
Par Moon of Alabama – Le 10 février 2025
Dans une variante du programme de propagande « Semer le doute sur la Chine – Mais à quel prix ? », le New York Times affirme (de manière quelque peu raciste) que la Chine n’a pas la capacité de transformer les talents en innovation :
Que dit le succès de DeepSeek à propos de la capacité de la Chine à encourager le talent ? (archivé) – New York Times, 10 février 2025
Le sous-titre révèle la thèse principale :
La Chine produit un grand nombre de diplômés en sciences et techniques, mais elle n’est pas réputée pour son sens de l’innovation. Des facteurs culturels et politiques peuvent contribuer à expliquer cette situation.
Dans un monde globalisé, la capacité d’innovation d’un pays peut être mesurée par le nombre de brevets mondiaux qu’il dépose.
L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) fournit des données à ce sujet.
La Chine, qui, selon le NYT, n’est pas connue pour son sens de l’innovation, est de loin en tête du peloton.
On pourrait arguer que la Chine, avec une population quatre fois supérieure à celle des États-Unis, aurait dû innover encore plus que cela. Mais sous cet angle, les États-Unis sont également loin d’être en tête.
Par million d’habitants, la Chine a déposé 1,2 brevet par an, contre 1,5 pour les États-Unis. Mais les véritables leaders sont la Corée du Sud avec 5,5 brevets par an et par million d’habitants, suivie par le Japon avec 3,3/an/million.
Les chiffres du monde réel ne conviennent pas pour étayer la thèse centrale du NYT. C’est pourquoi il en mentionne à peine quelques-uns. Son argument se résume à une question politique :
Pavel Durov, fondateur de la plateforme de messagerie Telegram, a déclaré le mois dernier que la concurrence féroce dans les écoles chinoises avait alimenté les succès du pays en matière d’intelligence artificielle. « Si les États-Unis ne réforment pas leur système éducatif, ils risquent de céder le leadership technologique à la Chine », a-t-il écrit en ligne.
La réalité est plus complexe. Certes, la Chine a beaucoup investi dans l’éducation, en particulier en sciences et technologies, ce qui lui a permis de se doter d’un important vivier de talents, essentiel à son ambition de devenir un leader mondial de l’intelligence artificielle d’ici à 2025.
Mais en dehors des salles de classe, ces diplômés doivent également faire face à des obstacles tels qu’une culture d’entreprise contraignante et les caprices politiques du parti communiste au pouvoir. Sous la houlette de son dirigeant actuel, Xi Jinping, le parti a mis l’accent sur le contrôle plutôt que sur la croissance économique et s’est montré prêt à sévir contre les entreprises technologiques qu’il juge trop influentes.
Si c’est le cas, en quoi est-ce supposé être mauvais ?
En quoi est-il vraiment sain pour un pays d’avoir Apple, Nvidia, Microsoft, Amazon et Alphabet (Google) en tête de la capitalisation boursière ? L’auteur ne répond pas à cette question.
Au lieu de cela, il induit en erreur sur la prétendue répression :
Pékin a béni le secteur de l’I.A. – pour l’instant. Mais en 2020, après avoir décidé qu’elle avait trop peu de contrôle sur les grandes entreprises comme Alibaba, elle a lancé une vaste campagne de répression d’une durée d’un an contre l’industrie technologique chinoise.
Le propriétaire d’Alibaba, Jack Ma, a fait l’objet d’une répression lorsqu’il a tenté d’étendre Alibaba au secteur de la technologie financière (fin-tech).
Jongler avec le crédit et ses divers dérivés est un aspect de l’économie qu’il vaut mieux garder sous contrôle. La crise du crédit hypothécaire de 2008 et le renflouement des banques privées par les pouvoirs publics qui s’en est suivi l’ont bien montré. Verser de l’argent et des talents dans un secteur qui n’est pas productif et qui comporte des risques élevés n’est pas dans l’intérêt de la société.
En aparté, l’auteur du NYT est sur le point de le reconnaître :
(Le fondateur de DeepSeek, Liang Wenfeng, s’est tourné vers l’I.A. alors qu’il se concentrait auparavant sur le commerce spéculatif, en partie à cause d’une autre mesure de répression du gouvernement).
Comment peut-on en conclure que la Chine doit encore se libéraliser ?
Mais la meilleure façon pour la Chine de tirer parti de sa main-d’œuvre bien éduquée et ambitieuse dans le domaine de l’I.A. pourrait être que le gouvernement se retire du chemin.
La planification et le contrôle de l’éducation et de l’économie par le gouvernement chinois sont à l’origine de l’étonnante ascension de la Chine.
Ne disposant pas de l’abondance de capitaux qu’OpenAI et d’autres entreprises américaines consacrent à leurs tentatives de monopolisation de leurs domaines, DeepSeek a dû innover. C’est ce qu’elle a fait et elle a battu ses concurrents.
Il est difficile d’expliquer comment une intervention gouvernementale moins importante aurait permis d’obtenir de meilleurs résultats que ceux obtenus par la Chine. Le NYT, pour sa part, n’y parvient pas.
Moon of Alabama
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.
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