fait probable.
Journaliste : Pourquoi font-ils cela ? Est-ce qu’ils ravivent Daech pour donner un prétexte à leur présence ?
Hassan Nasrallah : Il y a plus que ça. Ils veulent la reddition de l’État, la reddition du régime et des dirigeants syriens, ce qui ne s’est pas produit. La situation en Syrie nécessite donc que nous restions vigilants et prudents. Bien sûr, nous sommes présents dans la mesure du besoin, et il y a une grande partie de nos frères (combattants du Hezbollah) qui est revenue au Liban, car des fronts entiers ont été fermés avec la fin des combats, et notre présence n’était donc plus requise. Nous ne maintenons en Syrie que les forces nécessaires pour la situation.
Journaliste : Les agressions sionistes contre la Syrie persistent. Est-ce qu’elles touchent le Hezbollah ? Et la question qui se répète toujours, pourquoi n’y a-t-il pas de riposte face à ces agressions, que ce soit de la part de l’armée syrienne ou peut-être de ses alliés ?
Hassan Nasrallah : Concernant la première partie de la question, oui, ils se vantent de frapper la Syrie. Oui, parfois, certaines cibles qui sont frappées sont à nous. Oui, il arrive que certaines cibles frappées en Syrie appartiennent au Hezbollah, que ce soit des casernes du Hezbollah, des centres du Hezbollah, des dépôts du Hezbollah, nous en avons en Syrie. En ce qui concerne la riposte, pour tout ce qui concerne les Libanais et le Hezbollah, nous avons établi une équation selon laquelle si Israël tue nos hommes, si nous avons des martyrs suite aux bombardements israéliens, nous riposterons depuis le Liban. Car nous considérons que le front est le même. Cette équation est établie depuis un certain temps, et elle est toujours en vigueur. Il y a toujours un martyr (du Hezbollah) pour lequel nous leur devons rétribution : à l’époque, ils sont restés sur un pied et demi [terrorisés et prêts à prendre la fuite] pendant 2 ou 3 mois, et du fait de certaines considérations de terrain [tous les soldats israéliens avaient évacué la zone frontalière avec le Liban], nous avons reporté la chose à plus tard, lorsque le moment sera opportun. Donc en Syrie, nous leur devons un martyr, et au Liban, nous leur devons un martyr, ce qui fait deux martyrs [pour lesquels nous tuerons tôt ou tard au moins deux soldats israéliens]. Nous avons établi cette équation.
Voir Pour mettre fin à une guerre des nerfs insoutenable, Israël implore le Hezbollah de riposter et Nasrallah : les soldats israéliens se terrent comme des rats, mais nous finirons bien par en tuer un
Qu’a apporté cette équation ? Durant toutes les opérations de bombardements (israéliens) qui se produisaient, Israël veillait à ne tuer personne (par peur de la riposte du Hezbollah). Je ne vais pas m’étendre sur les moyens par lesquels Israël veillait à cela, mais il veillait toujours à ne pas tuer pour éviter une riposte depuis le Liban. Je me souviens qu’avant le dernier martyr, lors de l’intrusion à Dahiyeh (banlieue sud de Beyrouth), nous avons eu deux martyrs (dans une frappe israélienne) en Syrie. Ce jour-là, Pompeo, qui était Secrétaire d’Etat américain, a contacté l’un des responsables libanais officiels pour lui dire que Netanyahou avait parlé avec lui et lui avait demandé de faire savoir aux responsables libanais, pour qu’ils le transmettent au Hezbollah, qu’Israël ne savait pas qu’il y avait des Libanais dans ce centre lorsqu’ils l’ont frappé. Vous rendez-vous compte de la manière (humiliante) dont agit Israël ? Tout ça pour nous demander de ne pas riposter, en nous affirmant qu’ils n’ont pas fait exprès de tuer deux de nos combattants. Bien sûr, nous avions riposté à l’époque. Donc lorsque nous avons des martyrs, nous ripostons assurément pour confirmer cette équation.
Voir Nasrallah : l’armée israélienne est devenue une armée hollywoodienne
Maintenant, concernant les frappes israéliennes en Syrie en général, vous voyez que les défenses aériennes syriennes font face (avec une grande efficacité) aux attaques israéliennes, et la majorité des martyrs durant ces attaques ne sont pas en conséquence directe des frappes, mais du fait de l’intervention des défenses aériennes syriennes, qui sont frappées par de nouveaux avions lorsqu’elles font face à l’agression, et c’est là qu’il y a des martyrs. Bien sûr, cette action des défenses anti-aériennes est utile, car même si tous les missiles ne sont pas interceptés, un grand nombre d’entre eux est intercepté, et l’opération de bombardement ne réalise donc pas tous ses objectifs. C’est un fait établi. Maintenant, la question « Pourquoi la Syrie ne riposte-t-elle pas » (en frappant Israël) est régulièrement posée, mais la situation est différente pour la Syrie : elle est liée à la situation dans la région, au risque d’escalade vers la guerre, aux priorités de l’Etat syrien à l’étape actuelle, à savoir le combat contre les groupes terroristes et takfiris, la situation économique et sociale très difficile du fait du siège et des sanctions américaines, etc. Un certain nombre de considérations a jusqu’à présent empêché les dirigeants syriens de riposter, mais qui sait ce qui se passera demain ou après-demain ? Ça dépend de la capacité de tolérance de la Syrie face à ce type d’agressions. […]
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Maria Zakharova sur la situation en Syrie
Conférence de presse de Maria Zakharova, porte-parole du Ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, Moscou, 24 mars 2022.
Source : Ministère de la défense russe
Traduction : lecridespeuples.fr
Recrutement de militants en Syrie pour l’Ukraine
[…] Le recrutement actif de militants à utiliser contre la Fédération de Russie est en cours au Moyen-Orient, avec l’appui des ambassades ukrainiennes locales. Ces activités violent la Convention de Vienne de 1961.
Selon les données disponibles, les services de sécurité occidentaux et le Service de sécurité ukrainien travaillent en étroite collaboration pour coordonner ces efforts. En effet, il s’agit d’une nouvelle tentative de certains cercles occidentaux pour « apprivoiser » les radicaux du Moyen-Orient et canaliser leur énergie destructrice dans la lutte contre la Russie et en général contre l’ordre international fondé sur le droit international. Les échecs antérieurs de telles expériences n’ont pas arrêté les ingénieurs politiques anglo-saxons. Apparemment, la frénésie russophobe a complètement bloqué leur mémoire des attentats du 11 septembre à New York, des attentats terroristes à Londres et dans d’autres capitales européennes, des milliers de leurs compatriotes tués en Irak et de leur exode honteux d’Afghanistan. Ils espèrent que l’expérience ukrainienne sera un succès et qu’ils finiront par réussir à engendrer des terroristes « obéissants » qui leur obéiront à l’avenir. L’Occident a eu de telles illusions pendant des décennies. Ils ont élevé ces militants et ont ensuite été soumis à leurs attaques féroces. Ces extrémistes et terroristes sont élevés dans le sang. Aujourd’hui, c’est le sang des Russes, des Ukrainiens et d’autres groupes ethniques vivant dans la région. Nous nous ressemblons tous aux yeux des militants amenés en Ukraine depuis le Moyen-Orient. Ils ne distingueront pas un soldat russe d’un Ukrainien, d’un Hongrois, d’un Polonais, d’un Juif ou d’un Grec. Ils se délecteront simplement de la violence que leurs recruteurs les laisseront commettre.
L’extraordinaire cynisme des Occidentaux se manifeste dans le fait qu’ils recrutent massivement des terroristes en Syrie –sur les territoires qui ne sont pas contrôlés par le gouvernement légal de ce pays. Sous prétexte de lutter contre le terrorisme international, les militaires américains et d’autres pays de l’OTAN y sont illégalement présents depuis 2014. Ils ne vont pas rendre compte à qui que ce soit, porter le sacs et la cendre ou essayer de justifier leurs actions de quelque manière que ce soit. Ils restent simplement là. Ils pompent du pétrole, recrutent des terroristes et les envoient dans d’autres régions. Ils doivent être là et ils sont là. Les journalistes ne posent aucune question à leurs gouvernements. Qui meurt aux mains de l’armée américaine ? Pourquoi sont-ils là ? A qui profite la vente illégale du pétrole syrien et des autres ressources naturelles de ce pays indépendant ? Cette lutte s’est probablement transformée au fil du temps en une « fraternité de combat » qui permet à ces personnes de compter sur l’aide des prisonniers de guerre de Daech pour « défendre l’Ukraine démocratique de l’agression russe ».
Je voudrais demander : comment ces mesures sont-elles conformes au mécanisme de désescalade russo-américain en vigueur en Syrie ? Y a-t-il quelqu’un de l’autre côté de la ligne à Washington qui peut répondre ?
Nous avertissons à nouveau que flirter avec des terroristes ne produira aucun avantage. Ceux qui lancent un chien enragé sur leur voisin risquent de se faire déchirer en morceaux par l’animal déchaîné. […]
Déclaration d’un groupe de pays occidentaux à l’occasion de l’anniversaire des développements en Syrie
Nous avons pris note de la déclaration conjointe des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne, de la France et de l’Italie, publiée le 15 mars 2022, à l’occasion du 11e anniversaire de ce qu’ils appellent le « soulèvement syrien ».
Je voudrais répéter que l’impératif politique de la Russie en Syrie a toujours été et est toujours le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne. Au fil des ans, nous avons entendu beaucoup d’injures, subi beaucoup d’intimidation et entendu de nombreuses promesses. L’histoire a tout remis à sa place. Grâce aux actions de la Russie, la campagne occidentale, lancée pour détruire les États du Moyen-Orient, s’est arrêtée en Syrie. Le succès de cette campagne aurait été un désastre pour le monde, compte tenu, malheureusement, de la présence de technologies qui auraient pu être utilisées pour y créer des armes de destruction massive (armes non déclarées, « sales »), du nombre d’armes dans la région, ainsi que d’extrémistes, de terroristes et d’idéologie fondamentaliste.
La campagne lancée par l’OTAN, et principalement les États-Unis, aurait pu déboucher sur une catastrophe totale. Elle a été empêchée par la Russie, qui a contribué de manière décisive à mettre en déroute Daech, le plus grand groupe terroriste de l’histoire. Avez-vous oublié cela ? Le souvenir de l’énorme risque de catastrophe mondiale s’est-il effacé en Occident ? Des dommages irréparables ont également été causés à d’autres groupes armés illégaux. Il est regrettable que tout cela ait été oublié. Le statut d’État en ruine de pays tels que l’Irak et la destruction de leurs forces armées après l’arrivée d’étrangers dans leur pays ont signifié que les organisations ordonnées et contrôlées par le gouvernement ont été remplacées par des groupes armés désorganisés avec une idéologie fondamentaliste, créant un terreau fertile pour Daech. Mais ceux qui étaient responsables de cette situation n’éprouvent aucun regret ni auto-récrimination.
Comme nous pouvons le voir sur l’exemple de la Libye, les activités de l’OTAN ont conduit au chaos dans la région, et maintenant tous les pays d’Afrique du Nord et du Sahel en subissent les conséquences. Le bombardement de la Libye par un certain nombre de pays de l’OTAN ne peut être décrit que comme un crime de guerre, qui a entraîné la destruction de l’État, l’appauvrissement de la population, la faim, un grand nombre de réfugiés et la guerre civile.
Ce produit de la propagande reflète l’interprétation occidentale erronée des événements en Syrie, basée sur les préjugés et le deux poids deux mesures. L’Occident a probablement décidé de profiter de la situation actuelle pour présenter une nouvelle interprétation des événements passés. Il ne réussira pas. La déclaration susmentionnée fait partie de la politique collective de l’Occident consistant à répandre la désinformation pour inciter la communauté internationale à changer d’avis sur les développements en Syrie et dans d’autres parties du monde. Elle répète les allégations habituelles contre les autorités syriennes légitimes et la Russie. Une tentative cynique a été faite dans la déclaration ci-dessus pour établir des parallèles entre le conflit syrien et la situation en Ukraine. La Russie est accusée de créer une catastrophe humanitaire dans les deux cas (c’est une allégation récurrente). La seule similitude entre ces deux situations est que la Russie a agi en réponse à une demande des dirigeants d’États souverains de les défendre eux et leur peuple et de rétablir l’équilibre d’une situation qui avait été déstabilisée par la faute de l’Occident.
Nous estimons nécessaire de rappeler à nouveau à tous le rôle destructeur joué par les États-Unis et leurs alliés, qui ont délibérément alimenté le conflit en Syrie dès le début. Tout en agissant dans leurs propres intérêts égoïstes à court terme, ils n’ont reculé devant rien pour apporter un soutien total aux forces qui combattaient le Gouvernement syrien. Ils nourrissaient des extrémistes et créaient une nouvelle « classe » de terroristes internationaux. En même temps, l’Occident devait savoir que cette politique étirait la crise et l’effusion de sang. Mais c’était probablement ce qu’ils voulaient.
La Coalition internationale antiterroriste dirigée par les États-Unis n’a pas tant combattu Daech qu’elle a mené des bombardements massifs du territoire syrien, causant de nombreuses victimes civiles et la destruction d’infrastructures civiles.
Leurs frappes visaient aussi souvent les militaires syriens qui libéraient leur pays des hordes de terroristes, amenés et armés avec l’aide occidentale. Je voudrais vous rappeler les ignobles provocations chimiques menées par des groupes supervisés par les agences de renseignement occidentales. Bien qu’appelées ONG « humanitaires » et « des droits de l’homme » (rappelez-vous les Casques blancs), ces organisations faisaient en réalité partie d’un réseau extrémiste. Elles ont fourni toutes sortes de soutien aux terroristes. Naturellement, elles le faisaient avec de l’argent occidental. Le Département d’État a ouvertement tout financé (en ce qui concerne les Casques blancs). Cette activité était dirigée par un agent du renseignement britannique à la retraite qui a ensuite été « éliminé » lorsqu’il est devenu inutile et s’est mis en travers de leur chemin.
Les Américains entravent toujours la restauration de la souveraineté de la Syrie à l’Est de l’Euphrate. Ils poussent les Kurdes locaux vers le séparatisme, contribuant à un démembrement du pays. Les États-Unis continuent d’occuper une « zone de déconfliction » de 55 kilomètres autour de leur base militaire illégale d’Al-Tanf, dans le sud du pays. Cela a privé le gouvernement syrien de l’accès aux gisements d’hydrocarbures et autres ressources naturelles situés dans le Nord-Est.
Ils continuent de proclamer l’amélioration de la situation humanitaire en Syrie, mais en fait, les États-Unis et leurs alliés mettent tout en œuvre pour ralentir le redressement du pays après la crise, élargissant constamment la portée des mesures restrictives unilatérales contre Damas. On se souvient comment ils ont imposé des restrictions malgré l’aggravation de la situation sur le terrain en raison de la pandémie. Ils ont continué à frapper la Syrie encore et encore, essayant de blesser des civils, de leur rendre la vie insupportable, afin de faire pression sur Damas. Une histoire épouvantable. Premièrement, les tentatives de changement de régime, la déstabilisation, le chaos dans le pays, l’approvisionnement en armes de la Syrie, le recrutement d’extrémistes et de militants, les expériences dangereuses et les attentats terroristes, y compris l’utilisation d’armes chimiques, les bombardements aériens, le pompage de pétrole et le pillage de l’Etat. Après cela, lorsque cela n’a pas fonctionné en raison de l’action décisive de la Russie, ils ont commencé à imposer des sanctions suffocantes à la Syrie sur fond de pandémie, à un moment où le pays résistait et essayait de survivre depuis dix ans.
Je me souviens des paroles de l’ancienne secrétaire d’État américaine Madeleine Albright. Dans les années 1990, des journalistes occidentaux (ils étaient alors autorisés à poser des questions) lui ont demandé comment les États-Unis évaluaient la vie de milliers d’enfants (ils ont cité un chiffre proche d’un demi-million) morts à cause des sanctions américaines contre l’Irak. Elle a répondu calmement (il y a une vidéo) qu’elle considérait ces mesures comme raisonnables. C’était ça. Puis ils ont inventé le terme « dommages collatéraux » pour décrire le sacrifice qui a dû être fait pour faire prévaloir le point de vue américain, afin qu’ils puissent dominer et se considérer comme exceptionnels. Des pertes justifiées, et c’était tout. Maintenant, ils réfléchissent à ce qui se passe en Ukraine, comptent les réfugiés, etc. Comptent le nombre de victimes civiles des sanctions américaines rien qu’en Amérique latine, au Moyen-Orient. Je parlerai des attentats à la bombe séparément. En Syrie, le processus de règlement politique et le retour des réfugiés et des personnes déplacées sont artificiellement entravés. Les occidentaux en sont aussi responsables.
Je voudrais souligner que les pays qui ont publié ladite déclaration portent la responsabilité principale des événements tragiques en Syrie qui ont causé près d’un demi-million de morts et encore plus de blessés, des dommages de plusieurs milliards de dollars à l’économie et aux infrastructures sociales syriennes, les plus graves souffrance du peuple, alors que l’écrasante majorité résistait à ce projet géopolitique de l’Occident. Ce n’est pas à eux de dénoncer la Syrie ou la Russie, qui a joué un rôle clé dans la défaite de Daech et poursuit ses efforts constants pour promouvoir la paix tant attendue sur le sol syrien.
Nous les avons appelés à le faire ensemble, à créer une coalition mondiale anti-Daech et anti-terroriste. C’était en 2015. Ils se sont moqués de nous parce que cela ne correspondait pas à leurs plans. Ils pensaient que nous ne pouvions pas le faire, mais nous l’avons fait. Apparemment, ils ont décidé de se venger. Mais cela ne fonctionnera pas cette fois non plus. […]
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