Nœud gordien sur le Rubicon

Nœud gordien sur le Rubicon

Nœud gordien sur le Rubicon

• Dans cette séquence où ont surgi à nouveau les menaces des conflits les plus terribles, la crise ukrainienne se trouve dans un nouveau paroxysme dans une perception nouvelle de l’expression de la grande “catastrophe crisique” qui touche notre monde depuis l’effondrement de l’URSS. • C’est un symbole de haute signification que cette phase a lieu au moment où l’on commémore le trentième anniversaire de cet effondrement. • Nous sommes au cœur de la séquence crisique, alors que les Russes, qui ont déchaîné un déluge de communication pour restituer cette dimension à la crise ukrainienne, sont dans l’attente de réponses des USA sur des garanties de sécurité, notamment de la garantie que ni l’Ukraine, ni la Géorgie ne rejoindront l’OTAN. • Les espoirs à cet égard sont bien minces, et si nous avons une seule garantie assurée, c’est que l’actuelle phase de la crise ukrainienne se poursuivra en 2022 et qu’elle constituera un “point de fusion” terrible dans la grande bataille de survie que mène le Système aux abois , et qu'elle sera étroitement liée à la crise interne de notre-civilisation..

28 décembre 2021 – De façon assez curieuse, un peu comme on observe une crise selon une perception invertie, cul par-dessus tête, on verra avec avantage l’actuel point de fusion de la Grande Crise au travers d’un texte du 24 décembre du site trotskiste ‘WSWS.org’. L’actuel “point de fusion”, c’est-à-dire la sorte de flamme d’un paroxysme durable que la Grande Crise promène d’un point crisique à l’autre de sa propre structure, ce sont l’Ukraine et l’espèce de fièvre d’exaspération (de “panique”, diraient certains de manière trop péjorative) qui se sont emparées de la direction russe.

Poutine et la direction russe se trouvent devant une menace terrible, non d’une défaite mais du risque d’aller au terme d’un enchaînement effrayant, de néantissement réciproque ; non de la seule tâche où ils excellent de défendre “le territoire sacrée de la patrie” mais de le défendre éventuellement par les armes en s’assurant que l’adversaire ne commettra pas de faute objectivement catastrophique de perception ni ne perdra la tête en perdant le contrôle objectif de sa force ultime. Les Russes ne parviennent pas à restituer pour la perception des autres la tension terrifiante que fait peser cette menace, non seulement sur eux-mêmes mais sur l’ensemble des choses et des gens puisqu’en toute logique la pire des issues possibles et envisageables serait un affrontement nucléaire.

A partir du texte de ‘WSWS.org’ nous allons détailler une déformation fondamentale de la situation et de la conduite des Russes, assez originale certes mais nullement en rupture avec le conformisme de la déformation-inversion du bloc-BAO. Les trotskistes du bloc-BAO des retrouvent donc aux côtés des autres nuances du Système, – la bienpensance du Système, la fausse opposition au Système qui réclame des Russes une frappe de néantissement des USA et du bloc-BAO, etc.  Avec ce texte, nous remontons à mardi dernier après que Poutine ait prononcé ce que ‘WSWS.org’ désigne comme « un discours extraordinaire ». John Helmer lui, le sémillant et sarcastique hôte du site ‘Dance with the Bears décrit ainsi, dans des termes dramatiques, cette intervention :

« Les nations n’acceptent pas de concéder leur capitulation à leurs conquérants sans que des renégats, des Quisling, des Laval ou des Sadate n’y apposent leurs signatures

» C’est arrivé en Russie, le président Vladimir Poutine l’a dit pour la le 21 décembre 2021, devant la ‘Stavka’ [le “gouvernement de guerre russe”] et les officiers assemblés des forces armées russes.

» “Vous souvenez-vous comment cela s'est passé ?” leur a-t-il demandé. “Vous êtes tous des adultes. Cela s'est passé à une époque [les années 1991-2000] où les relations de la Russie avec les États-Unis et les principaux États membres de l’OTAN étaient sans nuage, voire complètement aliénées. Je l’ai déjà dit en public et je vous le rappelle à nouveau : des spécialistes américains étaient présents en permanence dans les installations d'armement nucléaire de la Fédération de Russie. Ils s’y rendaient tous les jours dans leurs bureaux, et ils avaient un drapeau américain sur leurs pupitres. Cela n'a-t-il pas été suffisant ? Que faut-il de plus ? Des conseillers américains travaillaient au sein du gouvernement russe, des officiers de carrière de la CIA donnaient leurs conseils. Que voulaient-ils de plus ?” 

» Poutine n'a pas eu besoin d'ajouter les noms des Russes qui avaient signé leur réponse à cette question, – quels qu’ils soient. Leurs noms sont Mikhaïl Gorbatchev ; Boris Eltsine ; Yegor Gaidar ; Anatoly Choubais ; Alexei Koudrine… »

Même si nous avons bien du mal à accepter le nom de Gorbatchev dans cette liste, et certes tendance à nuancer le terme de “renégats” dans une situation où la condition de vaincus implique une totale impuissance, la présentation de ‘WSWS.org’ nous propose un Poutine étrangement caractérisé à la fois par une furieuse détermination et une sorte de défaitisme confinant à la conception qu’Helmer se fait des “renégats”.

Poutine réclame des pays de l’OTAN, des USA essentiellement, des engagements écrits, alors que par ailleurs il croit, ou même il sait que la partie américaniste ne tient pas ses engagements, y compris écrits. La description du site trotskiste en tire la conclusion étrange que Poutine se trouve « dans une situation désespérée ».

 « Dans un discours extraordinaire prononcé mardi devant le corps des officiers russes, l’ensemble du ministère de la Défense ainsi que les cadets des écoles militaires, le président Vladimir Poutine a clairement indiqué que le gouvernement russe se prépare à une guerre potentielle avec l'OTAN. […]

» …Faisant référence à la situation en Ukraine, où un coup d'État soutenu par les États-Unis et l'UE en 2014 a renversé un gouvernement pro-russe, déclenchant une guerre civile et un renforcement massif de l’OTAN aux frontières de la Russie, Poutine a déclaré que l’OTAN doit comprendre que “Nous n’avons plus aucune possibilité de reculer”, tout se passe “juste sur le pas de notre porte”.

» Poutine a prévenu : “En cas de poursuite de la ligne plutôt de nos collègues occidentaux, nous répondrons par des mesures militaro-techniques adéquates, [nous] réagirons durement aux mesures inamicales.”

» Ainsi, tout en déclarant que tout contrat ou accord écrit avec les États-Unis et l’OTAN n'avait aucune valeur, il a insisté sur la nécessité pour l'OTAN de signer un tel accord, assorti de "garanties" à la Russie quant au respect de certaines “lignes rouges”. Soulignant à quel point l'oligarchie du Kremlin se voit dans une situation désespérée, Poutine a pleurniché en insistant sur ce point que les puissances de l'OTAN devaient donner “quelque chose, au moins quelque chose”. »

Alors, dans un raccourci historique saisissant, comme si les trente années depuis 1991 et la disparition de l’URSS se compressait en une simple extension du “Far West” russe des années1990 jusqu’en 2021-2022, et Poutine prenant l’aspect et les dimensions d’un super-Eltsine continué jusqu’à nous, ce texte étrange devient un produit tordu jusqu’à l’extrême du trotskisme du simulacre général du Système prenant en compte tous les mensonges du Système, – drôle de copinage…

Poutine devient alors un continuateur obéissant des oligarques américanisés des années 1990, un complice “objectif” de l’impérialisme américaniste qui l’assaille, alors que la véritable solution contre le risque d’un affrontement nucléaire entre les deux doigts de la même main repose évidemment dans la mobilisation progressiste et internationaliste des travailleurs. La libération de la parole que nous offre internet dans l’ère de la postvérité n’a donc pas fini de nous surprendre.

« Signe des conflits amers qui se déroulent en coulisses au sein de l'oligarchie sur la manière de répondre à la pression croissante de l'impérialisme, le quotidien économique russe Kommersant, l'équivalent russe du Financial Times britannique ou du Wall Street Journal américain, a consacré un article de tête au discours de Poutine, truffé de commentaires cyniques, dans lequel il compare les avertissements de Poutine concernant une provocation à l'arme chimique de la part des États-Unis en Ukraine au célèbre mensonge de Colin Powell sur les armes de destruction massive en Irak.

» L'article prévient que “ce n'est déjà plus la guerre froide, tout est devenu beaucoup plus chaud” et conclut par un commentaire sardonique selon lequel il serait “agréable d'avoir l'assurance qu'il y aura une nouvelle année”.

» Alors que Poutine, non sans fondement, met en garde contre la répétition de la catastrophe yougoslave à une échelle bien plus grande dans l’ancienne Union soviétique, la vérité est que l’oligarchie russe n'a pas la moindre réponse progressiste au danger toujours croissant de la guerre. Il est révélateur que le 30e anniversaire de la dissolution stalinienne de l'Union soviétique, le 26 décembre, ait été largement passé sous silence par les médias russes et n'ait pas été mentionné par Poutine.

» Le régime de Poutine et l’oligarchie au pouvoir dans son ensemble sont issus de la bureaucratie soviétique qui a trahi la Révolution d'Octobre pendant des décennies, et a liquidé l’URSS en 1991. Lorsque les États-Unis ont attaqué l’Irak en janvier 1991, inaugurant une période de trois décennies de guerres impérialistes de pillage, ils l'ont fait avec l'assentiment de la bureaucratie de Moscou.

» Concentrée sur la destruction de l'État soviétique et le pillage de ses ressources sociales menés main dans la main avec la bourgeoisie américaine, l'oligarchie nouvellement émergente en Russie a été prise dans la croyance illusoire en la possibilité d'une coopération pacifique avec l’impérialisme. Pourtant, tous les accords et toutes les assurances de l’OTAN, y compris le fait qu'elle ne se rapprocherait pas des frontières de la Russie, ont volé en éclats en quelques années. »

Le paradoxe est ainsi que les trotskistes d’extrême-gauche se retrouvent, au côté paradoxal de la fausse logique antiSystème de divers courants radicaux de droite et de gauche, se retrouve également au côté de la bienpensance-Système anti-poutinienne d’aujourd’hui aussi bien pour reprocher au Poutine d’hier et d’aujourd’hui d’être le complice ou le continuateur des déconstructeurs corrompus (oligarques avec les ‘Chicago’s boys’ & CIA) des années 1990. Les trotskistes voient en Poutine, qui ne résiste pas aux USA et ne sait comment retraiter plus encore, le continuateur des oligarques complices des USA dans ces années-là ; eux, les USA voient en Poutine le complice ou le continuateur des oligarques qu’ils avaient subvertis et qui n’ont pas tenu leur serment de soumission. Poutine est à toutes les sauces…

« Aujourd'hui, alors que les puissances impérialistes se préparent ouvertement à la guerre contre la Russie, la seule réponse du régime de Poutine est une combinaison de mendicité sans fin pour ce que Poutine lui-même reconnaît comme des assurances sans valeur, d'une part, et la promotion du nationalisme et d'un renforcement militaire, d'autre part.

» La faillite totale de la réponse de l’oligarchie à la menace d’un assaut impérialiste est déterminée par ses intérêts de classe. Le plus grand ennemi auquel elle se voit confrontée est la classe ouvrière russe et internationale, et non l’impérialisme. Sur toutes les questions critiques de politique de classe, surtout la contre-révolution sociale des dernières décennies et la réponse homicide à la pandémie du COVID-19, l’oligarchie russe a, en fait, reflété les politiques de la classe dirigeante américaine et européenne.

» La seule circonscription sociale et politique pour la lutte contre la guerre impérialiste est la classe ouvrière. Cette lutte doit être liée à une lutte déterminée pour l'élimination de la pandémie de COVID-19 et de la cause première de la guerre et de la mort de masse, le système capitaliste. Cette lutte, par-dessus tout, nécessite la construction d'une direction révolutionnaire dans la classe ouvrière qui est enracinée dans les expériences historiques critiques de la lutte du mouvement trotskyste contre le stalinisme. »

Cette critique d’un Poutine qui n’est pas assez jusqu’auboutiste se retrouve donc souvent dans les courants de la droite radicale, lorsqu’elle n’est pas occupée à débusquer le complot du jour des covidiens. Tout de même, certains hommes de droite disons plus modérés se jugent volontiers conduits à dans la défense de Poutine et de la Russie ; mais même ceux-là, qui convoquent souvent la “nostalgie impériale” pour défendre Poutine, ne rencontrent pas sa logique. (Poutine nie absolument vouloir refaire un empire mais s’occupant uniquement de la sécurité rapprochée de la Russie : “Que diraient Biden et le Pentagone si je déployais des ‘Iskander’ à têtes conventionnelles/nucléaires immédiatement au Sud d’El Paso ?”).

Une démarche typique à cet égard, celle de Dominique Jamet, dans ‘Valeurs Actuelles’ :

« Sommes-nous incapables, nous Français, de mesurer l’ampleur du choc subi par la Russie, ses dirigeants, son peuple, lorsqu’en quelques semaines dramatiques, et pourtant sans effusion de sang, l’URSS, cet artefact monstrueux, qui semblait devoir défier le temps, a disparu, que la moitié Est de l’Europe, conquise, colonisée, vassalisée, terrorisée, a recouvré la liberté, que les Républiques asiatiques, vaille que vaille, associées à l’ensemble soviétique s’en sont détachées, que la Russie nouvelle a perdu d’un seul coup un quart de son territoire, soit environ six fois la France, et la moitié de sa population, soit cent quarante millions d’individus, son glacis, ses satellites, son prestige et sa prétention de faire jeu égal avec la superpuissance à laquelle elle disputait la direction du monde ? Avons-nous oublié que la perte d’une seule province, à la suite d’un désastre, a orienté notre politique pendant près de cinquante ans, et conduit nos dirigeants de l’époque à déclencher avec le soutien tacite de l’opinion la Première Guerre mondiale ?

L’actuel président de la Russie n’a jamais dissimulé sa nostalgie du temps où ses devanciers régnaient sur un territoire quarante fois plus vaste que notre pays. Vladimir Poutine cherche et, quand il le peut, saisit toutes les occasions de ressusciter la gloire de l’empire. Est-il judicieux, est-il efficace de le traiter en réprouvé et d’accumuler les provocations à son endroit ? Gorbatchev n’avait consenti à un sacrifice sans équivalent dans l’histoire, puisqu’il n’était pas consécutif à une défaite militaire, que contre l’assurance formelle que l’Occident mettrait fin aux hostilités en tout genre contre son pays, qu’il ne chercherait pas à faire basculer dans son camp les États soustraits à l’influence russe, et plus précisément que l’OTAN, cette machine de guerre froide dirigée contre l’URSS, perdait avec l’effondrement de celle-ci sa raison d’être et le droit de se conduire en adversaire d’un ennemi défait sans s’être battu… »

Ukraine, “Touchée-Coulée” ?

Pour poursuivre, nous allons citer une partie importante du dernier commentaire du Saker-US, du 27 décembre, qui nous donne divers éléments de la situation en cours, que nous jugerions comme assez proche, le plus proche de ce qui est disponible selon nous, d’une “vérité-de-situation opérationnelle” de la crise. Il s’agit d’une situation en flux, que nous commenterons plus loin sur quelques points, d’une façon générale d’un flux allant dans le sens d’une aggravation par enlisement d’une improbable dynamique de pseudo-“négociations” ayant pour seule et modeste ambition de ralentir sinon stopper le processus actuel (disons sur une séquence des trois prochains mois) à son degré de détérioration actuelle, sans espoir de redressement ni de réparation.

« Les États-Unis n’avaient fourni vendredi aucune réponse [à ses propositions de négociation à la Russie]. En soi, ce n'est pas très surprenant, les niveaux de luttes intestines au sein des élites dirigeantes américaines rendant impossible un accord sur une réponse dans un délai aussi court, surtout pendant les diverses célébrations de fin d'année en Occident.

» Quant aux Russes, ils s’en accommodent, puisque leur propre délai est fixé à la mi-janvier.  Donc, à l'heure actuelle, rien de significatif n'a changé. Ce que nous observons, c’est un grand nombre de déclarations de la part de n’importe qui et de tout le monde, la plupart de ces déclarations n’ayant que peu ou pas de sens et se contredisant généralement toutes entre elles.  Nous ne devrions pas trop nous laisser entraîner par le “il a dit ceci, elle a dit cela”, il s’agit littéralement de paroles en l’air.

» En termes d'actions, là encore, nous assistons à des développements contradictoires : certaines sources rapportent que l’OTAN se prépare à une guerre majeure tandis que d'autres rapportent que les Américains et les Britanniques préparent une évacuation d'urgence.

» Il semble qu'une rencontre entre Poutine et Biden soit en préparation, selon les mêmes sources, après la Nativité orthodoxe, donc aux alentours ou peu après le 8 janvier.  Si c’est le cas, je m'en réjouis.

» Stoltenberg [SecGen OTAN] a déclaré qu’il y aurait une réunion entre l'OTAN et la Russie le 12 janvier. Stoltenberg est un clown impuissant dont les sorties verbales ne signifient rien. Il a totalement rejeté toute négociation avec la Russie il y a à peine une semaine, et maintenant il propose de négocier…

» J’ai passé les 3 derniers jours à lire des opinions sur le ‘Runet’, à écouter des talk-shows et à regarder et entendre divers officiels et personnalités exprimer leur opinion et voici ce que j’en conclus : il y a des preuves absolument impératives que les Russes ne bluffent PAS, qu'ils pensent vraiment chaque mot qu’ils disent.  On entend de plus en plus de voix dire qu’il vaudrait mieux pour la Russie que l'Occident rejette tout simplement toutes les demandes russes d'emblée. Nombreux sont ceux qui espèrent clairement que l'Occident essaiera de le faire, car cela permettrait de délier complètement les mains de la Russie (ou, si vous préférez, les griffes de l’ours).

» La plupart des responsables militaires semblent croire qu’une guerre à grande échelle contre l’OTAN n’aura pas lieu, mais qu’une sorte de conflit avec l’Ukraine est désormais inévitable.  J’ai tendance à être d’accord avec eux.

» De nombreux observateurs semblent également en avoir vraiment assez. Marre des saignées constantes en LDNR, marre de la présence constante de “conseillers” militaires occidentaux en Ukraine, marre des déclarations grandiloquentes et pompeuses des responsables de l'UE/OTAN que les Russes ne prennent même pas au sérieux.  Tout cela est devenu un énorme abcès dans l’esprit de nombreux Russes et un nombre croissant d'entre eux veulent maintenant que cet abcès soit vidé et guéri. Personne n'est prêt à accepter “plus de la même chose”.

» Mais si je suis certain que les Russes ne bluffent pas, je ne suis pas du tout sûr que les décideurs occidentaux en aient conscience.  À en juger par les inepties débitées par les responsables occidentaux et les médias anglo-sionistes, je dirais que non, la plupart du temps, ils n'en sont pas conscients (il y a quelques exceptions notables comme [cet article de ‘The American Conservative’])… »

Ce commentaire correspond assez bien à ce que nous tendons à penser, disons en bonne part de façon intuitive. Principalement, cela signifie trois choses pour nous :

• Les tentatives de “négociations” pour au moins geler très-temporairement la crise dans sa gravité actuelle est en train de se dissoudre ou de s’encalminer dans un torrent de désordre communicationnel où les réflexes pavloviens (hostilité antirusse, bellicisme compulsif et affectivisme pathologique) reprennent inévitablement le dessus.

• Effectivement, les Russes sont au bout de leurs capacités de temporiser et de tenter un accommodement, non sous le coup du désespoir avant une capitulation (l’étrange thèse de ‘WSWS.org’, vraiment), mais sous la pression d’une exaspération de plus en plus irrésistible et tout simplement aussi par absence de terrain de repli. Par conséquent, oui, cet “ultimatum” que Poutine a tenté de présenter sous les couleurs d’une proposition de négociations, est vraiment un ultimatum.

• Les dirigeants du bloc-BAO ne réalise pas cela (exaspération russe en passe de devenir détermination), et cette même inconscience habite même les jugements d’opposants à ces dirigeants qui s’avèrent donc objectivement tout autant influencés par le Système (cas assez exotique des trotskistes de ‘WSWS.org’). A notre sens, l’“influenceur” et distingué psychologue Ivan-Pavlov dominant d’une façon totalitaire leur “libre pensée”, ils ne réaliseront pas cette détermination russe, c’est-à-dire qu’ils ne le réaliseront jamais d’une façon suffisamment substantielle pour élaborer une politique qui en tienne compte

C’est alors que ce que nous écrivions plus haut doit être repris . C’est rythmé en termes dramatiques et ne constitue en rien une prévision avec la prétention d’être à la fois précise et inéluctable, mais une ligne d’analyse poussée à son extrême logique et que des événements nés de son développement, – donc non encore prévisibles puisque développés d’une action encore à faire, – peuvent dévier même (et probablement) décisivement, selon ce qu’ils seront. Nous reprenons ce passage comme une citation (italique et retrait) bien qu’il s’agisse du même texte (original : citer dans la forme graphique même, dans un texte, une autre partie de ce texte) ; cela, pour marquer justement qu’il ne s’agit pas d’une prévision à incorporer dans le développement pour le modifier complètement mais d’une analyse qui doit être présente dans les esprits comme arrière-plan du pire des possibles :

« Poutine et la direction russe se trouvent devant une menace terrible, non d’une défaite mais du risque d’aller au terme d’un enchaînement effrayant, de néantissement réciproque ; non de la seule tâche où ils excellent de défendre “le territoire sacrée de la patrie” mais de le défendre éventuellement par les armes en s’assurant que l’adversaire ne commettra pas de faute objectivement catastrophique de perception ni ne perdra la tête en perdant le contrôle de sa force ultime. Les Russes ne parviennent pas à restituer pour la perception des autres la tension terrifiante que fait peser cette menace, non seulement sur eux-mêmes mais sur l’ensemble des choses et des gens puisqu’en toute logique la pire des issues possibles et envisageables serait un affrontement nucléaire. »

Ainsi l’enjeu terrifiant est-il posé, – une fois de plus dira-t-on car nous l’avons évoqué à plus d’une occasion d’un paroxysme crisique, – mais chaque fois de pire en pire, d’une tension extrême à une tension encore plus extrême, face à un bloc-BAO/USA totalement envouté par son incroyable simulacre, ce labyrinthe de narrative et de déterminisme narrativiste. Pour autant, et quoi qu’il survienne, il est très probable que cette cécité, ce simulacre représenté de la perception persisteront sans l’ombre d’une virgule, ce qui n’implique pas automatiquement le pire catastrophique. On peut également envisager que, s’il y avait conflits, même s’ils (les gens du bloc-BAO, directement ou indirectement) sont battus en rase-campagne jusqu’à une sorte d’Afghanistan-en-Ukraine, ils n’y entendront toujours rien et la fiesta de la désintégration du bloc-BAO, USA en premier, se poursuivra tambour battant.  

Il y a pourtant dans cet séquence, – qui n’est évidemment pas finie, bien entendu, – un fait nouveau, essentiellement dû à l’intense activité de communication, des Russes. Grâce à cette activité, à la conjonction symbolique du trentième anniversaire de la chute de l’URSS, avec l’apport de circonstance considérable d’un Poutine s’imposant de plus en plus comme pôle d’attraction global de la voie des traditions contre la déconstruction progressiste de l’Occident devenu fou, l’ensemble de la crise ukrainienne a été approfondie à ses véritables racines, et dégagée de sa seule narrative du coup d’État de Kiev (février 2014) dans le simulacre du Maidan hors-CIA et continué dans la Crimée que continue à entretenir le bloc.

Désormais la crise est remise dans sa perspective de l’immédiat post-Guerre Froide, et des promesses trahies des USA, alimentées par de nouvelles déclassification de documents secrets US, qui éclairent de la triste et obscure lumière du déshonneur les incroyables, stupéfiants et dégradants mensonges historiques de l’OTAN et de divers organismes qu’on croyait honorables in illo tempore de la Haute Société d’espionnage londonienne. (« Par exemple, l’institut stratégique britannique RUSI [Chatham House] considère que l’idée qu’un engagement ait été pris de ne pas élargir le bloc militaire controversé est l’un des principaux “mythes et idées fausses dans le débat sur la Russie”, tandis que le propre site web de l’OTAN affirme de même qu'il s’agit d'une idée entièrement fabriquée » : l’Histoire dira-t-elle que Kim Philby était plus honorable que Chatham House ?) Ainsi quitte-t-on la seule Ukraine pour mettre en cause toutes les conceptions et perceptions des relations bloc-Russie depuis la fin de la Guerre Froide.

… Ce qui nous conduit à reprendre le conseil de PhG (« Mon idée est de souffler à Poutine-Xi : adoptez la doctrine de “l’irresponsabilité responsable” »). PhG ne l’envisageait que pour des opérations militaires et de provocations dans ce domaine ; il faut l’étendre à toutes sortes d’action, économique, culturelles, sanctionneuses, etc., – mais dans tous les cas, toujours paraître aussi fous qu’eux que les adversaires pour complètement les déstabiliser car alors ils verraient leur simulacre dans un miroir, et cela c’est insupportable !

« En bref, entrez dans leur jeu du simulacre inconscient (parce que tout le monde y croit, dans le bloc) et introduisez-y vos propres simulacres absolument conscients. Et clamez que c’est partout un simulacre conscient ou inconscient allez savoir, à moins que ce ne soit nulle part un simulacre. En un mot, jouez à être plus fous qu’eux, et faites-le savoir encore plus précisément, par exemple par Lavrov en ‘off’ comme Nixon avait fait répandre par Kissinger le bruit de la “Théorie du Fou” (“Madman Theory”)

» Tout cela est risqué, direz-vous ? J’en conviens, et je conviens même que Xi et Poutine ne sont en rien le genre d’hommes à être tentés par cette sorte d’exercice. Mais je crois que Nixon ne l’était pas davantage, contrairement à ce que les historiens-crétins, ou historiens-Système, disent de lui. Simplement, il y a des avantages potentiels à défaire audacieusement sinon follement une situation inextricable qui conduisent le sage à se conduire en fou, ou, comme dit l’adage du Professeur-PhG renforcé pour la situation, – “aujourd’hui, la sagesse c’est l’audace de la pensée”, par conséquent, l’audace des projets et actes qui en découlent, semblassent-ils (l’ai-je bien employé ?) les plus fous du monde.

» Tout cela fait et bien fait, installez-vous, Poutine-Xi, dans de confortables fauteuils et savourez, fruits de votre “irresponsabilité responsable”, les “bruits de fond” des salons parisiens et du bureau ovale où ‘Ol’White Joe’ était en train de jouer à “la bataille navale”, – ‘Touché-Coulé… »

Ukraine, “Touchée-Coulée” !

Source: Lire l'article complet de Dedefensa.org

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« La crisologie de notre temps » • Nous estimons que la situation de la politique générale et des relations internationales, autant que celle des psychologies et des esprits, est devenue entièrement crisique. • La “crise” est aujourd’hui substance et essence même du monde, et c’est elle qui doit constituer l’objet de notre attention constante, de notre analyse et de notre intuition. • Dans l’esprit de la chose, elle doit figurer avec le nom du site, comme devise pour donner tout son sens à ce nom.

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