Nous sommes en novembre 2023, et je viens de réaliser quelque chose. La quantité de gens qui aujourd’hui encore lisent « sioniste » et comprennent « juif » est impressionnante. Sans déconner, au début, je croyais que c’était juste de la mauvaise foi classique. Mais non. Leur inculture politique te submerge comme une vague traîtresse. Ils pensent que ce vocabulaire n’est qu’un langage codé. Tu m’étonnes qu’ils s’énervent. Et toi, dans ton pédalo à voguer sur les réseaux sociaux, tu ripostes avec ton ironie habituelle, en pensant avoir affaire à un concombre masqué, ce qui en retour est interprété comme du cynisme. Doux Jésus.
Tu réalises qu’ils ne suivent pas l’actualité dans cette région, ne consultent jamais les médias respectifs des acteurs principaux. Ils comptent sur les médias institutionnels et semblent s’en contenter.
Le résultat est leur vision qu’entre deux « pics » d’actualité, il ne règne qu’un calme plat troublé de temps en temps par quelques vaguelettes. Untel est mort, tué par une balle venue d’on ne sait où. Une explosion mystérieuse, provoquée par on ne sait quoi, fait des victimes. Quelque part, une maison est rasée, faute de permis de construire (apparemment). Une colonie « s’installe », comme des explorateurs d’un monde nouveau monteraient un campement dans un coin de jungle débroussaillée, à la tombée de la nuit. Des pétards géants décrits comme des missiles balistiques s’abattent en semant la terreur, interrompant les séances de manucure et provoquant la vision dantesque de silhouettes paniquées se ruant vers les abris et surmontées encore de bigoudis, oubliés dans l’urgence. Des barbus qui s’agitent. Des propres sur soi qui nous expliquent la situation dans un français ou un anglais parfait. Une confrontation entre un camp qui conteste et un autre qui insiste. Le mot « apartheid » défile en bas de l’écran sans provoquer de persistance rétinienne. Bref, « c’est compliqué ».
Puis vient un moment de vérité. « Un« , pas « Le« , car il y en a eu déjà d’autres, mais vite oubliés. Mais les fissures sont là, béantes dans les rues de Gaza, à peine perceptibles dans les médias et encore invisibles chez notre infâme « classe dirigeante ». Chez ces derniers, pas encore de panique, mais une certaine préoccupation que les murs de leur construction narrative suivent l’exemple de ceux de Gaza.
Alors, tu m’étonnes qu’ils s’énervent.
Viktor DEDAJ
capitaine de pédalo
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir