[TIM est l’opérateur historique de réseaux de télécommunications en Italie. Comme France Télécom, il a été privatisé dans les années 1990 et est aujourd’hui une société cotée en bourse dans laquelle l’État italien détient une participation. Cassa depositi e prestiti est le correspondant italien de la Caisse des dépôts et consignations.] L’acquisition du réseau de télécommunications italien de TIM par le fonds étasunien KKR et le fait de confier les activités d’intelligence économique de la Cassa Depositi e Prestiti à Globintech, une société de cybersécurité dirigée par d’anciens cadres de la CIA, soulèvent des questions préoccupantes quant à la souveraineté technologique et à la sécurité nationale de l’Italie. Ces deux événements mettent en lumière une tendance inquiétante : l’influence croissante d’entités étrangères, liées aux services de renseignement et militaires étasuniens, sur les secteurs stratégiques italiens.
L’affaire TIM
L’acquisition du réseau TIM, qui passera par FiberCop puis par Optics BidCo contrôlé par KKR, représente une étape cruciale. Le groupe de réflexion qui soutient KKR dans l’analyse des scénarios géopolitiques et mondiaux, le KKR Global Institute, est dirigé par David H. Petraeus, ancien directeur de la CIA et général ayant fait une longue carrière dans les forces armées des EU.
Petraeus n’est pas seulement un homme d’affaires, sa présence symbolise un lien direct avec les structures de pouvoir et de renseignement des États-Unis. Le réseau de télécommunications est l’une des infrastructures les plus critiques pour une nation, et son contrôle par une entité étrangère, surtout avec de telles connexions, met en péril la sécurité des communications et l’autonomie décisionnelle du pays.
Globintech et l’intelligence économique
Parallèlement, la Cassa Depositi e Prestiti a passé un contrat avec Globintech pour la fourniture de services de renseignement en matière de cybersécurité. Globintech est cofondée par Robert Gorelick, ancien chef de centre de la CIA en Italie, et Alberto Manenti, ancien directeur de la branche extérieure des services secrets italiens (AISE). Bien que cette collaboration promette des services de haute qualité en matière d’intelligence économique et de conseil en matière de risques, elle soulève des inquiétudes quant à la gestion des données sensibles. La présence de personnalités ayant un passé aussi marquant dans les services de renseignement soulève des doutes quant à la possibilité d’une influence étrangère dans la gestion d’informations critiques.
Implications géopolitiques
Ces deux affaires démontrent clairement que l’Italie cède le contrôle de secteurs clés de son économie et de sa sécurité à des entités liées aux États-Unis. L’acquisition du réseau TIM par KKR, avec Petraeus à la barre, pourrait être considérée comme une tentative des États-Unis d’étendre leur influence sur l’infrastructure de communication de l’Italie. Cela place l’Italie dans une position vulnérable, exposée à d’éventuelles pressions et ingérences extérieures.
L’externalisation des activités d’intelligence économique de la CDP à Globintech, dirigée par d’anciens cadres de la CIA, accentue encore cette vulnérabilité. Le traitement de données sensibles par une société ayant des liens étroits avec les services de renseignement étasuniens pourrait compromettre l’autonomie décisionnelle du pays et mettre en péril la sécurité nationale.
Conclusions
L’Italie est confrontée à un défi crucial : protéger sa souveraineté technologique et sa sécurité nationale dans un contexte d’interdépendance mondiale croissante. La vente d’infrastructures critiques à des entités étrangères et l’externalisation de services de renseignement à des entreprises ayant des liens avec les services de renseignement étasuniens constituent une menace sérieuse pour la souveraineté du pays.
Le gouvernement italien doit évaluer soigneusement les implications de ces choix et prendre des mesures pour s’assurer que les infrastructures critiques et les données sensibles sont gérées de manière sûre et indépendante. La protection de la souveraineté technologique est cruciale pour la sécurité nationale et la préservation de l’autonomie décisionnelle du pays. Dans un monde de plus en plus interconnecté, il est essentiel que l’Italie garde le contrôle de ses ressources stratégiques pour assurer sa sécurité et sa prospérité à long terme.
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir