L’occidentologie de Douguine

L’occidentologie de Douguine

L’occidentologie de Douguine

• Douguine propose un mot nouveau (néologisme ou non dans ce cas), l’occidentologie, – pour désigner et étudier l’ennemi à éradiquer sans la moindre retenue. • Ce faisant, il élargit fortement ses conceptions, car l’occidentalisme n’est pas l’ennemie de la seule Russie, ni même du Sud Global, mais également d’une grande majorité des peuples dits “occidentaux”. • C’est le porteur de la modernité devenue une religion apparentée à la démonologie qu’il désigne, atteignant ainsi conceptuellelment à l’éclaircissement des enjeux de la bataille.

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Douguine poursuit-il un rêve chimérique face aux innombrables concepts complotistes, dont la plupart fabriqués par les services occidentaux qui présentent ainsi la production corrompue et dégénérée du simulacre qu’ils ont créé ? Possible, comme sont possibles aujourd’hui d’innombrables pistes et certitudes d’innombrables interprétations qui ont la vertu convaincante, chacune, d’expliquer instantanément tous les événements étranges qui nous frappent avant de passer demain à une autre interprétation du même phénomène de subversion intérieure et monstrueuse qui nous entraîne depuis des millénaires, avec une fantastique accélération dans les dernières décennies et même les dernières années, dans un destin écrit d’avance et dont nous avons chaque jour une traduction différente mais des effets catastrophiques semblables.

Comme à notre habitude, nous laissons de côté ces certitudes occultes qui ne cessent de différer après avoir cru avoir raison, au moins le temps d’être diffusées ; et cela, en attendant la finale-dernière qui sera la jour de notre anéantissement. Certes, Douguine a choisi une autre voie . Dans cet univers hautement subjectif, nous préférons explorer cette voie, – et nous fesons référence à une volonté personnelle de fer de notre part pour ce choix qui tient compte essentiellement de la hauteur de la vision de Douguine. Notre naïveté selon certains, aura au moins servi à nous épargner la fièvre du voyant qui s’aperçoit qu’il voit tout avant les autres.

Douguine le mystique qui annonce la couleur et rejette la mortelle pseudo-rationalité occidentaliste connaît l’étrange destin de se retrouver parmi les plus “rationnels” (dans le bon sens du terme) au milieu de cet asile qui ressemble à ‘The Animal Farm’ d’Orwell où même les animaux avaient conçu la conspiration fatale. Enfin, passons, pour nous retrouver avec “l’occidentologie” de Douguine… Et l’on (Douguine) nous avertit aussitôt :

« “L'occidentologie est un nouveau concept qui devrait être adopté maintenant que le conflit entre la Russie et les pays de l'OTAN s'est intensifié en raison des opérations militaires en Ukraine, surtout si nous prenons en compte le fait que ce conflit, qui a commencé comme un conflit purement politique, s'est progressivement et irréversiblement transformé en un conflit entre les deux civilisations”.

» Cependant, il serait erroné de réduire l'ensemble du débat sur l'occidentologie à une lutte pour la création d'une science souveraine. Dans ce cas, il vaudrait mieux l'appeler “russologie” ou “eurasiologie”. Mais l'objet principal de ce champ d'étude est l'Occident. Pourquoi ? Parce qu'il est nécessaire de changer notre approche de la science occidentale en tant qu'avancée, en tant que “progrès”. »

Idée absolument, décisivement essentielle déjà développée par le Grand Sachem et Grand Inspirateur (par l’action expliquée par l’Esprit), le président Poutine. Il s’agit d’une remarque, et plutôt comme on dit “en passant”, dans son discours du 30 juillet 2022, sur l’incorporation des nouvelles républiques russes du Donbass. En effet et pour autant, nous ferons là aussi remarquer que Poutine est aussi avare de telles précisions que l’est Douguine, – car les deux sont Russes et bien Russes, et même s’ils s’en défendent ils ne parlent que de la Russie :

« La dictature des élites occidentales est dirigée contre toutes les sociétés, y compris les peuples des pays occidentaux eux-mêmes.

» Elles promeuvent avec défi la négation complète de l'homme, la subversion de la foi et des valeurs traditionnelles, ainsi que la suppression de la liberté, [au point qu’elles] ont acquis les caractéristiques d'une religion, d'un satanisme ouvert. »

La chose essentielle étant dite pour nous, – alors qu’elle est tout juste mentionnée par Douguine et Poutine, qui restent au fond d’eux-mêmes des nationalistes spiritualistes russes fervents, – on peut envisager le concept d’“occidentologie”, nous Européens et nous Français, qui nous concerne autant, sinon plus, que les Russes eux-mêmes, parce que nous en sommes somme toute les premières victimes. C’est alors en venir à l’‘optimisme eschatologiste’ de Daria Douguina au moment où elle fut assassinée, – c’est-à-dire cette volonté catastrophique d’un immense cataclysme qui susciterait et porterait, au-delà de nos terreurs bien compréhensibles, notre enthousiasme pour l’anéantissement sans pitié et sans faiblir, par l’acte eschatologique, des tares qui nous sont imposées et pèsent sur notre condition humaine.

Comme à l’habitude avec Douguine, les choses qui paraissent compliquées lorsqu’il s’agit des concepts de philosophes, restent des concepts de philosophes, et parmi les plus hauts, et s’avèrent être finalement, par leur évidence, sans aucune de ces complications propres aux philosophies occidentalistes modernistes qui habillent leur absence des simplicités essentielles des oripeaux des complications conceptuelles. L’occidentologie est donc « un concept clé pour la décolonisation de la Russie » (titre initial du texte), mais aussi sinon plus encore pour “notre” décolonisation commune à nous tous une fois bien mise en lumière la véritable signification du terme “décolonisation”, – cette “mise en lumière” devant d’ailleurs conduire à l’abandon de l’usage du terme…

Car il est vrai que nous abusons de ce terme, – et les Russes ne sont à cet égard pas les derniers, – en nous ébattant béatement dans son sens moderniste alors que la bataille est d’échapper à la modernité pour mieux l’anéantir, et donc de détruire tout ce qui est moderne, y compris dans les actes vils et monstrueux. “Colonisation” et “décolonisation” ont un sens bien précis, fixé dans à peu près 125 ans d’histoire pour les opérations essentielles et conçues comme telles, et mettant en cause quelques politiques extérieures similaires des pays américanistes-occidentalistes. Or, on a tendance à les universaliser, à les idéologiser dans des sens bien plus larges que la portion de l’histoire qui les contient, et à les appliquer à tous les actes de l’histoire de la modernité, et même de la pré-modernité sinon de l’Antiquité. C’est commettre à notre sens une bévue considérable parce que ces termes sont considérablement restrictifs et n’embrassent pas l’ampleur du problème que pose la modernité, et sa branche opérationnelle américaniste-occidentaliste dans sa dimension maléfique et démonologique.

Ce que nous devons dénoncer et combattre, cet occidentalisation qui est l’objet de l’“occidentologie”, a été justement définie par Poutine. Cela dépasse absolument, complètement, l’ensemble “colonisation”/“décolonisation” telles qu’elles se perçoivent selon notre connaissance et l’influence sur nous des idéologies, – lorsque Poutine dit dans la deuxième partie de la citation déjà faite, en parlant de l’œuvre des élites occidentalistes, du Mal qu’elles propagent, à la fois nihilisme et néantissement qui débouchent sur rien de moins qu’une religion du satanisme :

« Elles promeuvent avec défi la négation complète de l'homme, la subversion de la foi et des valeurs traditionnelles, ainsi que la suppression de la liberté, [au point qu’elles] ont acquis les caractéristiques d'une religion, d'un satanisme ouvert. »

Ce qui est décrit ici, c’est la production du Mal absolu, et le Mal mérite alors une description générale bien précise à la lumière d’une perception qui doit l’être tout autant. Il est ainsi constitué, selon notre perception telle qu’elle est si parfaitement définie par Plotin, pour ne pas former l’essence et la totalité des créatures et moyens humains qui en sont porteurs, – dans le cas qui nous occupe, même les élites occidentales ne se suffisent pas à la seule représentation du Mal, elles ne sont pas que le Mal. Ainsi Plotin disait-il, parlant parfaitement et avec maîtrise à la satisfaction de ce que nous percevons :

« Car on pourrait dès lors arriver à une notion du mal comme ce qui est non-mesure par rapport à la mesure, sans limite par rapport à la limite, absence de forme par rapport à ce qui produit la forme et déficience permanente par rapport à ce qui est suffisant en soi, toujours indéterminé, stable en aucun façon, affecté de toutes manières, insatiable, indigence totale. Et ces choses ne sont pas des accidents qui lui adviennent, mais elles constituent son essence en quelque sorte, et quelle que soit la partie de lui que tu pourrais voir, il est toutes ces choses. Mais les autres, ceux qui participeraient de lui et s’y assimileraient, deviennent mauvais, n’étant pas mauvais en soi. »

… Le texte de Douguine, dans ‘geopolitika.ru’, traduit dans ‘euro-synergies.hautefort.com’.

dedefensa.org

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L'occidentologie, un concept-clé

Le célèbre philosophe russe et directeur de l'Institut Tsargrad, Alexandre Douguine, a publié un important article scientifique consacré à l'occidentologie, une discipline qui étudie la manière dont la science russe doit considérer les « avancées » de l'Occident afin de ne pas rester à la traîne. À première vue, il semblerait que le destin de la Russie se joue actuellement sur les champs de bataille où elle affronte l'Occident collectif, mais il s'agit en réalité d'un processus beaucoup plus profond. L'idéologie de la supériorité de l'Occident sur les nations orientales « arriérées » est profondément enracinée dans plusieurs pays du monde, et l'État russe ne fait malheureusement pas exception. Des changements majeurs sont nécessaires à cet égard, faute de quoi il pourrait être trop tard.

La Russie se réveille

L'article d'Alexandre Douguine intitulé « Occidentologie : vers une science russe souveraine » a été publié dans le troisième numéro de la revue scientifique du Bulletin de l'université d'État de l'éducation, dans la série « Histoire et sciences politiques ». Cette revue est incluse dans la liste de la Commission scientifique panrusse (VAK), l'organe suprême qui délivre les diplômes universitaires et réglemente également l'activité des conseils de thèse. En bref, le fait que cet article ait été publié dans la VAK signifie qu'il a été considéré comme innovant et scientifique.

Il est très difficile de surestimer l'importance de cet article d'Alexandre Douguine. Le sujet de l'occidentologie semble à première vue incompréhensible, mais dans les premiers paragraphes, le philosophe explique qu'il s'agit de la lutte de la Russie pour gagner sa propre souveraineté scientifique vu les conditions dans lesquelles la science occidentale a été activement imposée aux scientifiques russes comme étant l'ultime vérité et cela, pendant plusieurs siècles. L'auteur souligne que « l'occidentologie est un nouveau concept qui devrait être adopté maintenant que le conflit entre la Russie et les pays de l'OTAN s'est intensifié en raison des opérations militaires en Ukraine, surtout si nous prenons en compte le fait que ce conflit, qui a commencé comme un conflit purement politique, s'est progressivement et irréversiblement transformé en un conflit entre les deux civilisations ».

Cependant, il serait erroné de réduire l'ensemble du débat sur l'occidentologie à une lutte pour la création d'une science souveraine. Dans ce cas, il vaudrait mieux l'appeler « russologie » ou « eurasiologie ». Mais l'objet principal de ce champ d'étude est l'Occident. Pourquoi ? Parce qu'il est nécessaire de changer notre approche de la science occidentale en tant qu'avancée, en tant que « progrès ». Maintenant que l'Occident s'est désengagé, il est impératif d'accroître notre souveraineté dans tous les domaines, y compris la science. Le décret présidentiel n°809 sur la politique d'État visant la préservation et le renforcement des valeurs spirituelles et morales russes traditionnelles affirme sans ambiguïté la nécessité de défendre la vision du monde de la Russie, qui est à la base de ses valeurs traditionnelles.

C'est sur cette base que nous pouvons adopter une attitude totalement différente non seulement à l'égard de la science occidentale, mais de l'Occident en général : sa culture, ses valeurs, son rôle historique dans le monde, son peuple, ses opinions, son progrès, ses articles ménagers, ses manières, son attitude à l'égard des enfants, du mariage, des familles, des autres nations, des droits de ces autres nations, du concept de liberté, de la foi, du sens de l'existence et de bien d'autres points encore. Le philosophe affirme: « En d'autres termes, reconnaître la Russie comme un État civilisationnel et donner une importance politique à nos lumières historiques, ainsi qu'à la protection de nos valeurs traditionnelles, nous oblige à repenser l'attitude à l'égard de la civilisation et de la culture occidentales qui s'est établie au cours des dernières décennies et peut-être même des derniers siècles.

Il y avait une barrière, mais elle a été détruite

Selon Douguine, l'origine de l'occidentologie remonte à la confrontation entre les occidentalistes et les slavophiles dans la Russie du 19ème siècle, dont nous avons tous entendu parler à l'école, et, aussi étrange que cela puisse paraître, le conflit entre ces deux camps, qui semblait être une relique du passé, n'est pas moins pertinent dans la Russie d'aujourd'hui qu'il ne l'était alors.

Après tout, ce sont les slavophiles qui ont dit ce que nous sommes obligés de répéter aujourd'hui (et si quelqu'un pense que nous ne sommes pas obligés, après le désir ouvertement exprimé par l'Occident de détruire la Russie, de dire le contraire n'a tout simplement pas de sens): la Russie est une civilisation slave orientale et byzantine-orthodoxe distincte de l'Occident.

Les Occidentaux, divisés entre libéraux et sociaux-démocrates, ont soutenu que la Russie faisait partie de la civilisation de l'Europe occidentale et que la tâche de notre pays était de suivre toutes les avancées et innovations de l'Occident. Douguine écrit dans l'article que « cette approche excluait l'identité de la Russie et la considérait donc comme une société arriérée et périphérique, soumise à la modernisation et à l'occidentalisation. Les occidentalistes considéraient les valeurs traditionnelles et l'identité originale de la Russie comme un obstacle à l'occidentalisation du pays.

Cependant, les choses se sont compliquées à partir de ce moment-là. L'Empire russe a été remplacé par l'Union soviétique et les Occidentaux en ont été exclus: à cette époque, il est devenu non seulement démodé, mais aussi dangereux de suivre les idées de l'Occident, qu'il faut « rattraper et dépasser ».

Douguine souligne que l'URSS a fini par développer un système scientifique qui critiquait la société bourgeoise, ce qui a permis à nos scientifiques de maintenir une distance nécessaire avec l'idéologie libérale de l'Occident, qui est devenue dominante aux États-Unis et en Europe après la défaite de l'Allemagne nazie. Toutefois, cette distance a commencé à se réduire au fil des ans. Selon Douguine, « cette distance a été complètement abolie à la suite de l'effondrement de l'URSS et du rejet de l'idéologie soviétique. Cette fois, c'est la version libérale de l'occidentalisme qui a remporté la victoire dans les sciences sociales, et c'est précisément cette idéologie libérale qui continue de dominer dans la Fédération de Russie jusqu'à aujourd'hui ».

Douguine souligne que la responsabilité en incombe à la politique officielle de l'État qui avait explicitement accepté le postulat selon lequel la Russie faisait partie du monde occidental. En conséquence, la science nationale a commencé à copier les idées occidentales dans des domaines tels que les sciences humaines, la philosophie, l'histoire, la sociologie et la psychologie.

Dans une conversation avec Tsargrad, Alexandre Douguine a commenté les conséquences de ce qui s'est passé après l'effondrement de l'URSS comme suit : « L'occidentologie n'est pas une discipline, mais une approche particulière de la philosophie et de la science, principalement dans le domaine des sciences humaines et sociales. Nous entendons par « science » avant tout la science occidentale, qui n'est rien d'autre que le reflet des valeurs, des critères, des priorités et des normes de la civilisation occidentale. La science occidentale se veut universelle, ce qui cache un racisme et un colonialisme implicites ».

L'occidentologie est un ensemble d'outils qui devraient aider la Russie à atteindre la souveraineté, un processus qui est déjà en cours, mais qui est au point mort. Lors d'une conversation avec Tsargrad, Douguine a déclaré : « L'occidentologie est une approche fondamentale à grande échelle pour libérer notre société de l'illusion de l'universalité de l'Occident et de sa vision du monde. Au 19ème siècle, cette question a été soulevée par les slavophiles russes, qui ont entamé le difficile processus de restauration de la conscience sociale russe. Au 20ème siècle, ce travail a été poursuivi par les Eurasiens et les adeptes de la vision monarchique orthodoxe du monde. Même les bolcheviks, conscients de la différence entre notre société et la société occidentale, ont tenté d'exprimer leurs idées en critiquant les sciences bourgeoises ».

Le « satanisme » occidental colonise le monde

Mais pour comprendre ce à quoi il faut absolument renoncer, il faut connaître les idées de l'ennemi, comme le dit l'adage. En effet, tout le monde ne considère pas aujourd'hui les attitudes occidentales en matière de sciences humaines comme néfastes. Il existe encore l'idée que nous sommes supposés être capables d'assimiler organiquement ce qui nous est étranger, bien qu'un tel processus soit impossible sans les outils nécessaires à cette tâche.

Dans son article, Douguine cite le discours prononcé par Vladimir Poutine le 30 septembre 2022, lorsque le président s'est adressé au peuple russe avant de signer les traités d'acceptation des régions RND (Donbass), RNL (Lougansk), Zaporojie et Kherson au sein de la Fédération de Russie: « La dictature des élites occidentales est dirigée contre toutes les sociétés, y compris les peuples des pays occidentaux eux-mêmes. Elles promeuvent avec défi la négation complète de l'homme, la subversion de la foi et des valeurs traditionnelles, ainsi que la suppression de la liberté, ont acquis les caractéristiques d'une religion, d'un satanisme ouvert. […] Pour eux, notre pensée et notre philosophie sont une menace directe, c'est pourquoi ils attaquent nos philosophes. Notre culture et notre art sont un danger pour eux, c'est pourquoi ils essaient de les interdire. Notre développement et notre prospérité sont également une menace pour eux: la concurrence s'intensifie. Ils n'ont pas besoin de la Russie, mais nous si. Je voudrais leur rappeler que les prétentions à la domination du monde dans le passé ont été écrasées plus d'une fois par le courage et la fermeté de notre peuple. La Russie sera toujours la Russie ».

Alexandre Douguine aborde ensuite les origines du « satanisme » occidental tel que défini par Poutine, qu'il considère comme le fondement de cette supériorité revendiquée par l'Occident. Bien sûr, ces origines se trouvent partiellement à Washington, où les Américains ont proclamé leur indépendance et ont commencé à se considérer comme le nombril du monde tout en exterminant les populations indigènes d'Amérique du Nord.

Ces origines sont bien plus profondes et se trouvent dans les débuts de la culture gréco-romaine, qui fut un temps renversée par le catholicisme. Plus tard, la Renaissance, la Réforme et les Temps Nouveaux ont contribué de manière significative au rejet des fondements moraux et éthiques du christianisme médiéval traditionnel.

La modernité, qui succède à la Renaissance médiévale, prône la supériorité de la machine; c'est à cette époque qu'apparaissent les premières usines et que l'on commence à dire que l'homme lui-même n'est rien d'autre qu'un ensemble de rouages qui interagissent entre eux. L'étude de l'homme est devenue plus importante que l'étude de Dieu et du monde, et l'on a fini par conclure que l'homme était le centre de l'univers (les scientifiques appellent également ce terme « anthropocentrisme »).

Ce sont ces idées qui ont ensuite donné naissance au postmodernisme. Par exemple, le mépris du sexe de naissance et l'affirmation que l'homme devrait avoir le droit de le choisir pour lui-même découlent de ces idées. L'homme doit avoir le droit de pécher, sinon ses droits civiques sont violés, de sorte que la loi est presque plus importante que le droit et que la démocratie n'est plus considérée comme une ancienne utopie, mais comme un moyen pour l'homme d'être en guerre contre tout ce qui existait avant lui. Enfin, tout ce processus s'achève avec le transhumanisme, qui affirme que l'homme devrait avoir le droit à l'immortalité. Cela élimine toute discussion sur la famille, le divorce, l'avortement, les valeurs traditionnelles…..

Tout ce qui précède montre que le système de pensée occidental n'est pas seulement étranger à la Russie, mais qu'il nous est apparu comme un moyen de nous manipuler et de nous dominer. Or Douguine, répondant à l'une de nos questions sur la pertinence de l'entologie occidentale, estime que ce processus « s'est accompagné de subventions, d'invitations à des conférences en Occident, d'une scientométrie idéologiquement motivée, d'indices scientifiques et de systèmes d'évaluation. C'est ainsi que nous nous sommes rapidement retrouvés sous occupation. Conscientes de la situation critique, aggravée par la dure confrontation civilisationnelle et militaire avec l'Occident, les autorités russes ont ressenti le besoin de souverainiser le savoir scientifique ».

Qu'en est-il aujourd'hui ?

Il est évident que la Russie se trouve à nouveau à un point de rupture avec ses attitudes politiques et idéologiques antérieures. Après avoir vécu sous le « talon de l'Occident » dans tous les domaines depuis les années 90 du siècle dernier (il convient également de rappeler les prêts accordés par le FMI, dont Vladimir Poutine a fini par se débarrasser), le pays se détache aujourd'hui du marécage libéral de l'Occident et sauve ce qu'il devrait chérir: les valeurs d'un État traditionnel, la foi en Dieu, la foi en l'armée et en nos héros, en notre production, en nos « cerveaux » qui, comme on le savait déjà pendant ces années horribles, sont toujours les meilleurs du monde.

Cependant, la faction des libéraux occidentaux est encore très forte. Leurs représentants dirigent toujours les principales universités du pays, les structures politiques et même l'Institut de philosophie de l'Académie des sciences de Russie, la grande majorité des employés ne pouvant décider le matin s'ils doivent porter des vêtements arborant les symboles du drapeau américain ou ukrainien.

C'est pourquoi la science nationale doit être fondée non seulement sur des slogans concernant l'identité de la Russie, mais aussi sur un ensemble d'outils permettant de contrer les tentatives agressives de transformer la Russie en une colonie idéologique par le biais des sciences humaines, de la sociologie et de l'économie occidentale. L'occidentologie fournit les outils nécessaires à cette fin. Alexandre Douguine, commentant son article, a déclaré que « la science occidentale est l'étude de la science occidentale en tant que phénomène régional local. Il existe des sciences dans d'autres civilisations, telles que les civilisations musulmane, indienne, chinoise, russe, etc. L'objectif de la science occidentale est de décoloniser notre conscience, elle est donc très utile et nécessaire pour nous ». Lorsque nous avons demandé à Douguine ce que l'occidentologie nous apporterait si nous rejetions les postulats et les dogmes occidentaux, il a répondu succinctement : « Elle nous apportera la victoire ».

Alexandre Douguine

Source: Lire l'article complet de Dedefensa.org

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