À la française, chers journalistes de Radio-Canada
Le vendredi 6 octobre, j’ai vu à Radio-Canada l’entrevue accordée par l’excellente chercheuse d’origine iranienne associée à l’Observatoire sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques à l’UQAM, Hanieh Ziaei [1], à la présentatrice et animatrice Claudine Bourbonnais au Téléjournal week-end [2]. Elle portait sur la militante des droits de la personne iranienne Narges Mohammadi [3], qui venait de se mériter le prix Nobel de la paix 2023.
Durant ladite entrevue, Mme Bourbonnais s’obstinait à vouloir prononcer « Mohammadi » à la persane, alors que Mme Ziaei, dont la langue maternelle est pourtant celle de Ferdowsi [4], le prononçait simplement à la française. J’ai failli partir à rire. Comme la diction de l’animatrice est déjà médiocre, pourquoi se met-elle en sus sur les épaules des défis de prononciation proprement superflus ?
Cela me rappelle un reportage de Yasmine Khayat portant sur l’affaire Jamal Khashoggi en 2019 [5]. En prononçant les nombreux patronymes arabes dans sa première langue apprise, l’ensemble du reportage de Mme Khayat en devenait malaisé à suivre. Nous sommes habitués à entendre les patronymes anglo-saxons être prononcés à l’anglaise, mais il n’en va pas de même de ceux arabes, la langue de Mahomet étant du chinois pour nous. Abdelaziz Bouteflika, c’est Abdelaziz Boutéflika, pas عبد العزيز بوتفليقة [6].
Les journalistes de Radio-Canada doivent se souvenir qu’ils travaillent pour une chaîne de télévision francophone, dont la majorité des téléspectateurs n’ont que faire de la prononciation souvent sophistiquée de certains patronymes (Erdogan [7]) et toponymes (Téhéran [8]) étrangers. Depuis février 2022, on commente souvent la situation en Ukraine. J’ai entendu bien des versions de « Kharkiv », « Kherson » et « Lougansk ». C’est à en perdre son latin. Contentez-vous de les prononcer à la française et nous serons amplement satisfaits. En vous remerciant à l’avance.
Sylvio Le Blanc
Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec