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par Chems Eddine Chitour.
« Quand il s’agit de la dignité humaine, nous ne pouvons pas faire de compromis » ~ Angela Merkel
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Dans un entretien avec des jeunes immigrés, le président Macron, bafouant toutes les règles et la courtoisie diplomatiques, s’est permis de porter atteinte à l’histoire de l’Algérie, lui déniant d’être une nation et reprenant une antienne qui veut que notre visibilité est née avec le nom Algérie quelques années après l’invasion des soudards de l’armée française. C’est dire si les Algériennes et les Algériens sont choqués par cette attaque inacceptable et qui remet aux calendes grecques toute normalisation dans l’égale dignité des peuples algérien et français.
Il y a 23 siècles, l’Algérie était une puissance visible
Pour situer objectivement l’histoire de l’Algérie, un bref détour pour affirmer que l’Algérie est considérée comme le second berceau de l’humanité. Il y a 2,4 millions d’années, du côté de Sétif, les premiers hommes vivaient. Plus tard, et pratiquement dans toutes les régions du pays, on trouve les traces de l’homme notamment celui de Tifernine, il y a 1,7 million d’années, pour arriver bien plus tard aux hommes préhistoriques de Mechta Affalou près de Béjaïa
Il y a 9 000 ans, le Sahara a connu une civilisation florissante attestée par les fresques du Tassili. Il y a trois mille ans, les premiers peuples commençaient à s’organiser en tribus. La côte algérienne a vu l’installation de comptoirs de commerce avec les Phéniciens au VIIIe siècle avant J.-C.
Karim Younès décrit les premiers temps du récit algérien : « Évoquant la lutte pour la suprématie en Méditerranée, Carthage la disputant à Rome, Hérodote évoque un autre intervenant : les Numides. L’État algérien moderne a existé du vivant de Massinissa pendant 54 ans, de 203 à 138 avant notre ère et au-delà, sous le règne de Micipsa, son fils et successeur pendant 30 ans sous la supervision, il est vrai envahissante, de Rome. Cet État jouissait d’une culture forgée dans un métissage qui avait résisté à l’épreuve d’un millénaire d’échanges culturels, linguistiques, vestimentaires, alimentaires et autres avec les Phéniciens, Grecs et Romains… »
Tout au long de son histoire, l’Algérie eut affaire à des envahisseurs successifs qu’elle a successivement boutés ou absorbés. Ce fut le cas des Phéniciens qui s’établirent sur les côtes et qui furent des marchands entretenant le commerce avec les autochtones et ceci pendant près de sept siècles après que Didon eut foulé le sol de l’Afrique à Carthage. Pendant la période romaine de près de six siècles de 148 avant J.-C., l’Algérie contribua au rayonnement universel d’abord par ses hommes de théâtre (Apulée, Lactance, Fronton… Térence) et ses hommes d’Église avec plus de 700 évêchés entre ceux des Donatistes et ceux de l’Église officielle représentée par l’un des pères de l’Église que fut Saint Augustin. C’est dire si cette œuvre ne fut pas positive pour la chrétienté.
Après l’arrivée des Arabes et l’islamisation de l’Algérie, des royaumes aux fortunes diverses virent le jour. L’avènement des Turcs, dont la présence se fit sur plus de trois siècles, il faut attester que les Turcs – exception faite de Kheïr Eddine qui fut, à des degrés divers, le fondateur de l’État algérien moderne en affermissant ses frontières à l’est et à l’ouest – ne furent pas des bâtisseurs, exception faite de la construction de mosquées. Ils se contentaient de collecter l’impôt avec des modus vivendi avec les tribus rebelles, notamment en Kabylie.
Retenons qu’à cette période de l’Histoire, la France n’existait pas encore. Faisons un saut de quelques siècles pour nous situer à la veille de l’agression de la France contre un pays, D’zaïr, Djazaïr, Alguer en espagnol, puis vint la francisation qui donne le nom de l’Algérie qui n’est qu’une traduction des appellations précédentes. Tocqueville témoigne après un séjour en Algérie : « Nous faisons la guerre de façon beaucoup plus barbare que les Arabes eux-mêmes […] C’est à présent de leur côté que se situe la civilisation »[1].
L’Algérie avait tous les attributs d’une nation de 1520 à 1580, environ, Alger est alignée sur la politique extérieure du sultan. La marine algérienne vient en appui de la flotte dans le cadre d’un conflit de titans qui opposa l’Empire ottoman à l’Empire des Habsbourg d’Espagne. C’est l’époque des Khayr al-Din Barberousse, des Salah Raïs, des Euldj Ali, qui, formés à l’école algérienne, sont devenus tous trois amiraux de la flotte ottomane, Qapudan pacha, en turc ; c’est-à-dire le 3ème personnage de l’Empire après le sultan et le grand vizir.
De 1830 à 1848, l’Algérie, sous le joug de l’armée, fut soumise à la période du talon de fer et le début d’un prosélytisme qui devait faire retrouver au Berbère son substrat chrétien. Le sinistre Bugeaud s’illustra avec d’autres sanguinaires, à l’image de Saint-Arnaud dont la devise était « on ravage, on brûle, on pille, on détruit les maisons et les arbres ». Victor Hugo eut à son égard cette sentence sans appel : « Le général Saint-Arnaud avait les états de service d’un chacal ». De la IIIe République, l’Algérie a connu les lois scélérates, instaurant l’état civil, pour déstructurer la société algérienne. Viendra ensuite le code de l’indigénat qui fit de l’Algérien un prisonnier en sursis dans son pays avec les 40 infractions qui ont perduré jusqu’à la veille de la Révolution.
Qu’est-ce qu’être français ?
Au vu du maelström qui s’est emparé de la classe politique française dont le sacerdoce est à géométrie variable s’agissant de l’émigration et de l’Islam, il est bon de fixer quelques idées sur ce qu’était la France et comment elle a émergé à l’histoire… Car ce qui arrive à l’approche de nouvelles élections présidentielles rappelle étrangement le même scénario du temps de Nicolas Sarkozy. Aucun homme politique n’y échappe, il faut puiser dans le vivier de l’immigration, des musulmans. On se souvient qu’une fois élu, Sarkozy fait organiser un débat par le ministre de l’Identité nationale prenant le risque de réveiller les vieux démons de l’extrême droite et d’ouvrir la boîte de Pandore qu’il sera difficile de refermer, comme c’est le cas présentement avec Zemmour capable de fracturer la nation française
Qui est en fait français et depuis quand ? En son temps, le général de Gaulle aurait répondu : « Pour moi, l’histoire de France commence avec Clovis, choisi comme roi de France par la tribu des Francs, qui donnèrent leur nom à la France ». Il y a donc à l’évidence débat sur les origines, ce qui nous appelle à parler de Français de souche.
D’autres sources avancent le traité de 845 entre les héritiers de Karl der Gross – françisé en Charlemagne – à Aachen. Quelles sont les valeurs qui font qu’on peut se sentir français ? Quelle différence y a-t-il entre un Bulgare, un Hongrois, un Espagnol, un Italien au regard de l’intégration avec un Algérien ou un Marocain ? En fait, il n’est pas important qu’ils soient imprégnés de culture française ou qu’ils aient vécu un compagnonnage commun à leur corps défendant avec la France coloniale. Leur avantage décisif est l’identité religieuse qui, à bien des égards, berce d’une façon invisible la société française. Tout ce beau monde est compatible avec le corps social français pétri par deux mille ans de cultures chrétiennes « ils sont comme nous ». Par contre, on peut être français depuis un siècle, le nom patronymique et surtout l’appartenance à une sphère cultuelle sont des « marqueurs indélébiles ».
On se souvient aussi de ces beur(e)s qui, las d’attendre un hypothétique ascenseur social, en viennent à revendiquer leur paléo-racine en reprenant les noms de Mohamed au lieu de Jean-Pierre pour suivre les injonctions d’un Zemmour issu d’une tribu berbère judaïsée. Sur quelle vision de l’histoire doit alors reposer l’identité nationale ? Celle d’une France gauloise cristallisée à Vercingétorix, ou celle d’une France métissée, faite de diversité culturelle et ethnique, ouverte sur l’avenir ? Doit-on, comme le réduit le débat actuel, tenir à distance le musulman au point qu’à la 4ème génération on parle encore de l’origine des beurs ?
Nous donnons la parole au philosophe Jean Baubérot qui a répondu magistralement en son temps et avec humour au président Sarkozy. Écoutons le philosophe ! : « Tu as écrit une tribune dans Le Monde (9 décembre) qui a retenu toute mon attention. En effet, tu t’adresses à tes “compatriotes musulmans”, et c’est mon cas, moi Mouloud Baubérot, frère siamois de celui qui tient ce blog. Avant, par politesse, il faut que je me présente très brièvement. Ma famille provient de Constantine, ville française depuis 1834 et chef-lieu d’un département français depuis 1848. Nous sommes donc d’anciens Français ».
« D’autres nous ont rejoints peu de temps après et sont devenus Français, en 1860, tels les Niçois et les Savoyards. Et au siècle suivant, d’autres sont encore venus. Certains de l’Europe centrale, bien différente de notre civilisation méditerranéenne. Nous avons donc accueilli parmi eux un certain Paul Sarkozy de Nagy-Bosca, qui fuyait l’avancée de l’Armée rouge en 1944. Nous sommes tellement “accueillants” que nous avons fait de son fils, ton frère siamois, immigré de la seconde génération, un président de notre belle République. Comment être plus accueillants ? »[3]
« Mais faudrait quand même pas tout confondre : entre lui et moi vois-tu, c’est moi qui accueille, et lui qui est accueilli. Ne l’oublie pas. (…) Quand les Sarkozy sont devenus français, le ciel de Paris s’ornait d’une Grande Mosquée, avec un beau minaret. Je suis d’accord, moi Mouloud qui t’accueille, je dois te faire “l’offre de partager (mon) héritage, (mon) histoire (ma) civilisation), (mon) art de vivre”. Tiens, je t’invite volontiers à venir manger un couscous avec moi. Contrairement à moi, puisque tu n’es en France que depuis une seule génération, tu as encore beaucoup de choses à apprendre quant aux “valeurs de la République (qui) sont partie intégrante de notre identité nationale”. (…) D’abord, la laïcité, ce n’est nullement “la séparation du temporel et du spirituel” comme tu l’écris. Le “spirituel“ et le “temporel”, ce sont des notions théologiques, et cela connotait des pouvoirs (…) »[3]
Hasard de l’actualité qui avait une façon singulière de sérier les Français et les autres et avait une phobie des mosquées au point qu’en octobre 2021, il pense qu’il y a trop de mosquées et que l’on ne construit pas d’églises. Le philosophe Jean Bauberot poursuit :
« Tu fais preuve d’une curieuse obsession des minarets et tu sembles assez ignorant à ce sujet. Pour être concret, je vais te raconter l’histoire de France en la reliant à ma propre histoire d’ancien Français, du temps où toi, tu ne l’étais pas encore. Pendant la guerre 1914-1918, mon arrière-grand-père est mort au front, car nous avons été environ 100 000, oui cent mille, musulmans à mourir au combat pour la France. Nous étions déjà tellement “arrivés” en France, que nous y sommes morts ! Ma famille y était venue, à cette occasion, et elle y est restée »[3].
« À Paris, précisément. Comme nous commencions à être assez nombreux, la République laïque a eu une très bonne idée : construire une mosquée, avec un beau minaret bien sûr. Elle avait décidé, en 1905, de “garantir le libre exercice du culte”. “Garantir”, c’est plus que respecter. C’est prendre les dispositions nécessaires pour assurer son bon fonctionnement. Quand on a posé la première pierre de la mosquée, le maréchal Lyautey a fait un très beau discours. Il a déclaré : “Quand s’érigera le minaret que vous allez construire, il montera vers le beau ciel de l’île-de-France qu’une prière de plus dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront point jalouses” »[3].
Les traités signés par l’Algérie et la France
Pour conforter le fait que la Régence était une puissance régionale à une époque le monde se réduisait à la Méditerranée il est bon de rappeler pour éviter l’amnésie que les relations entre l’Algérie et la France remontaient très loin dans l’histoire. Le premier traité de paix a été signé entre la Régence d’Alger et le royaume de France, représenté par Guillaume Marcel, le 24 septembre 1689, soit cent ans avant la Révolution de 1789. Durant la période du XVIIe au XIXe siècle, de nombreux traités ont été signés par son pays, la France avec la Régence d’Alger d’abord, et ensuite avec l’État, érigé par l’émir Abdelkader, que les autorités françaises avaient reconnu à deux reprises en 1834 et en 1837.
Au cours du XVIIe siècle, écrit l’historien Charles-André Julien dans son Histoire de l’Afrique du Nord, « les Régences d’Alger et de Tunis se dégagèrent de l’autorité de la “Sublime Porte”… L’Algérie avait son autonomie et n’était liée à la Turquie que par un lien moral : le Khalifat de l’Islam.
Pour l’histoire, l’Algérie a signé avec la France depuis la première attaque contre ses côtes en 1299 plus d’une cinquantaine de traités. Le plus connu est le Traité de paix de cent ans entre Louis XIV et la Régence d’Alger. Durant la période du 21 mars 1606 au 11 mars 1679 ont été signés six traités de paix et de commerce et onze traités de concessions. Ces traités reconnaissaient les privilèges accordés aux compagnies marchandes exploitant la côte du Bastion de France, situé près de La Calle.
Au XVIIIe siècle ont été signés entre le royaume de France et la Régence d’Alger huit traités de paix et de commerce et dix-neuf traités de concessions : la plupart de ces traités étaient des renouvellements des dispositions des traités antérieurs. Durant la période de 1800 à 1830, trois traités des concessions dont le principal était celui du 24 juillet 1824, relatif à la pêche du corail à l’est du pays, et huit traités de paix et de commerces ont été conclus entre les deux États respectivement le 30 septembre 1800, le 28 décembre 1801, le 26 décembre 1805, le 7 novembre 1808, le 12 juillet 1814, le 30 mars 1815, le 16 avril 1815 et le 29 mars 1818. Les copies et les originaux de ces actes se trouvent dans les archives suivantes : archives du Ministère des Affaires étrangères, archives du Ministère des Colonies, archives de la Chambre de Commerce de Marseille.
Ainsi, L’État algérien était reconnu comme tel par les puissances. Par la suite, l’Algérie acquiert une autonomie par rapport à l’Empire. C’est l’apogée de la course algérienne au point de développer des traités notamment après qu’elle eut reconnu l’indépendance des États-Unis d’Amérique ». De nombreux traités conclus, en plus de la France, par l’Angleterre, l’Espagne, les États-Unis d’Amérique… la Hollande en 1726 et la Suède en 1728, avec la Régence d’Alger. Les copies et les originaux de ces actes relatifs sont facilement accessibles dans les bibliothèques de France ou dans les services des archives civiles ou militaires publiques.
L’Algérie plonge son histoire 1000 ans avant l’émergence de la France
Au risque de donner l’impression de se justifier il est bon de répter un certain nombre de faits objectifs qui, je le pense tordont le cou à tout ceux qui sont tentés de déformer les faits. Ces historiens français scientifiquement malhonnêtes ne sont pas mus par la recherche de la vérité mais par le signal de fond qui est celui de dicter la norme même en histoire. Ce qui suit détruira ce mensonge. Cette région était connue sous l’appellation d’Algérie depuis des siècles. L’Algérie tire son nom de sa capitale, Alger. Au XIe siècle, Alger portait le nom de Djazaïr signifiant les îles. Le géographe andalou al Bakri évoquait Djazaïr Béni Mezghena que Bologhine ibn Ziri avait reconstruite en l’an 960. Selon le site touristique et culturel algérien Nessahra, « l’émir Abdelkader mentionne dans ses écrits Watan el Djazaïr (la patrie ou la nation des îles) ».
L’Algérie n’était que la transcription française du terme en langue arabe Djazaïr. En 1575, le géographe et cartographe allemand George Braun et le graveur sur cuivre allemand Frans Hogenber réalisèrent une planche de la ville d’Alger avec un paragraphe descriptif sous le titre Algeria qu’ils publièrent dans le livre Civitates Orbis Terrarum. En 1680, l’écrivain français Fontenelle, dans un opuscule intitulé De l’Algérie et des Algériens, écrit : « Si le premier terme est resté relativement rare avant le début de la conquête du pays, le second était d’usage courant durant le XVIIe siècle »(efn_note]Laid Seraghni. reseauinternational.net/les-agitations-de-macron-avant-avril-2022[/efn_note].
« Dans ce cadre, nous rappelons que le nom France venait des Francs, un peuple germanique qui conquit la Gaulle au VIe siècle et fonda la Francie, et ce ne qu’en 1214 que le roi Philippe Auguste lui donna le nom France. Il avait signé un texte “roi de France”. En conséquence, la France est une création du Franc Clovis, le premier roi de France. En 1824, suite à l’attaque de la Régence d’Alger par la marine anglaise en 1823, William Shaler, le consul général des États-Unis à Alger, évoquait bien une population algérienne et non algéroise. Dans son ouvrage, publié à Boston en 1826, le consul-général américain William Shaler donnait des informations précises sur la Régence d’Alger. Ce livre a été traduit en 1830. Dans la préface, le traducteur utilisait bien les termes : “marine algérienne, p 5, les armements algériens, p 6” ». Quant à l’auteur, dans sa préface, il avait bien utilisé le terme algérien et non turc ou ottoman : « l’importance politique des pirates algériens… »[4] p 11.
L’œuvre positive de l’Algérie avant l’invasion sanguinaire
Il nous a paru intéressant pou répondre à un mantra : « l’œuvre positive de la France en Algérie, de répondre par les faits indéniables de ce que furent les relations de l’Algérie et de la France ; Nous parlerons de la période avant l’invasion de 1830 en citant tout les traités commerciaux mais aussi comment l’Algérie (la Régence avec Khierredinne s’était portée au secours de François 1er. Nous citerons ensuite ce qu’a fait l’Algérie en donnant son sang et sa force de travail pour le rayonnement de la France.
En effet, trois guerres s’allumèrent opposant François 1er à Charles Quint. En 1526, François 1er est vaincu à Pavie. Il est fait prisonnier de Charles Quint puis enfermé à Madrid. Par le traité d’Arras, la France perd la Bourgogne, l’Artois et les Flandres. François Ier n’hésite pas à déclarer ses engagements. Il n’hésita pas à solliciter alors l’alliance du calife de Constantinople, Soliman le Magnifique. C’est dans ce cadre que Kheïreddine Barberousse vint au secours de François 1er vaincu par Charles Quint. La flotte de Barberousse sera hébergée à Nice en 1543. François 1er et les forces ottomanes de Barberousse se retrouvent à Marseille en août 1543. François 1er propose aux Ottomans de passer l’hiver à Toulon : la cathédrale de Toulon est transformée en mosquée, l’appel à la prière a lieu cinq fois par jour et les pièces ottomanes ont cours. Les Ottomans quittent leur base de Toulon en mai 1544, après que François Ier eut payé 800 000 écus à Barberousse ».
Par la suite, la Régence d’Alger fut très respectée par tous les pays, qui payaient pour la plupart des tributs pour naviguer en Méditerranée. « Pendant la Révolution française de 1789, pour l’histoire, la reconnaissance de la première République française a été faite par le Dey d’Alger le 20 mars 1793. C’est aussi la Régence d’Alger qui vint au secours de la République française naissante en acceptant de lui vendre du blé alors qu’elle était sous embargo européen. Il faut savoir que : “Le siècle du blé 1725-1815 ainsi dénommé a fait que de 1710 à 1830, soit en 120 ans, l’Algérie exporta plus de 2 193 000 charges de blé vers Marseille de 120 kg. Environ 1 434 000 charges, soit 65% du total, ont été exportées entre 1769 et 1795, soit en seulement 27 ans. Les grosses fournitures de blé faites par l’Algérie à la France, durant les premières années de la Révolution française, qu’elle a sauvée de la famine et du blocus anglais. Nous savons que le “coup de l’éventail” a été le prétexte invoqué par la France pour rompre avec l’Algérie et préparer l’expédition d’Alger de 1830 ».
L’œuvre positive de l’Algérie envers la France après l’invasion de 1830
Tout au long de ces 132 ans, l’œuvre coloniale ne fut pas positive car le fameux bréviaire déclinait de toutes les façons possibles les traces de cette « œuvre » à laquelle la présence française a contribué. Nous l’avons écrit, à titre individuel, des instituteurs, des médecins, des Européens admirables tentèrent d’alléger les souffrances des Algériens, mais ils furent en petit nombre. Les rares Algériens instruits furent, selon la belle expression de Jean El Mouhoub Amrouche, des voleurs de feu. Moins d’un millier d’Algériens formés en 132 ans, cela explique les errements de l’Algérie après 1962[5].
Après la conquête brutale, la politique du talon de fer du sabre, et avant celle du goupillon, ce fut la curée, imaginez La Casbah dont le trésor, évalué à plus de 200 millions de francs or, fut pillé. De l’avis des historiens, l’Algérie avait une agriculture florissante. On se souvient que l’Algérie fut pour Rome son grenier à blé que le colonisateur français n’eut aucune peine à exploiter… et à développer l’exportation de toutes les richesses agricoles, mais aussi minières. Comme l’écrit Pascal Blanchard : « Longtemps occultée, la participation des populations coloniales aux efforts de guerre de la France est aujourd’hui un véritable enjeu de mémoire au cœur des luttes politiques et juridiques des anciens combattants et des sans-papiers. Ces derniers ont contribué à sortir de l’oubli des milliers d’hommes dont les sacrifices ne sont toujours pas reconnus ».
L’Algérie toujours défendu la France contre ses nombreux ennemis
Pour l’histoire, des Algériens furent recrutés, à leur corps défendant, dans les troupes françaises depuis 1837 (les fameux turcos) on parle justement de ces zouaouas (zouaves) recrutés par tous les moyens – la famine, la peur. Ils furent ensuite envoyés lors de la guerre du Levant en 1865… Ensuite, ce fut la guerre de Crimée, la guerre de 1870. Parmi les plus braves, on cite les Algériens qui arrivèrent à enlever une colonne à Wissembourg, moins d’une centaine de rescapés sur les 800 du fait du Chassepot allemand qui fit des ravages.
Durant la Première Guerre mondiale, après le cauchemar de Verdun et du Chemin des dames, des milliers d’Algériens y laissèrent leur vie. Du fait de la conscription obligatoire, pratiquement chaque famille eut un soldat engagé, qui mourut ou qui revint gazé ou traumatisé à vie. Moins de dix ans plus tard, ces Algériens se retrouvèrent à guerroyer dans le Rif pour combattre d’autres musulmans, notamment les troupes de l’émir Abdelkrim.
Lors de la Seconde Guerre mondiale, les troupes coloniales furent, d’emblée, massivement placées en première ligne, elles payèrent un très lourd tribut lors des combats de mai et juin 1940. Plus tard, les troupes alliées furent bloquées à Monte Cassino. On fit appel, une fois de plus, aux tirailleurs algériens et marocains. Elles défoncèrent, au prix de pertes très lourdes, les lignes allemandes le 22 mai 1944. 260 000 soldats, majoritairement nord-africains, débarquent en Provence et libèrent Toulon et Marseille le 15 août 1944. Il y eut 140 000 soldats algériens. Il y eut 14 000 morts et 42 000 blessés. Ce sont, en partie, ces soldats qui revinrent ensuite au pays, pour voir leurs familles massacrées un jour de mai 1945… Ensuite, les Algériens, à leur corps défendant, partirent en Extrême-Orient, en Indochine, combattre pour l’Empire, et là encore, ils payèrent un lourd tribut.
L’Algérie participe à la reconstruction de la France avec les tirailleurs bétons
Les ressources agricoles et minières ont été exploitées sans retenue. Même la Tour Eiffel doit dit-on son fer à l’Algérie. De ce fait, on peut dire que la richesse de la France a beaucoup profité des matières premières de l’Algérie avec une main d’œuvre taillable et corvéable. De la Première Guerre mondiale, les Algériens remplacèrent dans les usines une partie des Français partis au front. À tel point que les colons en Algérie ont protesté disant qu’ils avaient besoin de la main d’œuvre indigène ; C’ est ainsi que s’est constitué progressivement un prolétariat aux portes de Paris mais aussi dans toutes les mines de Lorraine et de Saint-Étienne.
Après 1945, les « trente glorieuses » réussirent aussi grâce à l’apport des Algériens, « les tirailleurs bétons », qui, après avoir versé leur sang pour la France, aidèrent massivement pour sa reconstruction jusqu’au jour où le président Giscard d’Estaing décide de les « expulser » maintenant que le patronat n’en avait pas besoin… C’était selon le bon mot de Abdelamakek Sayah « des variables d’ajustement ». Ces mêmes chibanis épaves qui terminent leur vie dans les mouroirs des foyers Sonacotra.
Les Algériens qui ont participé à la Résistance française et aussi sauvé les Français de confession juive
Un fait ignoré à dessein est l’apport des Algériens à la résistance française à une époque où des Français abandonnèrent leurs concitoyens de confession juive. Que dire en effet de ces émigrés qui eurent le courage de risquer leur vie pour sauver des Français juifs abandonnés par tous du fait de la répression allemande. Le tract suivant résume mieux que cent discours l’empathie de ces « Justes ». Nous lisons : « Hier, à l’aube, les juifs de Paris ont été arrêtés. Les vieux, les femmes et les enfants. En exil comme nous, travailleurs comme nous. Ils sont nos frères. Leurs enfants sont comme nos propres enfants – “ammarach nagh”. Celui qui rencontre un de ces enfants doit lui donner un abri et la protection des enfants aussi longtemps que le malheur – ou le chagrin – durera. Oh ! l’homme de mon pays, votre cœur est généreux ». Ce tract rédigé en tamazight circulait parmi les émigrés algériens kabyles lors de la rafle des juifs le 16 juillet 1942 à Paris. Ainsi, les immigrés algériens avaient décidé d’aider les juifs à s’enfuir et les ont cachés. « Ammarache nagh », « Ce sont comme nos enfants » traduisant par là le sacrifice à faire pour sauver des enfants juifs…[7]
« De même dans un documentaire intitulé La Mosquée de Paris, une résistance oubliée, en 1991, Derri Berkani rapporte que durant la Seconde Guerre mondiale, la Mosquée de Paris sert de lieu de résistance. Les Algériens du FTP (Francs-Tireurs partisans) avaient pour mission de secourir et de protéger les parachutistes britanniques et de leur trouver un abri. Les FTP ont par la suite porté assistance à des familles juives, en les hébergeant dans la mosquée, en attente que des papiers leur soient fournis pour se rendre en zone libre ou franchir la Méditerranée pour rejoindre le Maghreb »[7].
José Aboulker, résistant contre le régime de Vichy et l’occupation allemande, a rendu en 1986 un hommage à l’attitude des Algériens : « Les Arabes n’ont pas pris parti dans la guerre. Avec les juifs, ils ont été parfaits. Non seulement ils ont refusé la propagande et les actes anti-juifs, ils n’ont pas cédé à la tentation des bénéfices. Alors que les pieds-noirs se disputaient les biens juifs, pas un Arabe n’en achetait. La consigne en fut donnée dans les mosquées : “Les juifs sont dans le malheur, ils sont nos frères” ».
Le rayonnement culturel et scientifique de la France : la part de l’Algérie
Enfin on ne peut passer sous silence l’apport culturel de l’Algérie. L’Algérie eut aussi sa part, souvent la plus terrible, dans le rayonnement de la France, à la fois pour défendre ses frontières, développer son économie et participer par l’enseignement du français au rayonnement culturel de la France qui peine à résister – même avec la francophonie – à l’anglais – la vulgate planétaire – selon le bon mot de Pierre Bourdieu. Ce sont des légions d’Algériens brillants qui ont porté haut et fort la langue française. Les Algériens ont fait fructifier le « butin de guerre » à telle enseigne que l’Algérie, paradoxalement, est le deuxième pays francophone, en refusant d’y participer car pour elle c’est la francafrique sous une autre forme. Elle a donc non seulement pratiqué la langue, l’a enrichie en lui adjoignant des termes spécifiquement algériens, mais, cerise sur le gâteau, offert à l’Académie française une écrivaine de talent en la personne de Assia Djebar. Par ailleurs, la France ne peut ignorer qu’une grande partie des pièces archéologiques qui sont la mémoire de l’Algérie sont quelque part dans tous les musées de France. Elle continue à enrichir la France par le tourisme et curieusement il est défendu aux Algériens d’aller contempler les pièces archéologiques butins de 132 ans de mise en coupe réglée.
Enfin le body shopping (l’émigration choisie) revient cher au pays. Pratiquement chaque année ce sont des centaines de diplômés de haut niveau qui sont aspirés sans contre partie. Par contre la chance aux sans papiers algériens est totalement déconnectée du problème global. Il serait normal que le dossier concernant cette hémorragie de la sève algérienne soit ouvert pour y trouver une juste solution[7].
Conclusion
Après la colère viendra forcément le temps de l’apaisement. Une fois cette mise au point faite, doit-on une fois de plus encaisser, passer à autre chose ou se mettre au travail autrement que par des rodomontades ? L’Algérie devra faire son aggiornamento en excluant tout sentimentalisme. Ceux qui ont misé sur la division entre le peuple et son armée en ont eu pour leurs frais. Cela ne veut pas dire que tout est rose. Le plus dur reste à faire. L’Algérie peine à se redéployer.
Il nous faut ré-talonner nos relations avec les partenaires dans une égale dignité sans condescendance ou quelque relent de race supérieure. On ne peut pas objectivement avec la France faire comme s’il ne s’est rien passé. Le passé ne peut pas passer quand un nombre de considérants fondamentaux ne sont pas réévalués. À chaque échéance électorale en France, le fonds de commerce de tout les nostalgériques est convoqué.
Les attaques lancinantes contre des Français musulmans risquent de remettre aux calendes grecques l’utopie toujours recommencée de la nation. Il est curieux que les pyromanes qui attisent les haines ont les coudées franches. Il est scandaleux que des pyromanes à l’exemple de Eric Zemmour dictent la norme en matière de relations d’État à État.
À bien des égards, le ressentiment et non la haine que nous éprouvons sont des répliques d’un tremblement de terre qui a eu lieu le 5 juillet 1830. Notre société, qui a été profondément déstructurée, n’a pas pu participer en son temps au mouvement de l’Histoire. Qui sait si nous n’aurions pas évolué d’une façon plus positive, si nous n’avions pas subi une colonisation sanguinaire qui est un crime contre l’humanité. Il est immoral que la France considère qu’elle a soldé ses comptes en 1962. Nous devons sans cesse avant toute négociation militer pour la restitution de nos archives seule mémoire qui nous permettra de conforter le récit national qui s’étale sur plus de 23 siècles documentés.
De ce fait, la vraie dette de la France est entière et ce ne sont pas des actions cosmétiques qui nous permettront de regarder ensemble dans la même direction. L’Algérie est une pièce importante dans cette Méditerranée de tous les dangers et qui a un grand besoin de stabilité. La France devrait avoir cela en tête et opposer le peuple à son armée est un mauvais calcul. Seul un respect réciproque permettra d’amener la confiance.
source : https://blogs.mediapart.fr/semcheddine
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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