« La contemplation de la Trinité détruit l’inimitié entre les hommes et la haine dans le monde. » – Saint Serge de Radonège
Je suis toujours heurté en voyant deux citoyens, adultes de surcroit, s’invectiver à tue-tête simultanément en se pointant du doigt. En fait, c’est bien probablement l’unique manière qu’ils ont de ressentir un peu de réciprocité à ce moment précis de leur rencontre. N’en demeure pas moins qu’il s’agit du premier degré de négation de l’autre menant à l’homicide : tu commences par haïr ton voisin et, next thing you know, tu fomentes un génocide… C’est du déjà-vu!
Ce dialogue de sourds est une remarquable expression corporelle de ce qu’est l’idéologie : un refus de dialoguer. Un court-circuitage de la raison au profit de la force pour imposer une idée. Favoriser une construction intellectuelle ou mentale au détriment du réel. Et ici, ce réel, c’est l’autre. Un autre qui peut avoir de belles intentions, mais des contradictions morales; de belles paroles, mais un discours illogique; un beau visage, mais des cheveux gras.
Ce réel, cet autre, complexe et parfois incompréhensible, ô combien de fois voudrait-on le faire rentrer dans nos conceptions, dans nos catégories, dans nos « tu devrais être comme ça »!
Une haine dévorante
Alors, de la haine, dans ces manifestations, il y en a, et de tous les côtés. Les amalgames ressassés par certains chroniqueurs et rehaussés par des jugements péremptoires n’aident pas. Je ne cherche toutefois pas à minimiser ou à excuser les paroles (et peut-être les actes) réellement homophobes ou transphobes de certains manifestants. Les désaccords ou les divergences d’opinions ne peuvent jamais servir de prétexte à la violence, qu’elle soit verbale, physique et, je dirais même, idéologique.
Je peux ainsi très bien concevoir pourquoi les personnes trans se sentent particulièrement visées ou attaquées : pour elles, remettre en cause l’identité de genre, c’est questionner l’expérience angoissante qu’elles ont de leur corps, de leur vie familiale et affective : c’est douter de leur droit d’exister. Derrière les idées et les concepts, il y a des personnes qui ont souffert, qui souffrent et qui continueront de souffrir. Et elles ne sont pas nécessairement des idéologues.
Je partage par ailleurs l’inquiétude des parents qui voient se répandre une vision de l’être humain et de la sexualité qui ne correspond pas à leurs convictions profondes. Et ce n’est pas parce qu’ils haïssent toutes les personnes trans pour ce qu’elles sont.
Acceptons de ne pas répondre à l’idéologie par l’idéologie, mais de nous en remettre à la raison et d’entrer dans la discussion,
publique ou privée, avec amitié et bienveillance.
En fait, au-delà du vécu malheureux de ces dernières — dont il ne s’agit pas de douter — la transaffirmation ou les opérations transaffirmatives peuvent être remises en question en tant que seules bonnes manières d’accompagner la dysphorie de genre. De même que la notion de genre qui, avant d’être une expérience personnelle, est une théorie, une manière de concevoir son être qui peut être débattue.
Elle devient une idéologie lorsqu’on cherche à l’imposer de manière militante comme une vérité universelle qui doit être acceptée par tous et sans aucune remise en question. Ainsi, les édentés nouveau genre en veulent généralement beaucoup plus aux idées ou au processus idéologique qu’aux personnes. Malheureusement, le glissement émotif est facile.
Renoncer à soi-même
Dans ce débat, il y a ainsi plusieurs droits qui s’affrontent : celui des parents quant à l’éducation de leurs enfants, et celui des personnes souffrant d’une dysphorie de genre à être respectées, protégées ou aidées de la manière qui leur semble la plus juste.
Dans une société libérale, la dynamique de lutte fait que les gagnants seront toujours ceux qui seront le plus en position d’imposer leur point de vue. Mais il y aura forcément des perdants qui se sentiront lésés et dont le ressentiment sera tôt ou tard le levier qui les fera revenir à la charge. Il s’agit nécessairement d’un cul-de-sac.
Cette impasse me semble surmontable seulement si les uns arrêtent de vouloir prendre les autres d’assaut. Si on accepte humblement que nos droits, nos idées, ne passent pas en priorité, partout, tout le temps. Si nous acceptons de ne pas répondre à l’idéologie par l’idéologie, mais de nous en remettre à la raison et d’entrer dans la discussion, publique ou privée, avec amitié et bienveillance. Et si on ne s’y sent pas capable ou appelé, on peut toujours demander la grâce de se laisser crucifier avec amour par la bêtise de celui ou celle que nous pensons être dans l’ignorance la plus totale.
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Source : Lire l'article complet par Le Verbe
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