On estime que sur les 7 000 langues parlées dans le monde, près de 25 disparaissent chaque année. Sommes-nous condamnés à assister, impuissants, à cet appauvrissement linguistique, ou pouvons-nous agir pour la sauvegarde des langues ?
La répartition des langues dans le monde est très inéquitable.
6 500 langues sont parlées par seulement 5 % de la population, tandis que 20 langues sont utilisées par 90 % de la population mondiale. Ce déséquilibre a des conséquences plutôt sombres, car si la tendance se maintient, près de la moitié des dialectes auront disparu d’ici la fin du siècle.
Le problème est particulièrement marqué pour les langues orales, qui sont de moins en moins pratiquées par les jeunes générations. Or, lorsqu’une langue n’est plus parlée que par une poignée de locuteurs très âgés, elle finit par s’éteindre, comme une espèce animale, dont les derniers représentants sont trop âgés pour se reproduire.
Il est donc important de chercher à comprendre ce qui fait que des jeunes ne parlent pas la langue de leurs parents ou de leurs grands-parents.
La perte de l’usage de la langue chez les jeunes est principalement expliquée par un processus d’assimilation qui peut être actif ou passif.
Deux types d’assimilation
On peut définir l’assimilation active comme le processus politique par lequel une puissance coloniale (ou tout du moins dominatrice) impose sa langue au détriment d’une autre. Par exemple, au Canada, le règlement 17, qui imposait l’usage de l’anglais comme seule langue d’enseignement dans les établissements publics en Ontario de 1912 à 1944, a fortement contribué au déclin de l’usage du français chez les jeunes de la province, malgré la résistance des Franco-Ontariens.
Si les lois sont nécessaires dans ce contexte, elles ne sont sans doute pas suffisantes. L’un des points clés pour inciter les jeunes à conserver, puis à transmettre la langue de leurs parents, est de ne pas considérer les langues qu’en termes d’usage, car cet argument a peu, voire pas de poids pour celles évoluant dans un contexte minoritaire.
Aujourd’hui, l’assimilation active est rare dans les démocraties, mais l’assimilation passive continue de menacer les langues. Celle-ci s’effectue surtout par la culture et le travail.
En effet, en Irlande, l’usage quotidien de l’irlandais est encore très minoritaire (2 % de la population seulement le parlent régulièrement), bien que cet idiome soit la première langue officielle du pays. Ce phénomène est notamment causé par le fait que parler l’anglais est vu comme un facteur d’ascension sociale tandis que l’irlandais est associé aux pauvres et aux paysans. Les régions où l’irlandais est le plus parlé sont d’ailleurs des régions rurales.
Beaucoup de jeunes voient donc mal l’utilité de parler l’irlandais et peuvent le délaisser au profit de l’anglais. De même, en Ontario, on valorise peu le français au travail en dehors des communautés francophones ou des institutions fédérales, ce qui incite les jeunes à étudier en anglais à l’université, voire à parler en anglais dans les cours de récréation d’écoles pourtant francophones !
La loi, nécessaire mais insuffisante
Finalement, le cinéma, avec la prépondérance d’Hollywood, les séries, la musique, et Internet peuvent constituer une menace pour les langues dites minoritaires, car les contenus y sont plus variés et plus populaires dans les principales langues parlées dans le monde.
Comment faire alors pour que les jeunes continuent de communiquer dans la langue de leurs parents ?
Bien entendu, le politique a un rôle à jouer, car certaines lois protectrices, notamment la loi 101, permettent de préserver une langue chez les jeunes. L’enjeu de l’extension de cette loi dans les cégeps est donc très important, alors qu’un jeune poursuivant ses études collégiales en français a plus de chance de travailler en français par la suite. Or, comme on l’a vu, le travail peut être un facteur d’assimilation.
Si les lois sont nécessaires dans ce contexte, elles ne sont sans doute pas suffisantes.
L’un des points clés pour inciter les jeunes à conserver, puis à transmettre la langue de leurs parents, est de ne pas considérer les langues qu’en termes d’usage, car cet argument a peu, voire pas de poids pour celles évoluant dans un contexte minoritaire.
Pour qu’un locuteur maintienne sa capacité et sa volonté à s’exprimer dans une langue, celle-ci doit avoir un rôle significatif pour lui. Si ce rôle n’est pas lié à l’usage, il peut être culturel, ou même émotionnel. En insistant sur l’importance de chaque langue comme vecteur culturel, et non pas seulement sur son côté utilitaire, on peut redonner gout aux jeunes de parler la langue de leurs parents.
Parler c’est voter
Nos comportements individuels ont également un rôle. Ainsi, l’une de mes anciennes collègues, une Allemande vivant aux États-Unis, refusait de répondre à ses enfants s’ils ne s’adressaient pas à elle en allemand. Ce principe a fait en sorte que ses enfants parlaient encore allemand avec elle au moment d’entrer à l’Université.
À contrario, une Mexicaine vivant aux États-Unis qui continuait à répondre à ses filles, même lorsque celles-ci lui parlaient en anglais, a involontairement fait en sorte qu’elles pratiquaient de moins en moins leur espagnol. Comme elle leur répondait en espagnol, ses filles gardent une bonne compréhension de cette langue, mais la pratiquent elles-mêmes très peu et risquent donc de ne pas la transmettre.
Même si nos deux parents s’expriment dans la même langue que celle du pays où nous vivons, nous avons un rôle à jouer, en apprenant par exemple une nouvelle langue. En effet, être bilingue ne suffit pas, car la seconde langue connue est souvent l’anglais. Il faut donc chercher à apprendre d’autres langues et favoriser le plurilinguisme plutôt que le bilinguisme. Les locuteurs natifs en seront stimulés puisqu’ils verront que d’autres personnes apprennent leur langue.
Parler évangélique
On peut voir l’importance de la langue jusque dans les Écritures. Dans le Nouveau Testament, on retrouve quelques termes en araméen, la langue parlée par Jésus. Le choix des évangélistes de ne pas traduire certains mots en grec vient souligner leur importance, comme Maranatha (Dieu vient) ou Effata (ouvre-toi).
L’araméen nous donne également un éclairage pour comprendre le fondement scriptural de la primauté de Pierre, tel que l’explique Scott Hahn. En effet, tandis qu’en grec, pierre se dit petra, un nom féminin et Pierre Petros, pour avoir une forme masculine, en araméen, pierre est masculin et se dit Cephas, terme qu’on retrouve dans le livre des Actes pour désigner Pierre.
Le nouveau nom de Simon, comme tout nouveau nom donné par Dieu, signifie ce qu’il est : la pierre, sur laquelle Jésus a bâti son Église.
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Source : Lire l'article complet par Le Verbe
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