par Valentin Vasilescu.
À mon avis, nous assistons aujourd’hui à la deuxième étape de la tentative de la Russie de forcer Washington à s’asseoir à la table des négociations en vue d’un nouveau partage des sphères d’influence mondiales, en profitant pleinement de la faiblesse, de l’indécision et de l’échec des dirigeants de la Maison Blanche en Afghanistan. L’objectif est d’éloigner la menace de l’OTAN des frontières de la Russie et de favoriser le développement économique de la Russie. Le rassemblement de troupes russes aux frontières de l’Ukraine n’est donc rien d’autre qu’un écran de fumée créé par le président Vladimir Poutine pour dissimuler cette intention et donner des atouts à la présidence américaine aux yeux du public américain si Washington décide de négocier sur le fond.
La première tentative de Poutine
Le discours annuel de Vladimir Poutine sur l’état de la nation devant le Parlement, qui a habituellement lieu en décembre, a été reporté au 1er mars 2018. Ce discours a été consacré à la présentation des nouvelles armes « invincibles » de la Russie, auxquelles les États-Unis ne pourront pas faire face. En fait, la Russie a envoyé un avertissement aux États-Unis : « À partir de maintenant, vous allez nous écouter », a déclaré le président Poutine. Vladimir Poutine pensait que le simple fait de les répertorier, plutôt que de les déployer dans les points chauds des États-Unis, suffirait à amener Washington à la table des négociations sur le nouveau partage des sphères d’influence. Poutine avait tort, Trump n’était pas prêt à négocier, il a même retiré unilatéralement les États-Unis du traité INF signé avec la Russie.
Quelles sont ces nouvelles armes ?
1) Le planeur spatial Avangard avec une tête nucléaire de 2 MT. L’Avangard traverse l’atmosphère à Mach 20 (24 500 km/h), contrairement à tous les missiles balistiques, et est capable de modifier sa trajectoire, d’effectuer des sauts d’altitude et des changements de direction. Ces caractéristiques rendent le système Avangard incapable d’être intercepté par un quelconque bouclier antimissile balistique. Il est entré en service auprès de l’armée russe en décembre 2019. L’Avangard a au moins une décennie d’avance sur les types d’armes occidentales.
5) Missile de croisière à propulsion nucléaire Burevestnik avec tête nucléaire. Il peut voler pendant des heures, des jours ou des années à une vitesse subsonique sans atterrir grâce à son réacteur nucléaire. A mon avis, c’est un fantasme qui ne peut pas devenir une arme de sitôt.
Après une analyse objective, le Pentagone a conclu que les nouvelles armes de Poutine en 2018 ne peuvent que réduire l’écart technologique entre les armées russe et américaine. Le territoire américain n’est pas encore exposé aux frappes massives de la Russie, et il est beaucoup moins vulnérable que le territoire occidental et méridional de la Russie aux armes américaines.
La deuxième étape de Poutine
En avril 2021, 20 à 30 unités, du niveau d’un bataillon ou d’une brigade, ont été déployées dans des zones situées sur le territoire russe, à 80-250 km de la frontière ukrainienne, pour y effectuer des exercices. Les opérations ont pris fin et les unités russes sont restées sur place ou sont parties et revenues. Une raison suffisante pour que les médias et les gouvernements occidentaux entrent dans une spirale de spéculation.
Dans ce contexte déjà enflammé, à la mi-décembre 2021, la Russie a précisé ses conditions pour un nouvel accord de sécurité avec les États-Unis. Il s’agit notamment de garanties écrites que l’OTAN ne s’étendra plus jusqu’aux frontières de la Russie et du retrait de l’infrastructure militaire installée par l’OTAN en Europe orientale après 1997. Il s’agit notamment de l’installation de missiles antibalistiques Deveselu (qui serait capable de lancer des missiles de croisière Tomahawk à tête nucléaire) et de la base militaire américaine de Mihail Kogalniceanu. Il est intéressant de noter que la Russie a insisté pour que les discussions aient lieu uniquement avec son partenaire américain, le reste de l’OTAN n’étant pas pris en compte. La Russie a fait de même avec l’UE, qui est considérée comme un sbire des États-Unis, alors que pas un mot n’a été prononcé à propos de l’Ukraine, qui n’est qu’un sous-fifre des États-Unis.
Il y a donc deux scénarios parallèles. Le premier, extrêmement bruyant, porté par les médias, est dicté par l’intérêt de l’Ukraine à récupérer la Crimée et le Donbas. Seulement, les Ukrainiens ne veulent pas combattre l’armée russe eux-mêmes, ils veulent que ce soit l’OTAN qui le fasse. Le président Joe Biden a exclu cette possibilité dès le départ. Le second scénario, dont nous n’avons pas de détails, est celui de la Russie, qui consiste à imposer des discussions à huis clos avec les États-Unis sur le partage des sphères d’influence. Ce n’est un secret pour personne que le nouveau partage des sphères d’influence profite à l’économie russe en lui ouvrant de nouveaux marchés.
Qu’est-ce qui a pris à Poutine ? Est-ce que quelque chose a changé depuis l’évaluation du Pentagone de 2018 pour justifier qu’il force la main de Washington ? La Russie dispose-t-elle d’une nouvelle arme, plus létale que celles présentées par Poutine en 2018, à déployer dans des zones où elle peut atteindre le territoire américain ? La réponse semble être oui.
Les États-Unis ont commis une énorme erreur en 2019 en se retirant unilatéralement du traité INF sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (signé en décembre 1987) sans avoir conçu ou avoir en cours de développement des missiles à moyenne ou de portée intermédiaire. En revanche, la Russie a procédé à des essais approfondis et est passée à la production en série du missile Zirkon. Le complexe anti-navire volant Zirkon (missile 3M22) a une longueur de 12 m, une masse de 3 000 kg, une vitesse maximale de Mach 9 (11 025 km/h ou 3 km/s), une portée maximale de 1 000 km et une altitude de croisière de 28 000 m. D’après le lancement d’essai du 10 juin 2020, le temps de vol jusqu’à la cible est de 270 secondes, ce qui fait que le temps dont disposent les défenses AA pour le neutraliser est bien trop court pour réagir.
En raison de sa manœuvrabilité (changement répété de direction) à des vitesses hypersoniques, le Zirkon rend impossible le calcul préalable des paramètres de la trajectoire vers la cible.
Jusqu’à présent, rien de nouveau : un missile antinavire de la marine russe doté de la plus longue portée et de la plus grande vitesse de vol, mais pas assez pour menacer le territoire américain. La mission la plus appropriée semble être de le lancer depuis la terre sur des cibles fixes d’importance stratégique. Toutefois, la Russie n’a pas l’intention d’adapter le Zirkon pour cette mission et a également changé d’avis quant à son utilisation sur des bombardiers à longue portée.
Parce qu’elle est simple et fiable, la conception du Zirkon présente l’énorme potentiel de modernisation et d’adaptation que le Pentagone redoute le plus. On sait déjà que la raison pour laquelle le Zirkon est limité à un usage naval est que la Russie a conçu et développe un autre missile hypersonique d’une plus grande portée que le Zirkon. Des sources russes affirment que le moteur superstatoréacteur GLL-8 a été testé au banc d’essai statique des fusées de Serghiev Posad à la fin de 2021. Il mesure 8 m de long et pèse 2 200 kg. Il est très probable qu’il s’agisse du moteur superstatoréacteur du nouveau missile hypersonique russe. À titre de comparaison, le moteur statoréacteur GLL-AP-2 dont est issue le missile Zircon (3M22) avait une masse de 600 kg et mesurait 3 m de long. En utilisant le GLL-8 comme moteur de propulsion, le missile Zirkon 2 atteindrait une vitesse maximale de Mach 15, une altitude de 70 km et une portée maximale correspondant à celle des missiles balistiques à portée intermédiaire ( 3 000-5 500 km ), comme le RSD-10 Pioneer. Le missile soviétique à ogives multiples qui a contraint les Américains, en 1987, à signer le traité FNI et à retirer d’Europe leurs missiles nucléaires Pershing 2 et Tomakawk basés au sol. On dirait que l’histoire pourrait se répéter, n’est-ce pas ?
Au milieu des discussions russo-américaines, des choses bizarres se produisent
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergei Ryabkov, a averti les États-Unis de répondre par écrit et dans les meilleurs délais aux conditions proposées par la Russie. Il n’a pas non plus exclu d’envoyer des troupes russes à Cuba et au Venezuela. Cette déclaration indique que la Russie est passée à un niveau supérieur, en montrant non seulement la capacité de ses nouvelles armes, mais aussi sa volonté de les déployer dans les zones de conflit américaines. Sur la carte, la distance entre Cuba et Washington est de 1 800 km et celle entre le Venezuela et Washington est de 3 000 km. Comme les États-Unis ne se sont jamais attendus à une attaque en provenance d’Amérique centrale et du Sud, ils ne disposent d’aucun bouclier antimissile balistique dans cette direction.
Alaska Public Media a diffusé un reportage sur un événement survenu le 4 janvier au complexe de lancement de missiles balistiques de Fort Greely. Tout le personnel du 49e bataillon exploitant l’installation a reçu l’ordre de se mettre à l’abri dans les bunkers de missiles antibalistiques pendant 15 minutes. Comme il ne s’agissait pas d’un exercice de vérification planifié à l’avance, on a supposé qu’il s’agissait d’un lancement nord-coréen ou de quelque chose lié au champ de tir russe de Kura au Kamchatka, séparé de l’Alaska par le détroit de Béring. Il y a 1 200 km entre la région de Chekotka (l’Extrême-Orient russe) et Fort Greely. Dans les silos de Fort Greely, il y a environ 30 missiles antibalistiques GMD capables d’intercepter les missiles balistiques intercontinentaux russes qui survolent le pôle Nord. Sans les missiles de Fort Greely, la partie du territoire américain où sont déployées les trois unités de missiles balistiques intercontinentaux armées de têtes nucléaires est à la merci des ICBM russes. Cela signifie les silos de lancement dans les États du Montana, du Dakota du Nord et du Wyoming, à la frontière avec le Canada. Trente-quatre autres missiles antibalistiques de ce type sont en service de combat sur la base aérienne de Vandenberg, en Californie.
traduction Avic pour Réseau International
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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