Les certitudes des classes dominantes, comme celles que représente la CAQ, sont à la hauteur de la domination qu’elles veulent absolue sur la société. En effet, on a dit que toute la classe politique a condamné le geste de réprobation de l’installation de Northvolt au Québec. Mais qu’en est-il de la responsabilité de la CAQ dans la radicalisation ainsi dénoncée si unanimement ? Même Ottawa y a mis son grand de sel ?
C’est ainsi que s’installe chez nous une transnationale suédoise, qui veut participer à la décarbonation du Québec et du monde en fabriquant des batteries. Dans tout le projet, il a été démontré, ou il le serait dans un BAPE générique, que cette filière batterie provoquera presqu’autant sinon plus de gaz à effet de serres qu’elle n’en élimine par l’exploitation minière.
Et cette transnationale, tout en exploitant main-d’œuvre et ressources naturelles, s’installe donc chez nous, avec la complicité des gouvernements en toute impunité, sans que personne ne s’interroge sur la pertinence d’une telle appropriation de nos ressources. Cela conduira à la génération d’une rente capitaliste qui quittera le Québec, s’en allant à l’étranger, avec seulement une mince contribution en taxes pour les dommages causés ou pour financer nos services publics.
Il faut l’hypocrisie des idées dominantes (étant celles de la classe dominante) pour ne pas exprimer le moindre doute sur la pertinence de cette installation à la suite d’un geste, déplorable certes, mais qui s’explique par tout le contexte de l’arrivée soudaine, comme par surprise presque, de cette compagnie auquel l’État québécois a ouvert toutes grandes les portes de la nation.
Comme si les Québécois étaient tout à coup dupes de voir les travailleurs de chez eux exploités par une compagnie tout à fait étrangère. Comme s’ils n’avaient l’expérience historique d’avoir protesté contre l’accaparement de notre territoire par des étrangers venus, soi-disant, nous offrir la charité d’emplois soi-disant bien rémunérés alors que tout le monde sait, sans l’admettre explicitement, qu’elles s’installent ici pour générer des profits qu’elles trouveraient sans doute difficile de faire ailleurs, même chez eux. La rente capitaliste issue de ces profits est autant de richesse engendrée par le travail de bons Québécois qui s’en va ailleurs sous la surveillance d’un gouvernement et son État à plat ventre devant le capital mondial.
La terreur utilisée pour protester est peut-être condamnable, mais l’hypocrisie manifestée par la soi-disant classe politique l’est tout autant, elle qui ne s’est même pas posé la question d’une autre voie que celle de la soumission au capitalisme mondiale pour fabriquer des batteries.
Est-ce qu’il n’est pas aussi pertinent de se demander si Hydro-Québec n’y aurait pas contribué tout autant en collaborant avec les industries qui fabriquent déjà au Québec des composantes de ces batteries pour exportation ? Car il y en a ! Des reportages le démontrent et nous ne sommes pas ignorants du potentiel de ces compagnies québécoises.
Manque de capitaux ? Toujours la même rengaine de la soumission au capitalisme mondial pour se développer. Quelle a été l’alternative quand il a fallu capitaliser pour l’expansion d’Hydro-Québec ? On a fait appel à ces capitaux, mais sous forme de prêts qu’Hydro-Québec a remboursé à même les profits qu’ont généré une main-d’œuvre québécoise syndiquée. Quelle est cette mentalité de ne pas se faire confiance comme entité nationale ?
C’est de la soumission au néocolonialisme et, une ignorance des opportunités qu’offre la nation avec son État, ses institutions universitaires, ses centres de recherche, ses compétences en ingénierie, ses propres ressources qu’il s’agit d’exploiter en toute indépendance même avant le choix final de l’indépendance plus complète.
Il faut non seulement manquer de confiance en soi, mais bien trahir la nation que de la soumettre ainsi au capital mondial, sans « compter sur nos propres moyens ». Déjà le mouvement ouvrier québécois a fait valoir cette maxime pour la classe ouvrière. Mais les classes bourgeoises n’ont pas mémoire de ce que les ouvriers ont défendu comme politiques pour eux-mêmes et pour la nation. Ils n’ont que les profits à courte vue… et encore n’ont-ils comme horizon que les profits qu’ils font faire à d’autres tellement ils sont bornés dans leur perspective de développement national et que la philosophie du capitalisme leur est propre.
L’extrémisme et la polarisation que l’on déplore souvent, avec une si grande unanimité, s’explique par la polarisation de la société entre classe dominante et classes subalternes dont la première tranche en voyant à ses intérêts sans considération pour les questionnements des subordonnés.
Ces classes dominantes font semblant d’être surpris par la radicalisation, peut-être petite-bourgeoise, qui suit leurs décisions à leur avantage et elles ne se remettent en question d’une fois que cette radicalisation ait provoqué les questionnements qu’elles ont ignorés.
Il ne faudrait pas exonérer trop vite les responsabilités de la CAQ dans l’installation laxiste de Northvolt, méprisant toutes les règles que la société québécoise s’est données pour se protéger d’une invasion transnationale qui lui est impropre et non souhaitée, malgré ce qu’on en dit si unanimement.
Le consensus pour dénoncer le geste violent escamote la mémoire historique québécoise de ne pas s’en laisser imposer par des compagnies d’autant plus qu’elles n’ont pas d’assises nationales. Et la complaisance face à une compagnie étrangère montre le peu de poids que les intérêts nationaux ont dans l’opinion majoritaire. Encore que le cas de Northvolt ne soit pas entièrement résolu !
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