Par Tyler Durden – Le mardi 19 octobre 2021 – Source Zero Hedge
La semaine dernière, Bank of America a déclenché une tempête de réactions dans les camps des partisans et des opposants au changement climatique, lorsqu’elle a publié l’un de ses énormes tomes de « Recherche thématique », cette fois-ci couvrant le monde du « Transwarming », et qui sert d’introduction clé à la réalité du plan Zero Carbone d’aujourd’hui, ne serait-ce que pour être l’une des premières banques à quantifier le coût de la plus grande remise en question économique, écologique et sociale de l’histoire moderne.
En résumé, pas moins de 150 000 milliards de dollars de nouveaux investissements en capital seraient nécessaires pour atteindre un monde « zéro carbone » sur 30 ans – ce qui équivaut à 5 000 milliards de dollars d’investissements annuels – c’est-à-dire deux fois le PIB mondial actuel.
Il va sans dire que le secteur privé est loin de disposer du capital nécessaire pour réaliser cet investissement. C’est pourquoi Bank of America estime généreusement que tout ou partie de la facture devra être payée par les banques centrales sous la forme de dizaines de milliards de dollars d’assouplissement quantitatif. Et comme l’assouplissement quantitatif est essentiellement une monétisation de la dette, et que 150 000 milliards de dollars de nouvelles dettes auraient des conséquences dévastatrices sur l’économie, la BofA a eu l’amabilité de partager ses calculs sur l’ampleur de l’inflation que provoquerait ce projet de milliardaires : le scénario de « monétisation totale », dans lequel les banques centrales injecteraient 5 000 milliards de dollars de liquidités chaque année via un assouplissement quantitatif durant 30 ans, entraînerait une inflation supplémentaire de 3 % pendant une bonne décennie. Il s’agirait d’une inflation s’ajoutant à celle déjà en cours.
Et nous en arrivons au cœur du sujet, car comme BofA l’admet, la croisade contre le changement climatique, la doctrine GES, le monde « Zero Carbone », quel que soit le nom qu’on veuille lui donner, devient un feu vert au plus grand épisode d’assouplissement quantitatif de l’histoire, un épisode enveloppé dans le vernis « noble » de la lutte pour la cause la plus importante de l’histoire de la civilisation, mais en réalité, c’est juste le plus grand plan de transfert de richesse de l’histoire :
Nous venons de voir un pic d’inflation supplémentaire de <1% par an sur un horizon de trois décennies. Dans des scénarios plus agressifs où les banques centrales choisissent d’absorber la moitié ou la totalité de la facture de la décarbonation par le biais de l’assouplissement quantitatif, les risques d’un choc inflationniste augmentent. Néanmoins, nous pensons que notre troisième cas est le plus probable, car il serait politiquement difficile de justifier une impulsion monétaire beaucoup plus expansive. Il est vrai que si les banquiers centraux ont exprimé le désir de contribuer à rendre l’économie plus verte, leurs achats d’obligations d’entreprises ont historiquement été limités aux politiques de crise par le biais de l’assouplissement quantitatif et restent bien en deçà des achats de dette souveraine. En tant que tel, tout achat d’obligations vertes d’entreprises serait probablement limité à la fois par la taille des futurs programmes d’achat et par leur proportion par rapport à l’ensemble du marché des obligations d’entreprises, avec des allocations légèrement plus élevées dans le cadre de politiques d’achat plus progressives qui mettent l’accent sur les préoccupations environnementales.
À ce stade, la sonnette d’alarme devrait être tirée, même par les progressistes les plus écervelés, car malgré tous les avantages vantés, les coûts commencent à apparaître et – au moins pour les deux ou trois prochaines générations – ils seront absolument écrasants pour la classe moyenne, tout en permettant aux 1 % les plus riches de piller et de saccager pratiquement tous les actifs du monde. Pensez-y comme au plus grand vol mandaté de l’histoire du monde, et vous comprendrez soudain pourquoi tous les milliardaires en jet privé soutiennent si bruyamment un monde « zéro carbone ».
Mais il y a pire.
Maintenant que le génie est sorti de la bouteille et que les questions difficiles telles que « qui va payer pour tout cela » sont posées, la Bank of America a publié un rapport de suivi dans lequel elle indique très clairement que « contrairement à certains arguments, nous pensons que les efforts d’atténuation du changement climatique sont susceptibles de nuire à la croissance au cours des dix prochaines années environ« .
Dans sa note intitulée « A hot take on climate change », l’économiste en chef de la Bank of America, Ethan Harris, passe d’abord en revue toutes les étapes familières expliquant pourquoi il est si impératif – et noble – de faire quelque chose pour lutter contre les gaz à effet de serre (semblable à ce que nous avons lu pendant une grande partie du début du 20e siècle, où, depuis 1912, article après article, on se lamentait sur la catastrophe que représentait le réchauffement de la planète, du moins jusqu’aux années 1970, lorsque l’absence de réchauffement réel de la planète a incité les « scientifiques » à suggérer que le refroidissement de la planète et une « nouvelle ère glaciaire » étaient inévitables). Au moins, les scientifiques pouvaient s’accorder sur le fait qu’il s’agissait de « quelque chose de global » (il s’est avéré que cela signifiait en réalité « une impression monétaire globale »), et comme Harris l’a exposé, c’est ce sur quoi le « consensus scientifique » semble s’accorder maintenant :
- Le comportement humain a un impact significatif sur le changement climatique et les événements climatiques.
- Même dans le cadre d’hypothèses optimistes – comme l’atteinte d’un taux d’émissions nettes nul d’ici 2050 – les impacts vont probablement augmenter au cours de ce siècle.
- Il est beaucoup plus efficace d’agir maintenant que d’attendre trop tard.
- L’incertitude quant à l’impact exact n’est pas une excuse pour l’inaction : un large éventail de résultats signifie qu’il est plus urgent d’agir, et non moins.
Rien de ce qui précède n’est nouveau, puisque les médias grand public bombardent leur public depuis dix ans de platitudes émotionnelles et d’appels qualitatifs expliquant pourquoi il faut agir.
Cependant, comme nous l’avons abordé la semaine dernière, toute discussion sur l’économie du changement climatique devrait commencer et se terminer par le fait qu’il s’agit de l’exemple ultime d’« externalités » – des activités privées (généralement pour des sociétés dont les descendants et les actionnaires se situent désormais dans le top 0,01% de la richesse mondiale) qui créent des coûts publics. En effet, comme l’écrit Harris, le changement climatique est l’externalité ultime, car une activité menée à un endroit a un impact sur le monde entier. Le fait que le changement climatique soit mondial par nature et qu’une si grande partie des bénéfices des actions reviennent à tout le monde a des implications importantes.
Premièrement, contrairement à d’autres « courses » technologiques, l’atténuation du changement climatique est davantage un « jeu » de coopération qu’une compétition. Lorsque des pays comme les États-Unis et la Chine « rivalisent » pour développer de nouvelles technologies, deux points de conflit tendent souvent à apparaître : une lutte pour la part de marché et une lutte pour la supériorité géopolitique. En revanche, les pays qui développent des technologies efficaces d’atténuation du changement climatique sont fortement incités à en partager les bénéfices. S’ils gardent la technologie pour eux, l’impact sur leur propre climat sera beaucoup plus faible.
C’est formidable… si seulement ce n’était pas une chimère. Pourquoi ? Parce que le récent refus de Xi Jinping, le plus grand pollueur de la planète, de se joindre à ses homologues de la « croisade contre le changement climatique » au sommet COP26 Net Zero qui se tiendra en Italie à la fin du mois, est un spectacle géant destiné aux masses. Parce que si le plus grand pollueur du monde fait clairement savoir qu’il n’a aucun intérêt à réduire réellement ses propres émissions de CO2, alors tous ceux qui prêchent des conneries sur un « jeu coopératif » peuvent aller se faire voir.
Cependant, là où Harris a quelque peu raison, c’est en soulignant le « consensus déprimant de la littérature sur le changement climatique » selon lequel, même si tout le monde coopère, la terre continuera à se réchauffer car il existe des décalages dans le lien entre les GES [Gaz à Effet de Serre] et le réchauffement de la planète. En effet, dans le meilleur des cas – chaque pays atteignant des objectifs agressifs au milieu du siècle – le changement de politique atténuera le problème, mais ne l’arrêtera pas. Ainsi, selon BofA, « les événements climatiques constitueront un risque croissant, d’intensité variable, dans presque tous les scénarios plausibles ».
En d’autres termes, le théâtre de l’absurde du « zéro carbone » est un théâtre où les motivations des acteurs divergent clairement – où seule une convergence dès le départ pourrait faire fonctionner le système – et où même le meilleur scénario de coopération totale n’a aucune chance d’arrêter réellement le problème, mais seulement de l’atténuer. Oh, et pendant ce temps, le monde devrait supporter des coûts de quelque 150 000 milliards de dollars.
Ce qui nous amène à l’évaluation principale de BofA : tout cela sera-t-il bon ou mauvais pour la croissance ? Ici, nous trouvons une vérité inattendue…
Selon BofA, les rapports de presse et de nombreuses études sur le changement climatique se concentrent sur le mauvais côté de l’économie – l’impact sur la demande globale plutôt que sur la capacité de production. Par exemple, le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) affirme que l’objectif de zéro émission nette réduirait l’emploi dans le secteur de l’énergie traditionnelle de 5 millions d’ici 2030, mais créerait 14 millions d’emplois dans le secteur de l’énergie propre. Ils affirment également que « l’augmentation des emplois et des investissements stimulerait la production économique, ce qui se traduirait par une augmentation nette du PIB mondial jusqu’en 2030. » La croissance du PIB mondial serait en moyenne de 0,4 plus élevée sur la période 2020 à 2030. L’inconvénient serait que certains pays seraient gagnants et d’autres perdants, et que l’inflation – une fois que l’on prend en compte les milliers de milliards d’euros d’assouplissement quantitatif des banques centrales nécessaires pour financer toute cette croisade – pourrait être de 1 à 3 % plus élevée.
Ici, Bank of America n’est pas d’accord et écrit qu’au moment où des efforts sérieux d’atténuation du changement climatique seront entrepris, l’économie mondiale sera probablement proche du plein emploi. Ce sera probablement le cas aux États-Unis. Par conséquent, pour doter l’industrie en personnel, il faut retirer des travailleurs du reste de l’économie. Dans le même temps, la mise en place d’une infrastructure d’énergie verte nécessitera plus qu’un doublement des investissements dans le secteur, qui passeront d’environ 2 % du PIB actuellement à une moyenne de 4,5 % sur la période 2020-30. D’où viendront ces 2,5 % du PIB ? (alerte spoiler : impression monétaire, et tout le monde le sait).
Ou alors : Harris admet qu’à court terme, les banques centrales pourraient en effet s’accommoder de la poussée de la demande, permettant ainsi à leurs économies de surchauffer. D’où l’estimation de l’AIE d’une hausse de l’inflation de 1 à 3 %. Cependant, l’économiste de BofA n’est pas d’accord avec cette estimation non plus. Si la Fed autorise un dépassement permanent du potentiel économique, l’inflation ne fera pas qu’augmenter, elle aura tendance à surchauffer. Comme dans les années 1970, il y aura une boucle de rétroaction entre l’inflation des prix, l’inflation des salaires et les attentes en matière de prix.
Traduction : la croisade « zéro carbone » contre le changement climatique est en réalité…. la condition nécessaire et suffisante pour déclencher l’hyperinflation dont les nations massivement endettées du monde ont besoin pour dégonfler leur dette.
Mais attendez, ce n’est pas tout, car comme le concède Harris ensuite, en réalité, alors que l’inflation va monter en flèche, l’atténuation du climat est « également susceptible de ralentir l’offre de l’économie, en particulier dans la phase d’accélération ». Il explique plus loin :
Les grands changements structurels dans l’économie ont tendance à créer de grands défis de transition. Les travailleurs doivent passer d’un secteur à l’autre, certaines industries vont connaître un essor tandis que d’autres vont se contracter, et à mesure que les réglementations et les taxes augmentent, le capital qui avait été investi dans la production et l’utilisation d’énergies sales deviendra rapidement obsolète.
Tout cela signifie une croissance tendancielle plus faible pendant la transition d’une économie sale à une économie verte. Et, comme indiqué plus haut, il n’y a même aucune garantie que la transition vers une économie verte sera un jour achevée une fois qu’elle aura commencé ; au mieux, nous pourrions être coincés pour toujours dans la phase d’« atténuation ».
Le gain très asymétrique – concède BofA – se produit sur le très long terme, les avantages s’accumulant ici et maintenant pour ceux qui sont susceptibles de récolter les bénéfices de la générosité de l’impression des banques centrales, qui seront naturellement ceux qui possèdent les actifs résistant à l’inflation tels que les actions, les matières premières et, bien sûr, les cryptos ; tandis que la douleur sera supportée par tous les autres, c’est-à-dire, malheureusement, par les classes moyennes et inférieures, et aura de plus des effets « sur le long terme », alors que les avantages d’un climat plus propre apportera (peut-être) des bénéfices à leurs petits-enfants et arrière-petits-enfants. Leur génération, cependant, sera sacrifiée sur l’autel des 0,1 %. Car comme toute vraie religion, le « changement climatique » exige aussi un sacrifice pour qu’une poignée d’élus puisse vivre mieux.
La partie visible de l’iceberg
Voilà pour la théorie, mais que se passe-t-il sur le terrain ? Comme l’explique Harris, les progrès en matière de politique sont terriblement lents, car certaines politiques continuent d’aggraver le problème au lieu de le résoudre. Prenons deux exemples. Premièrement, selon l’AIE, les pays dépensent plus de 400 milliards de dollars par an pour subventionner principalement la consommation de pétrole, mais aussi de gaz et d’électricité. Dans de nombreux cas, il existe un conflit entre l’aide aux pauvres et l’aide à l’environnement. Deuxièmement, malgré ce que BofA appelle « l’élévation du niveau de la mer et l’augmentation du nombre d’ouragans », certains pays encouragent l’installation de maisons dans des zones à risque en subventionnant les assurances et les secours en cas de catastrophe. C’est presque comme si les pays eux-mêmes, et certainement les milliardaires des plages de Malibu, ne croyaient pas à l’augmentation du niveau des mers. Là encore, il y a conflit entre deux objectifs : aider les personnes vulnérables et réduire le coût des événements climatiques.
Entre-temps, le changement climatique et les efforts d’atténuation climatique semblent déjà avoir un impact sur l’économie mondiale. Bien que les scientifiques prennent bien soin d’éviter d’attribuer une relation de cause à effet entre le changement climatique et les événements climatiques individuels – peut-être pour la même raison que la « science » est apparue comme une farce à motivation politique lorsqu’il s’est agi de tirer des conclusions hâtives et idéologiques pendant la mise en scène Covid – ils soulignent néanmoins certaines tendances inquiétantes. Prenons deux exemples mis en évidence par BofA : « Premièrement, les données publiées par l’Agence de protection de l’environnement montrent que le nombre d’incendies de forêt aux États-Unis n’a montré aucune tendance entre 1983 et 2020. Toutefois, si l’on se concentre uniquement sur les grands incendies, le nombre d’hectares brûlés semble avoir augmenté de manière significative à partir de 2000 environ. Deuxièmement, le Geophysical Fluid Dynamics Laboratory rassemble des études sur les ouragans et les cyclones tropicaux. Son rapport est parsemé des qualificatifs habituels (confiance moyenne à élevée), mais les preuves indiquent une augmentation de l’intensité des tempêtes ces dernières années. » Chère Bank of America, c’est ce qu’on appelle une recherche d’objectif torturée : pressez les données suffisamment fort et n’importe quel modèle que vous voulez finira par en émerger.
Plus important encore, BofA admet qu’il existe désormais des preuves que le changement climatique et l’atténuation de ses effets jouent « un certain rôle » dans la récente hausse des prix de l’énergie (à cela nous répondons que non seulement l’atténuation du changement climatique joue « un certain rôle » mais que la principale raison de la crise énergétique mondiale est la poussée idiote vers une utopie GES, ce dont nous avions déjà averti en juin dans « Will ESG Trigger Energy Hyperinflation« ).
Mais le pire, c’est qu’étant donné les perspectives réglementaires et la stigmatisation qui prévaut actuellement en ce qui concerne les combustibles fossiles, les investissements dans les capacités d’énergie sale seront faibles et dépendront de coûts élevés. Pendant ce temps, l’énergie verte n’augmente pas assez rapidement pour combler le vide. De façon ironique, les changements dans les régimes de vent et de pluie semblent avoir affecté l’offre d’énergie éolienne et hydraulique. Ces mêmes énergies éolienne et hydraulique qui étaient censées sortir le monde de sa dépendance aux combustibles fossiles. Parce que les scientifiques étaient tellement aveugles pour faire avancer leur agenda politique qu’ils n’ont pas vu ce qui était juste devant leur nez, de la même manière que Reuters a découvert la semaine dernière que les villes européennes et américaines qui prévoient d’éliminer progressivement les moteurs à combustion au cours des 15 prochaines années doivent d’abord combler un manque de prises de recharge pour des millions de résidents qui garent leur voiture dans la rue. Oups – peut-être qu’avec le recul, les décideurs et les scientifiques auraient dû penser d’abord à l’évidence, au lieu de se précipiter sur l’agenda qui leur rapporte le plus d’argent…
Tyler Durden
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone
Source: Lire l'article complet de Le Saker Francophone