par Strategika 51.
Selon les clauses d’un Accord conclu en février 2020 entre les Talibans d’Afghanistan et l’administration Trump, les forces étrangères déployées dans ce pays devaient entamer un retrait graduel qui devrait prendre fin le 1er mai 2021. En échange, les Talibans s’abstiendraient de toute attaque ciblant les forces étrangères déployées dans ce pays depuis octobre 2001.
La nouvelle administration Biden a révisé cet Accord très difficilement négocié au Qatar et a décidé que les forces US demeureraient en Afghanistan après la date du 1er mai 2021 en arrêtant une autre date pour ce retrait. Cette dernière devant coïncider avec le vingtième anniversaire des attaques du 11 septembre 2001, une date symbolique rejetée par les Talibans comme étant étrangère à leur pays.
Or, le premier délai du 1er mai 2021 est passé sans qu’aucun retrait n’ait été enregistré. C’est le contraire qui est constaté : les renforts militaires US ne cessent d’affluer vers l’Afghanistan. Officiellement, il s’agit d’un déploiement visant à protéger le retrait militaire intégral. Un paradoxe dont l’objectif est d’assurer que Washington puisse se retirer du bourbier afghan sans humiliation et en gardant la face.
C’est loin d’être l’avis des chefs militaires de la coalition qui redoutent désormais que les Talibans passent à l’offensive à outrance. Ce qui conduira à intensifier les opérations militaires et à retarder tout retrait. Un second paradoxe que la situation sur le terrain transcende. Depuis des mois, le nombre de soldats de l’Armée nationale afghane (ANA) passant dans le camp Taliban avec armes et bagages est en augmentation constante dans toutes les provinces.
Cette tendance inquiète au plus haut point les stratèges du Pentagone qui redoutent une recrudescence exponentielle des opérations militaires des Talibans après le passage du 1er mai. Toutes les grandes villes du pays ont été mises en état d’alerte maximale et Kaboul était survolé par des dizaines d’aéronefs en ce premier mai 2021. Il n’y a pas eu d’attaque significative en cette journée hormis une attaque au mortier ayant visé l’aérodrome militaire de Kandahar. Les Talibans estiment, de leur côté, que le délai non respecté du 1er mai 2021 était une violation flagrante de la parole donnée et des Accords en menaçant de déclencher une offensive sans répit contre les forces étrangères présentes en Afghanistan.
Détail intéressant, les négociateurs Talibans ne croient nullement à un retrait des forces étrangères de leur pays d’ici le 11 septembre 2021 et estiment que Washington essaie uniquement de gagner du temps pour garder la face et redéfinir les bases du conflit. Pour un haut responsable du mouvement, aucun retrait n’est possible avec cette administration. Les consignes données aux Talibans sont un peu plus claires que les lignes ambiguës de la stratégie de sortie de crise US : passé le délai du 1er mai 2021, il faudra empêcher les forces étrangères de donner l’impression d’en avoir fini avec cette guerre à leur avantage.
La guerre d’Afghanistan est la plus longue de l’histoire militaire des États-Unis et de la plupart des pays de l’OTAN. C’est également l’une des guerres les plus coûteuses de la période post-1945. Elle aurait coûté selon les estimations les plus optimistes entre 2,6 et 3,2 trillions de dollars US sans parvenir à aucun résultat probant. Elle a surtout drainé les ressources des États-Unis en dépit de la mise en place de mécanismes de génération de cash et d’une corruption monstrueuse qui a bénéficié aux parasites gravitant autour du complexe militaro-industriel. Cette guerre désastreuse va continuer au delà du 11 septembre 2021 car il n’y aura pas de retrait effectif à cette date. L’Afghanistan est un piège configuré pour les empires. La première erreur des États-Unis a été d’y aller en 2001 en se basant sur de faux prétextes parce que ce pays paraissait être détruit. C’est une nasse sans fin.
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