par Oufcom.
30 septembre 2015, l’armée de l’air russe entre en action pour éviter la chute de Damas et repousser l’avancée jusque-là inexorable des hordes armées islamistes. C’est la première fois depuis la fin de la Guerre froide que la Russie s’oppose militairement à un des plans destructeurs de l’Occident. Pour le monde entier, il apparait clair que la Russie est de retour sur le plan géopolitique et qu’il faudra désormais compter avec elle. Si 2015 peut marquer pour certains la fin officielle de l’ère unipolaire occidentale, pour nous cette intervention de l’ours russe n’est que l’aboutissement d’un long processus qui a commencé en 1999 avec les bombardements de la Serbie par l’aviation de l’OTAN. Dans cet article, nous verrons pourquoi.
Choc et émoi en Russie
L’intervention de l’OTAN pour soutenir les indépendantistes kosovars a été vécue par la plupart des Russes comme une véritable humiliation, voire une trahison de la part de l’Occident. L’agression de la République slave sœur sans que leur pays n’ait eu mot à dire a rendu cette situation davantage traumatisante. Qui plus est, cette opération a été menée dans ce qui était encore considéré comme un pré carré russe ou l’étranger proche comme les géopoliticiens eux l’appellent. De plus, elle leur a montré à quel point comment leur pays était faible et ignoré par les Occidentaux. Ils ont vu de leurs yeux que les promesses de stabilité et de prospérité dans un village planétaire qu’ont leur avait faites du temps de la Guerre froide étaient complètement fausses. L’impérialisme occidental n’entendait pas mettre de l’eau dans son vin. Tout le monde devait lui faire allégeance, se prosterner. Aucune velléité d’indépendance se serait tolérée. Pour la population comme pour une grande partie de l’élite russe, c’était niet ! C’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase : Boris Eltsine devait partir ! Il fallait une nouvelle équipe dirigeante devait prendre le relais. Ce serait chose faite six mois plus tard avec l’arrivée de Vladimir au pouvoir.
Arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine
La Russie est faible et méprisée à l’international. L’autorité de l’État s’exerce à peine sur Moscou et Saint-Pétersbourg, le reste du pays étant entre les mains de mafias et autres oligarques locaux. L’agression de la Serbie va marquer une sorte de sorte de ras de bol. Le premier ministre russe de l’époque, Evguéni Primakov, alors en route pour Washington ordonne au pilote de faire demi-tour. Un signal, un symbole ! Le compte à rebours du départ de Boris Eltsine était lancé et Vladimir Poutine finirait par accéder au pouvoir. L’histoire nous a appris que cette ascension n’a rien eu de hasard mais a été l’aboutissement d’un plan savamment conçu et mis en œuvre par l’appareil sécuritaire qui a dans l’ombre poussé ses pions.
Avec Poutine au pouvoir, fini l’ère de larbinisme et de complaisance de l’État russe. Les années 2000 verrait un redressement progressif de la Russie, une modernisation de l’armée, une consolidation de la conscience russe. Exactement ce que le peuple attendait. La suite, nous la connaissons. Patiemment, la Russie a mis en place un ordre multipolaire qui aujourd’hui s’impose aux occidentaux.
Mise en place de la construction eurasiatique
Un évènement important s’est produit pendant la campagne de bombardements de Belgrade mais est passé complètement inaperçu en occident. Pourtant pour nous, il a eu une grande influence par la suite. C’est la destruction manifestement délibérée de l’ambassade chinoise à Belgrade par l’aviation américaine. Cette attaque (d’aucuns diront que ladite ambassade fournissait des informations à l’armée serbe) incompréhensible a choqué énormément les chinois. À tel point que le souvenir de cet incident suscite une rancœur encore vive aujourd’hui. C’est un signal envoyé par Washington que Pékin a très bien compris et pris très au sérieux. La Chine a compris qu’elle devrait régler des différents (idéologiques et frontaliers) avec une Russie décomplexée et guérie de toute idéologie.
Dès lors, la mise en place d’un ordre multipolaire et la construction d’un espace eurasiatique hors de portée de l’hégémonie occidentale va être son leitmotiv. Ce en tandem avec la Russie. Le premier acte de cette coopération a été la signature du traité de bon voisinage de vingt ans (reconduit cette année en Poutine et Xi Jinping). Le second évènement, véritable changement tectonique géopolitique, a été la création de l’OCS (Organisation de Coopération de Shangaï). Le troisième et le non moins important (même si le Brésil a été neutralisé et l’Inde récupérée par la suite) a été la création des BRICS. Cette nouvelle ère a été mésestimée en occident mais son objectif était clair : mettre fin à l’hégémonie occidentale tant militaire qu’économique. C’est aujourd’hui chose faite.
Revanche russe et annexion de la Crimée
Lors du bombardement de la Serbie et la perte de la province du Kosovo par cette dernière, les russes ont crié au scandale et promis de prendre leur revanche. En 2007, à la Conférence de Sécurité de Munich, Poutine a signifié qu’un ordre unilatéral occidental était illégal et immoral et que la Russie entendait s’y opposer. Un an plus tard, lors de la proclamation unilatérale d’indépendance du Kosovo et reconnue par les occidentaux en violation d’une résolution de l’ONU, les russes ont réitéré leur avertissement qui soit n’a pas été entendu, soit a été totalement ignoré, c’est selon. Toujours est-il que les russes ne rigolaient pas et étaient résolus à faire payer aux occidentaux leur mépris et arrogance en utilisant con contre eux leurs propres méthodes.
Au final, il ne leur a fallu que huit ans à peine après l’aventure de Belgrade pour arracher les provinces d’Ossétie du sud et d’Abkhazie à la Géorgie et quinze ans pour annexer la Crimée.
Eh oui, il est de ces évènements qui ont l’allure de victoire écrasante à première vue mais en fin de compte s’avèrent être un désastre stratégique complet. Les bombardements de la Serbie sont de ceux-là. Ils ont constitué un avant-gout de ce que serait la courte période unipolaire occidentale sous l’égide des USA. Cette guerre d’agression, à la fois illégale et immorale, a montré aux autres États que les USA entendaient jouer les gendarmes du monde et n’hésiteraient pas à recourir à la force pour se faire obéir. Dès lors, cela a poussé la Russie et la Chine à mettre en place un ordre multipolaire, ce de façon concertée, patiente et discrète mais implacable.
illustration : Bombardement de la « Tour CK » à Belgrade, qui abritait le Comité Central (Centralni Komitet) de la Ligue des Communistes de Yougoslavie, puis du Parti Socialiste de Serbie.
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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