Les autrices sont respectivement secrétaire et présidente de Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec)
Lors de son investiture à la Maison-Blanche le 20 janvier 2025, le président Trump a signé un décret visant à mettre fin à l’autoidentification du genre et à rétablir la «vérité biologique», conformément à la promesse électorale de s’attaquer à ce qu’il appelait le «délire transgenre».
Sous sa gouverne, les politiques états-uniennes ne reconnaîtront que deux sexes, masculin et féminin, notamment sur les passeports, et interdiront l’inclusion d’hommes biologiques dans les prisons et les sports féminins.
Les transitions médicales ou chirurgicales ne seront plus financées par des fonds fédéraux. Cependant, le décret ne mentionne pas l’interdiction de ce type de traitements pour les mineurs, tels que c’était annoncé durant la campagne électorale.
Plusieurs féministes partagent également les mêmes points de vue sur la question trans et critiquent, elles aussi, les politiques en faveur de l’inclusion d’hommes biologiques dans les lieux réservés aux femmes, alors que ces toilettes, vestiaires, prisons sexospécifiques sont là pour assurer leur sécurité et leur intimité.
Ce point de vue critique en faveur des droits des femmes est aussitôt amalgamé à la droite conservatrice, voire à l’extrême droite, par les transactivistes radicaux et très souvent par les grands médias qui adhèrent à cette mouvance qui nous vient des États-Unis.
Permettons-nous de nuancer cette idée. Oui, la droite est parmi les voix qui s’opposent vivement à l’avancée des droits des personnes transgenres ou à l’orientation homosexuelle. Les médias et les réseaux sociaux leur accordent beaucoup de visibilité alors que le point de vue des féministes universalistes comme celui de PDF Québec est peu entendu.
Dès avril 2015, donc avant la présidence de Trump, PDF Québec a tenté de susciter un débat démocratique concernant la dysphorie de genre qui touchait davantage les jeunes filles. Au lieu de débattre de cette nouvelle tendance sociale, notre position a été amalgamée avec l’homophobie.
Rappelons aussi qu’en 2017, alors que le fédéral adoptait la Loi modifiant les droits de la personne et le Code criminel (Loi C-16), PDF Québec criait pratiquement seul dans le désert à propos des risques, pour les femmes, du fait que la Loi accorde des droits en fonction du genre ressenti alors qu’ils avaient été érigés pour les besoins sexospécifiques.
Les cas récemment médiatisés de criminels dangereux qui purgent ou ont purgé leur peine dans une prison pour femmes après avoir fait une transition de genre ont montré que les craintes de PDF Québec et de plusieurs féministes étaient fondées.
Associer systématiquement à la droite les critiques des enjeux soulevés par l’autoidentification de genre et par la médicalisation du traitement de la dysphorie des jeunes, c’est contribuer à museler le débat. Bien des gens, de tous les horizons, se rendent compte des dérives actuelles, mais ils ont peur de se faire étiqueter à droite ou d’être associés à Trump.
Or, chez les féministes, comme chez celles et ceux qui se réclament de la gauche, il y a des clivages sur cette question. Le néo-féminisme (de 3e vague ou intersectionnel) définit les femmes comme toute personne qui s’identifie comme femme, peu importe son sexe de naissance. Les féministes universalistes, dont nous sommes, sont critiques de «cette idéologie qui efface les filles et les femmes».
Historiquement, les discriminations et les violences qu’ont subies et subissent encore les femmes se fondent sur leurs particularités biologiques. C’est pourquoi PDF Québec défend la préservation d’une distinction claire entre le genre, qui est une catégorie sociale, et le sexe, qui est une catégorie biologique.
Si, sur cet enjeu de l’idéologie du genre, il semble y avoir un point de rencontre entre conservateurs et féministes universalistes et de gauche quant au fait de préserver la sécurité des femmes, ils ont plusieurs désaccords, notamment face à l’avortement.
Il en est de même de l’importance accordée à l’éducation à la sexualité, à la condition que celle-ci soit expurgée des idéologies militantes queer qui se sont immiscées dans les programmes scolaires.
Pourquoi avoir laissé à la droite conservatrice, souvent associée aux chrétiens ou aux musulmans traditionnalistes, la défense de l’intégrité des femmes et des mineurs alors que la gauche semblait être absente dans la protection des droits des enfants et des femmes?
Comment une certaine gauche peut-elle donner son aval au communautarisme et à la censure de la liberté d’expression en participant à la cancel culture qui nous vient des États-Unis?
Selon Mohamed Lotfi, « il fut un temps où nos débats et nos combats de société avaient pour objectif plus d’égalité. Aujourd’hui, c’est le combat pour l’identité qui les accapare et les empoisonne! »
Souhaitons la fin d’une rectitude politique moralisatrice qui préfère affubler les adversaires d’épithètes infamantes au lieu d’une véritable conversation démocratique sur des enjeux complexes.
Pour les droits des femmes du Québec – PDF Québec https://site.pdfquebec.org/fr
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