Enfin, notre ‘American Gorbatchev’ ?

Enfin, notre ‘American Gorbatchev’ ?

Enfin, notre ‘American Gorbatchev’ ?

26 décembre 2024 (17H30) – Pour notre compte, cela fait plus de 16 ans que nous parlons d’un ‘American Gorbatchev’, après que Gorbatchev lui-même ait été largement cité comme exemple nécessaire pour sauver les États-Unis de l’emportement vers le néant où le conduisait ce fameux ‘ Complexe Militaro Industriel’ ([CMI], devenu entretemps ‘Complexe Militaro-Médiatico-Hollywoodiste–Congressiste-Industriel’) dénoncé en janvier 1961 par Eisenhower. Retenez ce passage et, surtout, le qualificatif de “spirituel”…

« Cette conjonction d’un immense dispositif militaire et d’une grande industrie d’armement est nouvelle dans l’expérience américaine. L’influence totale – économique, politique, et même spirituelle – se fait sentir dans chaque ville, dans chaque parlement d’État, dans chaque bureau du gouvernement fédéral. Nous reconnaissons la nécessité impérative de ce développement. Nous ne devons cependant pas méconnaître ses graves implications. Notre travail, nos ressources et nos moyens de subsistance sont tous concernés. C’est la structure même de notre société. »

Dans les colonnes sans fin de ce site l’idée est sous-jacente depuis longtemps, et notamment dans la mesure où je reste, contrairement à une très large majorité de Russes et un grand nombre de dissidents-résistants, un admirateur de Gorbatchev et un admirateur ‘sur le vif’ puisqu’ayant vécu la période et connu les extraordinaires tensions ainsi que les vagues d’espoir qui la caractérisèrent. Certains ont gardé à l’esprit ce mérite de Gorbatchev d’avoir liquidé ce “monstre” (pas tant l’URSS que le Système qui l’avait investi), nullement sous la poussée des dépenses d’armement US suscitant l’épuisement par nécessité de tenir le rythme (un des premiers contes-simulacre des neocon).

Quoiqu’on en dise enfin, j’estime avec une grande force pour ma part qu’il n’y aurait pas eu un Poutine s’il n’y avait pas eu un Gorbatchev et sans lui l’URSS aurait été liquidée, ou disons liquéfiée avec les USA dans un énorme Système englobant les anciens ennemis-complices de la Guerre Froide. Et on aurait appelé cela : “globalisation”, pour sûr… Parmi ceux que j’aime citer, il y a James Carroll et son bouquin ‘The House of War’ (20 juillet 2006)

« Et regardez le plus grand exemple de ce changement – il a eu lieu en Union soviétique, qui s'est démantelée elle-même. Au lieu de tout mettre sur le dos de l'ennemi extérieur, elle a fait face à ses propres corruptions et s'est démantelée. Ce grand événement du 20e siècle – la disparition non violente de l'Union soviétique – est une source d'espoir que nous, Américains, devrions examiner de plus près. Notre insistance superficielle sur le fait que nous avons “gagné” la guerre froide signifie que nous n'avons pas besoin de regarder ce qui s'est passé de l'autre côté. Sous la direction de Mikhaïl Gorbatchev, en particulier, mais pas seulement lui, et en réponse aux pressions exercées par la base, la révolution de velours, l'Union soviétique nous a offert un moyen de prendre du recul par rapport à la pulsion totalitaire. Et nous devrions comprendre que nous pouvons le faire, nous aussi. Nous pouvons démanteler la structure d'une économie militaire. Nous pouvons transformer notre identité nationale. Nous pouvons cesser d'être une nation fondée sur la préparation à la guerre. Tout cela est possible. Cela s'est produit au 20e siècle et cela peut se produire au 21e siècle. »

Il y a encore beaucoup de choses à dire sur Gorbatchev, et surtout sur les relations Gorbatchev-Poutine, sur ce que Gorbatchev pensait de Poutine (plus intéressant que l’inverse), etc. J’ai mis en annexe un extrait d’une interview de Gorbatchev en 2007, donnant son avis sur Poutine. Ce n’est pas inintéressant.

Venons-en à notre ‘American Gorbatchev’

Oui, revenons à notre sujet. L’expression ‘American Gorbatchev’ a été largement utilisé par ‘dde.org’ à partir de 2008 et, disons, pour les deux années qui suivirent, et concernant le prestigieux et sémillant président Obama. Jamais un homme aussi intelligent et aussi fin accomplit une œuvre aussi catastrophique, – et, je dis le mot en pesant bien son sens le plus large, le plus haut et le plus bas à la fois, parlant de l’Au-Delà et des Enfers du Mordor : “une œuvre aussi diabolique”.

La première fois où l’expression fut nettement et clairement employée est celle du texte du 29 octobre 2008, dont le titre  est … « American Gorbatchev » (à lire en se reportant au texte du jour précédent, 28 octobre 2008, et à un autre du 28 avril 2008 où l’expression n’était pas employée en tant que telle mais présente dans son esprit).

• Il y eut une vingtaine-trentaine de textes (disons jusqu’au 20 septembre 2011) où l’on agita encore sérieusement cette hypothèse d’un Obama devenant notre ‘American Gorbatchev’, les derniers de plus en plus pessimistes, avant de passer à l’amertume de la dérision pour soi-même d’avoir seulement espéré que ce type serait bien le modèle en question. Naufrage complet, rigolade cynique, Prix d’Excellence de la Paix-par-anticipation à ce président qui faisait assassiner les gens, notamment les mariages terroristes et les familles villageoises anti-américanismes à des milliers de kilomètres, par drones-tueurs interposés, le cul tranquillement et héroïquement posé sur un siège en cuir-présidentiel de la ‘War Room’, de la Maison-Blanche, sous les caméras, avec une Hillary gloussante comme dinde en chamaille à ses côtés.

• En 2015-2017, on reprend le thème pour ‘The-Donald’, mais plutôt pas très sérieusement tant le personnage paraît politiquement et tactiquement léger dans la mare aux requins de Washington D.C. Disons qu’on en parle un tantinet sérieusement, du 9 octobre 2015 (« Ah Ah, Said the Clown ! »), où on laisse entendre et croire qu’Obama en serait bien un, par procuration, pour avoir accouché d’un Trump, ce qui n’est pas si faux dans la perspective historique, non ? Et cela jusqu’au 18 mai 2017 (« L’insaisissable “American Gorbatchev” »).

L’épisode Trump-I…

… En effet, je me suis précipité sur le sens général du texte « Ah Ah, Said the Clown ! », qui s’avéra complètement faux pour la période, mais qui pourrait prendre des allures prémonitoires aujourd’hui. Je vous rappelle la fin du texte :

« J’ignore si un ‘The Donald’ sera président, mais je sais qu’Obama a liquidé la présidence des USA quasiment d’une main de maître … Et alors m’apparaît l’évidence ! Car je finirais par croire qu’aveuglé par la pression de la raison antiSystème, celle qui m’avait fait regretter qu’Obama n’ait pas été l’’American Gorbatchev’ que je croyais qu’il serait, je ne serais pas, moi, en train de rater qu’en détruisant la fonction sacralisée du POTUS (President Of The United States), Obama nous a discrètement signalé qu’en fait, il a bien été cet ‘American Gorbatchev’ qu’on attendait de lui. Finalement, ce Machiavel désigné par le destin des forces du Ciel devenu antiSystème aurait-il joué sa faiblesse psychologique et sa carence de caractère pour justifier cette destruction qu’il a accomplie en douceur, “softly, as I leave you” ?

» Et ainsi seraient ses dernières paroles de Président, en passant les clefs de la Maison-Blanche à un Trump qui s’affublera aussitôt d’un nez rouge en chantant la fameuse chanson des Manfred Mann de nos jeunes années soixante :

» “Ah Ah ! Said the Clown” … »

Et parut Trump-II

… En effet, l’on sait aujourd’hui où l’on en est, les pages subversives bourdonnantes de thèses sur  les intentions et les aventures d’un président-bulldozer élu par tsunami populaire. Est-il manipulé ? est-il nul ? Est-il un super GW qui nous mène par le bout du nez ? Enfin bref ! Est-il un ‘American Gorbatchev’ ? Tout cela dans un délire total  qui secoue et emporte dans tous les sens les us et coutumes, les institutions, les serments et les drapeaux d’une Amérique devenue folle.

D’où, je pense qu’on le comprend, cet intérêt pour cette remarque de l’ancien diplomate Jim Jatras, ancien ambassadeur au Mexique, puis spécialiste attitré des affaires de sécurité nationale rattaché au Congrès :

« “Je pense que nous traversons une période prolongée, que j'appellerais une période de stagnation brejnévienne. Notre période de stagnation dure plus longtemps parce que, je pense, nous l'avons vécue pendant plus de dix ans“, a déclaré Jatras. “Trump est d’une certaine façon une sorte de Gorbatchev, qui pense pouvoir faire bouger les choses et sauver l’empire américain. Comme je l’ai dit, cela va conduire à une déstabilisation encore plus grande”.

» Jatras estime que le fait d’avoir les puissances occidentales comme camp opposé a conduit l’Union soviétique à connaître une stagnation relativement rapide.

» Cependant, les États-Unis n’ont actuellement aucun rival, ce qui pourrait rendre leur chemin plus long et plus difficile pour le monde entier, selon Jatras. »

Je ne sais pas si je suis bien d’accord avec lui. Jatras a beau penser ce qu’il pense il n’en reste pas moins américaniste, notamment avec la vision d’une Amérique structurellement solide, – illusion considérable à mon sens. Quant à Trump-II, qu’il fasse ou non le l’‘American Gorbatchev’  n’importe pas. Il s’agit de détruire, et rien d’autre ; on peut le faire en prenant sa dose de fentanyl pour se croire le plus fort des plus forts, ce qui fera un naufrage comme jamais vu dans l’histoire (l’Amérique exceptionnaliste) ; on peut le faire en comprenant bien ce qu’on fait, et alors vogue la galère ! De toutes les façons, c’est bien de l’‘American Gorbatchev’ qu’il s’agit.

Pour terminer, un vibrant hommage à celui que l’on a tant moqué : Joe Biden, Grand-Homme ! Car en étant ce qu’il fut, fou, dément, gâteux, entêté et rassis dans sa haine, il n’a fait que consolider l’œuvre de destruction d’Obama (celui-ci le manipulant de sa cave déguisé en bunker), et donc mettre l’Amérique en état de nécessité de recevoir les derniers soins de l’‘American Gorbatchev’.

 

Annexe : Poutine vu par Gorbatchev

Cette remarque vient d’une longue interview de Gorbatchev par Ulysse Gosset, diffusée sur la chaîne France 24, le 9 novembre 2007. Novosti publiait ce même 9 novembre des extraits de l’interview. Il est intéressant d’entendre ce que Gorbatchev pense de Poutine, ses rapports avec lui, ses considérations sur l’état et l’évolution de la Russie. Bien entendu, le jugement de Gorbatchev fait bonne et prompte justice de toutes les jérémiades occidentales et intéressées sur la stature morale du président russe ; je veux dire par là qu’il ne viendrait pas à l’idée d’un journaliste professionnel convenable de faire figurer cette interview dans un documentaire sur Poutine.

Ulysse Gosset : « Des regrets?

Mikhaïl Gorbatchev : «  … D’abord l’effondrement de l’Union Soviétique! On a été en retard avec les réformes : les gens étaient pour les réformes et en même temps ils voulaient préserver l'Union Soviétique. Presque 78% ont voté pour préserver l’URSS… Donc, c'est le premier regret j’ai pris du retard dans la réforme du parti qui est devenu un frein à la perestroïka. Il y encore beaucoup de regrets… Raymond Barre… m’a dit un jour : “Écoute Mikhaïl, Vladimir Poutine affronte une situation très dure. Dans des cas pareils, dans n'importe quel système, pour réussir, on ne peut tenir sans avoir recours à des mesures autoritaires”! Mais autant que je connais Poutine, il ne va pas instaurer de régime autoritaire. Je peux dire que Poutine a ses problèmes, parfois il fait des erreurs mais il avance dans la bonne direction… C’est vrai, il a parfois des actions autoritaires, mais après Eltsine l'armée était sur le point de se décomposer, les services sociaux, la médecine, les écoles ne fonctionnaient plus…Qu’est-ce vous voulez qu’il fasse, qu’il suive les manuels de savoir vivre ?….
 

Ulysse Gosset : « Quels sont vos rapports personnels avec Vladimir Poutine?

Mikhaïl Gorbatchev : « On n'est pas de proches amis mais… nous avons confiance l'un dans l'autre. Parfois, quand c’est nécessaire pour l’un ou pour l’autre, on se rencontre, mais je ne suis pas son conseiller. Quand je considère qu'il faut que je dise quelque chose, je le dis ouvertement via la presse.
 

Ulysse Gosset : « Quand Vladimir Poutine restreint les libertés d'opinion, quand il y a des emprisonnements d'opposants, on a vu le meurtre d'Anna Politkovskaïa qui n'est toujours pas résolu, vous n'êtes pas critique sur l'absence de démocratie? Sur ces questions-là, est-ce que vous n'êtes pas inquiet pour la démocratie en Russie et certains disent même que Poutine est un nouveau dictateur, qu'est-ce que vous en dites?

Mikhaïl Gorbatchev : « Je ne suis pas de cet avis. Poutine est un homme qui a une attitude très sérieuse vis-à-vis de ses obligations présidentielles. Il a sorti la Russie du chaos… J'ai beaucoup réfléchi sur qui critique qui, quand et pourquoi. Vous savez, pendant l’époque Eltsine, les gens pendant des mois où même des années ne touchaient pas leur salaire. Si cela s'était produit en France…, les Français auraient balayé le gouvernement !.. 

»Je pense que Poutine réagit à la critique de façon sérieuse. Il m'a dit qu’il est pour la presse libre, mais une presse responsable. Je crois que c'est la bonne attitude parce que la presse, parfois fait n’importe quoi… Poutine rencontre la presse plus que moi…; il travaille beaucoup avec la presse et c’est bien.
 

Ulysse Gosset : « Et Anna Politkovskaïa ?… Vous pensez qu’on va trouver l’assassin?

Mikhaïl Gorbatchev : « J'aimerais mais jusque là beaucoup de meurtres n'ont pas été élucidés et la question est de savoir qui est le meurtrier si on ne peut pas le prouver. Alors, j'espère qu'il sera retrouvé et je crois que l’intention de Poutine c’est aussi qu'il faut absolument trouver l'assassin.
 

Ulysse Gosset : « Si Vladimir Poutine n'est pas responsable de cette situation vis-à-vis de la presse et si, néanmoins, Anna Politkovskaïa a été assassinée, ça veut dire qu'il ne contrôle pas complètement la situation?

Mikhaïl Gorbatchev : « Je crois que c'est la responsabilité aussi bien de la société que du pouvoir…. Tout le monde pense que nous avons beaucoup progressé sur la démocratie. Nous sortons seulement de la période de transition pour aller vers des institutions démocratiques… Les Américains disent qu'ils veulent la même démocratie que chez eux mais moi je suis ravi !.. Nous sortons à peine de 70 ans d'un système qui était totalitaire, qui réprimait toute forme de démocratie !.. Alors, attendez, soyez patients…
 

Ulysse Gosset : « Je vous propose maintenant de voir les résultats d'un sondage… [qui] montrent que pour la majorité des sondés, la Russie redevient une grande puissance… Vous êtes satisfait, vous êtes fier?

Mikhaïl Gorbatchev : « Ce n'est pas une question de fierté. Le pays s'est relevé, il va de l'avant et cela se produit parce que les gens arrivent à résoudre leurs problèmes… et, bien sûr, la conjoncture était très favorable. Je pense que c’est Dieu qui aide la Russie à sortir de la crise. Il faut se souvenir qu’en Occident et en Orient, nos amis n'étaient pas très inquiets de la situation en Russie et ils applaudissaient Eltsine. On voyait, nous, que ça allait mal et l'Occident applaudissait! Alors, je me suis demandé ce que voulait l'Occident… Moi je suis très content qu’on se soit débarrassé de Eltsine, il est parti lui-même, il n’y avait que 2% de Russes qui le soutenaient… Maintenant, la Russie s'est relevée, elle reste la Russie, elle a son expérience, sa culture, son histoire pour participer à tous les processus mondiaux et l'absence de la Russie quand elle était en crise, c'était très mauvais pour la Russie, pour l’Europe et le monde. Mais maintenant, la voix de la Russie est écoutée… et la Russie accepte cette responsabilité… La Russie va être un partenaire fiable et stable mais c'est peut-être intéressant pour l'Europe de parler du chantage énergétique de la Russie… Je ne sais pas qui est l'otage de qui… Ce qui est important pour nous, c'est que nous sommes des amis, des partenaires historiques. Il faut qu'on fasse du commerce ensemble et que la Russie remplisse ses obligations.

»L'Occident nous critique: pourquoi vendons-nous à l'Ukraine, à la Moldavie, à la Biélorussie, à la Géorgie, le gaz à moitié prix? Le marché doit être le même pour tous. On prévient nos partenaires un an à l’avance… mais les autorités suprêmes de ces pays disent: “La Russie ne peut pas augmenter les prix, nous sommes frères”… On commence à prendre des mesures concrètes. A ce moment-là tout l'Occident s’insurge pour défendre l'Ukraine, la Biélorussie… Je vous confirme que La Russie est un partenaire fiable… Il ne faut pas mettre la Russie dans une situation difficile. Il n’y a aucun plan machiavélique…»

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À propos de l'auteur Dedefensa.org

« La crisologie de notre temps » • Nous estimons que la situation de la politique générale et des relations internationales, autant que celle des psychologies et des esprits, est devenue entièrement crisique. • La “crise” est aujourd’hui substance et essence même du monde, et c’est elle qui doit constituer l’objet de notre attention constante, de notre analyse et de notre intuition. • Dans l’esprit de la chose, elle doit figurer avec le nom du site, comme devise pour donner tout son sens à ce nom.

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