Par Mike Whitney − Le 26 avril 2024 − Source Unz Review
Il faut bien comprendre ce qui suit au sujet de l’Ukraine :
Les États-Unis sont déjà passés au plan B. Non, l’administration Biden n’a pas produit de déclaration officielle pour l’annoncer, mais la bascule a déjà commencé. Le groupe d’experts de Washington a abandonné tout espoir de remporter formellement la guerre (plan A), et a donc adopté une stratégie totalement différente (plan B).
Ce plan B combine deux éléments principaux :
- A — une stratégie de déni, qui constitue “une approche défensive conçue pour empêcher un adversaire” d’atteindre ses objectifs. Dans cette instance, l’objectif est de prolonger le conflit aussi longtemps que possible pour empêcher la Russie d’obtenir une victoire nette. Il s’agit de la priorité principale.
- B — continuer de faire croître et d’intensifier les attaques asymétriques contre les infrastructures vitales et les zones civiles en Russie, dans l’objectif d’infliger le maximum possible de dégâts à la Russie.
Voilà ce qui constitue l’essentiel du plan B. Les calculs cyniques entretenus par Washington n’intègrent aucune préoccupation au sujet du peuple ukrainien ou de la viabilité future de l’État ukrainien. La seule chose qui compte est d’empêcher la victoire russe et d’infliger autant de dégâts à la Russie que possible. Tels sont les objectifs principaux. En termes pratiques, cela signifie que l’on va massacrer encore davantage de soldats ukrainiens pour continuer d’utiliser l’Ukraine comme plateforme de lancement d’attaques contre la Russie. Dans les faits, les seigneurs de guerre britanniques ont d’ores et déjà confirmé ce que nous affirmons ici. Voyons cet extrait tiré d’un article paru dans Zero Hedge :
… L’amiral Sir Tony Radakin, chef de la défense britannique, affirme au Financial Times que la nouvelle infusion occidentale d’aide militaire va aider l’Ukraine à accroître ses frappes à longue portée contre le territoire russe :
L’Ukraine est vouée à augmenter les attaques à longue portée sur le territoire russe, l’afflux de l’aide militaire occidentale visant à aider Kiev à définir la guerre “de manières bien plus fortes”, a affirmé le chef de l’armée britannique…
L’amiral Radakin de poursuivre : “Au fur et à mesure que l’Ukraine acquière de nouvelles capacités pour la lutte à longue portée… sa capacité de poursuivre des opérations en profondeur va [de plus en plus] devenir un trait” de la guerre… Ce qu’a ajouté Radakin indique une escalade (et non pas des négociations)… le chef de la défense britannique veut augmenter les frappes de longue portée contre la Russie, Zero Hedge.
Est-ce que vous voyez ce que je veux dire ? Il s’agit du plan B noir sur blanc. On ne s’attend plus du tout à ce que l’Ukraine gagne la guerre. Non. Le pays ne sera plus utilisé que comme plateforme pour terroriser et harceler le peuple russe. Voilà le plan B en quelques mots.
Mais comment être sûr que le plan B a déjà commencé ?
Commençons par prendre en compte l’allocation des ressources envoyées suivant le nouveau “Supplément de Sécurité Nationale” que Biden a ratifié en début de semaine. Cette loi prévoit 61 milliards de dollars pour l’Ukraine, sur lesquels 13 milliards seulement seront dépensés en armes et systèmes d’armement. Comment ce montent dérisoire va-t-il contribuer à vaincre l’armée russe ?
Souvenons-nous que les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN ont déjà versé plus de 200 milliards de dollars de financement pour la guerre en Ukraine, et que les Ukrainiens sont en train de perdre. Comment 13 milliards de dollars de plus pourraient-ils faire la différence ?
Ils ne vont pas faire la différence, et ce n’est pas pour cela qu’on les verse. Comme nous l’avons dit plus haut, le véritable objectif de cet argent est d’empêcher une victoire claire de la Russie, en lançant des attaques au hasard contre des infrastructures et des régions civiles en Russie. Une fois que vous avez compris que le plan fondamental des opérations a changé, les développements observés sur le terrain prennent leur sens. L’objectif est de se confronter à un rival géopolitique, pas à gagner une guerre. Capisce ?
Voici ce que la dotation d’aide de 61 milliards de dollars ne va pas faire : (selon l’analyste politique Ted Snider)
Cela ne va pas apporter assez d’argent. Cela na va pas apporter les armes désespérément nécessaires, ni les livrer dans les temps. Cela ne va pas apporter les soldats, encore plus désespérément nécessaires. Et cela ne va pas apporter la victoire… Bien que 61 milliards de dollars constituent une somme d’argent colossale, elle n’est pas suffisante pour vaincre la Russie. Ce que 61 milliards de dollars ne vont pas faire pour l’Ukraine The American Conservative
Il est à noter que le plus gros des unités de combat les mieux entraînées d’Ukraine se sont déjà fait éradiquer. Elles ne sont plus. Cela a contraint Zelensky à kidnapper des hommes dans les rues de Kiev et de les envoyer au combat après une formation d’à peine deux semaines, ce qui explique un taux de perte aussi important. Personne ne croit que ces “recrues vertes” vont déloger l’armée russe, ni même ralentir son avancée inexorable. Personne. On sacrifie purement et simplement ces hommes afin que Washington puisse continuer de lancer ses attaques de drones contre les infrastructures pétrolières aux abords de Moscou, de bombarder des villages de civils à la frontière russe, ou de mener des attaques aériennes sur le pont de Kerch. En d’autres termes, cette débauche de carnage est perpétrée afin que les élites occidentales dégénérées puissent continuer de projeter des images d’attaques de piqûres de moustiques contre l’ours russe. C’est la valeur qu’accordent ces élites de milliardaires à la vie humaine. Elle n’a aucune valeur pour eux. Voyons cette séquence extraite d’un article de Scott Ritter :
Joe Biden, président des États-Unis, a récemment ratifié un paquet d’aide de 95 milliards de dollars attendu de longue date, dont 61 milliards pour l’Ukraine. Sur cette somme, au moins 13,8 milliards de dollars seront utilisés pour livrer des armes, comme des missiles ATACMS à longue portée et des chasseurs F-16…
“Les 13,8 milliards de dollars d’assistance militaires qui vont être livrés à l’Ukraine ne suffiront pas à mettre un arrêt à l’avancée russe en cours,” ni “à changer le résultat sur le champ de bataille”, a-t-il affirmé…
La Russie jouit actuellement “de la supériorité militaire, voire de la suprématie totale, sur l’ensemble de la ligne de contact, pas uniquement sur les lignes de front, mais jusque dans les régions à l’arrière des zones de défense ukrainiennes.”… Scott Ritter : Une puissante aide militaire pour l’Ukraine ne va pas entraver l’avantage stratégique de la Russie, Sputnik.
Le peuple étasunien qui croit béatement que le nouveau paquet d’aides va aider à renvoyer les “méchants” Russes hors d’Ukraine vit au pays des bisounours. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité. Quiconque suit les événements du terrain sait que l’Ukraine n’a pas la moindre chance de vaincre une armée russe bien équipée et très motivée, qui revendique des réserves quasiment illimitées, des capacités industrielles quasiment illimitées, des ressources quasiment illimitées et une ferme conviction que l’Occident utilise l’Ukraine pour briser la Russie et installer sa propre marionnette à Moscou. C’est pour cela que les soldats russes se battent, et c’est pour cela qu’ils vont l’emporter. Et Snider poursuit :
“61 milliards de dollars ne vont pas changer le résultat de cette guerre,” affirme Nicolai Petro, professeur de sciences politiques à l’université de Rhodes et auteur de La tragédie de l’Ukraine, (selon) Valery Zaluzhny… “Il faudrait multiplier ce montant par cinq voire par sept, soit 300 à 400 milliards de dollars.” (Mais) même si l’argent suffisait, cela n’apporterait pas à l’Ukraine les armes dont elle a besoin, car ces armes ne sont pas disponibles à la vente. (Selon) Daniel Davis, colonel en retraite de l’armée des États-Unis, Senior Fellow des priorités de défense : “même si vous rassemblez l’argent, vous n’allez pas atteindre le nombre de munitions d’artillerie, de missiles intercepteurs pour la défense aérienne. On ne peut pas produire les munitions d’artillerie plus rapidement que les cadences actuelles. C’est une affaire de capacités physiques : ce n’est pas possible”…
Même si l’Ouest pouvait livrer à l’Ukraine les armements dans les temps, le “gros problème de l’Ukraine”, selon Davis, n’est pas la livraison des armes, mais le “problème des ressources humaines”. Les pertes de l’Ukraine sur le champ de bataille, morts ou blessés, posent à l’Ukraine un problème de ressources humaines plus grand que le problème d’artillerie… même si les États-Unis donnaient à l’Ukraine toutes les armes dont elle a besoin, elle “ne dispose pas des hommes pour en faire usage.” Ce que 61 milliards de dollars ne vont pas faire pour l’Ukraine The American Conservative
Tout cela est vraiment basique. De toute évidence, si vous n’avez pas les hommes ni l’argent, ni les armes, vous allez perdre. Et les maniaques qui mènent une croisade anti-russe vouée à l’échec SAVENT que l’Ukraine va perdre, mais ils ont décidé de poursuivre la guerre malgré tout. Pourquoi ?
Parce que les vies, la destruction et la dissolution de l’État ukrainien, ils s’en fichent complètement. Tout ce qui les intéresse est d’infliger des dégâts à la Russie, quel qu’en soit le coût. Telle est la “noble cause” pour laquelle 500 000 Ukrainiens ont sacrifié leur vie. Et c’est pour cela que cette débâcle sanglante va continuer de manière indéfinie, alors que le résultat n’en fait aucun doute.
Mike Whitney
Traduit par José Martí, relu par Wayan, pour le Saker Francophone
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