Une ministre du monde

Une ministre du monde

Une ministre du monde

22 septembre 2023 (20H00) – Je l’avais noté dans ma tête et croyait même en avoir fait accessoirement mention, dans un texte, – dont je n’ai pas réussi à retrouver la trace. Cette fois, toute honte bue et toute réflexion savourée, je reviens ou j’en viens à ce cas qui me paraît finalement extraordinaire si on l’extrapole un peu, – chosé autorisée dans une si étrange époque. 

…Qui plus est, mon Dieu ! Ce n’est pas la première fois que madame Jacinda Ardean, jeune femme bien de son temps et ancien première ministresse de Nouvelle-Zélande, parle dans le sens qu’on va voir à la tribune de l’ONU lors de l’Assemblée Générale puisqu’elle l’avait fait déjà en 2022 alors qu’elle se trouvait encore aux affaires…

Sans doute a-t-on jugé qu’un tel talent, un si bel humanisme, en rien ne pouvait être gâché ; l’université d’Harvard, la forteresse richissime de la haine anti-liberté d’expression, l’a aussitôt gobé comme ‘Visiting Fellow’ richement dotée pour qu’elle poursuive sa croisade. Les donateurs, où l’on retrouve le gotha néolibéral et globaliste, a approuvé avec enthousiasme ce recrutement.

En gros, dit-elle en 2023 à la tribune de l’ONU, invitée on ne sait sous quelle étiquette sinon bien entendu celle de Ministre comme vous verrez plus loin :

« Jacinda Ardean, de Harvard, appelle les Nations unies à réprimer la liberté d'expression en tant qu'arme de guerre. »

La phrase fait le titre de l’article de Jonathan Turley, qui est la seule plume convenable à ma connaissance à s’être attachée à cette affaire (tout comme en 2022 : l’article référencé est de lui). Quelques mots rapides et fort modérés de Turley pour savoir de quoi il s’agit ; car il s’agit de rien moins que l’exposé de la nécessité d’une censure globale.

« Jacinda Ardean n'est peut-être plus Première ministre de Nouvelle-Zélande, mais elle était de retour aux Nations unies pour poursuivre son appel à la censure internationale. Jacinda Ardern est aujourd'hui l'une des principales figures de la lutte contre la liberté d'expression dans le monde et continue de bénéficier du soutien des milieux politiques et universitaires.  Dans sa dernière attaque contre la liberté d'expression, Ardern a déclaré que la liberté d'expression était une arme de guerre virtuelle. Elle demande au monde entier de se joindre à elle pour combattre la liberté d'expression dans le cadre de sa propre guerre contre la "désinformation" et la "mésinformation". Bien entendu, son point de vue a été adopté avec enthousiasme non seulement par les pays autoritaires, mais aussi par l'élite gouvernementale et universitaire.

» Dans son discours, elle souligne que nous ne pouvons pas laisser la liberté d'expression entraver la lutte contre des problèmes tels que le changement climatique. Elle fait remarquer qu'ils ne peuvent pas gagner la guerre contre le changement climatique si les gens ne les croient pas au sujet du problème sous-jacent. La solution consiste à réduire au silence ceux qui ont des opinions divergentes. C'est aussi simple que cela. »

D’une façon générale, mise à part une pique ou l’autre, je trouve Turley très modéré dans son exposé. On n’y sent pas l’indignation et le ridicule à la fois qu’une telle entreprise doit raisonnablement, – j’insiste sur cet adverbe pour qu’on ne croit pas à une poussée de colère, la raison gouverene mon propos et sa forme, – susciter chez un esprit épris de la liberté d’expression, donc de la liberté tout court. Je pense que Turley a pris le cas du point de vue technique de la logique juridique, qui fait penser que puisqu’il y a liberté d’expression toutes les opinions doivent s’exprimer, y compris cet appel à la “cancellation”-guillotine de la liberté. C’est beau pour la logique, mais pour la vraie raison non-subvertie, c’est une belle occasion perdue d’exprimer la nausée et le dégoût devant des circonstances qui élèvent au pinacle une telle entreprise.

Tout de même, Turley conclut, sur un tron pincé et glacé, cette fois sur une tirade plutôt sévère :

« Ce qui fait froid dans le dos, c'est d'entendre Ardean exprimer sa fidélité à la liberté d'expression alors qu'elle appelle les nations du monde à la restreindre sévèrement pour empêcher les gens de saper leurs politiques et leurs priorités. Elle reste le visage “empathique” de la censure brute et de l'intolérance. Elle est désormais l'ambassadrice virtuelle de la réglementation et de la criminalisation de la liberté d'expression à l'échelle mondiale. »

“Froid dans dos”, hein ? Il y a beaucoup de choses qui ont été globalisées, mais dans des domaines, – le commerce, la culture, etc., – où cette démarche avait du sens et ne constituait pas nécessairement une attaque unilatérale, dévastatrice et sans la moindre contrepartie contre les citoyens des différentes nations concernées. Ici, point du tout, et “froid dans le dos”, certes.

Ministère de “la Vérité-par-la-Censure”

Il ne faut pas s’y tromper : ce que propose la ‘Harpie’-Ardean, c’est l’instauration d’un ministère global de la censure, – ou mieux “de la Vérité-par-la-Censure”. Cela n’est du Orwell, mais du Orwell inversé : on ne nie pas qu’il y ait non-réalité ou anti-Vérité mais on pose comme irréfragable Vérité que la Vérité existe sous la forme de la narrative tandis que ce qui est habituellement désigné comme la Vérité est écarté comme tromperie, erreur, distorsion idéologique, croyance primaire, etc. On ne dit pas “le Mensonge c’est la Vérité” (Orwell), on dit “la Vérité est hors de propos, voici ce qui importe et qui fait bien mieux qu’elle”. Bien entendu, cette conception vaut pour tous les problèmes, toutes les analyses, toutes les émotions, toutes les émulsions accouchées par l’affectivisme, elle est pourrait-on dire, universelle. 

Note de PhG-Bis : « On ne doit donc pas s’y tromper ! Ce qui vaut ici pour la crise climatique que cite l’Ardean, est bon pour tout le reste, Zelenski et Ukraine en tête. Retenez bien cet aspect universel des bas-fonds correspondant au globalisme. »

C’est une avancée audacieuse dans la marche vers la globalisation, et par une voie habilement tracée à l’ombre des vertus irréfragables de notre temps (pensez donc, la crise climatique). On se trouve placés devant l’affirmation que tout ce que nous répète la narrative officielle est instituée, quasiment par décret, par 49/3 si vous voulez, comme la Vérité-vrai-de-vrai. C’est tellement vrai et c’est tellement la Vérité qu’il devient désormais inutile d’employer ce terme, que l’usage et la référence de la narrative suffiront.

Alastair Crooke s’essayait récemment à une définition du phénomène, – que l’on pourrait effectivement nommer narrativiseme, – à partir de références courantes pêchées dans la presseSystème anglaise, certainement la plus avancée dans la pratique du narrativisme. C’est à propos de l’Ukraine, lui-même (Crooke) ayant estimé que le sentiment à l’origine de cette démarche est l’hubris de Sapiens Sapiens.

« L’hubris consiste à croire qu’une narrative inventée peut, en soi, apporter la victoire. [Le narrativisme] est un fantasme qui a envahi l’Occident, surtout depuis le XVIIe siècle.

» Récemment, le Daily Telegraph a publié une vidéo ridicule de neuf minutes prétendant démontrer que “les narrative gagnent les guerres” et que les revers dans l’espace de combat sont accessoires : ce qui compte, c’est d’avoir un fil narrativiste unitaire articulé, à la fois verticalement et horizontalement, à travers tout le spectre – du soldat des forces spéciales sur le terrain jusqu’au sommet de la hiérarchie politique.

» L’essentiel est que “nous” (l’Occident) avons imposé notre narrative, tandis que celle de la Russie est “maladroite” – “Notre victoire est donc inévitable” .

» Il est facile de se moquer, mais on peut néanmoins y reconnaître une certaine substance (même si cette substance est une invention). La narrative est désormais la façon dont les élites occidentales imaginent le monde… »

Le ministère de “la Vérité-par-la-Censure” d’Ardean, richement financé par Harvard, doit fonctionner en toutes choses de cette façon. Le problème est qu’à ce jour, et même de plus en plus souvent, la réalité-Vérité, n’est pas effacée (“cancellée”) malgré tous les 49/3 du monde, qu’elle persiste et même se renforce, qu’elle constitue un obstacle de plus en plus insupportable ou un dilemme de plus en plus insoluble.

• Par exemple, la situation en Ukraine, que Crooke décrivait à partir d’exemples pris dans la presseSystème au printemps, avant la fameuse contre-offensive, s’est encalminé dans une situation opérationnelle catastrophique et donc complètement inverse à celle que décrit la narrative. Ce constat est extrêmement préoccupant pour le narrativisme du Ministère de “la Vérité-par-la-Censure” du fait du bruit et des éclats divers, – d’obus, de blessés et de mourants, et d’une tragédie sanglante et catastrophique. 

• Que fera le ministère d’Ardean placé devant une situation comme celle de l’Inde contre le Canada ? Les deux pays sont pour l’instant tout aussi bien vus l’un que l’autre, même si pour des raisons différentes. Donc, pas de réponse, le ministère passera la main et l’on se demandera à quoi sert ce ministère si bien achalandé s’il s’en lave les mains, s’il ne se prononce pas

Tous les cas sont de la même sorte et de plus en plus pressants à mesure qu’évolue la situation entre un “parti  globaliste” qui a décidé de passer à l’action en cherchant à institutionnaliser le narrativisme et sa narrative, et une situation faite de diverses vérités-de-situation qui ne cessent de s’affirmer et de démentir de plus en plus durement la narrative. La césure devenue rupture tend donc à se diriger vers des affrontements de plus en plus directs, de plus nombreux. Les divers ministres globalistes, comme l’Ardean, évoluent sur des territoires et et des espaces qui n’ont plus aucun rapport avec la vérité-de-situation du monde, même si Harvard paye très bien, sinon de mieux en mieux, ses affidés. Au reste et en fait d’affidé, les hauts personnages du parti globaliste sont de plus en plus visible puisqu’ils parlent à la tribune de l’ONU (même s’il y a souvent salle vide à guichets fermés, preuve de l’exaltation globaliste).

Dans le cadre de la GrandeCrise et de l’effondrement, on se doute bien que cette situations constitue une bombe à retardement de plus. C’est un carpet-bombing de bombes à retardement… 

Source: Lire l'article complet de Dedefensa.org

À propos de l'auteur Dedefensa.org

« La crisologie de notre temps » • Nous estimons que la situation de la politique générale et des relations internationales, autant que celle des psychologies et des esprits, est devenue entièrement crisique. • La “crise” est aujourd’hui substance et essence même du monde, et c’est elle qui doit constituer l’objet de notre attention constante, de notre analyse et de notre intuition. • Dans l’esprit de la chose, elle doit figurer avec le nom du site, comme devise pour donner tout son sens à ce nom.

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