Médecin réanimateur à l’hôpital de la Conception à Marseille, le Dr Louis Fouché fait partie de ces personnalités qui ont acquis une forte visibilité à l’occasion de la crise sanitaire. Co-fondateur et porte-parole du collectif Réinfo Covid, sa double formation en sciences humaines et en médecine le dote d’un capacité de vision large. Qui lui permet de poser une analyse systémique sur les problèmes structurels qui affligent l’industrie de la santé – et que la crise actuelle met en lumière pour l’essentiel hors de tout débat public.
Il les aborde dans un grand entretien avec la journaliste Amèle Debey (de l’Impertinent média), passant en revue notamment :
- la perte de liberté des médecins face aux directives politiques ;
- la mise en échec des plans pandémie ainsi que des bonnes pratiques médicales dans la prise en charge des patients atteints du Covid ;
- l’évolution de la recherche et de la pratique médicales dans des formes de plus en plus éloignées de la clinique et donc du terrain ;
- de la méthodologie Evidence-based medicine conçue comme un processus industriel à visée lucrative ;
- de la tension entre technocratie et démocratie sanitaire ;
- de la manière dont le bio-pouvoir a pris la main sur le contrat social ;
- des « experts » légitimés par leurs diplômes qui tendent à devenir les gardiens du dogme et donc d’une approche religieuse de la science ;
- du besoin de souveraineté sanitaire, politique et social pour résister à la confiscation du pouvoir réel par des élites largement inféodées à des intérêts privés.
Des propos construits et étayés, qui ne vont sans doute pas plaire à tout le monde mais ont la mérite d’inviter à un vrai débat.
« C’est plutôt une bonne chose pour moi quand il y a de la biodiversité et j’apprends beaucoup des contradicteurs, explique ainsi Louis Fouché. Je suis complètement ok pour qu’il y ait du dissensus. Ça fait avancer. Ce qu’il faut c’est pouvoir parler librement. Or, aujourd’hui c’est impossible. Une pression insidieuse s’est mise en place. Si vous n’êtes pas d’accord avec la doxa dominante alors vous êtes “dangereux” ».
Un entretien aussi important qu’intéressant réalisé par Amèle Debey qui, avec son Impertinent média, poursuit un travail remarquable aux antipodes du naufrage lamentable des médias mainstream ~
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« L’industrie pharmaceutique est rodée à la fabrique de l’ignorance »
par Amèle Debey.
Louis Fouché était médecin-anesthésiste réanimateur à l’AP-HM de Marseille il y a encore quelques jours, jusqu’à ce que ses positions face aux décisions du gouvernement Macron lui coûtent son poste. Il a été parmi les premiers professionnels de la santé à dénoncer les incohérences de la stratégie sanitaire durant la pandémie de Coronavirus. Il est également porte-parole de Réinfo Covid, un collectif de chercheurs, d’universitaires, de médecins, de soignants, d’enseignants, d’entrepreneurs, d’artistes, de parents et de citoyens qui questionnent la politique sanitaire et cherchent à rouvrir l’espace de débat démocratique, mais pas que. Ce couteau suisse, réfugié dans le pays de l’horlogerie pour souffler un peu loin du tumulte français, a accepté de revenir sur cette période survoltée dans laquelle nous sommes tous plongés depuis près de deux ans. En nous fournissant sa grille de lecture et les solutions qu’il entrevoit pour le futur.
Amèle Debey pour L’Impertinent : Alors, vous vous êtes fait virer ?
Louis Fouché : Les mots sont plus subtils que ça. Je suis en disponibilité de la fonction publique hospitalière. Je ne travaille plus officiellement pour l’Assistance publique des Hôpitaux de Marseille. Je suis en vacances sans solde si vous préférez. Ce n’est pas forcément définitif, mais c’est en attendant que la poussière retombe. C’est un choix volontaire… mais il y a beaucoup de pression.
On vous a poussé vers la porte ?
J’ai décidé de prendre un peu de recul et de me consacrer à mes enfants à temps plein. C’est la raison officielle de ma disponibilité.
Qui dit raison officielle implique qu’il y ait une raison officieuse ?
Il y a une différence entre la parole publique et la parole privée. La première est stratégique et ne cherche pas à régler ses comptes avec qui que ce soit. C’est celle que nous partageons ici. Ce qu’il faut c’est traverser le conflit et arriver à le résoudre. L’attiser, ou jeter de l’huile sur le feu n’a pas beaucoup d’intérêt, à part le buzz et l’audience. Mais je n’ai rien à vendre. Et ça n’est pas une voie stratégique vers la paix.
Une plainte a également été déposée contre vous par l’Ordre des Médecins ?
En effet. On ne m’en a d’ailleurs pas encore précisé le motif, malgré une demande très officielle de ma part. Donc je ne sais pas. Les peines encourues peuvent être symboliques ou importantes. Puisque c’est de la justice ordinale, cela va jusqu’au retrait du droit d’exercice. J’ai le souvenir de quelqu’un qui a dit que l’azithromycine était peut-être utile et qui a pris trois ans d’interdiction d’exercer. Donc trois ans sans salaire, sans travail. Cela me paraît disproportionné. Le Covid soulève beaucoup trop de passions.
Qu’il y ait une plainte, c’est très sain. Je souhaite que cela permette de rouvrir un espace de dialogue, de remettre en discussion des choses qui ne l’ont pas été jusqu’ici, notamment sur la politique sanitaire. Mais hélas, je crains que cette plainte soit plutôt le reflet d’un certain raidissement quant à la liberté de la parole médicale et scientifique.
La loi a changé le 22 décembre 2020. La parole des médecins en France doit se conformer aux directives de l’OMS et de la Haute Autorité de Santé. Ce qui est complètement délirant. À la fin, il n’y a plus de discussion. Les médecins sont indépendants dans leur prescription, leur diagnostic et le lien qu’ils ont avec le patient. Ce n’est sûrement pas un ministre qui va décider ce qu’il faut faire. Encore moins l’OMS, depuis Genève ou je ne sais où, de manière univoque, concernant le soin.
À quel moment vous êtes-vous dit que quelque chose clochait dans la gestion de cette crise ?
Quasiment depuis le départ, car on n’a pas du tout appliqué le plan pandémie qui avait été écrit et qui impliquait des éléments de bons sens comme de tester et d’isoler les malades, de les traiter, surveiller leur évolution, prendre soin de manière pluridisciplinaire et y compris des comorbidités. La grande bataille médiatique et gouvernementale contre l’hydroxychloroquine m’a étonné. On ne va pas se battre pour une molécule ? C’est une stratégie entière qui fait sens.
En anglais, on appelle ça un « bundle of care » : rassurer, informer, essayer de travailler sur les pathologies chroniques des gens, les surveiller à la maison, mettre en route une anticoagulation précoce si c’est utile – et dans cette maladie ça l’est – pour éviter les caillots sanguins qui vont amener plein de complications, une morbidité et une mortalité propres. Rien que le fait de mettre des anticoagulants quand c’est utile diminue le recours à l’hospitalisation, à la réanimation. Rien que ça, aurait dû être fait et ça a pris un certain temps.
« On a laissé l’hôpital se surcharger »
L’oxygénothérapie aussi est quelque chose qui sauve des vies et permet de gagner du temps. Juste mettre de l’oxygène dans le nez des gens en fait. C’est pareil : on sait le faire en médecine de ville, on n’est pas obligé de le faire en réanimation. Ça dépend de la dose, mais on peut le mettre en route à la maison, en ambulatoire. Idem pour la corticothérapie qui est utile au stade de l’orage cytokinique. Dans toutes les infections virales, il peut survenir une surinfection bactérienne. Le traitement est alors une antibiothérapie. Tout cela est du ressort de la médecine de ville.
Au lieu de ça, s’est mise en place une tout autre façon de faire. On a négligé voir interdit la médecine de ville pour laisser l’hôpital se surcharger. Je ne vous parle même pas du gag à répétition des masques. N’importe qui de sain d’esprit doit voir que quelque chose cloche. Et tout le monde l’a vu. Mais certains sont rentrés dans une rationalité morbide. Par déni des conclusions à tirer, ils ont cherché à soutenir et justifier les choix politiques sidérants.
Je n’ai pas d’explication. Beaucoup de choses ont été transparentes dès le départ. Une des pistes que je peux donner est que c’était une nouvelle maladie et qu’il fallait prendre le temps de la connaître.
On a assez rapidement compris un certain nombre de choses dans cette pandémie. En réanimation par exemple, on a réalisé assez vite qu’il valait mieux laisser les malades avec de l’oxygène à plein pot dans le nez plutôt que de les intuber de manière systématique. Pourtant, c’est resté la recommandation pendant plusieurs semaines. Certains services prestigieux ont eu beaucoup de mal à accepter le feed-back du terrain. C’est un problème.
Lien vers la suite de l’entretien sur L’Impertinent média : cliquer ici.
source : https://anthropo-logiques.org
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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