Tunisie, 14 janvier 2011 – 14 janvier 2025 : La Révolution nous appelle ! par Salah HORCHANI

Tunisie, 14 janvier 2011 – 14 janvier 2025 : La Révolution nous appelle ! par Salah HORCHANI

Kaïs Saïed nous a plongés dans l’abîme des tourments dont on a cru s’être débarrassé

Après que les foules révolutionnaires du 14 janvier, d’une seule voix, eurent crié

« La khawf baaâd al yaoum ! », « Plus jamais peur, à l’avenir ! », car, en son régime, la peur, il a restaurée

Après une décennie d’éclaircies où nous nous sommes sentis libres dans l’exercice de notre pensée

Où l’intérêt pour la chose publique et l’engagement pour le bien commun furent vivifiés

Où nous exprimions nos opinions, sans aucune crainte, sur la politique et plein d’autres sujets

Un climat de peur s’est installé avec l’impression d’être surveillés, à tout moment, menacés

Par la machine judiciaro-policière, grâce au décret liberticide 54, prête à nous écraser

À tel point que beaucoup d’entre nous s’interrogent sur la possibilité de retrouver, un jour, notre liberté

D’autant plus que l’approche de la répression sécuritaire et de l’oppression semble être pleinement adoptée 

Un climat de plus en plus lourd, de mémoire d’octogénaire, jamais vécu par le passé

Et ce, que ce soit sous le protectorat, sous Bourguiba ou sous Ben Ali, au grand jamais

Un climat de verrouillage de l’espace public où, fréquemment, sont poursuivis, voire emprisonnés

Des politiques, des acteurs de la société civile, des journalistes, des facebookeurs, des syndiqués,…

Où, d’après le CRLDHT, les prisons se sont transformées en outil de vengeance et de cruauté [1]

En vertu d’un « usage abusif » de la détention préventive, par Amnesty international, dénoncé

Un climat inédit caractérisé par des pressions de plus en plus croissantes sur la civile société

Où la répression contre les associations et les militants des droits humains ne fait que s’ intensifier

Militants qui se retrouvent incarcérés, en réalité, en raison de leur associative activité

Et de leur engagement civique, mais, officiellement, pour suspicion de financement occulte, étranger

« Les impliquant, [selon Kaïs Saïed], dans un complot visant » les citoyennes et étatique sécurités 

Et cela, même si « les fonds reçus par l’association provenaient d’organisations, à l’ONU, affiliées » 

Ces « accusations sont [généralement] accompagnées de campagnes médiatiques visant à discréditer

Les défenseurs des droits humains » soulevant « de graves inquiétudes quant au respect du droit à un équitable procès » 

Et, presque toujours, ces accusés, à l’issue de leur interrogatoire, en prison, sont transférés [2]

Ces événements s’inscrivent dans un contexte préoccupant de criminalisation de la solidarité [3]

Et de diabolisation de la société civile critique envers le régime du coup d’État du 25 juillet [2]

Un climat marqué par la reprise en main, par le pouvoir en place, des médias publics et certains médias privés

Leur faisant perdre la crédibilité qu’ils ont acquise après la révolution du 14 janvier

Nous ramenant à la funeste période qui l’a précédée, mettant en péril notre droit de nous informer

Librement, nous privant de pouvoir accéder à des médias exerçant en toute indépendance leurs activités

Conduisant au dévoiement de notre démocratie naissante par le développement d’une presse orientée

Les mêmes pratiques d’hier ont été reprises, sous des apparences trompeuses et drapées, par le régime du 25 juillet 

On a eu peur pour nos libertés du temps des islamistes, aujourd’hui, elles sont réellement détériorées

Ils n’ont emprisonné personne pour ses opinions ; ce qu’ils n’ont pas osé faire, le régime du 25 juillet l’a fait

À cause d’un post, d’un commentaire, d’un graffiti, d’une opinion exprimée, on peut, en prison, se retrouver

Une certaine mélancolie, liée à cette ambiance inquisitoire, se lit, sur les visages des militants, désormais

Dans leurs réunions, rassemblements et manifestations, et aussi sur ceux des déçus du 25 juillet

Les citoyens, de moins en moins, participent au débat politique et sont, dans la vie publique, moins impliqués

Mais, où est donc passée cette euphorie qui a alimenté notre combat pour nos droits et libertés

Support de rêves collectifs, de discours portant sur l’avenir, de projets ambitieux, de novatrices idées

Où l’on parlait de l’égalité femme-homme devant l’héritage, de la justice sociale, de la laïcité

De la lutte contre l’islamisme, de la liberté de pensée, de la mainmise du Qatar sur notre destinée

De la séparation des pouvoirs, de l’indépendance de la justice et du parquet, de notre tunisianité

Mouvement d’une ampleur sans précédent dans toute l’histoire de notre pays qui, acteurs, nous a propulsés

Sur le devant de la scène, accompagné d’un authentique vent de liberté qui, partout, a soufflé

Mouvement que nous avons cru capable de tourner la page, de nous permettre, de l’avant, aller 

Mais, où sont donc passés ces débats libres et contradictoires qui avaient envahi radios et télés

Traitant, sans langue de bois, sans faux-fuyants, ni tabous, plein de sujets divers de publique utilité

N’hésitant pas à critiquer sévèrement nos gouvernants, de tous grades, à moquer, à invectiver

Et ces manifestations permanentes, dont le Sit-in du départ qui, toutes les générations, avaient rassemblées

Réunions-forums, refaisant le monde, qui ont maillé le pays, villes et villages les plus reculés

Sit-in qui, du pouvoir islamiste et de sa constitution islamistisée nous a débarrassés [4]

Et cette Tunisie qui avait brisé les chaînes d’une dictature bien installée, où est-t-elle donc passée

Qui avait inventé le slogan « Dégage ! », devenu slogan universel pour tous les révoltés

Qui se retrouve, aujourd’hui, sous la coupe d’un autocrate qui, à sa Révolution, n’a point participé [5]

D’un régime où conservatisme, totalitarisme, populisme et islamisme y sont conjugués [5], [6]

Résistance-résilience-engagement sont les maîtres-mots de notre salut, de sortie de l’abîme, leurs mots-clés

Et je me battrai jusqu’à ce que le jasmin refleurisse, jusqu’à ce que l’on retrouve nos libertés

Comme je l’ai fait, ma vie durant, quand j’ai combattu pour mes principes et valeurs, depuis mes années Lycée [7]

Le chemin est long, même si son système, via les taux de participation aux scrutins qu’il a organisés

Pour le mettre sur pied, à chaque fois, par une majorité écrasante d’électeurs, a été rejeté

Je me battrai sans relâche pour reconquérir nos droits spoliés, dont le premier : le droit de pouvoir s’exprimer

Librement, le plus important acquis de notre Révolution, droit qu’il faut absolument restaurer

Je me battrai jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucun prisonnier politique, aucun prisonnier pour ses idées

Je reste un citoyen engagé qui, jusqu’à son dernier souffle, se battra, sans relâche, pour les droits et les libertés

Que nous avons acquis de haute lutte, pendant des années, et qui, par le régime actuel, nous ont été volés

Pour que la Tunisie, de l’islamisme, du populisme, de l’autocratisme soit, à jamais, débarrassée

Taire ma voix, baisser les bras, je ne peux l’imaginer ; même si le combat paraît bien difficile et trop risqué

Dans la défense des libertés, le silence est lâcheté et complicité ; chaque action compte, soit-elle isolée 

« La Révolution nous appelle, la liberté guide nos pas », comme l’aurait dit le poète Marie-Joseph Chénier [8]

Salah HORCHANI

[1] https://www.facebook.com/photo/?fbid=1837084050397649&set=a.120896128683125

[2] https://www.businessnews.com.tn/pressions-croissantes-sur-la-societe-civile–le-cas-de-saloua-ghrissa,520,144181,3 

https://www.businessnews.com.tn/la-militante-saloua-ghrissa-adresse-un-message-depuis-sa-prison,520,144140,3

https://www.businessnews.com.tn/diabolisation-de-la-societe-civile–gare-a-la-derive,519,142550,3

[3] https://www.ldh-france.org/tunisie-non-a-la-criminalisation-de-la-solidarite-avec-les-migrants-appel-a-la-solidarite-avec-abdallah-said/

https://kapitalis.com/tunisie/2024/12/19/tunisie-des-ong-defendent-les-droits-des-migrants/

[4] https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/091015/prix-nobel-de-la-paix-2015-une-petite-pensee-pour-le-sit-du-depart

[5] https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/220919/tunisie-mais-qui-est-kais-saied-favori-de-la-course-au-palais-de-carthage

[6] https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/080921/tunisie-monsieur-le-president-kais-saied-de-votre-systeme-n-en-veut-pas

[7] https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/220521/genese-de-mon-engagement-politique-accompagnee-de-quelques-temoignages-et-souvenirs 

https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/060820/arrive-au-crepuscule-de-ma-vie-je-dois-avouer

https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/010717/un-sizain-resumant-mon-combat-contre-les-islamistescause-de-mon-ejection-de-facebook

https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/111117/tgi-de-paris-non-lieu-dans-le-proces-intente-par-ghannouchi-rached-mon-encontre

Que le temps passe vite ! Le lien ci-dessous contient une photo, capture d’écran, prise lors de ma participation au double-rassemblement [Islamisto-fasciste VS Moderno-progressiste], qui a eu lieu le 19 Avril 2012, devant le Tribunal de première instance à Tunis, pendant le procès de la chaîne Nessma TV , poursuivie pour avoir diffusé le film Persepolis en octobre 2011. Depuis, mes cheveux n’ont plus guère blanchi !

https://www.facebook.com/photo/?fbid=1283378299101563&set=a.117719242334147

[8] Extrait de la référence ci-dessous, augmenté substantiellement.

https://www.legrandsoir.info/tunisie-liberte-pour-les-prisonniers-d-opinion-victimes-du-regime-du-25-juillet.html

»» https://blogs.mediapart.fr/salah-ho…

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Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir

À propos de l'auteur Le Grand Soir

« Journal Militant d'Information Alternative » « Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »C'est quoi, Le Grand Soir ? Bonne question. Un journal qui ne croit plus aux "médias de masse"... Un journal radicalement opposé au "Clash des civilisations", c'est certain. Anti-impérialiste, c'est sûr. Anticapitaliste, ça va de soi. Un journal qui ne court pas après l'actualité immédiate (ça fatigue de courir et pour quel résultat à la fin ?) Un journal qui croit au sens des mots "solidarité" et "internationalisme". Un journal qui accorde la priorité et le bénéfice du doute à ceux qui sont en "situation de résistance". Un journal qui se méfie du gauchisme (cet art de tirer contre son camp). Donc un journal qui se méfie des critiques faciles à distance. Un journal radical, mais pas extrémiste. Un journal qui essaie de donner à lire et à réfléchir (à vous de juger). Un journal animé par des militants qui ne se prennent pas trop au sérieux mais qui prennent leur combat très au sérieux.

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