Ci-dessous, traduit par Tlaxcala, le troisième article d’une série consacrée aux perspectives de la résistance palestinienne après le 7 octobre et au dixième mois d’une guerre asymétrique opposant des combattants défendant leur peuple à une armée d’occupation surarmée, équipée et soutenue par les puissances impériales. La stratégie génocidaire des occupants n’est pas parvenue à écraser cette résistance en 285 jours. Une fois de plus se vérifie cette vérité historique : aucune armée d’occupation ne peut écraser une armée populaire. Ni au Vietnam, ni en Algérie, ni en Afghanistan, ni en Irak, ni en Palestine. L’auteur de ces articles, Jeremy Scahill, est un journaliste américain d’investigation chevronné, qui vient de créer avec ses amis le site Drop Site News, après avoir travaillé pendant 11 ans au site The Intercept, qu’il avait cratteéé avec Glenn Greenwald. Le mérite de ces articles est de donner la parole aux protagonistes de la résistance, une parole universellement censurée par les médias dominants. Une belle leçon de journalisme.
Voir la première partie (En direct avec le Hamas) et la seconde partie (La résistance se poursuivra)
Jihad Islamique palestinien : « Oslo, c’est fini »
Entretien avec le Dr. Mohammed Al Hindi, l’un des principaux dirigeants du Jihad islamique palestinien, qui parle du 7 octobre, de la guerre contre Israël et de la question de savoir qui, de Trump ou de Biden, serait le mieux pour la Palestine.
Jeremy Scahill, Dropsite News, 16 juillet 2024
Mohammed Al-Hindi en 2005. Photo : Mahmud Hams/AFP via Getty
Avant le Hamas, il y avait le Jihad Islamique palestinien (JIP). Ce mouvement de résistance, fondé en 1981, s’est organisé autour du principe selon lequel la défaite de l’occupation et de l’asservissement israéliens ne pouvait être obtenue que par la lutte armée, et il a cherché à fusionner les courants laïques et islamistes du paysage politique palestinien. Depuis 30 ans, le JIP mène une campagne de guerre paramilitaire contre Israël et contrôle la deuxième plus grande faction armée de la résistance palestinienne. Alors que le Hamas gouverne la bande de Gaza depuis 2006, le JIP a souvent donné le ton d’un militantisme accru à l’égard d’Israël et a prouvé sa volonté de s’engager dans des batailles à lui tout seul.
Bien que le JIP affirme ne pas avoir été informé à l’avance des attaques du 7 octobre, sa branche armée a rejoint l’opération menée par le Hamas le matin même, a pris des otages et, avec les brigades Al-Qassam du Hamas, a mené une guérilla de neuf mois à Gaza contre les forces d’occupation israéliennes.
Les hauts responsables du JIP accordent rarement des interviews aux journalistes occidentaux, mais le Dr Mohammed Al-Hindi, le deuxième plus haut responsable du groupe, a accepté de s’asseoir pour une longue interview en personne avec Drop Site News. Al-Hindi a discuté du rôle du JIP dans les attaques du 7 octobre, de ce qu’il considère comme les objectifs politiques des opérations, de son point de vue sur les efforts du président Joe Biden pour relancer une solution à « deux États », de Donald Trump et des élections usaméricaines, des accords d’Abraham et de l’avenir de la libération et de la politique palestiniennes. Il évoque également les liens entre le JIP et l’Iran et explique pourquoi il pense qu’Israël serait confronté à une catastrophe au Liban s’il décidait d’entrer en guerre contre le Hezbollah.
Depuis le début des années 1980, M. Al-Hindi est une figure centrale du Jihad Islamique palestinien, dont il est actuellement le Secrétaire général adjoint et le négociateur politique en chef. Pédiatre de formation, il a travaillé au début de sa carrière à l’hôpital Al-Shifa de Gaza. M. Al-Hindi a été emprisonné pendant un an au cours de la première Intifada et a été emprisonné à plusieurs reprises par le gouvernement israélien et l’Autorité palestinienne. En 2004, des hélicoptères israéliens ont tiré plusieurs missiles sur le bureau d’Al-Hindi à Gaza, dans ce qui a été généralement considéré comme une tentative d’assassinat. Al-Hindi est le chef du département politique du JIP et le principal adjoint de son Secrétaire général, Ziyad Al-Nakhalah. Il a dirigé les négociations du JIP avec Israël qui ont abouti à un cessez-le-feu en mai 2023 et continue de conseiller les négociateurs du Hamas dans la guerre actuelle. En 2019, M. Al-Hindi a été étiqueté « Terroriste mondial spécialement désigné » par le Département d’État usaméricain.
Drop Site News a décidé de publier l’interview d’Al-Hindi dans son intégralité car nous pensons qu’il est dans l’intérêt du public d’examiner les perspectives d’une figure de proue de la résistance armée palestinienne actuelle et du commandant en second d’une organisation au centre de la guerre génocidaire d’Israël contre les Palestiniens de Gaza.
Le Jihad Islamique palestinien : l’histoire
Le Jihad Islamique palestinien a commencé à mener des attaques armées contre Israël en 1984, trois ans avant la création du Hamas. Plus de dix ans avant la signature du premier accord d’Oslo en 1993, les fondateurs du JIP estimaient que l’Organisation de libération de la Palestine de Yasser Arafat avait engagé les Palestiniens sur la voie du désastre en ouvrant la porte à la concession d’un territoire substantiel à Israël dans le cadre d’un règlement prévoyant deux États. Les fondateurs ont également été inspirés par la révolution islamique de 1979 en Iran et ont vu dans le renversement du shah soutenu par les USA la preuve qu’ils pouvaient renverser leurs oppresseurs.
« Dans les années 1980, lorsqu’une jeune garde d’étudiants palestiniens souhaitait que les Frères musulmans s’engagent dans la violence armée ou dans la lutte armée contre l’occupation israélienne, ils étaient frustrés du manque d’intérêt des Frères musulmans pour la lutte armée », a déclaré Erik Skare, chercheur postdoctoral à l’université d’Oslo, largement considéré comme l’un des principaux spécialistes de langue anglaise du JIP. « Si vous étiez un Palestinien dans les années 1980 dans la bande de Gaza et que vous vouliez participer à la lutte armée, il n’y avait pas de moyen réalisable pour le faire. D’une part, il y avait le mouvement islamiste qui ne participait pas à la lutte armée militaire. D’autre part, il y avait les nationalistes laïques qui étaient soit en prison, soit incapables d’agir. Le JIP a comblé ce vide ».
Erik Skare a écrit deux livres sur le groupe, dont Une histoire du Jihad Islamique palestinien : foi, révolution et prise de conscience au Moyen-Orient [voir annexe p. 82]. Il explique que les fondateurs du JIP ont rejeté ce qu’ils considéraient comme le dogmatisme des Frères musulmans, dont le Hamas est issu. « Ils ne se sont pas contentés de lire Ibn Taymiyya. Ils n’ont pas seulement lu Sayyid Qutb. Ils n’ont pas seulement lu Hassan al-Banna. Ils ont lu Lénine, Jean-Paul Sartre, Fiodor Dostoïevski [et aussi Antonio Gramsci et Ibn Khaldoun Mao et Che Guevara, Khomeiny et Ali Shariati, le premier traducteur en persan de Frantz Fanon, NdT] Ils ont lu tout ce qu’ils ont pu trouver en essayant de se représenter l’avenir et la voie à suivre pour sortir de l’impasse palestinienne », m’a dit M. Skare. « Ils voulaient être fidèles à leur religion et aller au cinéma. Ils voulaient lire, étudier l’orthodoxie islamiste, tout en étant ouverts à de nouvelles idées. »
En août 1987, des membres du JIP ont tendu une embuscade à un officier de l’armée israélienne et l’ont tué dans la bande de Gaza, ce qui allait devenir le précurseur d’une révolte palestinienne plus large. Au cours de la première Intifada, qui a débuté en décembre, le JIP a étendu ses opérations armées à Gaza et en Cisjordanie, utilisant initialement des pierres, des couteaux et des armes légères. À la fin de la décennie, les principaux dirigeants du groupe étaient exilés et de nombreux membres emprisonnés. En 1992, Israël a déporté au Liban des centaines de membres du JIP et du Hamas, dont des dirigeants influents des deux mouvements. En exil, les deux groupes ont tissé des liens plus étroits et ont envisagé de coordonner leurs actions contre Israël. Le JIP a également renforcé ses relations avec le Hezbollah, la République islamique d’Iran et le gouvernement syrien. Ses membres ont reçu une formation militaire et un soutien de la part de ces trois entités.
Le JIP a acquis une reconnaissance internationale entachée d’infamie dans les années 1990, lorsque le Hamas et lui-même ont commencé à commettre des attaques suicides contre des civils et des cibles militaires israéliens. Le JIP a également commencé à organiser officiellement son aile paramilitaire, Saraya Al-Quds, les Brigades de Jérusalem. Le 22 janvier 1995, un agent du JIP déguisé en soldat israélien s’est approché d’un arrêt de bus bondé dans la ville de Beit Lid, au centre d’Israël, où des soldats israéliens attendaient d’être ramenés à leurs bases. L’agent a fait détoner une ceinture d’explosifs au milieu de la foule. Quelques minutes plus tard, un deuxième kamikaze a attaqué. Au total, 21 soldats israéliens et un civil ont été tués. « Nous confirmons notre capacité à pénétrer toutes les fausses lignes de sécurité de l’ennemi et à atteindre le cœur de l’ennemi », a déclaré un haut dirigeant du JIP en revendiquant l’attaque. Le président Bill Clinton a réagi le lendemain en publiant un décret criminalisant tout soutien financier au PIJ.
En 1997, le JIP et le Hamas ont été officiellement désignés comme organisations terroristes par le Département d’État usaméricain. Au cours de la seconde Intifada, qui a débuté en septembre 2000 et a duré près de cinq ans, les deux organisations se sont engagées dans des batailles militaires contre les forces israéliennes et ont mené de nombreuses attaques-suicides à l’intérieur d’Israël.
Au cours des années qui ont suivi la dernière intifada, le JIP a renforcé sa présence en Cisjordanie et à Gaza, d’où il a régulièrement lancé des attaques à la roquette contre des cibles militaires et des villes israéliennes. Contrairement au Hamas, le JIP n’est pas un parti politique qui présente des candidats aux élections organisées par l’Autorité palestinienne, car il rejette tout le cadre des accords d’Oslo qui ont donné naissance à l’Autorité palestinienne. Au lieu de cela, le JIP a donné la priorité à la lutte contre le colonialisme et l’occupation israéliens par une action militaire directe. « Ils se battent pour la totalité de la Palestine historique, du fleuve à la mer, explique M. Skare. La logique est à peu près la même que celle de l’OLP dans les années 1960 et 1970 : ce qui a été pris par la force doit être reconquis par la force. »
Bien que le JIP soit souvent décrit comme une organisation terroriste islamique violente, il se considère à la fois comme une avant-garde armée prônant un mouvement de libération unifié et comme un mouvement politique et social enraciné dans l’histoire et la culture islamistes et palestiniennes. « Nous voyions deux catégories de Palestiniens : les nationalistes, qui parlaient de la libération de la Palestine mais oubliaient l’islam, et les traditionalistes, qui parlaient de l’islam et d’un État islamique mais oubliaient la Palestine », a déclaré le fondateur du PIJ, le Dr Fathi Shaqaqi, dans un entretien avec Robert Fisk [voir version française en annexe, p. 78] en 1995, neuf mois avant son assassinat par le Mossad devant un hôtel de Malte. « Nous devions résoudre ce problème, faire le lien entre le nationalisme et l’islamisme. »
Bon nombre des premières recrues du JIP provenaient des rangs de l’OLP laïque, et les dirigeants du JIP ont tracé la voie pour unir l’esprit révolutionnaire laïque aux idées islamistes. Son objectif principal était de récupérer tous les territoires saisis lors de la création de l’État d’Israël en 1948 et de venger les déplacements violents et les meurtres de Palestiniens lors de la Nakba. « Le Jihad Islamique a bouleversé la logique des Frères musulmans, explique M. Skare. Les Frères musulmans mettaient l’accent sur l’islamisation pour la libération. Autrement dit, il fallait d’abord islamiser la société palestinienne et préparer les masses palestiniennes en diffusant les valeurs islamiques afin de les préparer à la lutte armée pour libérer la Palestine. Le Jihad Islamique, quant à lui, a déclaré qu’il fallait d’abord libérer les territoires palestiniens occupés et que ce n’est qu’ensuite que nous pourrions nous concentrer sur l’islamisation. »
Skare a déclaré qu’en dépit de sa désignation par les USA et d’autres pays occidentaux comme organisation terroriste, le JIP ne mène pas d’attaques en dehors de la Palestine historique. « Il se distancie également des attaques contre l’Occident et contre les Israéliens en dehors du territoire israélien ou palestinien parce que cela affaiblirait la lutte palestinienne et la légitimité de la lutte palestinienne », a déclaré M. Skare. « Ils affirment clairement que leur lutte n’est pas dirigée contre les Israéliens en raison de leur foi juive, mais à cause de l’occupation. »
Depuis la création du Hamas en 1987, ses relations avec le JIP ont connu des périodes de coordination étroite, mais aussi de conflits, de désaccords stratégiques et de guerres intestines. Après que le Hamas a remporté les élections démocratiques dans les territoires palestiniens occupés en 2006 et consolidé son contrôle sur la bande de Gaza, les deux groupes ont souvent synchronisé leurs opérations contre Israël. L’année où il a pris le pouvoir à Gaza, le Hamas a annoncé qu’il mettait fin aux attaques suicides contre Israël, ce qui a fait chuter le nombre de ces attaques. Le Hamas a déclaré que cette tactique n’avait été déployée que pendant une « période exceptionnelle ».
Alors que le Hamas est devenu une autorité dirigeante, responsable de l’administration de base de la vie civile dans la bande de Gaza, le JIP a éludé ces fonctions et s’est concentré sur la résistance armée. Le JIP a ouvert ses portes aux Palestiniens qui donnaient la priorité à l’action armée contre Israël, y compris à ceux « qui n’étaient pas satisfaits du projet de gouvernance du Hamas », a déclaré M. Skare, qui a interviewé de hauts responsables du JIP. « Cela en dit long sur la manière dont [le JIP] peut pousser d’autres mouvements armés. »
Le JIP et le Hamas ont formé un front uni dans une série de guerres de plus courte durée dans les années qui ont suivi l’élection du Hamas, notamment en 2009, 2012 et 2014. En 2018, les deux groupes ont relancé un centre d’opérations commun avec d’autres factions armées plus petites à Gaza. En mai 2021, le JIP et le Hamas ont lancé un tir de barrage de roquettes sur Israël en réponse aux attaques israéliennes contre les fidèles palestiniens de la mosquée Al-Aqsa et aux menaces d’expulsion à Jérusalem-Est, tuant 12 civils israéliens. Israël a lancé une intense campagne de bombardements de 11 jours contre Gaza, au cours de laquelle plus de 250 Palestiniens ont été tués et quelque 1 900 blessés. La guerre a pris fin lorsque le président Joe Biden a appelé le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou pour lui annoncer que la rigolade était terminée. Les dirigeants du Hamas et du JIP ont clairement indiqué que si une trêve avait été conclue, la guerre plus large se poursuivrait. « Nous viendrons à vous, si Dieu le veut, dans un déluge rugissant », a déclaré le chef du Hamas à Gaza, Yahya Sinwar, dans un discours prononcé en décembre 2022. « Nous viendrons à vous avec des roquettes à n’en plus finir, nous viendrons à vous avec un flot illimité de soldats, nous viendrons à vous avec des millions de nos concitoyens, comme une marée récurrente ».
Alors que le Hamas a globalement respecté le cessez-le-feu conclu avec Israël sous l’égide de l’Égypte, le JIP et Israël ont continué de s’affronter. En août 2022, Israël a lancé une campagne d’assassinats ciblés contre les principaux dirigeants du JIP à Gaza, tuant d’importants commandants. Israël a déclaré qu’il s’agissait de frappes « préventives ». Deux des frappes aériennes israéliennes ont tué des dizaines de Palestiniens, dont des enfants. En représailles, le JIP a lancé plus de 1 000 roquettes sur le territoire israélien, tandis qu’Israël pilonnait Gaza par d’autres raids aériens. Israël a également lancé des raids contre les bastions du JIP en Cisjordanie, arrêtant des agents du JIP.
Les combats intermittents entre Israël et JIP ont duré jusqu’au 13 mai 2023, date à laquelle un cessez-le-feu a été déclaré sous l’égide de l’Égypte. Bien que le Hamas n’ait pas participé aux combats, il a félicité le JIP pour avoir « défendu le peuple palestinien contre la dernière agression israélienne contre la bande de Gaza ».
Avant le 7 octobre, les forces des Brigades d’Al-Quds du Jihad Islamique palestinien étaient estimées, selon les sources gouvernementales et médiatiques occidentales, entre 1 000 et 8 000 combattants à Gaza. Des sources au sein du JIP affirment toutefois que le nombre de combattants et de personnel de soutien logistique dépasse les 10 000 (il n’existe pas de statistiques fiables et vérifiables). Bien qu’il s’agisse d’une force plus petite que les Brigades Qassam du Hamas, qui, avant le 7 octobre, étaient estimées entre 20 000 et 30 000 soldats, le JIP jouit également d’une plus forte présence paramilitaire en Cisjordanie, en particulier à Naplouse, Tulkarem et Jénine. Le JIP a récemment déclaré qu’il continuait à enrôler de nouvelles recrues pour combattre Israël à la fois à Gaza et en Cisjordanie.
Dans les rapports sur les attaques du 7 octobre contre Israël, le JIP est souvent passé sous silence ou décrit en passant comme un autre groupe militant ayant participé à l’opération « Déluge d’Al-Aqsa ». De l’aveu même du groupe, il n’a pas été impliqué dans la planification des attaques du 7 octobre, mais il s’est joint à l’opération dès le début de la matinée. Selon M. Skare, même si le JIP n’a pas organisé les attaques, sa position militante, qui consiste à considérer la lutte armée comme la seule solution contre Israël, a peut-être joué un rôle dans la décision du Hamas d’envisager une action décisive à grande échelle. « Le Hamas devait trouver un équilibre sur le fil du rasoir entre la fourniture de services, la gouvernance de la bande de Gaza et le maintien de son rôle en tant que mouvement de résistance. Le Jihad Islamique pouvait continuer à insister sur la nécessité d’une résistance armée, continuer à insister sur la nécessité d’une libération complète sans être encombré par les responsabilités gênantes de la gouvernance. Et cela a toujours été un problème pour le Hamas », a-t-il déclaré. « Je pense que le fait que le Hamas ait exécuté le 7 octobre est en partie dû au fait que le Hamas s’est retrouvé dans une situation impossible. »
Tout comme le Hamas, le JIP a vu sa cote de popularité augmenter de manière significative parmi les Palestiniens des territoires occupés depuis le mois d’octobre. Ses membres ont combattu aux côtés des forces Al Qassam dans la guérilla contre les forces d’occupation israéliennes à Gaza, et il publie régulièrement des vidéos d’embuscades tendues par ses forces contre des tanks et des soldats israéliens.
Le JIP détient toujours un nombre inconnu d’Israéliens capturés le 7 octobre – il a initialement déclaré qu’il avait 30 captifs – et a participé aux échanges de novembre dernier au cours desquels 105 Israéliens ont été libérés en échange de centaines de Palestiniens détenus par Israël. Avec le Hamas, le Jihad Islamique palestinien est membre de l’Axe de la résistance, une coalition qui comprend l’Iran, la Syrie, Ansar Allah au Yémen et plusieurs groupes militants régionaux qui coordonnent leur stratégie face à Israël.
Mohammed Al-Hindi s’entretient avec Jeremy Scahill. Photo : Jeremy Scahill
Mon entretien avec Mohammed Al-Hindi
Jeremy Scahill : Dr. Mohammed Al-Hindi, merci d’avoir accepté cette interview. Il est inhabituel pour un journaliste occidental de pouvoir interviewer l’un des dirigeants du Jihad Islamique palestinien. Expliquez l’idéologie politique et les objectifs de l’organisation.
Mohammed Al-Hindi : Au nom de Dieu, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux. Tout d’abord, le Jihad Islamique est généralement perçu comme un groupe de combat. Cette impression n’est cependant pas exacte. Au début de sa création, notre mouvement a essayé de développer sa propre vision et sa propre compréhension avant de s’engager dans une lutte active contre Israël. Une vision de la réalité politique, une compréhension du monde islamique et de l’histoire de la région. Il a donc commencé par une discussion intellectuelle avant de prendre les armes. En fin de compte, cependant, son analyse était que le projet de création d’Israël était un projet occidental. L’Occident avait ses problèmes avec les Juifs. En résumé, on peut dire que l’antisémitisme est un problème européen qui n’existait pas en Orient. Ce problème a toutefois été résolu aux dépens du peuple palestinien et de la région. Le projet sioniste ne concerne pas les Juifs en premier lieu. Il s’agit plutôt d’un projet de colonisation occidentale qui vise à contrôler la région et à empêcher son indépendance et son développement.
Tel est le projet sioniste dans son essence. Nous n’avons pas de problème avec les Juifs en tant que tels. Notre problème est plutôt le sionisme en tant que mouvement raciste fondé sur l’usurpation de nos ressources et de notre patrie et sur notre déplacement en 1948. C’est sur cette vision politique fondatrice que le mouvement du Jihad Islamique a été créé. Notre vision s’appuyait sur l’Islam qui constitue la culture, l’histoire et la foi du peuple palestinien.
C’est sur la base de cette vision et de cette compréhension de la réalité politique et de l’histoire islamique que le mouvement a été créé. Ce débat a commencé très tôt, lorsque nous étions étudiants dans les universités égyptiennes au milieu des années 1970. Cette vision s’est traduite, cependant, lorsque nous sommes retournés dans la bande de Gaza sous l’occupation. Puisqu’il y avait une occupation, il était impératif d’avoir une résistance. Le Jihad Islamique a donc commencé à s’engager dans la résistance au début des années 1980, après notre retour des universités égyptiennes.
La résistance est donc née de la présence de l’occupation. En tant que peuple religieux et musulman, nous fondons notre résistance sur notre compréhension, notre histoire et notre foi. C’est pourquoi certains ont identifié le Jihad Islamique comme se situant en quelque sorte au milieu entre l’extrémisme islamique et le mouvement national, qui était basé à l’époque sur le Fatah et la gauche palestinienne. En bref, nous sommes un mouvement de résistance national palestinien qui est enraciné dans la foi, la culture et la croyance de notre peuple, à savoir l’Islam.
Jeremy Scahill : Lorsque vous dites que le Jihad Islamique palestinien est un mouvement de résistance nationale, vous parlez de lutte armée.
Mohammed Al-Hindi : Non, je parle de l’idée du Jihad Islamique.
Jeremy Scahill : Comment définissez-vous alors ce qu’est un groupe de résistance dans le contexte de votre propos ?
Mohammed Al-Hindi : Tant qu’il y a une occupation, il doit y avoir une résistance. Nous avons commencé notre résistance en présence de l’occupation par la Nakba en 1948, puis en 1967 avec l’occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Nous avons été conçus dans la bande de Gaza et le mouvement s’est ensuite étendu à la Cisjordanie sous l’occupation. L’occupation se livrait à des pratiques que le monde entier pouvait voir. Mais le monde est resté silencieux, malheureusement, parce qu’en fin de compte, le projet sioniste est un projet occidental. C’est pourquoi, en 1987, lors de la première Intifada, sous le Premier ministre israélien de l’époque [Yithzak] Rabin, ils ont eu recours à une politique extrêmement oppressive, la politique consistant à « briser les os » des enfants qui participaient au soulèvement. Littéralement, un soldat tenait la main d’un enfant contre une pierre, puis la brisait avec une autre pierre. Cette politique était appliquée littéralement. Cette violence utilisée par Israël, dans laquelle nous avons grandi, nous a obligés à résister.
Jeremy Scahill : Mais le Jihad Islamique palestinien, par exemple, ne se présente pas aux élections.
Mohammed Al-Hindi : Ce n’est pas vrai. Nous participons aux élections des étudiants dans les universités palestiniennes. Nous participons aux élections des syndicats, de tous les syndicats palestiniens : médecins, enseignants, avocats, ingénieurs… Tous les syndicats. Environ 13 syndicats. Et nous avons pris l’initiative de créer d’autres syndicats. Mais cette impression ou cette perception est due au fait que nous n’avons pas participé aux élections du conseil législatif palestinien de 2006. S’abstenir de participer constitue une forme de participation en soi, une forme de position politique. Nous avons pris position à l’égard de l’accord d’Oslo, qui, au niveau national, a concédé certains principes de base, en plus d’être antidémocratique puisque le peuple palestinien n’a pas été consulté, pas plus que d’autres membres de l’OLP et de ses factions. Cet accord a été conclu dans le dos du peuple palestinien. La position du Jihad Islamique a donc été de boycotter tout arrangement ou toute élection d’une autorité émanant de cet accord. Il s’agit d’une position politique à part entière. Nous participons à toutes les autres élections.
Jeremy Scahill : Quelle est la relation entre le Jihad Islamique palestinien et le Hamas ?
Mohammed Al-Hindi : Tout d’abord, en termes de principes fondateurs, l’Islam constitue la foi, la culture et l’histoire de notre peuple palestinien. C’est une foi pour les musulmans et une culture pour les chrétiens. Le Hamas et le Jihad Islamique utilisent tous deux la foi de notre peuple et sa culture dans le cas des chrétiens comme point de départ. Nous sommes également d’accord avec le Hamas sur certains aspects de notre vision politique en ce qui concerne la position vis-à-vis de l’accord d’Oslo et son rejet, ainsi qu’en ce qui concerne l’impératif de résistance et le maintien des principes palestiniens fondamentaux. D’un autre côté, il y a des désaccords sur notre vision ou sur certaines questions politiques telles que les élections. Nous avions une position, le Hamas avait une position différente, etc. Ainsi, sur certaines questions politiques, le Jihad Islamique a une position différente de celle du Hamas. Nos différences étaient plus prononcées dans le passé. Avec le temps, cependant, l’ampleur des désaccords entre les deux mouvements a commencé à diminuer.
Jeremy Scahill : Je voudrais vous interroger sur la période de deux ans qui a précédé l’opération « Déluge d’Al-Aqsa ». Il y a eu la campagne de bombardements israéliens de 2021 contre Gaza. Puis, au cours des deux années qui ont suivi, les Israéliens ont continué à cibler et à assassiner les dirigeants du Jihad Islamique palestinien. Nous pourrions peut-être commencer par décrire cette période et la manière dont votre mouvement a vécu les attaques d’Israël depuis la fin de la guerre intense de 2021 jusqu’au 7 octobre 2023. Le Jihad Islamique palestinien lançait des attaques à la roquette contre Israël et le Hamas se tenait largement à l’écart, ou du moins disait qu’il n’y participait pas directement. Il ne condamnait pas le Jihad Islamique palestinien, mais disait qu’il n’y participait pas.
Mohammed Al-Hindi : Tout d’abord, Israël entretient l’illusion que l’élimination des chefs militaires ou politiques des mouvements de résistance palestiniens affecterait ces mouvements. Au cours des deux années que vous avez mentionnées, le Jihad Islamique a été exposé à une vague d’assassinats, en fait trois vagues. Le Jihad Islamique s’est donc engagé à défendre le peuple palestinien et à répondre aux crimes commis contre les dirigeants de la structure militaire des Brigades Al-Quds. Le Hamas, au cours de ces trois confrontations, n’est pas intervenu. Mais comme vous l’avez dit, il n’a pas condamné la résistance palestinienne et les tirs de roquettes. En fait, il a soutenu le Jihad Islamique dans sa position politique en déclarant qu’il s’agissait d’une réponse normale aux crimes sionistes. Certains, en particulier en Israël et dans certains médias régionaux, ont tenté de discréditer le Hamas pour avoir abandonné le Jihad Islamique, en disant qu’il aurait pu aider à repousser l’agression sioniste sur Gaza puisqu’il était en charge de son administration. Mais permettez-moi de préciser que le Jihad Islamique était capable de répondre et de persister à affronter Israël pendant longtemps sans intervention. S’il n’en était pas capable, nous aurions pu reprocher au Hamas de ne pas participer, mais le Jihad Islamique s’en est avéré capable et Israël a été contraint d’engager des négociations avec le mouvement du Jihad Islamique au Caire. Je menais ces négociations avec les Égyptiens. Nous sommes parvenus à un accord. Les observateurs ne doivent pas utiliser cet épisode pour creuser un fossé entre le Hamas et le Jihad Islamique. Au contraire, le Jihad Islamique a compris la position du Hamas et a décidé que nous pouvions gérer cette bataille par nous-mêmes dans les trois confrontations, et nous l’avons très bien fait.
Mohammed al-Hindi (à droite) avec le chef spirituel du Hamas, Cheikh Ahmed Yassine (au centre), et Ismail Haniyeh du Hamas (à gauche) lors d’une commémoration en 2003 pour le chef du Hamas assassiné, Ismail Abu Shanab. Photo : Mahmud Hams/AFP via Getty.
Les attaques du 7 octobre
Jeremy Scahill : Comment l’opération « Délugé d’Al-Aqsa » a-t-elle vu le jour ? Qui en a eu l’idée ? Est-elle venue du Jihad Islamique palestinien ou du Hamas, ou y a-t-il eu un comité conjoint chargé d’évaluer les réponses potentielles à Israël ou les avantages et inconvénients potentiels du lancement d’une attaque quelconque ? J’essaie de comprendre comment tout cela a été organisé.
Mohammed Al-Hindi : Le Hamas, ou plus exactement Al-Qassam, se préparait pour le déluge d’Al-Aqsa et personne ne le savait. Un jour plus tôt, le 6 octobre, le Jihad Islamique avait célébré l’anniversaire du mouvement du Jihad Islamique. Des milliers de personnes ont participé à cette célébration et nous avons été pris par surprise, comme tout le monde. Cependant, peu de temps après avoir été informés du Déluge, nous nous sommes engagés dans cette bataille. Il était de notre devoir, en tant que mouvement de résistance, de faire face immédiatement à l’agression.
Jeremy Scahill : Juste pour clarifier une chose, vous dites que le Jihad Islamique palestinien, même ses forces spéciales, n’étaient pas du tout impliquées dans la planification jusqu’au matin où les clôtures et les murs ont été abattus ?
Mohammed Al-Hindi : Oui, c’est vrai.
Jeremy Scahill : Donc une fois que vos forces ont commencé à pénétrer dans la zone de combat, avez-vous été surpris par la profondeur des zones de contrôle israéliennes qu’elles ont pu atteindre, en particulier sur les bases militaires ?
Mohammed Al-Hindi : Le monde entier a été surpris ! Les unités militaires israéliennes se sont évaporées.
Jeremy Scahill : Une fois les opérations lancées, les commandants militaires du Jihad Islamique palestinien ont-ils pu donner des ordres à leurs hommes sur le terrain ? Étant donné qu’ils n’ont pas participé à la planification, une fois que vos soldats étaient au combat, le Jihad islamique leur a-t-il donné des directives ou des objectifs ? Comment les ordres ont-ils été donnés aux forces du JIP qui ont participé à l’opération ?
Mohammed Al-Hindi : Au début, les commandants militaires [d’Al-Qods] de notre mouvement ont commencé à donner l’ordre de prendre part au combat. Peu de temps après, les Brigades Al-Quds du Jihad Islamique ont pris part à la bataille et les affrontements ont commencé. En tant que mouvement de résistance, notre devoir était de lutter contre l’occupation et contre cette agression. Chaque fois qu’une bataille éclate, les Brigades Al-Quds jouent leur rôle et combattent.
Jeremy Scahill : Lorsque vous avez commencé à regarder les premiers rapports des médias – certains des premiers rapports disaient que deux mille personnes, principalement des civils, avaient été tuées, bien que ces chiffres aient été réduits par la suite et qu’il soit devenu clair qu’un grand nombre de soldats israéliens avaient également été tués avec des civils –, quel type de réponse attendiez-vous de la part de l’État israélien à ces opérations ?
Mohammed Al-Hindi : Nous savons qu’Israël s’est construit sur le mensonge et il s’agit là d’un mensonge de plus. Nous avons reconnu dès le début qu’un grand nombre d’informations trompeuses étaient adressées à l’Occident. Nous nous attendions, bien sûr, à une réaction forte. Toutefois, au fil du temps, ces mensonges ont commencé à être dévoilés. La réponse israélienne au 7 octobre n’a été régie par aucune loi. Ni lois militaires, ni lois d’occupation, ni aucune sorte de lois. Je pense qu’avec le temps, d’autres crimes dont personne n’a eu connaissance jusqu’à présent seront révélés. En particulier en ce qui concerne les détenus qui ont été arrêtés juste à l’extérieur de Gaza et dont beaucoup ont été exécutés sur le terrain.
Jeremy Scahill : Quels sont, selon votre compréhension, les objectifs directs des opérations du 7 octobre ?
Mohammed Al-Hindi : Tout d’abord, il s’agit d’un nouvel épisode de ce conflit. Il a éclaté de cette manière, mais c’est un nouvel épisode d’un conflit long, amer et sanglant qui dure depuis 1948. En 1948, nous faisons référence à la Nakba, où des crimes énormes ont été commis. Environ 500 villages palestiniens ont été détruits. Le peuple palestinien se bat depuis 1948. Vous savez peut-être, ou peut-être pas, qu’il n’y a pas de famille palestinienne qui n’ait pas au moins un martyr. Toutes les fausses nouvelles qu’Israël fabrique pour tromper le monde occidental sont évidentes, mais l’Occident les accepte et les souhaite parce qu’il veut maintenir Israël comme projet de contrôle et d’hégémonie dans la région. Ce qui s’est passé le 7 octobre est une extension de ces crimes. C’est aussi la preuve que le peuple palestinien ne peut être détruit. En bref, Israël et les États-Unis voulaient mettre fin à la cause palestinienne, non seulement à Gaza, mais partout.
Les choses ont commencé à se clarifier après les accords d’Abraham, qui négligeaient les droits du peuple palestinien et visaient à organiser la région en termes de sécurité en y établissant des alliances sécuritaires et économiques, sans tenir compte des droits du peuple palestinien. De toute évidence, le peuple palestinien n’est pas mort et il fallait s’attendre à ce qu’il se défende et défende ses droits. S’il n’obtient pas la totalité de ses droits, il n’y aura rien d’autre que du sang dans la région. C’est dans ce contexte que nous comprenons le Déluge d’Al-Aqsa : non pas dans le contexte du 7 octobre, mais plutôt dans le contexte de 1948.
Jeremy Scahill : Avez-vous une idée de la raison pour laquelle ce jour précis a été choisi pour ces opérations ?
Mohammed Al-Hindi : Cette question est à la discrétion d’Al-Qassam. Mais je peux dire que Gaza est sous blocus depuis 17 ans. Des crimes sont commis en Cisjordanie et à Gaza. Il existe un contexte politique régional dans lequel un nouvel ennemi [l’Iran] est en train d’être inventé pour la région, loin de l’ennemi sioniste. C’est dans ce contexte que nous comprenons la situation. Un groupe de combat prend donc ses dispositions, ses décisions et son jugement en fonction des conditions appropriées. Il ne fait aucun doute que les conditions étaient effectivement appropriées.
Jeremy Scahill : Je voudrais vous interroger sur la capture de civils le 7 octobre. Les responsables du Hamas m’ont dit que leurs forces n’avaient pas reçu l’ordre de ramener en captivité à Gaza des femmes qui n’étaient pas des soldats ou des enfants. Le Hamas m’a dit qu’essentiellement lorsque la clôture et le mur encerclant Gaza ont été démantelés et que la deuxième et la troisième vague de personnes sont entrées – cela comprenait des personnes ordinaires ou des personnes qui n’étaient pas officiellement impliquées dans l’opération – elles ont commencé à ramener des civils israéliens à Gaza et que le Hamas a dû essentiellement trouver ces personnes et leur proposer de les rendre à Israël. Que pensez-vous des civils emmenés à Gaza ?
Mohammed Al-Hindi : Le Hamas l’a déjà déclaré. Au sein du Jihad islamique, nous avions un garçon et une dame âgée. Très tôt, nous avons fait une déclaration disant que nous voulions les libérer tous les deux, sans rien en échange, si les conditions de sécurité étaient réunies. Cette déclaration a été rendue publique et filmée à l’époque. Donc, oui, ce problème existait, en particulier le fait que des enfants, des femmes et des personnes âgées aient été capturés par erreur. Nous avons fait connaître notre position, et vous pouvez consulter les archives. Nous avons dit que nous avions ces personnes sous notre garde, et qu’elles apparaissaient dans une vidéo, le jeune garçon et la dame âgée, et que nous étions prêts à les relâcher comme ça, si les conditions de sécurité le permettaient. Ils ont été libérés dès le premier accord.
Jeremy Scahill : Comment pensez-vous que l’histoire va considérer les événements du 7 octobre et les mois qui se sont écoulés depuis ?
Mohammed Al-Hindi : Le 7 octobre, Israël a subi un énorme échec stratégique à tous les niveaux : politique, militaire et de renseignement. Ce fut également un échec pour les protecteurs d’Israël. Les neuf mois qui ont suivi n’ont été qu’un échec de plus, car ils ont commis des crimes contre des civils, détruit Gaza, appliqué une politique de famine. Tous ces éléments s’ajoutent à l’échec militaire et moral. L’image d’Israël a été ternie. L’image de victime qu’il a vendue au monde pendant des années est révolue. Il est devenu un criminel recherché. Israël a donc perdu au niveau de son image et de son récit, ainsi qu’au niveau moral. De plus, l’armée n’a atteint aucun de ses objectifs et est épuisée. Ces mois successifs n’ont donc été qu’un échec supplémentaire à tous les niveaux : militaire, politique, moral et en termes d’image d’Israël.
Jeremy Scahill : Vous êtes le négociateur politique en chef du Jihad islamique palestinien. Participez-vous directement aux négociations sur un cessez-le-feu ou sur la fin du siège de Gaza ?
Mohammed Al-Hindi : Je voudrais que les choses soient claires. Dans ces négociations, nous, en tant que factions de la résistance, avons mandaté le Hamas pour mener les négociations. Nous avons convenu que le Hamas dirigerait les négociations pour diverses raisons. Nous sommes assurés que le Hamas ne cédera pas dans ces négociations parce qu’il est davantage dans le collimateur que le Jihad Islamique.
Dans le cadre de ces négociations, des documents sont donc présentés, qu’ils émanent d’Israël, des États-Unis ou d’autres pays. Le Hamas nous présente ces documents, nous en discutons et nous donnons notre avis. Sur cette base, le Hamas répond. La réponse n’est donc pas celle du Hamas, mais celle de la résistance et de ses factions.
Le Hamas est le négociateur en chef mandaté par les factions de la résistance. Il discute des propositions faites avec les factions de la résistance et fournit une réponse qui reflète le point de vue des factions de la résistance. Le Hamas est mandaté et autorisé à négocier au nom des factions.
L’autre point est qu’Israël a essayé de semer la discorde entre les factions de la résistance en ce qui concerne les négociations. Netanyahou a personnellement demandé au représentant de l’ONU de le rencontrer à Jérusalem il y a environ quatre mois. Netanyahou et son équipe de négociation lui ont demandé de se rendre au Liban et de rencontrer le Jihad Islamique pour faire passer un message disant que Netanyahou était prêt à s’engager dans des négociations directes avec le Jihad Islamique et qu’il serait indulgent dans la conclusion d’un accord avec eux sur l’échange de prisonniers.
Il y a environ trois mois, le représentant de l’ONU est venu rencontrer l’un de nos frères au Liban, un responsable du Jihad Islamique, et il lui a transmis le message de Netanyahou. Nous avons compris que Netanyahou essayait de créer une fracture entre le Hamas et le Jihad Islamique, et nous ne lui avons pas donné cette chance. Nous l’avons annoncé à l’époque, mais nous n’avons pas essayé d’en faire tout un plat. Nous en avons parlé dans un journal libanais, Al-Akhbar. Certains journaux israéliens en ont parlé le lendemain. Certaines puissances régionales ont également essayé d’inviter le Jihad Islamique à des réunions et des discussions, mais nous avons également gardé cette porte fermée. J’avais l’intention d’envoyer une délégation et d’effectuer des visites, mais nous nous sommes rendu compte qu’ils essayaient d’entamer des négociations individuelles, et nous avons donc rejeté ces propositions.
Capture d’écran d’une vidéo des Brigades Al Quds montrant un défilé dans la ville de Gaza marquant le 36e anniversaire de la création du Jihad Islamique palestinien, le 4 octobre 2023.
Un État, deux États ou un état de guerre perpétuel ?
Jeremy Scahill : Vous avez également des forces dans d’autres régions de Palestine, en Cisjordanie occupée et ailleurs, et je me demande pourquoi il n’y a pas eu de soulèvements coordonnés dans d’autres régions que Gaza immédiatement après le 7 octobre. Je me demande s’il s’agissait d’une décision stratégique ou si les dirigeants du Jihad Islamique ont retenu leurs forces. J’essaie de comprendre pourquoi cette opération ne s’est pas étendue à d’autres régions de Palestine.
Mohammed Al-Hindi : En Cisjordanie, la résistance est présente et s’intensifie, et le Jihad Islamique y participe, voire en prend la tête. Des arrestations ont lieu quotidiennement en Cisjordanie. Il ne se passe pas un jour sans qu’il y ait des arrestations et d’autres crimes. Depuis le 7 octobre, il y a eu plus de 500 martyrs en Cisjordanie, environ 10 000 détenus et des milliers de blessés. La Cisjordanie participe donc bel et bien à l’opération. Cependant, en raison de l’ampleur des crimes commis à Gaza, les médias n’en parlent pas beaucoup.
Au niveau international, il existe également d’autres fronts ouverts au Liban et dans la mer Rouge, au Yémen. Ces fronts soutiennent le front de Gaza. Ils ont décidé que la bataille sur ces fronts ne s’arrêterait pas tant que l’agression contre la bande de Gaza ne cesserait pas. Le Jihad islamique est présent au Liban, étant donné qu’il y a des camps de réfugiés au Liban et qu’il fait partie de cette confrontation au Liban. Toutefois, c’est le Hezbollah qui constitue l’essentiel de ce front.
Jeremy Scahill : Pensez-vous que les conditions sont réunies pour une véritable intifada à ce stade ?
Mohammed Al-Hindi : Je pense que l’horizon politique en Cisjordanie est bloqué. Nous avons un gouvernement extrémiste en Israël qui ne croit pas… le programme des membres ou des composantes du gouvernement est connu du public. Lorsque [le ministre israélien des finances Bezalel] Smotrich parle des options qui s’offrent aux Palestiniens : se rendre complètement et travailler comme salariés pour Israël, être déplacés ou être tués, c’est ce qu’ils appellent le programme de résolution. C’est ce qu’ils appellent le programme de résolution. Il s’agit d’un programme déclaré. Et Smotrich est un élément fondamental de ce gouvernement sioniste. [Le ministre israélien de la sécurité nationale, Itamar] Ben-Gvir a lui aussi un programme similaire. L’horizon politique d’un État palestinien est donc bloqué et le peuple palestinien le sait. D’autre part, l’ampleur des crimes commis par Israël dans la bande de Gaza a montré qu’ils ne pouvaient pas provenir d’un État qui prétend être l’oasis de la démocratie dans la région, ni d’une armée gouvernée par des lois et des règles. Il s’agit plutôt d’une bande d’assassins et de criminels qui tuent des civils, des femmes et des enfants, et dont les dirigeants sont poursuivis devant les tribunaux internationaux pour crimes de guerre. Ainsi, l’horizon bloqué et l’ampleur de ces crimes conduisent précisément à une intifada.
La forme que prend actuellement l’intifada en Cisjordanie implique une faible participation populaire en raison de l’énorme répression sécuritaire exercée par Israël. Comme je l’ai mentionné, il y a plus de 10 000 détenus dans les prisons de l’ennemi. Les opérations n’ont pas cessé non plus. Ces personnes ne sont pas dépourvues de familles, de partisans, d’organisations ; il en va de même pour les détenus. Cette ampleur ouvre la voie à un grand soulèvement populaire dans un avenir proche, espérons-le.
Je voudrais ajouter qu’il n’y a pas de Hamas en Cisjordanie, ni de 7 octobre. Ce qui existe en Cisjordanie, c’est Oslo. Néanmoins, les agressions commises par les colons en Cisjordanie sont monnaie courante. Des milliers de colons sont armés loin de toute structure officielle, même de l’armée et de la police sionistes. Ce sont les milices de Ben-Gvir. Les crimes perpétrés en Cisjordanie sont sans précédent. Les colonies qui sont construites aujourd’hui et reconnues sont des regroupements arbitraires de colons que même les gouvernements israéliens radicaux avaient refusé de reconnaître. Néanmoins, elles sont aujourd’hui légalisées.
Les Palestiniens de Gaza sont tués. En Cisjordanie, par contre, ils perdent leurs terres qui sont transformées en colonies et perdent leurs moyens de subsistance. C’est pourquoi la situation en Cisjordanie va exploser, et je pense qu’il s’agira d’un grand conflit sanglant. L’Occident ferme maintenant les yeux et parle de Gaza et de l’administration de Gaza, mais Israël et Netanyahou refusent même la présence de l’Autorité palestinienne à Gaza. Il essaie de trouver des alternatives à l’Autorité palestinienne, qui travaille en Cisjordanie conformément à l’accord d’Oslo, en se limitant à ce que l’on appelle la « coordination de la sécurité ». L’horizon est donc complètement bouché. Le conflit en Cisjordanie sera sanglant. Ensuite, l’Occident se retournera et dira « solution à deux États ». Mais c’est un non-sens car ce que nous voyons sur le terrain est plus pertinent que les déclarations que nous entendons et qui n’ont aucune valeur.
Jeremy Scahill : La question la plus « cliché » qu’un journaliste puisse poser à un Palestinien est la suivante : « Que pensez-vous de la solution à deux États ? » C’est pourtant ce que préconise l’administration Biden. Lorsque j’ai interrogé des responsables du Hamas, ils ont déclaré que si la volonté démocratique du peuple palestinien était d’établir un État le long des frontières de 1967, le Hamas ne s’y opposerait pas. Quelle est la position du Jihad Islamique palestinien à ce sujet ?
Mohammed Al-Hindi : Cette question n’est pas réaliste. Ce n’est pas comme si quoi que ce soit dépendait de cette question. Yasser Arafat a signé les accords d’Oslo et a accepté la solution des deux États ; il était le chef de l’OLP et a signé en son nom. Trente et un ans plus tard, les terres sur lesquelles l’État palestinien était censé être établi sont devenues un second Israël. Elles sont devenues un État de colons. Il semble qu’une solution à deux États concernait le premier État d’Israël de 1948 et le deuxième État d’Israël de 1967.
Même Gaza est soumise à un blocus étouffant depuis 17 ans parce que personne ne veut de Gaza, cette étroite bande de terre sur laquelle vivent 2,5 millions de Palestiniens. En ce qui concerne la solution à deux États, l’Occident demande : « Quelle est la position du Hamas sur la solution à deux États ? » Mais Yasser Arafat avait déjà signé la solution des deux États il y a 31 ans, et cela n’a servi à rien. Certains journalistes s’enquièrent de la position du Jihad Islamique sur la solution à deux États, mais personne ne pose la question aux partis israéliens qui constituent le gouvernement et sont membres de la Knesset et qui appellent à l’élimination de la cause palestinienne et au déplacement du peuple palestinien dans son ensemble, appelant à un transfert tout en étant dans la position sioniste de prise de décision. Nous nous opposons donc à ce que l’on mette le peuple palestinien à l’épreuve en lui demandant : « Quelle est la position des factions sur la solution à deux États ? » Ce n’est pas logique.
D’autre part, le Hamas est parfois contraint de répondre à cette question parce qu’il administre la bande de Gaza et que tout le monde veut lui demander : « Et si c’était le souhait du peuple palestinien ? » Mais Israël refuse cette solution, s’y oppose et y résiste. Il construit un État sur les terres qui étaient censées devenir celles de l’État palestinien. Aujourd’hui, certains proposent la solution d’un seul État. S’ils sont vraiment attachés à la démocratie, il existe une population palestinienne dans les territoires occupés de la Palestine historique. Qu’en est-il de la gouvernance de l’État ? Pourquoi personne ne pose la question d’un État unique où tous les citoyens jouissent des mêmes droits ?
Par principe, je pense donc que nous sommes dans une phase de libération nationale qui exige la résistance. Lorsqu’il y aura un partenaire disposé à résoudre la question palestinienne, que ce soit en Israël ou en Occident, en particulier aux États-Unis, alors seulement ils pourront discuter. Aujourd’hui, cependant, parler d’une solution à deux États n’offre au peuple palestinien que des illusions, comme si l’administration usaméricaine et l’Occident étaient favorables à la solution à deux États. Le magicien américain vient de sortir cela de sa poche pour le jeter contre le Déluge d’Al-Aqsa. C’est tout ! Ils parlent même d’une nouvelle autorité, et non de l’Autorité palestinienne, qui est le partenaire de la solution à deux États. Ils parlent d’une nouvelle autorité et personne ne sait de quoi il s’agit. Néanmoins, Israël refuse cette proposition. Il dit que l’armée israélienne réoccupera la bande de Gaza, mais en raison des problèmes de sécurité et du coût élevé d’un tel retour, Israël veut trouver une sorte d’agents dans l’administration de Gaza et, en cas d’échec, le [secrétaire d’État Antony] Blinken, par exemple, ferait une déclaration disant « Nous n’acceptons pas l’occupation, nous n’acceptons pas que le Hamas gère la bande de Gaza, nous n’acceptons pas le chaos ». Dites-nous, s’il vous plaît, quelle est l’alternative ? Faites une proposition. Le problème n’est donc pas que le peuple palestinien ou les factions palestiniennes répondent à cette question. Le problème est fondamentalement qu’Israël ne veut nous accorder aucun de nos droits et que l’administration usaméricaine soutient cette position israélienne et n’ose pas, pour de nombreuses raisons, faire face à cet horizon bouché.
Notre problème réside dans l’injustice qui nous est faite, dans l’agression dont nous sommes l’objet. Notre problème n’est pas avec les Juifs, ni avec les Américains. Notre problème est l’injustice. Ainsi, si Netanyahou se tenait sur le plus haut minaret de Palestine, ou sur le minaret de la mosquée Al-Aqsa, et embrassait l’islam, le problème ne serait pas résolu pour autant. Notre problème avec Netanyahou et Israël est qu’ils ont occupé notre terre, tué notre peuple et qu’ils se livrent à une agression contre nous. Même s’il embrassait l’islam, le problème resterait entier. Les Usaméricains doivent comprendre cela.
Jeremy Scahill : A quoi ressemblerait une résolution acceptable de votre point de vue ?
Mohammed Al-Hindi : Écoutez, mettons-nous d’accord sur quelques règles de base. Après 76 ans, le peuple palestinien n’a pas renoncé, et il a lancé le Déluge d’Al-Aqsa. Israël est gouverné par un gouvernement radical sans précédent qui ne croit qu’en la fin du conflit avec une détermination pleine de racisme et de rancune. Cela place les choses dans une position irréconciliable.
Pour nous, Palestiniens, et je ne parle pas d’un groupe de résistance, du Jihad Islamique ou du Hamas, si nous n’obtenons pas nos droits, il n’y aura pas de stabilité dans la région. Le monde entier est en train de changer. Des conflits internationaux en cours affectent la question palestinienne et sont affectés par elle. La région change également. La région n’est plus ce qu’elle était il y a dix ans, lorsque les Arabes semblaient avoir tourné le dos au peuple palestinien et que tout était fini. Il est clair aujourd’hui qu’il existe des fronts de soutien à la cause palestinienne. La situation interne des Palestiniens est également en train de changer.
Après plus de 30 ans, Oslo est terminé. L’Autorité palestinienne est désormais utilisée comme un outil de sécurité. Il est clair que les membres du Fatah s’engagent également dans la confrontation avec Israël et ne sont pas satisfaits de la position de l’Autorité [palestinienne]. La résistance palestinienne à Gaza a persévéré à Gaza pendant neuf mois et est toujours en bonne forme et prête à persister d’une manière à laquelle personne ne pouvait s’attendre. Tous ces changements doivent être pris en compte lorsque l’on parle de la cause palestinienne. Les droits du peuple palestinien au strict minimum qui a été convenu impliquent un État en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. C’est le minimum que le peuple palestinien pourrait accepter dans un premier temps. Nous ne sommes pas opposés à ce que des Juifs vivent parmi nous dans la région, mais ils ne peuvent pas dominer, prendre le contrôle et diriger la région et l’organiser selon des conditions de sécurité conformes à leurs intérêts et à ceux de leurs alliés. Cette région a ses habitants qui ont des droits auxquels ils ne renonceront pas.
Le temps joue en faveur du peuple palestinien, malgré toutes les souffrances qu’il subit. Toutes ces illusions dans l’esprit des dirigeants israéliens se brisent devant la nouvelle réalité de la région et du monde.
Jeremy Scahill : Pensez-vous que les Juifs qui ont émigré d’Europe, des États-Unis, d’Australie ou d’Afrique du Sud ont le droit de vivre dans cet État ?
Mohammed Al-Hindi : Nous n’aurions pas de problème avec eux s’ils ne conspiraient pas, s’ils ne se livraient pas à des agressions, s’ils n’infligeaint pas d’injustices, s’ils ne contrôlaient pas la région. Nous n’avons pas de problème sans cela.
Jeremy Scahill : Quel est l’objectif de Mahmoud Abbas et de l’Autorité palestinienne (AP) à l’heure actuelle ?
Mohammed Al-Hindi : Mahmoud Abbas a une vision et un projet qui se sont traduits par l’accord d’Oslo. Aujourd’hui, 31 ans plus tard, la vision de Mahmoud Abbas et de l’Autorité palestinienne s’évapore. Ils ne sont plus du tout pertinents, que ce soit pour un partenariat politique avec Israël ou pour la résistance. Tout ce projet touche donc à sa fin, attendue de longue date. Je pense que le projet de l’AP se désintègre avec le temps. Premièrement, il n’a pas répondu aux attentes minimales sur lesquelles il a été construit. Deuxièmement, Israël ne l’utilise que temporairement pour gérer la situation en Cisjordanie alors qu’il n’a aucune souveraineté réelle, même dans la zone B. Dans la zone A, il n’y a pas non plus de souveraineté réelle. Israël pénètre dans ces zones quand il le veut, arrête qui il veut dans la zone A. Donc, avec le temps, je pense que n’importe quel sondage d’opinion en Cisjordanie montrera que la plupart des Palestiniens sont avec la résistance, pas avec l’AP. Le projet d’Oslo était donc essentiellement ce que Yasser Arafat, puis Mahmoud Abbas, espéraient voir évoluer vers un État en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Israël, quant à lui, voulait en faire un outil de gestion du peuple palestinien, afin que l’occupation soit facile et peu coûteuse. L’équilibre des pouvoirs a aidé Israël à atteindre cet objectif, à concrétiser sa vision de l’accord. Sur le terrain, il a dépouillé l’Autorité palestinienne de toute souveraineté et l’a transformée en un outil de gestion des communautés palestiniennes. Ensuite, Israël a construit le mur de séparation qui a dévoré de larges pans de la Cisjordanie, a construit ces colonies, a judaïsé Jérusalem. Ainsi, le projet de l’Autorité palestinienne est presque terminé.
Jeremy Scahill : Serait-il préférable pour le peuple palestinien qu’il n’y ait pas d’Autorité palestinienne ? Qu’est-ce qui la remplacerait ?
Mohammed Al-Hindi : L’alternative serait un accord palestinien interne. Il existe des pouvoirs palestiniens fondamentaux qui n’existaient pas lorsque l’OLP a été créée. Le Hamas et le Jihad Islamique ne font pas partie de l’OLP alors qu’ils sont les principales puissances actives sur le terrain. L’OLP est composée de factions. Le Fatah, en tant que faction, est présent et a son impact et ses électeurs. Mais la plupart des autres factions sont des factions marginales sans présence significative. Les accords internes palestiniens doivent maintenant être construits sur la base des réalités et des acteurs sur le terrain plutôt que sur la situation des années 1960 et 1970. C’est pourquoi la reconstruction de l’OLP est, à mon avis, la meilleure façon d’aborder la réorganisation de la structure palestinienne interne.
Jeremy Scahill : Si les négociations entre le Hamas, le Jihad Islamique palestinien et les Israéliens aboutissent à la libération de Marwan Barghouti, soutiendrez-vous sa candidature à la présidence d’une Palestine indépendante et internationalement reconnue ? [Note : Marwan Barghouti est un leader de la résistance palestinienne emprisonné par Israël depuis 2002. Bien qu’il soit membre du Fatah, le parti au pouvoir, il a vivement critiqué l’accord d’Oslo, et le Hamas et le JIP n’ont cessé de réclamer sa liberté. Parfois qualifié de Nelson Mandela palestinien, il est largement considéré comme le choix le plus populaire parmi les Palestiniens pour devenir le futur président d’un État indépendant].
Mohammed Al-Hindi : Il est prématuré de se prononcer. Tout d’abord, il y a la question de la libération de Marwan Barghouti. Bien sûr, nous demandons la libération de tous les prisonniers palestiniens, y compris les leaders de la résistance palestinienne, Marwan Barghouti, tous. C’est au Fatah de décider s’il se présentera plus tard à l’élection présidentielle. Barghouti est un dirigeant du Fatah et s’il le nomme, la question pourra être discutée. Le Jihad Islamique ou le Hamas, pour avoir été à l’origine de sa libération, ne le soutiendront pas et ne s’y opposeront pas. C’est au Fatah de le nommer, puis nous examinons tous les candidats et nous parvenons à certains accords. C’est donc tout à fait prématuré. Mais je peux dire qu’au Jihad Islamique, nous tenons à ce que le Fatah soit solide, fort et cohérent, et qu’il soit unifié en interne.
L’Axe de la Résistance
Jeremy Scahill : Dans les médias, de nombreux articles affirment que le Jihad Islamique palestinien est soutenu de manière significative par l’Iran. Je voulais vous interroger sur vos relations avec l’Iran et vous demander s’il est vrai que Téhéran apporte un soutien militaire et financier au Jihad islamique palestinien.
Mohammed Al-Hindi : Nous sommes un mouvement de résistance palestinien. Notre lutte a commencé avant la révolution iranienne. La lutte du peuple palestinien dure depuis 76 ans. Nous sommes reconnaissants et apprécions tous ceux qui sont à nos côtés. Aujourd’hui, l’Iran est aux côtés du peuple palestinien et de la résistance palestinienne. Il soutient le peuple palestinien et la résistance avec tout ce dont le peuple palestinien peut avoir besoin. Cela est déclaré et évident pour tout le monde. Ce n’est pas un secret. Le mouvement du Jihad Islamique a commencé à discuter et à dialoguer en interne avant la révolution de 1979. Nous avons commencé au milieu des années 1970. Nous avons commencé à résister au début des années 1980, avant d’avoir des relations avec la République islamique. Nous étions dans des prisons d’occupation dans la bande de Gaza et nous ne connaissions personne d’Iran. Nous avons commencé parce que nous avions notre vision et notre compréhension de l’histoire et de la politique dans la région. Nous avons donc rempli notre devoir. Aujourd’hui, l’Iran vient nous soutenir. Nous apprécions ce soutien. Surtout à un moment où les Arabes nous abandonnent, se rendent en Israël et concluent des accords avec lui.
En ce qui concerne l’Iran, la grande agitation dans les médias occidentaux et même dans la région a été provoquée par Israël qui essaie de dire, dans le contexte de la normalisation avec les Arabes, qu’il y a un nouvel ennemi pour les Arabes dans la région tandis qu’Israël devient un allié plutôt qu’un ennemi. C’est dans ce contexte que le rôle de l’Iran est discuté, ainsi que le soutien iranien à la résistance désignée comme terroriste par Israël et une partie de l’Occident. Par conséquent, il a inventé cet ennemi pour suggérer que la région a Israël, qui est un allié des États sunnites de la région, et que des accords et des accords de paix sont conclus avec lui, tandis qu’il y a un ennemi qui constitue une menace pour tout le monde, à la fois les États sunnites et Israël. Cet ennemi est l’Iran, qui soutient des « mouvements terroristes » dans la région, à savoir la résistance palestinienne. Israël tente ainsi d’envahir toute la région de cette manière. Cependant, l’Iran n’est pas un État éphémère.
Si l’on considère les populations qui habitent cette région depuis des milliers d’années, on trouve des Arabes, des Perses et des Turcs. L’Iran n’est pas une nouveauté. C’est un État reconnu dans la région et il a ses intérêts. Les Arabes et les non-Arabes reconnaissent ces intérêts. C’est un État qui ne peut être négligé dans la région. Israël est un État éphémère. C’est pourquoi il essaie de changer l’équation. Ces accusations sont portées contre le Jihad Islamique, le Hamas ou la résistance palestinienne, suggérant qu’ils suivent les ordres de l’Iran ou qu’ils font partie de cette alliance jugée « diabolique » contre les intérêts occidentaux et mondiaux.
Jeremy Scahill : Est-il vrai qu’il existe une sorte de centre de commandement où les factions – qu’il s’agisse de l’Iran ou de la résistance islamique en Irak ou des Houthis au Yémen, du Hezbollah, du Hamas, du Jihad Islamique palestinien – ont un accord officiel sur la coordination de la résistance ?
Mohammed Al-Hindi : Qu’il y en ait ou qu’il n’y en ait pas n’est pas un sujet de discussion pour les médias. La résistance est actuellement engagée dans une bataille, une confrontation. Il y a des fronts arrière. C’est tout ce que l’on peut dire à ce sujet. C’est ce qui est publiquement connu et déclaré. Je n’ai rien à ajouter.
Jeremy Scahill : Quelle est votre analyse politique actuelle de ce qui pourrait se passer au Liban ? Il semble que les Israéliens veuillent au moins s’engager dans une forme de guerre plus intense contre le Liban, contre le Hezbollah. L’administration Biden a indiqué qu’elle soutiendrait Israël dans une telle guerre.
Mohammed Al-Hindi : Le Hezbollah a déclaré qu’il avait ouvert un front supplémentaire depuis le 8 octobre et que les confrontations sur ce front ne s’arrêteraient pas tant que l’agression contre Gaza ne cesserait pas. Aujourd’hui, Israël menace d’étendre la guerre et certaines voix dures au sein du gouvernement israélien appellent à une guerre totale au Sud-Liban. Mais je pense que c’est peu probable. Tout d’abord, Israël est épuisé : son armée est épuisée dans la bande de Gaza. Depuis neuf mois, il n’a pas été en mesure de résoudre quoi que ce soit ou d’atteindre l’un de ses objectifs déclarés. Il s’enfonce dans les sables mouvants de Gaza. Malgré toutes les violences et tous les massacres, les options d’Israël dans la bande de Gaza sont aujourd’hui très limitées. Qu’il s’agisse de rester à Gaza, de procéder à un retrait partiel et à un redéploiement et de maintenir le corridor Philadelphie ou le corridor Netzarim, ou de se retirer complètement. Israël n’est en mesure de résoudre aucun de ses problèmes à Gaza. Alors, comment peut-il emmener une armée épuisée dans une guerre au Sud-Liban ? Ils savent que le Hezbollah a des capacités plusieurs fois supérieures à celles de la résistance à Gaza. Il sait également que le territoire du Hezbollah n’est pas comme Gaza, c’est-à-dire ouvert comme un terrain de football. La topographie est tout à fait différente. Le front au Liban n’est pas non plus fermé comme Gaza, mais on peut dire qu’il s’étend de la Méditerranée à la mer Caspienne.
D’autre part, quels sont les cibles d’Israël au Liban ? Y a-t-il des cibles militaires ou des installations économiques du Hezbollah qu’Israël pourrait viser ? Israël pourrait détruire la banlieue sud de Beyrouth en termes de bâtiments. Mais quelles sont les cibles au Liban ? Aucune. En Israël, il existe des centaines, voire des milliers, de cibles militaires et économiques pour le Hezbollah. Le Hezbollah a publié certaines de ces cibles il y a environ deux semaines. Ces cibles ont été filmées et publiées.
Par ailleurs, la décision de mener une guerre au Liban est-elle une décision purement israélienne ? Ou faut-il une approbation ou un feu vert américain pour une décision qui pourrait entraîner la région dans une guerre régionale qui pourrait être difficile à contenir ? Les Usaméricains ne sont pas en mesure d’autoriser une guerre qui pourrait se transformer en guerre régionale à un moment aussi critique, avec les élections à venir, la guerre en Ukraine et d’autres questions. C’est pourquoi je pense que toutes les menaces israéliennes, en particulier celles de Netanyahu et de son ministre Gallant, ne sont que des paroles en l’air.
Jeremy Scahill : Vous sentez-vous trahi par les nations arabes en général dans cette situation de l’après 7 octobre ? Pensez-vous que l’approche des accords d’Abraham et des autres négociations engagées par les États-Unis pour tenter de normaliser les relations entre Israël et les États arabes représente une trahison de la cause palestinienne ?
Mohammed Al-Hindi : Depuis le début des accords de normalisation, les accords d’Abraham, il était clair que les Arabes avaient abandonné la position qu’ils avaient adoptée lors du sommet arabe de Beyrouth en 2002, qui parlait de la volonté de normaliser les relations avec Israël uniquement lorsque la question palestinienne serait abordée dans le cadre de la solution à deux États. Ils ont ensuite franchi le pas dans les accords d’Abraham, à savoir la normalisation ; ils avaient pris leur décision. Cependant, nous avons maintenant le 7 octobre. La situation avant le 7 octobre est différente de celle qui vient après, y compris pour les régimes qui ont normalisé leurs relations avec Israël.
La vision de ces régimes dépend de l’issue de cette guerre. Tout le monde attend donc de voir ce que donnera cette confrontation à Gaza. Il est clair qu’Israël n’a atteint aucun de ses objectifs jusqu’à présent et qu’il apparaîtra sous un jour différent, qui n’est pas celui dans lequel il était perçu lorsqu’il a signé les accords d’Abraham. Dans les accords d’Abraham, Israël était considéré comme un État fort capable de remplacer les États-Unis lorsqu’ils se retireraient progressivement de la région pour se réfugier en Asie du Sud-Est afin d’y affronter la Chine et les Russes. Israël prendrait la tête de la région. Cette perception a maintenant changé. Et au vu de l’issue de la bataille de Gaza, il est clair que les choses continueront d’être différentes. Bien sûr, nous ne verrons pas de résultats rapides et clairs au début, mais il s’agit d’États qui ont des intérêts. Je m’attends à ce que ces États commencent, à moyen terme ou plus tôt, à agir sur la base des règles sur lesquelles la région sera construite après le 7 octobre.
Comment la Résistance palestinienne voit-elle le duel Biden contre Trump ?
Jeremy Scahill : J’ai parcouru votre histoire depuis les années 1980, et vous avez participé à cette lutte sous de nombreuses administrations usaméricaines. Quelle est la place de Joe Biden dans l’histoire ?
Mohammed Al-Hindi : Trump nous manque un peu maintenant, avec ses débats et ses déclarations. Le président Biden ne doit pas être considéré comme une seule personne, mais il représente le parti démocrate qui a une politique claire. C’est un expert. Le président Biden n’est pas un nouveau venu en politique. C’est un expert doté d’une vaste expérience. Il a passé sa vie à travailler en politique en tant que sénateur, vice-président, etc. C’est un vétéran. Il représente très bien le parti démocrate. Il maîtrise les équilibres sur la scène internationale. Il a probablement commis une erreur lorsqu’il a mené la bataille en venant en Israël et en assistant au premier cabinet de guerre.
Je pense que ses calculs ont échoué à cet égard. Netanyahou, qui a une longue expérience des relations avec les différentes administrations, en particulier pendant les élections, a été le grand gagnant de cette affaire avec l’implication brutale de Biden dans la guerre. Netanyahou s’est rendu au Congrès sous l’administration Obama. Il a une expérience préalable. Il s’y rendra également maintenant. Il est clair qu’il essaiera de s’attarder à Gaza jusqu’aux élections américaines, d’une manière ou d’une autre, dans l’espoir que les choses seront résolues si Trump remporte les élections.
L’administration usaméricaine est limitée, qu’elle soit démocrate ou républicaine. Ils sont liés par des affaires internes, des lobbies, des capitalistes, des hommes d’affaires. Les élections américaines sont affectées par tous ces facteurs. Très franchement, nous ne comptons pas beaucoup sur le résultat de ces élections.
À la base de la société américaine, au niveau de la jeunesse, il y a de véritables changements et de nombreuses voix libres et humaines qui se répandent dans les universités. Même l’officier américain qui s’est immolé par le feu – nous lui construirons un monument, non seulement à Gaza, mais dans nos cœurs. Il s’agit là de manifestations très fortes. Toutefois, ces mouvements libres et humains ne se traduiront pas – et nous ne nous attendons pas à ce qu’ils se traduisent – en politiques qui gouverneront l’administration américaine.
Jeremy Scahill : Je me demande si vous pensez que la situation des Palestiniens serait meilleure si Trump gagnait à la place de Biden ?
Mohammed Al-Hindi : Je pense que cela dépend de l’évolution de certaines questions. Trump, en fin de compte, tout comme Biden, veillera aux intérêts américains. Ainsi, les développements dans la région, les développements dans le monde, la guerre en Ukraine, les tensions avec la Chine, tous ces facteurs influencent n’importe quel président américain, qu’il soit démocrate ou républicain. Je pense que le monde change, que la région change, que le peuple palestinien bouge, que la résistance palestinienne a prouvé qu’elle n’était pas un acteur que l’on pouvait négliger. Il existe des puissances régionales qui soutiennent le peuple palestinien. Tout cela doit être pris en compte. La guerre en cours en Ukraine, ses résultats et ses tendances, les règles qu’elle inculque, le conflit avec la Chine, toutes ces questions affecteront l’approche adoptée par Trump ou tout président démocrate, qu’il s’agisse de Biden, s’il reste candidat, ou de tout autre candidat démocrate. Nous préférons toutefois avoir un autre candidat que Biden.
Le poids stratégique d’Israël dans la région a indéniablement été affecté. Quel regard les États de la région, alliés des États-Unis, porteront-ils sur Israël après cet échec du 7 octobre et pendant plus de neuf mois ? C’est un point important. Comment le monde considérera-t-il également Israël ? Aux yeux du monde et de la région, Israël, qui a échoué si lamentablement avant Gaza, sera-il un allié fiable à qui l’on peut confier la protection de la région et la garantie de sa sécurité et de son avenir politique et économique ? Ainsi, tout futur président trouvera ces changements sur la table et ils ne pourront pas être ignorés. Surtout s’il s’agit d’un homme d’affaires comme Trump.
Le Secrétaire général des Nations unies s’est exprimé en termes honnêtes, humains et forts et a dénoncé Israël. La CIJ et la CPI poursuivent à juste titre Israël. Cependant, nous craignons que la résonance de ces crimes s’estompe et se refroidisse avec le temps. C’est pourquoi il est très important pour nous que les États-Unis, en particulier la nouvelle génération, maintiennent cette relation, qui ne concerne pas uniquement la Palestine. La Palestine est plutôt devenue un symbole de la résistance à l’injustice, à l’impérialisme et au piétinement de l’humanité dans son ensemble. Ce sont des crimes sans précédent dans l’histoire de l’humanité qui sont diffusés pour la première fois en continu.
Je voudrais insister une fois de plus sur le fait que certaines voix juives, en particulier aux États-Unis, sont meilleures que certaines voix arabes et musulmanes. Le sionisme est une idée et une politique. On peut trouver des Arabes ou des musulmans qui sont également sionistes. Tout comme il y a des sionistes chrétiens et juifs, il y a des sionistes musulmans. Je répète donc que nous respectons toutes ces voix, ces voix libres qui veulent que l’humanité l’emporte à la fin de cette bataille, et nous pensons que notre bataille en Palestine est la bataille de tous contre l’injustice, le piétinement, la rancune, le racisme : une bataille contre tous ces maux auxquels le peuple américain s’oppose.
D’autant plus que ce conflit ne s’achèvera pas avec la fin de cette guerre. Il s’agit d’un conflit ouvert. Ainsi, même si nous comprenons que ces voix ne se traduiront pas en politiques du jour au lendemain, puisqu’il s’agit d’un conflit ouvert, ces voix auront un impact significatif à l’avenir. Il y a eu quelques exemples usaméricains importants comme Rachel Corrie qui s’est tenue devant le bulldozer dans le passé à Rafah. [Note : Rachel Corrie est une militante usaméricaine qui a été tuée à Rafah, dans la bande de Gaza, en 2003, alors qu’elle tentait d’empêcher les forces israéliennes de démolir des maisons palestiniennes].
Jeremy Scahill : J’ai lu que le Département d’État usaméricain vous avait désigné comme terroriste spécialement désigné et j’aimerais entendre votre commentaire sur cette désignation.
Mohammed Al-Hindi : Je crois que les USAméricains ne connaissent pas Mohammed Al-Hindi. Ce sont les Israéliens qui m’ont présenté à eux, donc cette désignation est en fin de compte israélienne. Ils ont dit : « Ce sont des terroristes. » A l’époque, quand ils m’ont désigné il y a des années, ils ont dit qu’en tant que Secrétaire général adjoint du Jihad Islamique, il est responsable des actes de résistance du mouvement. Les USAméricains ont donc pris des décisions qui n’avaient aucune valeur, comme le gel des avoirs. Je ne suis jamais allé aux États-Unis et je n’ai pas un centime dans les banques usaméricaines ou autres. Ces décisions n’ont donc aucune valeur et n’ont aucune incidence sur le terrain. Je pense que ce sont des décisions israéliennes par excellence.
Un cheikh est associé à la fondation du mouvement du Jihad Islamique. Il s’appelait Abd Al Aziz Awda. Il est retourné à Gaza après les accords d’Oslo. Un journal usaméricain a écrit sur lui à l’époque en disant qu’il était un membre fondateur du Jihad Islamique et a mentionné son nom parmi quatre noms qui, selon le journal, étaient dangereux et recherchés. On lui a dit que les USAméricains disaient telle ou telle chose à votre sujet. Il a répondu que ce n’était pas important. Ce qui est important, c’est qu’Israël connaisse la vérité.
Les USAméricains ne voient la région qu’à travers une seule lentille, celle d’Israël, car c’est leur projet. Toutes ces décisions n’ont donc aucune incidence et aucune valeur pour la résistance, mais ne font que renforcer notre détermination.
Jeremy Scahill : Y a-t-il un message que vous souhaiteriez adresser au peuple ou au gouvernement usaméricain ?
Mohammed Al-Hindi : Le peuple usaméricain est un peuple libre. Les mouvements que nous observons dans les universités usaméricaines et les voix de personnalités usaméricaines importantes nous donnent de l’espoir. Nous apprécions tout cela, et nous croyons que l’humanité prévaudra, bientôt espérons-le. Pour nous, en Palestine, il est de notre devoir de combattre le projet sioniste en tant que menace non seulement pour les Palestiniens, mais aussi pour toute la région. En bref, il ne peut y avoir de sécurité ou de stabilité dans la région si le peuple palestinien n’accède pas à ses droits minimaux. Le Déluge d’Al-Aqsa a ramené le conflit à la case départ d’une manière que personne ne pouvait prévoir. Ce n’est pas le message du Hamas seul. C’est le message du peuple palestinien dans son ensemble.
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Source: Lire l'article complet de Le Cri des Peuples