On vient d’annoncer aux nouvelles de fin d’année que les itinérants n’ayant pas de place dans les refuges, qui manquent cruellement de fonds, se présentent aux urgences pour passer une nuit au chaud. Je me dis souvent que c’est là une immense faillite de la société que de laisser ainsi des gens à la rue sans subvenir à leurs besoins.
C’est un échec de la société capitaliste surtout, devrait-on dire, car le responsable de l’urgence que le journaliste interviewait demandait qu’on ouvre un poste de travailleur social pour prendre en charge ces itinérants qui se présentent aux urgences pour se réchauffer en cas de grands froids. La solution existe donc. Elle est suggérée par le personnel hospitalier. Qu’attend-on?
Les responsables se tourneront peut-être vers le gouvernement pour demander des fonds qui, on s’en doute, ne viendront pas, par manque de moyens dira-t-on. On prétextera le peu de ressources. Pourtant, aux mêmes nouvelles, on annonçait que les 100 PDG les mieux payés au Canada ont déjà, en quelques heures, gagné le salaire annuel moyen. C’est donc que les ressources ne manquent pas!
C’est le courage politique d’aller chercher ces ressources où elles se trouvent qui manque. Et si jamais ce courage existait chez les décideurs, il s’en trouverait pourtant parmi les commentateurs politiques défenseurs du capitalisme, comme un Legault, par exemple, pour dénoncer une éventuelle « taxe orange » qui appauvrirait les supers riches.
Et, de toute façon, la bourse annonce chaque jour, aux mêmes nouvelles, l’augmentation de la richesse qui s’accumule entre les mains de quelques actionnaires. Et quand la bourse dégringole, par inadvertance, tous les conseillers financiers recommandent de ne pas vendre des actions baissantes pour ne pas les mettre à la disposition d’acheteurs opportunistes qui flairent la bonne affaire puisque les cours de la bourse finissent toujours par remonter.
Ainsi, une richesse presque inépuisable se concentre entre les mains d’actionnaires toujours plus riches et toujours moins nombreux dont on s’explique mal que les privilèges empêchent la socialisation, par un impôt minimum ou par des nationalisations, décidée démocratiquement en fonction de la majorité, au sein du système lui-même, qui, s’il se défend bien, peut être miné de l’Intérieur tout à fait démocratiquement dans ses faiblesses ou ses contradictions.
Ce sont donc les privilèges de ces ultrariches qui sont à la source du manque à gagner des administrateurs des hôpitaux et des décideurs politiques parce qu’ils concentrent entre leurs mains une richesse déviée dans les faits de ses objectifs progressistes.
Vous me direz que l’État est déjà obsolète, qu’il n’est toujours pas capable de gérer le bien public comme ces hommes d’affaires qu’on devrait recruter à sa tête et qu’il est plus qu’embourbé dans sa bureaucratie que jamais. Mais ce sont des arguments fallacieux de la droite américaine pour dégarnir l’État de moyens qui serait à sa disposition si on décidait de les attribuer aux revenus collectifs.
La société capitaliste est ainsi faite que, même si la décision politique venait, à la suite de l’indépendance, par exemple, par un souhait général de solidarité des Québécois, il faudrait envisager un pouvoir différent de la société libérale d’un Legault, socialiste celui-là, pour permettre à cette solidarité de s’exprimer
On ne viendra pas me répéter, si jamais un journaliste plus éveillé ou social-démocrate venait à l’évoquer, que cette richesse accumulée, une fois socialisée par l’impôt, ne permettrait pas d’engager ce travailleur social à l’urgence pour s’occuper des itinérants chassés de la rue par le froid à la place du personnel hospitalier si occupé.
Ainsi donc, même à l’intérieur du capitalisme, les solutions sont envisageables. Et si les gauches du PQ et de QS en venaient à tenir à leurs valeurs de plus grande unité et progressaient, il y des solutions à portée de main dès à présent. Mais, même là, est-ce que le courage politique les gagnera ou se laisseront-elles emporter par la pusillanimité des commentateurs de droite pro-capitalistes américanisés comme un Legault qui ne les lâche pas sans qu’elles ne ripostent rigoureusement?
Dans une société sociale-démocrate comme le Québec (n’a-t-elle pas atteint ce niveau politique, pour une bonne proportion d’entre elle, depuis les années 70 où elle est montée à l’assaut du ciel avec un René Lévesque, toujours admiré, comme leader?), il serait normal que les représentants politiques qui s’en réclament y fasse allusion de temps en temps!
C’est le souhait que je me fais pour l’année 2025 qui commence par un exposé, on ne peut plus clair, des contradictions du système capitaliste et de ses défenseurs politiques… même de gauche. Que la social-démocratie s’unisse en front uni autour d’objectifs progressistes, se ressaisisse bel et bien et passe à l’offensive proprement dit en dépit des obstacles autrement que contre elle-même, divisée et impuissante.
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