Je m’autorise de ce que fait Donald Trump, qui n’a de cesse d’affubler ses adversaires de qualificatifs souvent orduriers et qui n’hésite pas à jouer avec leurs noms pour faire rire son club d’adorateurs inconditionnels. La dernière victime en date est le gouverneur de la Californie, Gavin Newsom, dont il a travesti le nom en Newscom.
Un felon – félon en français – est un traître à son maître. Le problème, ces jours-ci, c’est qu’on ne sait plus qui est le boss de qui…
Un récent montage qui a circulé sur les médias sociaux exprime en partie pourquoi on peut s’interroger à savoir qui mène :
Canada : not for sale
Panama : not for sale
Groenland : not for sale
America : recently bought by Elon Musk !
La fortune personnelle de Musk a grimpé en flèche depuis l’élection de Trump : 147 milliards US. Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce Musk sait où se trouve son intérêt. Le spectacle auquel on assiste depuis deux mois, alors qu’on voit défiler à Mar-a-Lago des oligarques comme Bill Gates, Jeff Bezos et Mark Zuckerberg, venus prêter allégeance à Trump, comme le font les affidés à un chef mafieux, confirme que ce système est tout sauf une démocratie. Une oligarchie qui n’a rien à envier à celle dirigée en Russie par Poutine.
Mais dans certains milieux de l’extrême droite américaine, on commence à s’interroger. À commencer par Steve Bannon, qui fut un temps le gourou de Trump. Il déclarait récemment que Musk « est devenu accro à l’adoration que les rassemblements lui ont apportée pendant la période précédant le jour de l’élection ». Dans le Corriere della Sera du 8 janvier, il accusait : « C’est un homme vraiment diabolique, un très mauvais gars. J’ai fait de mon mieux pour le faire tomber. » .
La commentatrice Laura Loomer en a rajouté : « En tant que fidèle partisane du président Trump, je le soutiens suffisamment pour tirer la sonnette d’alarme sur ce qui est en train de devenir un boulet. Vous n’êtes pas autorisé à remettre Musk en question, semble-t-il, et la question qui se pose est la suivante : Donald Trump va-t-il intervenir avant que cela ne crée une crise pour son administration ? »
Musk, jamais élu par personne, a pris en main la politique internationale des États-Unis.
Il traite le chancelier Olaf Scholz de « tyran antidémocratique », tout en appelant ouvertement à voter pour le parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne, un parti dont la cheffe dit qu’il est « libertarien et conservateur, mais qu’on veut le faire passer pour extrémiste ». Il s’en prend au gouvernement britannique de Keir Starmer, l’accusant de « protéger des gangs de pédos immigrés et de diriger un État policier tyrannique. » Il vante les mérites de Georgia Meloni, première ministre d’Italie, pas particulièrement de gauche…
Sans parler de ce qu’il pense de Justin Trudeau et qu’il a étalé publiquement, le traitant d’insupportable abruti et l’interpelant sous le vocable fort peu gracieux de « fillette ».
Malgré leurs défauts, ces pays sont encore des démocraties.
Mais, curieusement, on n’a pas entendu un seul mot sur des régimes autoritaires, comme la Russie, la Chine, l’Arabie saoudite et autres contrées dirigées par des hommes forts comme les aime Donald Trump.
Parlant de la Chine…
Dans sa gigafactory de Shanghai, celui que Trump a nommé son conseiller en efficacité gouvernementale fabrique 950 000 Tesla par année, soit 40 voitures à la seconde… Or, Musk est comme cul et chemise avec la Chine. On peut entrevoir d’ici le choc alors que Donald Trump veut rapatrier sur le sol américain la production dont la Chine inonde les États-Unis.
Celui qui dit vouloir sabrer 2000 milliards de dollars dans les dépenses fédérales s’y connaît en matière de hache budgétaire. Jean-François Nadeau y a fait allusion dans une récente chronique du Devoir. Le Canard enchaîné, sous le titre Le bilan saignant d’Elon Musk, décrit comment, pour arriver à ses fins, il n’a aucun respect pour la santé et la vie de ses employés.
À ses deux usines du Nevada et de la Californie, les mesures de sécurité ont été enlevées pour accélérer la cadence de la chaîne de montage, avec le résultat que le taux d’accident est désormais « supérieur de 30 % à la moyenne de l’industrie américaine. » Même chose à l’usine de Berlin. « Cadences infernales, explosion des accidents de travail, syndicats bannis et salaires riquiqui », écrit Le Canard. L’usine qui fabrique les fusées de SpaceX, au Texas, fonctionne sur la même base. Le taux d’accident y est sept fois plus élevé que dans le reste de l’industrie : 5,9 blessures pour 100 travailleurs contre 0,8 pour la concurrence, souligne l’hebdomadaire.
Comme le Narcisse de Mar-a-Lago n’apprécie pas qu’on lui fasse ombrage, qui sera le maître et qui sera le traître ? Musk pourrait bien devenir l’un des principaux marionnettistes du pantin Trump afin de nourrir ses propres intérêts, comme l’écrit le Slate.
« That is the question », aurait décrété Shakespeare.
Source: Lire l'article complet de L'aut'journal