Pour TV5 Monde, l’animateur (très proche d’Alain Delon) Cyril Viguier interroge Pierre-Marie Adam, le grand maître de la Grande Loge de France. À 1’41, on en apprend une belle.
Viguier : Le fait d’être un ancien policier, haut fonctionnaire des renseignements généraux, d’avoir exercé 25 ans cette profession, est-ce que cela ne rajoute pas un petit peu au halo de mystère, ce halo entre guillemets sulfureux qui peut être perçu par les gens par rapport à votre fonction ?
Adam : Oui, encore ne savent-ils peut-être pas que je suis issu des renseignements généraux, mais j’ai un, un, un, un, un ancêtre prestigieux qui a dirigé une grande obédience maçonnique, qui est Michel Baroin, et qui était aussi aux RG, je pense pas que ça a été dommageable pour, pour le Grand Orient, comme je pense ce n’est pas dommageable pour la Grande Loge. Est-ce que ça doit ajouter au halo de mystère ou est-ce que déjà le halo de mystère est suffisant…
Viguier : Vous percevez ce regard, dans les profanes, les gens que vous croisez dans vos déplacements, quand vous exprimez le fait que vous êtes le grand maître de la Grande Loge de France, par ailleurs ancien fonctionnaire des renseignements généraux, ça fait beaucoup pour comprendre ?
Adam : Ça n’apparaît pas dans le CV, ça apparaît que je suis le grand maître mais on ne dit pas que j’ai, bon, sauf ceux qui le savent, et qui en effet ajoutent un peu.
Viguier : Ça vous a aidé d’être aux renseignements généraux pour comprendre la société française, ses mutations, et exercer le rôle de grand maître ?
Adam : Je vais dire hélas oui, ça m’a aidé, parce que on a la prétention d’avoir une capacité d’analyse de la société, c’est pour ça que nous étions engagés et rémunérés, ça sert aussi à mieux connaître ce que sont les ressorts humains, à mieux connaître aussi ce qu’est la société, et pour diriger une structure de 32 000 adhérents, c’est utile aussi de connaître ce qu’est l’humain et, et, et sa manière de fonctionner.
Surtout quand on a les fiches !
Viguier a quand même fait une partie de son travail de journaliste (il est aussi producteur) en poussant légèrement le GM dans les cordes, mais sans l’achever. Pourtant, la piste de la connaissance de la société et surtout des hommes, quand on croise les organigrammes de la deuxième obédience de France et les fichiers des RG, ça devient subitement intéressant. Qui n’a pas jeté un œil sur une fiche pour évaluer une candidature ? Chez les gens peu informés on a le CV, chez les gens très informés on a les fiches…
Beaucoup de GM ou de vénérables ont touché au renseignement, Michel Baroin, bien sûr, cité par Adam, qui perdra la vie dans un accident d’avion, Philippe Guglielmi, militaire de carrière qui finira GM du Grand Orient, et surtout Alain Bauer, qui s’occupe auprès des présidents de la République successifs des domaines de la sécurité, du terrorisme, pardon, de l’anti-terrorisme…
C’est une affaire embarrassante. Depuis plusieurs mois, le tout-puissant Syndicat des commissaires et des hauts fonctionnaires de la police nationale (SCHFPN) est confronté à un choix délicat : sa revue publiera-t-elle une tribune libre, signée de l’un de ses membres, réclamant que les francs-maçons de la police se dévoilent ? Ce texte, en tout cas, ne figurera pas dans le prochain numéro. « Avec le changement de ministre, il y a eu d’autres priorités dans l’actualité », indique-t-on au syndicat. S’il devait être diffusé dans le suivant, nul doute que, parmi les 2 018 commissaires de police en activité, des voix s’élèveront pour condamner cette initiative. Tollé en perspective. (…)
C’est une liaison troublante. Les policiers sont attirés par les temples comme les papillons de nuit par la lumière. « Parce qu’ils voient dans la franc-maçonnerie une grande institution républicaine, et même, consciemment ou pas, un grand corps de l’État », explique Roger Dachez, président de l’Institut maçonnique de France. « Parce qu’ils se sentent mal aimés et mal compris, ils plébiscitent des structures discrètes où ils peuvent se retrouver pour parler », ajoute l’ancien conseil maçon d’un syndicat de police. Confrontés à un quotidien morose et violent, les policiers, plus que toute autre profession, auraient besoin de s’aérer l’esprit.
Et puis, il faut bien le dire, l’entrée en loge est aussi considérée comme un moyen de faire carrière. À défaut d’explications rationnelles, certaines promotions ou réussites sont liées, en partie, à ces réseaux discrets. Mais l’on connaît aussi au ministère certains grands flics qui, tout juste initiés, ont rendu leur tablier, déçus que l’ascenseur maçonnique ne soit finalement qu’un leurre. « Bien souvent, alors que je rencontrais un commissaire, il me faisait savoir qu’il était maçon en me serrant la main de manière particulière. Tous étaient convaincus que j’étais moi-même un frère, se souvient cet ancien patron du Syndicat des commissaires. Ils pensaient que se dévoiler pouvait être bon pour leur avancement. » Ancien secrétaire général du syndicat Alliance, Jean-Claude Gleize a, lui, quitté le Grand Orient (GO), « dégoûté par le carriérisme, le copinage et la recherche d’intérêts personnels » de ses frères policiers. (L’Express, 2004)
Plus généralement, il y a tellement de grands flics chez les francs-maçons qu’on ne peut même plus parler de collusion, ou d’interpénétration : on dira que les grandes loges sont des succursales du renseignement. Tout en bas, il en va autrement, au niveau des troupes : le secret, celui qui mène au pouvoir ou à l’influence, n’est pas partagé avec tout le monde.
Archive de l’INA : qui sont les francs-maçons ? (1975)
Source: Lire l'article complet de Égalité et Réconciliation