Celle qui a inventé de toutes pièces la notion de « faits alternatifs », Kellyanne Conway, âme damnée de Trump, a dû applaudir à cette déclaration du porte-parole de la Russie à Paris, Alexandre Makogonov, livrée avec un sourire sardonique : « Ce n’est pas une guerre, on ne cible pas les civils ; uniquement les éléments néonazis et les éléments de l’armée ukrainienne qui résistent. « Il y a manifestement des enfants que vous considérez comme des néonazis en Ukraine », a rétorqué le journaliste.
Quand ce sont des faits alternatifs qui inondent les réseaux sociaux, alimentés bien sûr par des entreprises de propagande proprement gigantesques, c’est la vérité qui se transforme en martyre.
L’invasion en Ukraine fournit plusieurs de ces faits alternatifs. Je n’en relèverai qu’un seul, celui de Poutine affirmant, sans sourciller, que l’invasion de l’Ukraine avait pour objectif la « dénazification » de ce pays. Vérification faite, on constate qu’aux élections de 2019, le candidat d’extrême droite Kochoulynsky a obtenu 1,62 % des voix au premier tour, contre 73,2 % pour le président Zelensky, élu au deuxième tour. Et aux élections législatives, le même parti Svoboda a obtenu 2,15 % des voix et fait élire… un seul député dans un Parlement qui en compte 450. En France, Marine Le Pen, candidate du Rassemblement national, a obtenu 33,90 % des voix contre Emmanuel Macron. Ce parti compte 7 députés en France et 23 au Parlement européen. En Allemagne, en Grèce et ailleurs en Europe, même phénomène. Et ne parlons pas de ces cryptofascistes agglutinés autour de Donald Trump ! Ce sont là des faits qui n’ont rien d’alternatif. Et si Poutine veut vraiment éliminer le fascisme de la carte, il en aura plein ses tanks !
Pauvre, le Québec ?
Se souvient-on du retour des États-Unis de ce cher Mad Dog Vachon, lutteur catégorie méchant ? Un p’tit Québécois résidant aux États-Unis pour des raisons d’impôt. Il nous est revenu par avion, grâce aux bons soins de Brian Mulroney. Aux journalistes, il déclarait à son arrivée : « Je reviens chez nous avec une facture de 150 000 $. J’espère que ça va se régler. » Mad Dog payait moins d’impôt aux États-Unis. Mais ce sont les impôts payés par ceux qui demeurent ici qui ont épongé cette facture…
Cette histoire est révélatrice d’un autre « fait alternatif », à savoir que le Québec serait dans la dèche comparé à d’autres provinces et États. Les travaux du professeur Pierre Fortin mettent la hache dans ces préjugés. Dans une intervention devant les Intellectuels pour la souveraineté (IPSO) en 2019, ce dernier rappelait qu’il y a 20 ans, le taux d’emploi au Québec de la tranche d’âge de 15 à 64 ans se situait à 12 points de pourcentage derrière celui des États-Unis. Le Québec devance aujourd’hui ce pays de 9 %. Depuis, le taux d’emploi est passé au Québec de 63 % à 78 %, en Ontario de 70 % à 76 %.
En prenant en compte la même population selon un calcul du revenu par habitant déterminé par le PIB et celui de la population que publie la Banque mondiale, le Québec se range au 23e rang mondial avec un revenu annuel de 69 000 $. Mais le professeur Fortin procède ensuite à une autre démonstration, fulgurante celle-là. Parmi les huit pays les plus riches, on en compte six qui sont d’importants producteurs de pétrole et deux qui sont des paradis fiscaux. Ainsi, si on commence à compter à partir du 9e rang, le Québec se classe au…13e rang parmi les États dont le revenu par habitant est le plus élevé. Si on soustrait des statistiques les trois provinces pétrolières, le Québec se classe au premier rang, devant la Colombie britannique, à 68,300 $ et l’Ontario, à 67 400 $.
L’État Provigo
Il m’est arrivé ces derniers temps de rechercher comment avait été reçu le rapport de la Commission Rochon sur la santé et les services sociaux au moment de son dépôt, en février 1988.
On y lit que « les employés ont souvent le sentiment de travailler avec des patients ou des clients comme s’ils travaillaient sur une chaîne de montage… » Pourtant, le monstre bureaucratique décrit il y a 35 ans est encore plus obèse aujourd’hui. Or, ici et là, on laisse couler que le salut doit passer par une privatisation des soins, comme le réclamait à grands cris Paul Gobeil, qui rêvait de troquer l’État Providence pour l’État Provigo. Comme si c’étaient les réceptionnistes, les cuisiniers, les préposées, les secrétaires, les infirmières et autres qui avaient engraissé ce monstre, et non pas ces mandarins et technocrates en possession de la science infuse !
Autre « fait alternatif » ! Commentant le rapport, Le Devoir avait écrit : « Une kyrielle d’associations jugent que le rapport Rochon fait fi des vrais problèmes… » C’est beaucoup, une kyrielle. Vérification faite, la kyrielle en question se résumait à deux associations et demie…
À n’en point douter, les « faits alternatifs » ont un bel avenir !
Source: Lire l'article complet de L'aut'journal