Un article intéressant de Jon Schwarz dans The Intercept retrace l’histoire de l’OTAN et réfléchit à sa pertinence aujourd’hui. Il rappelle que l’OTAN est née dans l’urgence après la Seconde Guerre mondiale, en 1949, à une époque où l’Europe était détruite et où « la puissance des États-Unis était si prépondérante qu’elle pouvait simplement dicter leur conduite à ses alliés ».
Les interlocuteurs de Washington étaient si impuissants que l’Alliance a été discutée « en secret pendant quinze jours au Pentagone ». D’où le rôle prépondérant des États-Unis, auxquels les alliés sont de facto attelés.
Bien sûr, il y avait un risque que l’Union soviétique et le communisme s’étendent au Vieux Continent, notamment en raison de la force des partis communistes occidentaux. Mais Schwarz rappelle que les victimes russes de la guerre étaient au nombre de 27 millions, soit un Russe sur six. Un tribut de sang pour lequel « même Staline aurait eu du mal à motiver son propre pays à se lancer immédiatement dans une autre aventure similaire ».
L’OTAN, le Pacte de Varsovie et la Guerre froide
De plus, les partisans de l’OTAN considèrent l’Alliance comme une réponse indispensable à la Guerre froide imposée par les Russes. Mais l’histoire nous dit le contraire, puisque le Pacte de Varsovie est né six ans plus tard. Ainsi, « une lecture plus fidèle de l’histoire suggère que la formation de l’OTAN a contribué à intensifier et à institutionnaliser la Guerre froide » plutôt qu’à l’endiguer.
Le Pacte de Varsovie reflète le modèle antagoniste de l’OTAN, ne différant que par le numéro de l’article engageant les pays membres à la défense mutuelle : non pas l’article 5, mais l’article 4.
L’objectif déclaré de l’OTAN était de se défendre contre la menace de l’Union soviétique et du communisme en général, y compris les partis communistes de l’Ouest, que l’organisme militaire devait empêcher d’accéder au pouvoir, en prodiguant « confiance et énergie » aux forces démocratiques, avec des déclinaisons encore à découvrir dans les méandres obscurs de l’histoire de l’Italie (stratégie de la tension, etc.) et de celles des autres pays.
Mais l’objectif implicite de l’OTAN, et du Pacte, était de faire des pays adhérents des satellites de leurs dominateurs respectifs, les États-Unis et l’Union soviétique. D’autre part, depuis l’époque de la Ligue Delio-Atlantique, « accorder une protection est le moyen essentiel par lequel les pays puissants lient à eux les pays moins puissants ». En d’autres termes, il s’agissait de structurer et de garantir l’irrévocabilité de la « sphère d’influence » des deux puissances.
L’OTAN ne s’arrête pas, elle se transforme
Une fois l’Union soviétique dissoute, l’ennemi qui rendait l’OTAN nécessaire a disparu et elle aurait dès lors dû se dissoudre. Au contraire, ses objectifs ont changé, la rendant indispensable pour faire face aux nouvelles menaces, qui auraient certainement pu être traitées par des moyens différents qui, tout en préservant la convergence du plus grand nombre, auraient été moins contraignants pour les États subordonnés.
« Le temps a donné raison aux critiques les plus virulents de l’OTAN, qui affirmaient qu’elle était surtout un instrument agressif de la puissance américaine ». La nouvelle doctrine a en effet permis à l’OTAN de s’engager dans des guerres d’une nature différente de celle envisagée par ses premiers impulseurs : il ne s’agit plus de la défense d’un État membre, mais de guerres agressives, légitimées de diverses manières sous l’égide de l’ONU, comme la guerre en ex-Yougoslavie et en Libye.
La subordination de l’OTAN à la doctrine des guerres sans fin a donc généré de nouvelles critiques dans le monde, tandis que d’autres ont été produites par des événements moins conflictuels, mais non moins déstabilisants, comme l’élargissement de l’alliance militaire en Europe de l’Est.
L’élargissement en Europe de l’Est
Une expansion qui a d’ailleurs rompu le pacte passé avec l’ancien ennemi, comme le note The Intercept, rappelant la promesse solennelle faite par James Baker, le secrétaire d’État de George H. W. Bush, à Gorbatchev, qui lui avait fait une promesse de paix. Bush, en effet, avait émis cette promesse à Gorbatchev, qui avait demandé d’éviter l’élargissement de l’OTAN dans l’ancien espace soviétique, que Moscou aurait perçu comme une menace existentielle.
James Baker a rassuré son interlocuteur « non pas une mais trois fois que cela ne se produirait pas ». « Pas un pouce de la juridiction militaire actuelle de l’OTAN ne s’étendra en direction de l’Est », avait-t-il promis. Depuis lors, la quasi-totalité de l’Europe de l’Est a été absorbée par l’Alliance.
« La Russie, note The Intercept, a accueilli de tels événements avec le même enthousiasme que celui qu’auraient les États-Unis si le Mexique, le Canada et un Texas nouvellement indépendant se joignaient à une alliance militaire dirigée par la Russie »…
Aujourd’hui, « l’OTAN regarde plus loin, son horizon est la planète entière », à tel point qu’elle a mis la Chine, qui se trouve sur les rives du Pacifique, dans sa ligne de mire. Et comme par le passé, elle poussera d’autres pays à la rejoindre en les convainquant de diverses manières. Et « tout comme l’OTAN a contribué à créer la guerre froide à l’époque, elle est en train d’en créer une autre aujourd’hui ».
La religion otaniste
La remarque finale de Schwarz est très pertinente : « Tragiquement, il n’y a pas de débat à ce sujet, ni aux États-Unis ni en Europe. Comme l’a dit Biden, le petit nombre d’élites impliquées dans ces débats considère l’OTAN comme une instance “sacrée” ».
« De même, lorsqu’il a préconisé la création de l’OTAN, le ministre britannique des Affaires étrangères de l’époque, Ernest Bevin, a déclaré qu’elle était nécessaire pour “le salut de l’Occident” ».
« Aussi étrange que cela puisse paraître aux gens normaux, pour les élites occidentales, l’OTAN est devenue une institution de nature religieuse et ne peut donc être remise en question, pas plus que le pape n’est ouvert au débat sur la Sainte Trinité. Et nous savons tous comment les religions peuvent mener à la guerre ».
source : https://piccolenote.ilgiornale.it
via http://euro-synergies.hautetfort.com
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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