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Aujourd’hui, 6 mai 2021, la Syrie et le Liban célèbrent la « Fête des Martyrs » en mémoire des patriotes exécutés à Damas et à Beyrouth par Djemal Pacha, wali ottoman local en 1916.
Depuis, le sang de ce même peuple, divisé en deux nationalités, a beaucoup coulé du fait des successeurs colonialistes de l’Empire ottoman par le passé, puis des néo-ottomans et des néo-colonialistes avançant masqués au présent. Ces derniers réussiront-ils à le diviser et le rediviser au profit, d’abord et avant tout, de leur bras armé greffé sur le corps de la Palestine ? Nasser Kandil est sûr du contraire. Il le dit, l’écrit et le répète haut et fort depuis des années. Pour mieux comprendre ses arguments, quelques extraits de ses innombrables interventions sont signalés en « Notes » à la fin de ce texte. [NdT].
*
par Nasser Kandil.
Comme tout a commencé par Damas, la fin viendra de Damas
Pendant le mandat de l’ex-président américain George W. Bush et suite à l’aveu public de l’échec des guerres qu’il a menées à travers la diffusion du célèbre « rapport Baker-Hamilton » diffusé [le 6 décembre 2006 ; Ndt] par une commission composée des membres des deux partis républicain et démocrate du Congrès des États-Unis, le président syrien Bachar al-Assad a lancé son appel invitant à la formation d’un système régional qui réunirait les États riverains des cinq mers [la Mer Méditerranée, la Mer Rouge, la Mer Caspienne, la Mer Noire et la Mer des Pays du Golfe arabo-persique] dans le but de combler le vide consécutif à l’échec américain.
Le président syrien a donc initié un premier mouvement incluant la Russie, l’Iran, la Turquie, l’Égypte et l’Arabie Saoudite, en motivant ses alliés russes et iraniens à accepter son invitation et en tentant de convaincre la Turquie, l’Arabie Saoudite et l’Égypte de l’étendue des risques consécutifs au vide stratégique annoncé ; un vide qui serait comblé par le chaos et le terrorisme, à moins d’une alternative qui assurerait la stabilité dans la région.
Mais le Parti démocrate a fini par refuser l’option recommandée par le rapport Baker-Hamilton quant à l’ouverture sur la Syrie, située au cœur même de ce système régional des cinq mers, parce qu’il n’incluait pas l’entité occupante israélienne. Et ce, en dépit de son rôle jugé décisif face aux guerres des néoconservateurs, vu que la Syrie aurait contribué à ouvrir la voie au retour des démocrates à la Maison Blanche, d’après les propos de la présidente de la Chambre des Représentants des États-Unis, Nancy Pelosi, suite à sa visite à Damas et sa rencontre avec le président Bachar al-Assad en 2007. De surcroît, avec l’arrivée de Barak Obama au pouvoir et la floraison des prétendus printemps arabes, il est vite apparu que l’option du chaos et du terrorisme était devenue une option officielle pour Washington, prouvant la validité des prédictions du président Al-Assad.
En effet, à partir de là, l’Égypte fut la première victime visée par le chaos et le terrorisme ayant profité de la colère du peuple égyptien aspirant au changement, au point de tomber sous l’emprise de la Confrérie des dits Frères Musulmans, avant que l’armée ne la récupère deux ans plus tard. Quant à la Turquie et à l’Arabie Saoudite, elles participèrent activement au nouveau plan américain, dont la Syrie était la principale cible : la Turquie, motivée par des ambitions ottomanes déclarées, étant le pivot et l’incubateur de la guerre sur la Syrie ; l’Arabie Saoudite étant le financier, l’instigateur et l’organisateur de groupes terroristes constituant « l’armée auxiliaire » de cette guerre, afin de compenser l’inaptitude au combat [terrestre] des armées occidentales et de l’armée israélienne.
C’est ainsi que ces dix dernières années, la guerre sur la Syrie devint une version géographiquement réduite d’une Troisième Guerre mondiale, que ce soit par l’énormité des ressources consacrées à la gagner, ou par la multiplicité des pays impliqués.
Et c’est ainsi que dix ans après l’agression sur la Syrie, l’Égypte, l’Arabie Saoudite et la Turquie, invitées hier à adhérer au système de stabilité régionale proposé par le président Al-Assad, se retrouvent aujourd’hui face à des échéances dramatiques. L’Égypte est menacée existentiellement par le barrage de la Renaissance en Éthiopie. La Turquie et l’Arabie Saoudite récoltent les résultats de l’échec des guerres dans lesquelles elles se sont impliquées, en Syrie pour la première, en Syrie et au Yémen pour la seconde.
Entretemps, c’est la résistance désormais légendaire de la Syrie qui fut la raison décisive de l’échec des agresseurs à atteindre leurs principaux objectifs, ses fidèles alliés restés de son côté étant pleinement conscients qu’il s’agissait non seulement d’une guerre sur la Syrie, mais aussi d’une guerre destinée à changer le monde à partir du portail syrien et à y semer le chaos et le terrorisme.
En effet, le projet des coalisés ayant lancé la guerre contre la Syrie dépassait de loin ses frontières. En l’attaquant, ils ciblaient la Russie dans sa sécurité, la Chine dans son accès à la Méditerranée, l’Iran dans son rôle, sa résilience et ses relations avec les divers mouvements de résistance, tout en cherchant à casser les reins de la Résistance libanaise et à bloquer ses voies d’approvisionnement. Et, chemin faisant, ils ont travaillé à garantir la sécurité d’Israël et celle de l’occupant américain en Irak, à remettre le Liban entre les mains du « groupe de Jeffrey Feltman » et, implicitement, à couper la route à la résistance renaissante au Yémen, en Palestine et en Irak.
Mais avec le départ de l’administration de l’ex-président Donald Trump et l’échec de ses plans de relance et de généralisation du chaos et du terrorisme, en raison des victoires de la Syrie sur les organisations de Daech, du Front al-Nosra et des dits Frères Musulmans, la Maison Blanche s’est de nouveau ouverte à une administration démocrate en la personne du président Joe Biden.
Une nouvelle administration qui a réaffirmé l’échec des guerres menées par les États-Unis et exprimé son intention d’entrer dans un processus de règlement des conflits, à commencer par le retour à l’accord sur le nucléaire iranien. Elle a aussi pris la décision de retirer ses troupes d’Afghanistan en sachant pertinemment que le maintien de la stabilité est incompatible avec le vide stratégique. Tout comme elle sait qu’il n’y a plus de place pour l’entité occupante israélienne dans un système destiné à préserver la stabilité régionale et que les politiques de normalisation, menées par Donald Trump, sont incapables de créer un contexte sur lequel elle pourrait compter à cet effet.
Et maintenant que la guerre semble toucher à sa fin, son commanditaire principal ayant perdu ses chances de la poursuivre et se retrouvant coincé faute d’une stratégie de sortie, voici que Washington frappe à la porte de Téhéran et de Moscou, suivi par l’Arabie Saoudite confrontée à la nécessité d’admettre que les règles d’engagement ont changé et à la réponse signifiant : « Pour que nous puissions avancer, vous devez vous diriger vers Damas, car c’est là que se situe le cœur du problème ». L’Arabie Saoudite cherche donc à normaliser ses relations avec l’Iran et la Syrie. Et la Turquie, dont la présence en Libye soulève des problèmes internationaux et régionaux majeurs, s’apprête à normaliser ses relations avec l’Égypte.
Par conséquent, la question redevient : « Quel serait le système régional apte à préserver la stabilité ? ». Apparemment, la réponse est qu’il n’y a pas d’autres possibilités qui mériteraient discussion pour choisir entre l’option des cinq mers de Al-Assad et celle menant au chaos ainsi qu’au terrorisme. Et finalement, comme tout a commencé par Damas, la fin viendra de Damas.
Et Damas restera la capitale de la région
À ce sujet, rappelons que durant des années, les médias n’ont cessé de parler de rapports prétendant que Téhéran et Moscou avaient conclu en aparté des accords décidant de l’avenir de la présidence en Syrie. Ce à quoi nous répondions : « Si c’est ce qu’ils veulent, il ne l’obtiendront pas, mais ils ne veulent pas et ne le voudront pas ! ».
Or, voici que Téhéran et Moscou soutiennent la décision du président Bachar al-Assad de respecter l’échéance des élections présidentielles conformément à la constitution syrienne en vigueur, ainsi que sa candidature pour un nouveau mandat. Et ce, avant toutes les négociations censées mener à une nouvelle constitution qui lui permettrait de se présenter pour un premier puis un deuxième mandat, de telle sorte que se vérifiera le dicton : « Al-Assad reste et les autres s’en vont ! ».
Et voici que les médias nous parlent des délégations qui se sont précipitées vers Damas, la réponse entendue par celles des pays impliqués dans la guerre contre la Syrie étant invariable : « Sans réorganisation des relations avec la Syrie, la région restera coincée au milieu du gouffre ».
Autrement dit, à ceux qui ne l’auraient pas remarqué, les événements évoluent vers une nouvelle réalité régionale et internationale qui sera couronnée par la rencontre au sommet entre le président Poutine et le président Biden. Une réalité qui démarrera de l’accord sur le nucléaire iranien et dont le rythme devrait s’accélérer après les élections présidentielles syriennes par l’ouverture sur la Syrie à travers des dossiers d’une grande importance. Parmi ces dossiers : l’occupation des territoires syriens par les États-Unis et la Turquie, les agressions de l’armée d’occupation israélienne, la question des séparatistes kurdes, la formulation de la solution politique, le retour des déplacés et la reconstruction.
Des évolutions que l’esprit de certains ne digérera sans doute pas, mais dont l’ampleur sera suffisante pour leur confirmer que Damas restera la capitale de la région, que la Résistance est la puissance montante en cette région, et que le Liban voisin est le pays frère de la Syrie et le centre de cette Résistance, abstraction faite de leurs ennemis. En effet, l’heure de vérité fera comprendre à ces derniers qu’ils ne sont plus que de la petite monnaie bien qu’ils aient occupé les trônes de la finance et de la politique pendant de longues années.
Par conséquent, est-il raisonnable d’imaginer pour 2022 un gouvernement libanais qui n’établirait pas les meilleures relations avec la Syrie ? Est-il raisonnable d’imaginer, en 2022, un gouvernement et des élections qui ne partiraient pas de l’équation entre Damas capitale de la région et la Résistance ? Quiconque s’imagine cela ferait mieux de suivre ce conseil : « Ne restez pas en queue de caravane, vous ne trouverez plus personne pour vous accueillir ! ».
M. Nasser Kandil est un homme politique libanais, ancien député et Rédacteur en chef du quotidien libanais Al-Binaa.
source : Synthèse de deux articles d’Al-Binaa (Liban)
traduit par Mouna Alno-Nakhal
Notes :
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