par Docteur Amine Umlil.
La nécessaire rectification des affirmations « inexactes » (contraires à la « loi ») diffusées par le journal « Libération – CheckNews »
Le 28 avril 2021, un article est publié par le journal « Libération CheckNews » sous le titre « Est-il vrai que des centres de pharmacovigilance ont appelé à limiter les signalements d’effets secondaires des vaccins ? ». Des affirmations, diffusées par cet article, appellent les nécessaires rectifications suivantes.
Cet article soutient que le « rôle » des centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) « est d’enquêter sur les problèmes graves et non identifiés » ; et qu’il est « inutile de signaler des effets non graves qui sont déjà connus ». Cet article poursuit en affirmant que l’idée « selon laquelle la mission des CRPV est de recenser de manière exhaustive tous les effets secondaires liés à un médicament, même les plus bénins » repose sur « une idée fausse ». Or, en réalité, ces affirmations, diffusées auprès du public notamment, sont contredites par les dispositions du Code de la Santé publique.
En effet, d’une part, l’article R.5121-161 du Code de la Santé publique dispose :
« Le médecin, le chirurgien-dentiste, la sage-femme ou le pharmacien déclare immédiatement TOUT effet indésirable suspecté d’être dû à un médicament ou à un produit mentionné à l’article R.5121-150, dont il a connaissance, au centre régional de pharmacovigilance.
Les autres professionnels de santé, les patients et les associations agréées de patients peuvent déclarer TOUT effet indésirable suspecté d’être dû à un médicament ou à un produit mentionné à l’article R.5121-150, dont ils ont connaissance, au centre régional de pharmacovigilance. (…) »
Selon le Code de la Santé publique, et contrairement à ce qui est affirmé dans cet article de presse, « tout » effet indésirable « suspecté » doit être déclaré en pharmacovigilance. Il n’est pas nécessaire que cet effet indésirable soit certain : une simple suspicion d’un lien de causalité entre cet effet indésirable et le médicament (vaccin) concerné suffit à rendre cette déclaration obligatoire pour notamment « le médecin, le chirurgien-dentiste, la sage-femme ou le pharmacien ». Il n’est pas nécessaire, non plus, que ces derniers soient les prescripteurs ou les dispensateurs dudit médicament (vaccin) : dès qu’ils sont informés, ils doivent signaler ledit effet indésirable au CRPV territorialement compétent.
Cet article (R.5121-161) du Code de la Santé publique a été modifié par le Décret n°2012-1244 du 8 novembre 2012 relatif au renforcement des dispositions en matière de sécurité des médicaments à usage humain soumis à autorisation de mise sur le marché et à la pharmacovigilance. Il nous semble, qu’avant ce décret, l’obligation de déclaration en pharmacovigilance ne pesait que sur les effets indésirables « graves » (même connus) ou « inattendus ». La question est donc : pourquoi avoir élargi le champ de cette notification à « tous » les effets indésirables depuis 2012 ?
En effet, d’autre part, les « Bonnes pratiques de pharmacovigilance », prises par « Décision du 2 février 2018 » du Directeur général de l’Agence nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) et intégrées au Code de la Santé publique, consacrent cette obligation de déclaration immédiate de « tout » effet indésirable (page 19/43) :
« Fait l’objet d’une déclaration immédiate tout effet indésirable suspecté d’être lié à l’utilisation d’un ou plusieurs médicaments qu’il soit grave ou non, listé ou non dans la notice patient, survenant dans des conditions d’utilisation conforme ou non conforme aux termes de l’autorisation ou de l’enregistrement du ou des médicaments. Sont également concernés, les effets indésirables résultant : (…) ».
Dès le 10 juin 2018, ces Bonnes pratiques de pharmacovigilance ont fait l’objet d’un article publié, sur le site du CTIAP, sous le titre :
Toutefois, les inquiétudes des CRPV, exprimées dans cet article de presse, nous semblent légitimes : les moyens dont disposent ces CRPV devraient être mobilisés pour documenter, en priorité, les effets indésirables « nouveaux ou graves ». Les CRPV soulèvent également deux causes à l’origine de cette « embolie du système » : d’une part, la création du « portail de signalement des effets secondaires [indésirables] » ; et d’autre part le fait que « beaucoup » de « signalements » reçus, par les CRPV, « n’ont pas le niveau de précision requis. Certains médecins se contentent en effet de nous déclarer « décès », « thrombose », « hospitalisation »… » ; ce qui obligent les CRPV à « recontacter les médecins pour demander les antécédents, les facteurs de risques, les données cliniques, le jour de la vaccination. Et ainsi construire une histoire clinique… C’est cette histoire clinique qui permet de construire le dossier qui est intégré dans la base nationale » de pharmacovigilance.
Mais si ces inquiétudes des CRPV sont légitimes, et au lieu de stigmatiser publiquement les déclarants (professionnels de santé, patients…) qui ne font que se conformer à la « loi » (au sens large), il y a lieu de s’interroger plutôt sur les véritables causes à l’origine de cette nouvelle « embolie du système » de pharmacovigilance ; un tel constat ayant déjà pu être réalisé lors de « l’affaire LÉVOTHYROX° » notamment. Parmi ces causes, certaines ont déjà été identifiées depuis plusieurs années. Et le CTIAP a déjà proposé quelques réflexions sur ce point comme le montre l’article publié, le 16 juin 2017, sous le titre « Pharmacovigilance : une nouvelle plateforme du Ministère de la Santé inutile, nuisible et coûteuse » ; une réflexion qui alertait déjà en ces termes :
« Cette orientation prise ne peut que conduire à la dilution des signaux importants. Les cas graves et/ou inattendus peuvent être noyés dans une masse d’informations transmises sans contrôle préalable ».
Et, une autre cause potentielle, de cette nouvelle « embolie du système » de pharmacovigilance, mérite d’être soulevée. En effet, dans le cadre des vaccins contre la Covid-19 qui ont été autorisés notamment en Europe (et donc en France), il y a lieu de rappeler notamment le contenu du paragraphe « E » de l’annexe II de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) « conditionnelle » (temporaire) correspondant à chacun de ces vaccins. Selon les termes de ce paragraphe « E », l’évaluation du rapport bénéfice/risque de ces vaccins n’est pas terminée. Et par conséquent, en principe, la gestion des déclarations des effets indésirables, observés après l’administration de ces vaccins, aurait dû être supportée par les laboratoires pharmaceutiques concernés comme cela serait fait lors des essais cliniques (chez l’Homme) qui précédent l’AMM, nous semble-t-il ; et non pas par les CRPV (et à moyens constants). Ledit contenu de ce paragraphe « E » de l’annexe II de AMM « conditionnelle » est repris dans l’article publié, le 2 avril 2021, par le CTIAP sous le titre
Dès 2002, au centre hospitalier de Cholet, nous avons proposé, en lien avec le CRPV territorialement compétent, une organisation efficiente (qualité, sécurité, coût) de la pharmacovigilance. Cette organisation a été saluée par plusieurs autorités ad hoc. Elle est décrite notamment dans une publication parue, en 2006, dans une revue nationale avec comité de lecture « Le Pharmacien Hospitalier » sous le titre : « La pharmacovigilance dans un Centre Hospitalier Général : modalités pratiques de mise en place, résultats et actions d’améliorations ». Cette organisation contribue à soulager le CRPV : les déclarations sont reçues et complétées, localement, par l’unité de pharmacovigilance de l’hôpital de Cholet avant leur transmission au CRPV ; ce dernier dispose d’un correspondant local bien identifié s’il a besoin d’un complément d’informations ; cette antenne locale (de proximité) du CRPV a plus facilement accès aux dossiers des patients ; etc. Mais, curieusement, dans le cadre de ces vaccins contre la Covid-19, cette procédure, en vigueur à l’hôpital de Cholet depuis 2002, a été violée ; et les alertes adressées notamment à la direction sont restées vaines.
Par ailleurs, et à plusieurs reprises, nous avons déjà signalé des obstacles à la pharmacovigilance comme le montrent ces deux articles disponibles sur le site du CTIAP :
Malgré ces alertes auprès des autorités ad hoc notamment, rien n’a changé : les obstacles à la pharmacovigilance continuent de prospérer.
Une autre solution pourrait également trouver sa source dans cette autre analyse proposée dans l’article du CTIAP publié, le 10 décembre 2018, sous le titre « Le PMSI : un moyen pour détecter les effets indésirables liés aux médicaments et NON DÉCLARÉS en pharmacovigilance ».
Enfin, il y a lieu d’utiliser le terme d’effet « indésirable » et non celui d’effet « secondaire ». Car, l’effet « indésirable », notamment, est défini, de façon précise, par le Code de la Santé publique (article R.5121-152) ; cet article définit aussi ce qu’est un effet indésirable « grave », « inattendu », etc..
En conclusion, et eu égard aux motifs (non exhaustifs) ci-dessus mentionnés, l’affirmation de cet article de presse (publié par le journal « Libération CheckNews »), qui semble vouloir imputer les réclamations enregistrées à notamment des « divers sites ou comptes opposés à la vaccination », nous semble être une argumentation, pour le moins, irrecevable : elle ne peut donc prospérer. Et en cas de divergence d’opinions, il y a lieu de se référer, d’abord, aux règles consacrées notamment par la « loi » (au sens large) et par les règles professionnelles ; au lieu de mettre à l’index, et publiquement, les déclarants (professionnels de santé, patients, etc.) qui ne font que suivre le cadre légal prescrit au système de pharmacovigilance français. Et d’autant plus que la sous-notification est habituellement forte en pharmacovigilance ; et que l’évaluation du rapport bénéfice/risque de ces nouveaux vaccins contre la Covid-19 n’est pas achevée.
source : https://ctiapchcholet.blogspot.com
Source : Lire l'article complet par Réseau International
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