L’Occident compte les milliards qu’il va perdre en Russie. Cet article analyse les conditions dans lesquelles les entreprises occidentales qui face à la pression punitive et à la « Guerre économique » (le terme a été employé officiellement par notre ministre Bruno Lemaire) renonceraient à maintenir leur présence sur le sol russe, pourraient soit être nationalisées, soit bénéficier d’un système de gestion externe temporaire. Il semble bien que ce soit encore une manière de se tirer une balle dans le pied qui permettrait aux Russes de compenser le gel de certains de leurs avoirs par l’occident. La question est qu’est qui est le mieux non pour le capital mais pour les peuples ? (Danielle Bleitrach)
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par Konstantin Olshansky.
Une guerre économique a été menée contre la Russie. Moscou est obligée de se défendre contre les attaques occidentales par des moyens non conventionnels. Le premier consiste à nationaliser les entreprises occidentales qui ont fui la Russie.
Le Premier ministre Mikhaïl Mishustin et le président Vladimir Poutine ont déjà approuvé la saisie des actifs des entreprises occidentales qui ont trahi la Russie. Ce n’est donc qu’une question de temps avant que la loi de nationalisation ne soit adoptée.
Il s’agirait d’actifs valant des dizaines de milliards de dollars. Cela permettrait de couvrir au moins partiellement les pertes dues au gel (et en fait à la confiscation) des réserves de change de la Russie par l’Occident.
Pas de nationalisation, mais une « gestion externe »
Vous ne trouverez le mot « nationalisation » dans aucun document officiel. Il n’est utilisé que par des hommes politiques comme l’ex-président Dmitry Medvedev ou l’un des leaders de Russie Unie, Andrei Turchak.
En termes juridiques, il s’agit de la « gestion externe » des entreprises étrangères qui ont quitté la Russie. L’essentiel des propositions est le suivant. Si la direction d’une société, dont plus de 25% des parts sont détenues par des étrangers, décide de cesser ses activités de manière « injustifiée », la société doit être placée sous la gestion d’une administration provisoire.
La signification de ce que serait une cessation « injustifiée » est également inscrite dans le projet de loi. Il s’agit de toute annonce publique d’une sortie de la Russie qui ne fournit pas de justification économique.
Dans la pratique, cela signifierait que les gestionnaires nommés par l’État se verraient confier les pleins pouvoirs pour gérer les sociétés.
En effet, les gestionnaires externes seront nommés par l’Agence d’assurance-dépôts (DIA) ou par la société de développement de l’État VEB.RF, selon que la société est une institution financière ou non. Les managers auront un accès illimité à l’entreprise, y compris aux secrets commerciaux.
Les entreprises étrangères peuvent être placées sous gestion externe pour une durée maximale de six mois. Pendant cette période, le processus de cessation de leurs activités en Russie peut être inversé. Pour ce faire, les actionnaires qui détiennent plus de 50% de la société peuvent demander à un tribunal de supprimer la gestion externe ou de vendre leur participation à de « nouveaux propriétaires appropriés ».
Combien de temps durera « l’altruisme » des marques occidentales ?
Depuis le 24 février, plusieurs dizaines de grandes et moyennes entreprises ont déjà annoncé la suspension de leurs activités en Russie. Il s’agit notamment de géants de la technologie tels qu’Apple, Oracle, Microsoft, IBM et le fournisseur de services internet Cogent Communications, de grands fabricants de biens de consommation tels qu’Unilever, les chaînes de restauration rapide Starbucks et McDonald’s, et les sociétés de vêtements H&M, Inditex et Uniqlo, le détaillant espagnol Industria de Diseno Textil SA (Inditex), qui comprend les marques de grande consommation Zara, Bershka, Pull & Bear, Oysho et Massimo Dutti.
Les entreprises qui quittent la Russie calculent déjà le montant des actifs qu’elles risquent de perdre. Par exemple, Mercedes-Benz estime ses actifs russes à 2,2 milliards de dollars, a déclaré le constructeur allemand de voitures haut de gamme.
C’est pourquoi, d’un point de vue économique, il est désormais plus simple pour les entreprises occidentales de poursuivre leurs activités en Russie. En effet, même si elles voulaient vendre leur entreprise maintenant, c’est pratiquement impossible, étant donné l’état de crise de l’économie russe.
Le bureau du procureur général de Russie a déjà expliqué que la « gestion externe » est nécessaire pour protéger les travailleurs touchés par la fermeture d’entreprises. La chaîne américaine de restauration rapide McDonald’s emploie à elle seule 62 000 personnes en Russie. Bien que les entreprises continuent de verser des indemnités aux employés russes, on ne sait pas combien de temps cela va durer.
Goychmann : les rentiers occidentaux seront remplacés par des Turcs et des Chinois
La publication commerciale IntelliNews explique le fonctionnement du nouvel instrument économique. La branche russe d’une société existante serait liquidée dans le cadre d’une procédure de faillite, puis une nouvelle organisation serait créée à partir de ses actifs. Les actions des nouvelles sociétés seront mises aux enchères, la priorité étant donnée aux acteurs établis du secteur. Les nouveaux propriétaires seront tenus de conserver au moins deux tiers de la main-d’œuvre.
« Non seulement les usines, mais aussi les hôtels, les centres d’affaires, les centres commerciaux tomberont sous le coup de la nouvelle loi… Par exemple, rien qu’à Saint-Pétersbourg, des biens immobiliers d’une valeur de plus de 10 milliards de dollars pourraient tomber sous le coup de la loi sur la « gestion externe ». Et pour ces biens, les nouveaux propriétaires pourraient même représenter le salut. Pour l’immobilier commercial, la situation économique actuelle présente un risque important de réduction de la demande et des revenus. L’hôtellerie souffre de la fermeture presque totale des vols directs entre la Russie et les pays occidentaux et d’une forte baisse du flux de touristes. Et pas seulement les touristes étrangers, mais aussi les nationaux, qui ressentiront une baisse de leurs revenus dans un contexte de hausse des prix, y compris pour les vacances », a déclaré Mark Goykhman, analyste en chef chez TeleTrade, une société financière.
Selon M. Goykhman, l’immobilier commercial (notamment dans les grandes villes) est déjà confronté au départ de nombreux locataires. « Et ce ne sont pas seulement les entreprises étrangères qui ont cessé de faire des affaires en Russie, mais aussi les entreprises russes qui en dépendent – concessionnaires, importateurs, transporteurs », précise l’expert.
M. Goykhman est persuadé que certains espaces commerciaux seront progressivement remplacés par de nouvelles entreprises qui se lanceront dans ces créneaux. Et il peut s’agir d’entreprises non seulement de Russie, mais aussi de Turquie, de Chine et d’Inde.
source : SV Pressa
traduction Marianne Dunlop
via Histoire et Société
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