Pour que les horreurs du carnage de Gaza soient les derniers – Purger l’État d’Israël de ses fondements sionistes ! — Yorgos MITRALIAS

Pour que les horreurs du carnage de Gaza soient les derniers – Purger l’État d’Israël de ses fondements sionistes ! — Yorgos MITRALIAS

L’enfer sur terre ! Les semaines et les mois passent et le martyre des Palestiniens de Gaza, mais aussi de ceux de Cisjordanie, continue et atteint, jour après jour, de nouveaux sommets d’horreur ! Et ce d’autant plus infâme et intolérable que le massacre se déroule devant les yeux de tout le monde, en direct sur nos écrans de télé, jour et nuit, sans interruption. Et surtout, avec la complicité active (États-Unis, UE) ou passive (Chine, Russie, Inde) des « grands » de ce monde, qui se contentent de jouer aux spectateurs, tout en prédisant que le pire est à venir ! L’horreur mêlé d’insoutenable émotion, de rage, mais aussi du plus profond dégoût.

Dégoût pour nos dirigeants occidentaux qui, ne craignent pas le ridicule le plus macabre, quand ils n’arrêtent pas d’appeler Israël à protéger les civils Palestiniens, au moment précis où ce même Israël ne fait que les exterminer méthodiquement ! Et comble de ce ridicule macabre, le gouvernement des états-Unis qui félicite Israël, constatant que l’armée israélienne se conforme à leurs souhaits de protéger la vie des civils palestiniens pendant que les hécatombes des ces civils Palestiniens s’accumulent et dépassent tout précédent !

Dégoût aussi pour – presque tous – nos médias et leurs journalistes qui persistent à nous parler d’une certaine « guerre entre le Hamas et Israël », quand en réalité il n’y a qu’une guerre d’extermination bien planifiée menée par Israël contre le peuple palestinien sous prétexte d’opérations militaires visant à la liquidation du Hamas, dont le crime est exactement qu’il a offert à Israël ce prétexte avec ses actions terroristes du 7 Octobre. Ces médias et leurs journalistes qui passent sous un silence assourdissant le martyre des Palestiniens au point de ne rien dire même de leurs propres collègues, ces 72 journalistes ciblés en priorité et tués à Gaza par l’armée israélienne, depuis le début de cette barbarie. Ces médias et leurs journalistes qui ne ressentent pas le besoin de protester même par solidarité professionnelle, contre les autorités israéliennes qui menacent de représailles qui vont de l’asphyxie économique à la fermeture, les quelques médias qui osent rapporter les faits bruts et donner la parole aux victimes du génocide en cours. Ces médias que nous ressentons le devoir de nommer par leur nom, le quotidien israélien Haaretz, et les chaînes télé qui font honneur au journalisme, comme la britannique BBC, et encore plus l’étasunienne CNN, et surtout l’arabe Al Jazeera dont les journalistes payent avec leurs vies et leur sang et le sang de leurs familles, le fait qu’ils font ce que refuse de faire l’écrasante majorité de leurs collègues des médias occidentaux, médias français en tête : rapporter fidèlement ce qui se passe sur le terrain, en donnant la parole aux victimes mais aussi a leurs bourreaux.

Dégoût donc et répulsion pour ces mêmes médias, qui donnent de plus en plus l’impression d’être en mission commandée, et qui cachent habilement derrière des phrases prétendument « neutres » faisant état des « frappes » israéliennes, la réalité quotidienne qui consiste en ces véritables exercices de tir de l’armée israélienne contre les civils Palestiniens sans défense, terrorisés, ensanglantés, affamés, assoiffés, et déjà décimés, qui errent même à pied ou à dos d’âne (!) sous une avalanche d’obus, de missiles et de bombes de 900 kilos, du nord au sud, et du sud au nord de cette minuscule Bande de Gaza, au gré du sadisme de leurs bourreaux armés jusqu’aux dents. D’un sadisme qui n’est pas du tout gratuit, mais qui fait partie intégrante de l’arrogance suprémaciste qui caractérise non seulement les actuels dirigeants mais aussi leur État, et malheureusement même la majeure partie de la société israélienne !

Nous voici donc au cœur de l’interminable tragédie palestinienne : la nature ou plutôt la raison d’être coloniale de l’État israélien lequel, faute de Constitution du pays, n’est autre que celle définie par ce qui est son projet fondateur, le projet sioniste. Un projet sioniste qui ne préconise et n’admet ni la cohabitation, ni encore moins la coexistence pacifique des peuples juif et palestinien dans un État qui doit être exclusivement juif, l’État hébreu. (1) Vu sous l’angle de ce projet sioniste, tout devient plus claire et compréhensible. Comme par exemple le refus persistant des dirigeants israéliens de tenir compte des avertissements de leurs alliés occidentaux que trop massacrer les Palestiniens fait naître les terroristes de demain. Ici, il ne s’agit pas d’une prétendue incapacité des dirigeants israéliens de comprendre quel est leur vrai intérêt. En réalité, c’est exactement parce que les dirigeants israéliens savent très bien quel est leur intérêt, qu’ils font tout leur possible pour créer en toute conscience et entretenir en permanence la menace terroriste ! Et ils le font en humiliant, torturant, emprisonnant et en tuant les Palestiniens des leur plus jeune age, car ils savent très bien que quand on traite quelqu’un comme un animal, on le contraint de réagir comme un animal ! Car sans ennemi et psychose de la menace extérieure qui pousse la population apeurée a s’unir derrière ses chefs, « oubliant » leurs méfaits et ses propres problèmes, il serait impossible par exemple à Netanyahou de se maintenir au pouvoir parce que c’est bien connu que, une fois les actuelles opérations militaires terminées, il sera jugé et condamné pour sa corruption, et ira probablement terminer ses jours en prison. Mais, attention : il ne s’agit pas seulement de Netanyahou mais de l’État d’Israël lui-même lequel, plus que tout autre, a un besoin vital de la menace extérieure permanente afin de maintenir sa population, ainsi que la Diaspora, unies autour de son projet sioniste.

De même, c’est seulement en l’examinant sous l’angle du projet colonial fondateur, qu’on comprend le pourquoi de l’actuelle fureur meurtrière et destructrice de l’armée israélienne à Gaza mais aussi en Cisjordanie. Encore une fois, on n’assiste pas du tout à des « erreurs » techniques et de jugement des chefs israéliens qui seraient prétendument aveuglés pas leur rage vindicative contre le Hamas et ses crimes. En réalité, le massacre méthodique et le nettoyage ethnique des Palestiniens qui a commencé avec la liquidation de ce qui est ce véritable ghetto de Gaza, se font en toute conscience car ils correspondent aux objectifs historiques du projet sioniste : la création, par l’extermination, l’expulsion et la soumission des indigènes, d’un État exclusivement juif sur l’ensemble des terres du Grand Israël !

La conclusion est évidente : un tel État est par nature monstrueux, inhumain et irréformable. Monstrueux non seulement pour les indigènes qu’il opprime et détruit, mais aussi pour ses propres citoyens juifs auxquels il a promis la sécurité qui leur manquait cruellement et qu’ils n’ont jamais trouvé en Israël. Et irréformable car sa logique interne a fait que ses illusions égalitaristes et démocratiques initiales soient progressivement remplacées par des glissements successifs vers une extrême droite de plus en plus raciste et antidémocratique, pour aboutir à l’actuelle extrême droite religieuse, pogromiste, obscurantiste et fascisante sinon fasciste, au discours fanatique et messianique d’un autre age.

Alors, la solution qui s’impose crève les yeux : il faut changer cet État de fond en comble, afin de le rendre au moins « normal », « comme les autres ». En somme, il faut “ desionisiser ”. Ce qui ouvrirait la voie au dépassement définitif de la « solution », d’ailleurs illusoire et irréalisable, « à deux états », par la création d’un État multiethnique où pourraient cohabiter pacifiquement partageant les mêmes droits, les populations juives et palestiniennes. Cependant, la réalisation d’un tel projet n’est pas du tout facile. Dans le premier de deux cas, les plus illustres qui peuvent servir de guide, la dénazification de l’Allemagne à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, a été imposé par les puissances qui l’ont vaincu sur le champ de bataille. Dans le deuxième cas, celui de l’Apartheid sud-africain, la « purification » et la « normalisation » de l’État s’est faite de l’intérieur, à l’initiative de deux populations jusqu’alors ennemies. Sur la base de ces précédents, on peut déjà exclure l’application à Israël du modèle de la dénazification allemande parce qu’il présupposerait la défaite militaire d’Israël, ce qui conduirait très probablement à un terrible bain de sang de sa population juive.

Alors, reste la variante sud-africaine qui suppose que la “ désionisisation ” d’Israël vienne de son intérieur, à l’initiative de ses propres citoyens. Cette perspective n’est pas seulement plus réalisable. Elle est aussi bien plus réaliste et effective car elle serait faite sans contrainte extérieure, et donc elle aurait toutes les chances de s’enraciner et de durer dans la conscience des premiers intéressés, ses propres citoyens. Ceci étant dit, l’état actuel de la société israélienne qui fait bloc autour de ses dirigeants et de son armée refusant de se soucier du sort des Palestiniens, ne signifie pas du tout qu’il n’y pas des Juifs déjà décidés d’entreprendre la tache historique et si lourde de conséquences de “ désionisiser ” leur pays. Ils existent bel et bien tant dans la Diaspora qu’en Israël lui-même, au grand désarroi tant des sionistes que des antisémites qui, de commun accord, s’interdisent d’accepter l’existence des juifs qui ne sont pas sionistes. Ils existent et leur militantisme humaniste et internationaliste porte déjà des résultats qui se font sentir en Israël et de par le monde. Ce sont ces admirables jeunesJuifs et Juives des mouvements antisionistes et pacifistes comme If Not Now ou encore Jewish Voice for Peace qui, en l’espace de quelques années, ont pu démultiplier leur influence au-delà de toute prévision, au point de pouvoir mobiliser ces deux derniers mois, des milliers d’autres juifs dans des manifestations et autres actions coup de poing pratiquement quotidiennes en solidarité avec les Palestiniens de Gaza, aux États-Unis et ailleurs. Ce sont aussi ces héroïques citoyens Israéliens comme Sasha Povolotsky et ses camarades, qui vivent jour et nuit chez les paysans palestiniens du village Al Farisiya pour les protéger des bandes de colons Israéliens, et qui n’hésitent pas à se battre contre ces commandos fascistes en versant leur sang à coté de leurs frères palestiniens, comme il l’ont fait il y a encore quelques jours, le 4 décembre 2023 ! (2)

Oui, il faudrait sans doute qu’ils soient aujourd’hui plus nombreux, mais il faut se souvenir qu’ils étaient peut être moins nombreux qu’eux les militants sud-africains quand ils ont commencé à lutter contre l’apartheid, avec le succès qu’on connaît. Oui, on aimerait qu’ils soient plus nombreux mais raison de plus pour les aider avec toutes nos forces, pour populariser leur combat et leurs idées, pour construire des mouvements de solidarité avec eux et avec ceux des Palestiniens qui mènent le même combat dans des conditions encore plus difficiles. D’ailleurs, comme le dit si bien le nom qu’ils ont choisi de donner à leur mouvement If Not Now, si ce n’est pas maintenant, alors quand ?

Notes

1. Voir l’excellent texte de Gilbert Achcar « La dualité du projet sioniste » : https://www.monde-diplomatique.fr/mav/157/ACHCAR/58306

2. Haaretz, Left-wing Israeli Activists Attacked While Protecting Settler-targeted West Bank Village : https://www.haaretz.com/israel-news/2023-12-04/ty-article/.premium/lef…

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Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir

À propos de l'auteur Le Grand Soir

« Journal Militant d'Information Alternative » « Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »C'est quoi, Le Grand Soir ? Bonne question. Un journal qui ne croit plus aux "médias de masse"... Un journal radicalement opposé au "Clash des civilisations", c'est certain. Anti-impérialiste, c'est sûr. Anticapitaliste, ça va de soi. Un journal qui ne court pas après l'actualité immédiate (ça fatigue de courir et pour quel résultat à la fin ?) Un journal qui croit au sens des mots "solidarité" et "internationalisme". Un journal qui accorde la priorité et le bénéfice du doute à ceux qui sont en "situation de résistance". Un journal qui se méfie du gauchisme (cet art de tirer contre son camp). Donc un journal qui se méfie des critiques faciles à distance. Un journal radical, mais pas extrémiste. Un journal qui essaie de donner à lire et à réfléchir (à vous de juger). Un journal animé par des militants qui ne se prennent pas trop au sérieux mais qui prennent leur combat très au sérieux.

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