par Serge H. Moïse.
« La liberté du travail est garantie. Tout citoyen a pour obligation de se consacrer à un travail de son choix en vue de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille, de coopérer avec l’État à l’établissement d’un système de sécurité sociale » ~ Art. 35 de la constitution haïtienne
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Ceux d’un certain âge se souviennent encore des vagues d’euphorie soulevées par la promulgation de cette loi mère en ce 29 mars 1987.
En dépit de ses failles, elle promettait cette rupture d’avec l’obscurantisme que nous réclamions à cor et à cri depuis au moins une trentaine d’années.
Hélas, la montagne à accouché d’une souris, puisque 29 ans après, avec l’augmentation démographique, les inégalités sociales sont devenues plus criantes, les taux de chômage et d’analphabétisme se sont multipliés de manière exponentielle. Dans les deux cas on parle de 60 à 70%. Ceci, bien avant le séisme du 12 janvier 2010, suivi des autres catastrophes naturelles et humaines auxquelles nous avons assisté avec un silence tout à fait complice.
Rappelons pour l’histoire et la vérité que nos catastrophes humaines, sans cesse renouvelées, de l’indépendance à nos jours ont causé plus de torts à la nation que les ouragans, cyclones et tremblements de terre réunis.
Et nos intellos pas trop réglos, plutôt « P-H-D » Perroquets-Hâbleurs-Délirants persistent et signent à tout venant :
Parlons plutôt d’eudukâsion
Surtout pas de : malnutrition
Encore moins de refondation
Tout ira mieux pour la nation
Ce moïku à la rigolade pourrait laisser croire que nous banalisons l’importance de l’éducation dans le processus de développement humain.
Rassurez-vous bonnes gens, il n’en est rien. Enlevez vos œillères et ouvrez bien les yeux. Qu’est-ce qui est responsable de l’exode massif de nos professeurs vers des cieux plus cléments, qu’est-ce qui a cautionné et encouragé la prolifération des « écoles borlettes » à travers la république avec le résultat que le taux d’analphabétisme se chiffre aujourd’hui encore autour de soixante dix pour cent de la population ? Poser la question c’est déjà y répondre !
Nous disons « travail d’abord » et nous nous sommes fait répondre, sur le ton de la désinvolture évidemment : L’un n’empêche pas l’autre. Incohérence quand tu nous tiens !
De plus, parler d’éducation en lieu et place de scolarisation ou instruction nous chatouille un petit peu, mais nous n’en ferons pas un drame. Toutefois, puisque le distinguo existe bel et bien, il est préférable de ne pas l’ignorer afin que la réforme à venir se fasse en adéquation avec notre haïtianité comme dirait Albert Memmi, au lieu de simplement singer ce qui se fait ailleurs.
Il demeure évident que, quel que soit le cas de figure, la formation s’avère incontournable, cette dernière sera toujours la clé indispensable au processus du développement.
Demandons-nous alors à quoi sert une clé lorsqu’elle n’est pas compatible avec la serrure ?
Voilà donc ce sur quoi nous tenons à attirer l’attention. Éducation de qualité, éducation supérieure, c’est vite dit mais quel en est le substrat idéologique d’une part, quels sont les voies et moyens pour y parvenir d’autre part ? Ce serait dommage de persister à former des acculturés de plus en plus aptes à l’exportation et prétendre travailler au développement de l’alma mater.
L’éducation tout comme la justice, c’est l’affaire de tous et chacun d’entre nous, il est donc impérieux que s’amorce un débat en profondeur avec la participation avisée des véritables compétences en la matière afin de faire plus et mieux que la réforme Bernard.
À ce chapitre, nous invitons ceux que la question intéresse vraiment à jeter un coup d’œil sur le très intéressant ouvrage intitulé : « Manifeste du Mouvement Humanisation » de Gaston Marcotte, docteur en sciences de l’éducation de l’Université Laval à Québec.
Comment parler sérieusement « d’éducation-scolarisation-formation » sans tenir compte des préalables que sont : la bouffe, le logement, l’habillement et éventuellement le transport ?
Vous nous voyez venir évidemment puisque cela découle de la simple logique des choses !
La communauté internationale a montré ses faiblesses et ses méfaits, lesquels semblent laisser certains d’entre nous plutôt indifférents. Elle ne cesse de répéter qu’elle est en appui au peuple haïtien mais qu’il incombe à ce dernier de prendre en main sa destinée.
Plaider en faveur de la réalisation de ces préalables c’est à notre humble avis, indiquer la voie idéale permettant de satisfaire les besoins primaires, secondaires et tertiaires. Simple question de méthodologie appliquée.
Il se trouve que ces pré-requis ne sont autre que la « création d’emplois » à travers le pays et, soulignons le, en marge de l’économie néo-libérale qui nous étouffe au vu et au su de tout le monde.
Tous les experts s’accordent à dire que la priorité absolue dans notre singulier petit pays est la création d’emplois. Nos élites s’entêtent à faire la sourde oreille s’exposant chaque jour aux risques d’une explosion sociale.
Ce qui paraît paradoxal, c’est que les voies et moyens pour multiplier les emplois au pays sont identifiés depuis belle lurette, il ne manque que la volonté politique. Aveuglément, incompétence ou serait-ce l’œuvre de la main invisible ?
Nous terminerons cet articulet en recommandant, encore une fois à ceux que la question intéresse, la lecture de : L’Éducation en Révolution publié en 1975 à Cuba et dont les résultats se sont révélés tangibles et palpables, en dépit de cet injuste et interminable embargo.
Nos querelles intestines, les âpres luttes pour la défense des intérêts personnels et mesquins, les inégalités sociales inhumaines et affreuses nous ont conduits au fond de ces abysses. Il est donc temps d’amorcer cette révolution culturelle porteuse de progrès et de justice sociale en jumelant emploi et éducation pour une Haïti belle, souveraine et prospère.
Me Serge H. Moïse av.
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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