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par Faina Savenkova.
À l’occasion de la journée internationale de l’enfance, la jeune auteure de Lougansk, Faina Savenkova a écrit un texte et tourné une vidéo destinée à l’ONU, afin de rappeler le sort des enfants qui vivent dans le Donbass en guerre.
Croire et espérer
Chaque fois qu’on me demande de parler de la vie sous les bombardements ukrainiens, je suis perdue. Pas parce que je suis une enfant et pas parce qu’il n’y a rien à dire, non. Je ne sais pas ce qu’ils veulent entendre de moi. Des rapports secs et indifférents sur les pertes et les destructions ? Bien sûr que non. C’est à ça que servent les nouvelles. Des sentiments et des expériences personnelles ? Ici, c’est plus difficile. À quoi ressemble la vie en temps de guerre ? Probablement ordinaire, si vous ne vous souvenez pas beaucoup de la vie en temps de paix.
Beaucoup seront peut-être horrifiés de constater qu’il existe des enfants au XXIe siècle, dans le centre géographique de l’Europe, qui n’ont aucun souvenir d’avions volant haut dans le ciel, de promenades dans la ville le soir avec leurs parents ou d’autres bêtises mignonnes auxquelles les autres enfants ne prêtent pas attention. Notre vie s’adapte à la zone d’exclusion aérienne et au couvre-feu. Et quand on voit les émeutes qui ont éclaté dans certaines villes européennes suite à l’imposition d’un couvre-feu en raison du coronavirus, on se demande : qu’est-ce qui ne va pas ? Ce n’est qu’un couvre-feu, rien de terrible n’est arrivé, alors pourquoi se tracasser ? La raison d’un tel calme est en fait très simple : tout s’apprend par comparaison, et nous n’avons rien à comparer. Nous sommes la génération qui n’a aucun souvenir d’une vie paisible. Nous sommes une génération qui vit selon des règles strictes, et le non-respect de ces règles peut entraîner la mort.
Nous avons appris à identifier la trajectoire des obus, afin de savoir quand nous devons nous inquiéter et quand nous pouvons continuer à vaquer à nos occupations. Nous avons appris à ne pas ignorer les cours du ministère des Situations d’urgence sur la façon de se comporter pendant les bombardements, lorsqu’on trouve des objets suspects, ou d’autres recommandations pour diverses situations. Pourtant, personne ne peut garantir que vous ne serez pas accidentellement touché par des éclats d’obus parce que vous n’avez pas eu de chance. Bizarre ? Effrayant ? Banal, avec quelques variations en fonction de l’intensité des bombardements contre la zone concernée.
À quoi ressemble la vie sous les bombardements ukrainiens ? C’est lorsque, le soir du 1er juin, journée de l’enfance, près des monuments commémorant les enfants du Donbass morts sous les bombardements, des centaines de lanternes en papier s’élèvent dans le ciel pour éclairer le chemin des anges. Après tout, il est difficile d’expliquer aux enfants qui lancent des lanternes pourquoi ces anges ont été privés de leur courte vie et de la chance de grandir et de voir la paix revenir dans notre mère patrie. Maintenant, ils ne peuvent que regarder depuis le ciel et pleurer avec les adultes qui les réconfortent.
Il se trouve que presque toute ma vie et mes souvenirs sont liés à la guerre, ce qui fait que je n’ai pas de regrets ni de tristesse pour le passé. Je vis dans le présent et pense occasionnellement à l’avenir, dans lequel il y a de la place pour un rêve naïf et idiot qui me fait sourire. Tout à fait réel, chaleureux et presque tangible, il me permet de ne pas désespérer, même dans les moments les plus difficiles. Je veux que des avions de ligne volent dans le ciel du Donbass, pas des lanternes en papier. Tout rêve doit se transformer en réalité. C’est ainsi que cela devrait être et je crois que cela le sera.
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Voici la vidéo envoyée par Faina Savenkova à l’ONU pour la journée de l’enfance, avec l’aide de la représentation russe :
Traduction en français du texte et des sous-titres de la vidéo envoyés à l’ONU :
Bonjour ! Mon nom est Faina Savenkova. Je suis écrivain et dramaturge en herbe. Je vis à Lougansk et je ne suis guère différente de la plupart des autres enfants. Mais il se trouve que c’est la septième année que je vis en situation de guerre. En 2014, les avions de combat ukrainiens ont attaqué ma ville natale, nous ont bombardés et ont lâché des bombes sur nos maisons, tuant de nombreux adultes et enfants.
À l’époque, nos parents ont dû prendre les armes pour protéger nos vies. Aujourd’hui, il y a moins de tirs qu’avant, mais comme avant, nous vivons tous – amis, enseignants, proches – dans l’attente constante de nouveaux bombardements et d’une reprise des hostilités actives, sans oser faire de plans pour l’avenir. Parce que tous ces plans peuvent facilement être détruits par un petit éclat d’obus.
Dans notre ville, il y a un mémorial dédié aux enfants qui sont morts pendant cette guerre. Pour la plupart des gens dans le monde, la Journée de l’enfance est simplement une fête pleine de ballons, d’amusement et de légèreté. Mais pour le Donbass, c’est aussi un jour de douleur et de deuil devant ce mémorial.
Aujourd’hui, je vous demande de vous souvenir des sourires de vos enfants et je veux vous dire que nous aussi, nous voulons être heureux, nous voulons choisir notre avenir, nous voulons simplement vivre. Et pour cela, la guerre doit cesser. Je souhaite que les Nations Unies se souviennent que les enfants du Donbass ont eux aussi le droit à l’enfance et à une vie paisible.
source : https://www.donbass-insider.com
traduit par Christelle Néant pour Donbass Insider
Source : Lire l'article complet par Réseau International
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