« La vérité parle un langage sans détour, et la justice n’a que faire d’explications compliquées. Elle trouve en soi son opportunité, tandis que l’injustice, viciée en son essence, réclame des sophismes pour remède. » (Euripide)
Le 30 avril 2024, la police judiciaire a convoqué Mathilde Panot, la cheffe de file des députés de La France insoumise (LFI) et Rima Hassan, candidate LFI aux européennes. Raison invoquée : apologie du terrorisme.
Cette accusation s’appuie sur la déclaration du groupe parlementaire LFI-NUPES datant du 7 octobre 2023 : « l’offensive armée de forces palestiniennes menée par le Hamas intervient dans un contexte d’intensification de la politique d’occupation israélienne à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Nous déplorons les morts israéliens et palestiniens. Nos pensées vont à toutes les victimes. L’escalade actuelle risque d’entraîner un cycle de violences infernales. La France, l’Union européenne et la communauté internationale doivent agir sans délai pour empêcher cet engrenage. Dans l’immédiat, il faut obtenir un cessez-le-feu et la protection des populations.Toutes les parties doivent revenir à la table des négociations. Pour qu’une paix juste et durable voie le jour, les résolutions de l’ONU, à commencer par la fin de la colonisation, doivent être activement mises en œuvre.Nous devons tous et toutes œuvrer dans ce sens. »(1)
L’avocat virtuel se présente devant le juge :
– Votre honneur, je me présente devant vous pour défendre les deux accusées. Ayant étudié la déclaration ci-dessous, ma question est simple : quelles phrases du contenu de la déclaration ci-dessus font l’apologie du terrorisme ?
La réponse du juge est sans détour :
– « L’offensive armée de forces palestiniennes menée par le Hamas » et « Nous déplorons les morts israéliens et palestiniens. »
Car, explique le juge :
– Elles mettent sur le même plan l’action du Hamas et l’action de défense de l’armée israélienne. L’action du Hamas est un acte terroriste qui a entraîné un pogrom et une prise d’otages. Celle de l’armée israélienne est un acte de défense.
A cette précision du juge, l’avocat virtuel répondit :
– monsieur le Président, vous confondez causes et conséquences. En effet, le drame, aussi douloureux soit-il, vécu le 7 octobre 2023 par les habitants des colonies, terre palestinienne, il faut le souligner, est une conséquence. Et donc il faut se poser la question : quelle est la cause ?
Ceci d’autant plus que d’autres actions de résistance pacifiques et militaires palestiniennes ont eu lieu depuis 1917. Et la cause est toujours la même : l’occupation de la Palestine.
Sans vous offenser, Monsieur le Président, vous confondez l’axiome avec le théorème qui en découle.
Et afin de clarifier mon propos et pour ne pas être soupçonné d’antisémitisme, je cite l’un des premier dirigeant du mouvement sioniste, Ben Gourion, devenu Premier ministre de l’entité sioniste de 1948 à 1954 et de 1955 à 1963 : « … Pourquoi les Palestiniens feraient-ils la paix ? Si j’étais, moi, un leader palestinien, jamais je ne signerai avec Israël. C’est normal, nous avons pris leur pays. Certes, Dieu nous l’a promis, mais en quoi cela peut-il les intéresser ? Notre Dieu n’est pas le leur. Nous sommes originaires d’Israël, c’est vrai, mais il y a de cela deux mille ans : en quoi cela les concerne-t-il ? Il y a eu l’antisémitisme, les nazis, Hitler, Auschwitz, mais est-ce leur faute ? Ils ne voient qu’une chose : nous sommes venus et nous avons volé leur pays.
Pourquoi l’accepteraient-ils..? » (2)
Des propos clairs que je partage sans enlever une virgule.Monsieur le Président, permettez-moi d’ajouter : d’un axiome aberrant, on peut déduire une ’’vérité’’ mais une vérité en contradiction avec le réel.
Que faire alors ? Faire abstraction du réel ou éliminer l’axiome. Si on veut être juste, il faut éliminer l’axiome !
En effet, il est injuste d’exiger d’un peuple d’abandonner son droit naturel, à savoir le droit de disposer de lui même. Un droit qui ne peut être exercé qu’en vivant libre sur sa terre d’origine. Et cette injustice est d’autant plus révoltante que l’impérialisme occidentale avec à sa tête les Etats-Unis et ses vassaux arabes ont masqué sous une multitude de résolutions de ONU dont celle du droit au retour tout en permettant à la force occupante de continuer son œuvre d’occupation et de démolition. Des résolutions qui demeurent lettres mortes.
Quant aux Accords d’Oslo ? Un conte des milles et une nuits…
Pour conclure, monsieur le Président, permettez-moi de citer un autre sioniste plus extrémiste que Ben Gourion, l’auteur du Zéro et l’infini (Arthur Koestler) :« …Israël est un phénomène historique aberrant. C’est une espèce de monstre à la Frankestein, conçu sur bleus d’architectes et couvé dans les laboratoires de la diplomatie… Il existe en fin de compte grâce à un fait accompli dont la population indigène est la victime. » (3)
D’une vérité historique, à savoir la Shoah, les puissants ont produit une injustice historique : spolier un peuple. Coloniser la terre tout en se débarrassant du propriétaire. Et cette vérité historique continue à être ressassée par les tenants du Droit international pour justifier l’injustifiable.
Ignorent-il qu’ils commettent ainsi un autre crime ? Insulter la mémoire des victimes de la Shoah.
Et ne retenant plus sa colère, l’avocat virtuel conclut :
– Dans la France, patrie des Lumières, en commerçant sur le plan militaire et économique avec la puissance occupante, c’est le président de l’État français qu’il faut accuser de participation à un génocide à Gaza ou, du moins, à un crime de guerre. Et ni les ‘’sacs de riz’’ ni les comédies diplomatiques ne peuvent effacer cette vérité. Quant à Mathilde Panot et Rima Hassan, elles agissent comme elles peuvent pour que cette France sorte de l’obscurité.
Ne vous trompez pas encore une fois, Monsieur le Président, je ne suis pas membre de LFI.
(1) https://lafranceinsoumise.fr/2023/10/07/israel-palestine-pour-une-paix…
(2) GOLDMANN, Nahum. Où va Israël ? Ed Calmann-Lévy, 1975.p.104
(3) Arthur Koestler : Analyse d’un miracle. Circé poche. Pages 51-52
(01/05/2024) Mohamed El Bachir
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir