Une analyse de K.J. Noh du 6 Nov 2024, qui me plait assez. (Traduction par G. Rodi) .
Lorsque les électeurs étasuniens sont allés voter le 5 novembre, se sont-ils souvenu que lorsque les États-Unis élisent leur (supposé) dirigeant national, ils choisissent également l’empereur d’un empire mondial ultra-violent ?
Les choix faits sur diverses questions nationales ont des implications profondes qui vont bien au-delà des politiques locales, ils déterminent qui vit et qui meurt sur terre et combien de souffrances, de blessures et de souffrances le reste du monde subira.
Dans ce cas, il est juste de demander, qui est le moindre mal ? Trump ou Harris ?
Bien sûr, la réponse est « ni l’un ni l’autre ». Quand il s’agit du diable, compter avec les doigts n’est pas très utile pour savoir lequel s’en rapprocherait plus ou moins.
Kamala/Donald sont équivalents.
Cependant, entre deux choix terrifiants, la Présidente Kamala Harris – qui, d’une certaine manière, aurait maintenu une continuité institutionnelle avec l’administration Biden en conservant les conseillers clés – pouvait déclencher plus de guerres. En Ukraine, et très certainement autour de la Chine.
Non pas que Trump soit moins belliciste ou plus prudent, mais il pourrait bien ne pas être aussi efficace.
Trump perdra temps et énergie à présenter l’addition à ses ennemis intérieurs, ceux qui le harcèlent, le rabaissent, le trahissent, le diffament, le destituent, le poursuivent, l’accusent et qui peuvent encore être tentés de l’assassiner.
Il sera également plus souvent bloqué ou contrarié dans la mise en œuvre de son agenda politique par les forces du système, y compris s’il fait la guerre.
Et s’il tient ne serait-ce qu’en partie sa parole, le bonhomme nous offre des perspectives intéressantes.
1/ Pression sur Séoul.
Trump a parlé de multiplier par neuf le coût des troupes étasuniennes en Corée du Sud. Il a ouvertement qualifié la Corée du Sud de « machine à sous ».
Cette transaction commerciale pourrait mettre du sable sur les engrenages de la machine de guerre des EU qui se verrait bien faire de la Corée du Nord le premier endroit pour lancer une guerre sans fin avec la Chine.
Les Sud-coréens sont déjà furieux que leur Président Yoon ait placé les intérêts politiques et économiques du pays sous la férule de la politique étrangère des États-Unis, et ils pourraient le destituer s’il succombait à ce chantage flagrant.
D’autre part, si Yoon refuse de payer la note, le Gouvernement des EU diminuera son soutien. Là encore, le peuple sud-coréen pourrait se lever pour le renverser, tout comme l’ont été par le passé d’autres Présidents vendus aux intérêts étasuniens.
La rumeur selon laquelle les troupes nord-coréennes se battent en Ukraine serait une tentative de contre-feu de la part des stratèges du Pentagone.
En faisant ainsi monter les enjeux, le statut de la Corée du Sud (et de Yoon) s’élèverait au niveau d’un « pays pivot mondial » et l’entraînerait à participer militairement sur le front de l’Ukraine aux côtés de l’OTAN.
2/Pression sur Tokyo
Trump avait ouvertement défié Shinzo Abe, mais il a encore moins de relations personnelles avec le Premier Ministre japonais actuel.
Comme en Corée du Sud, il avancera grossièrement ses demandes pour augmenter la contribution du Japon au Budget des forces étasuniennes. Ce qui ne manquera pas de contrarier les dirigeants japonais (en disgrâce) et de provoquer la colère de la population. Une population déjà passablement énervée d’avoir à prendre en charge le coût des viols des GI sur les filles d’Okinawa.
L’alliance Japon /Corée/États-Unis est déjà fragile en raison des faiblesses politiques actuelles du Parti au pouvoir au Japon, et de la haine de la Corée du Sud à l’égard de la position de Yoon dont la popularité se traîne à 17%.
3/Pression sur Tapei
Trump a déclaré que les autorités taïwanaises devaient payer des frais de protection aux États-Unis car, pour Taipei, les États-Unis ne sont rien de moins qu’une compagnie d’assurance ».
Là encore, le DPP au pouvoir sera contrarié par la demande de Trump, d’autant qu’il s’agit d’une demande qu’ils ne peuvent pas refuser :
Ils seront tenus de payer une politique d’« assurance » qui leur garantira un déni de service quasi certain, tout en ruinant le pays.
Trump refusera de s’engager à envoyer des troupes à Taiwan pour soutenir le séparatisme orchestré par les États-Unis.
Dans le même temps, la Vice-présidente Louise Hsiao, une ancienne citoyenne des EU (!), sera bien embarrassée d’avoir misé toute sa communication sur le fait que « la guerre en Ukraine envoie un message fort à Beijing ».
4/ Pression sur Kiev
Tout comme l’administration Biden, Trump soutiendra également la poursuite du génocide et du nettoyage ethnique d’Israël, à condition que cela ne traîne pas de trop.
Mais il pourrait forcer une sorte de solution en Ukraine, car il déteste les défaites et les perdants, les loooosers.
A ses yeux, l’Ukraine est une cause perdue dont l’administration Biden portera le blâme.
Trump est extrêmement belliqueux, il est impulsif, mais son narcissisme le pousse à toujours essayer de se faire passer pour un gagnant. Tout comme un enfant trop gâté, il évitera tout défi qui pourrait exposer ses faiblesses.
Il est agressif sur l’Iran, cependant il est peu probable qu’il teste les limites de la puissance étasunienne avec l’axe de la résistance. Cela signifie qu’il hésiterait à lancer une guerre conventionnelle qu’il ne serait pas sûr de gagner, mais qu’il mettra le paquet sur la guerre commerciale.
5/ Les risques de dérapage catastrophique.
Le risque géopolitique majeur avec Trump, c’est qu’il ne comprenne pas bien les risques réels d’une escalade nucléaire.
Il a osé demander « Pourquoi avoir des armes nucléaires si elles ne peuvent pas être utilisées ? ».
Il pourrait bien être tenté ou incité à le faire.
Il en va de même pour le changement climatique. Trump a toujours nié le réchauffement climatique et déclaré qu’il s’agissait d’un complot chinois visant à saper l’économie des EU.
Cela dit, et même si l’Administration Harris-Biden a fait au moins semblant d’être active sur le sujet, elle estimait elle aussi qu’une transition durable était inacceptable car elle favoriserait le développement et la position mondiale de la Chine qui tient le haut du pavé en matière de solutions.
Tous s’accordent à penser que doubler l’utilisation de combustibles fossiles est dans l’intérêt stratégique central des États–Unis. Pour maintenir leur hégémonie, tous préfèrent voir brûler la planète que de laisser la Chine briller.
En fait, tous préfèreront détruire la Terre plutôt que de renoncer à une once de leurs privilèges en faveur du monde multipolaire émergent.
Plutôt mourir que d’être entraînés dans un monde de souverainetés indépendantes, de non-ingérence et de paix.
Trump élu, les pays du Sud prieront pour qu’il n’abandonne jamais son côté néo-mercantile et sa personnalité vantarde, étroite et narcissique.
Jusqu’à ce que les empires et leurs capitales se désintègrent…
Jusqu’à ce que l’Occident cesse d’utiliser la guerre pour relancer l’économie…
Trump pourrait bien être le seul moyen de sauver le monde.
… Si cette analyse de Kiji Noh me plait assez, c’est qu’elle colle bien à mon côté « accélérationniste ».
Je ne prétends pas être objectif. Mais quand même… Un peu d’espoir est bon à prendre.
K.J. Noh paraît sur un site australien. C’est loin de l’Europe.
Il ne parle pas de la pression sur l’UE.
Car Trump est aussi capable de présenter la note pour que soient remboursés les milliards investis sur le conflit en Ukraine.
Et nous pouvons évidemment compter sur Ursula pour ne pas défendre plus que cela les intérêts des membres de l’UE.
Les électeurs étasuniens en seraient enchantés.
Et la direction de Blackrock qui voit ses investissements en grand risque d’être perdus encore plus.
D’autant que, bien sûr, l’OTAN devra multiplier ses achats auprès du complexe militaro-industriel.
Enfin, ne négligeons pas qu’il pourrait aussi y avoir un effet Elon Musk.
Lui, s’il parvient à faire appliquer ses idées économiques, les EU seront en feu.
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir