Legault craint un automne chaud et recule sur une prime aux députés

Legault craint un automne chaud et recule sur une prime aux députés

Face à la perspective de grèves dans le secteur public et dans un contexte où les pressions financières se multiplient sur le gouvernement, le premier ministre François Legault a annoncé, vendredi, l’abolition d’une prime de 125 $ par jour versée aux députés, dont la rémunération a bondi de 30 % après une hausse controversée en juin.

Clôturant une réunion de deux jours de ses députés, en prévision de la rentrée parlementaire, M. Legault a confié ses inquiétudes lors d’une conférence de presse.

Le premier ministre craint des perturbations de la part de certains syndicats qui auront le droit de tomber en grève dès la fin du mois. « J’ai quand même des inquiétudes quand j’entends certains chefs syndicaux faire des menaces de grève », a-t-il dit.

M. Legault a invité les syndiqués à se montrer raisonnables face aux offres du gouvernement, qui propose de compenser la hausse de l’inflation avec une augmentation salariale de 11,5 % sur cinq ans.

« Nos offres salariales couvrent l’inflation. C’est très important et il faut être raisonnable », a-t-il déclaré en se défendant de négocier sur la place publique.

Le premier ministre a ciblé la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), qui représente notamment les infirmières et dont il dénonce les demandes.
 

« Évidemment il y a des syndicats comme la FIQ qui nous demande des augmentations de 24 %, a-t-il affirmé. Bien honnêtement, on gère l’argent des Québécois. On n’a pas cette capacité de payer là. On est en déficit et il n’est pas question d’augmenter les impôts ou les taxes. »

M. Legault a souligné l’importance d’accorder des incitatifs pour avoir des infirmières sur les quarts de nuit et en région, ce à quoi la FIQ s’opposerait.

« Je sais que les syndicats comme la FIQ veulent de la Labatt Bleue pour tout le monde, le mur à mur, la même augmentation », a-t-il constaté.

Après un caucus marqué par de vifs échanges avec des maires réunis pour un sommet sur la fiscalité à Montréal, M. Legault a servi à leurs demandes financières le même argument qu’aux syndicats.

« Si on pense qu’on va régler tous les problèmes en donnant plus d’argent du gouvernement du Québec aux municipalités, il n’y a pas de marge de manoeuvre, il n’est pas question d’augmenter les taxes », a-t-il déclaré.

Recul sur une prime

 

Après avoir défendu le statu quo, jeudi, M. Legault a affirmé que les députés, dont la rémunération a récemment bondi de 30 %, de 101 561 $ à 131 766 $, devront renoncer à une allocation qui s’ajoutait à cette somme.

« J’en ai parlé avec nos députés et on a décidé de façon unanime, notre whip va emmener au Bureau de l’Assemblée nationale une résolution pour abolir ces primes de 125 $ qui sont payées quand des commissions sont hors des moments où l’Assemblée nationale siège. »

Jeudi, le whip en chef du gouvernement, Éric Lefebvre, avait pourtant affirmé que le dossier de la rémunération était clos.
 

M. Legault est resté vague sur les raisons de cette volte-face. Il s’est contenté d’affirmer que des partis de l’opposition ont réclamé son abolition, jeudi, après qu’il l’a défendue.

« On a deux partis, le Parti québécois et le Parti libéral qui disent “on est prêt à l’abolir”, donc je pense que ça change la perspective. »

Un député de Québec solidaire, Étienne Grandmont, a fait de même jeudi, après les péquistes et les libéraux.

 

Jeudi, Le Devoir a rappelé l’existence de cette prime toujours en vigueur malgré l’augmentation de 30 % votée par les députés en juin.

Deux ex-présidents de l’Assemblée nationale, Jean-Pierre Charbonneau et Jacques Chagnon, ont jugé qu’elle n’était plus justifiée, un argument qui n’avait pas, d’emblée, obtenu l’adhésion du premier ministre.

Inflation

 

François Legault a répété son intention de continuer à aider la population à affronter l’inflation. Ses députés devaient en discuter au cours des deux derniers jours, notamment comment aider certains groupes ciblés qui pourraient être plus touchés, malgré les décisions de son gouvernement comme l’envoi de chèques.

« Est-ce qu’on doit en faire plus ? C’est de cette question qu’on a beaucoup débattue. Nos 89 députés sont bien conscients qu’il y a des gens qui ont de la misère à arriver quand vient le temps de faire l’épicerie, de payer le loyer ou de renégocier son hypothèque sur sa maison. »

M. Legault a rappelé les décisions de son gouvernement pour améliorer la situation financière des contribuables.

« On vient de baisser les impôts, les gens l’ont sûrement vu sur leur chèque de paie depuis le 1er juillet », a-t-il dit.

Jeudi, la Banque du Canada a rappelé qu’elle devrait peut-être, après une pause annoncée cette semaine, rehausser son taux directeur face à des prévisions d’inflation à la hausse.

« Il y a beaucoup d’inconnues dans les prochains mois, la Banque du Canada essaie de baisser l’inflation », a glissé le premier ministre.

Construction et immigration

 

La pénurie de main-d’oeuvre et l’ampleur des projets de construction à venir nécessitent la mise sur pied de programmes de formation et de conversion rémunérés qui permettront d’ajouter des travailleurs sur les chantiers.

Le premier ministre Legault a affirmé que les besoins ont augmenté pour les projets gouvernementaux d’infrastructures, dont la valeur est passée de 100 milliards de dollars à 150 milliards depuis l’élection de la Coalition avenir Québec (CAQ).

La pénurie de logements, la nécessité d’augmenter la capacité de production d’Hydro-Québec et les projets privés de la filière batterie font entrevoir de grands besoins de main-d’oeuvre dans la construction.

« Il faut être capable de construire plus et de construire plus vite nos écoles, nos hôpitaux, notre transport en commun, notre logement, Hydro-Québec, les usines. On va avoir besoin de beaucoup, beaucoup de monde », a dit M. Legault sans se fixer d’objectif d’effectifs.

Alors que des consultations débutent sur une proposition de hausser les seuils d’immigration de 50 000 à 60 000 personnes par année, M. Legault ne s’est pas avancé sur sa préférence.

« Il y a des besoins de main-d’oeuvre, mais en même temps c’est non négociable de protéger le français », a-t-il dit.

Satisfaction et courage

 

M. Legault a reçu avec philosophie un sondage, publié par Le Soleil vendredi, montrant que la satisfaction de la moitié des Québécois a baissé à l’égard du gouvernement de la CAQ.

« Je ne suis pas là pour gagner un concours de popularité, je suis là pour travailler pour le meilleur intérêt des Québécois », a-t-il dit.

Le premier ministre a répété qu’il n’est pas facile de faire de la politique actuellement, avec les effets de la pandémie et de la guerre en Ukraine qui se font encore sentir.

Jeudi soir, lors d’un rassemblement militant, M. Legault avait confié une anecdote du temps où il était ministre péquiste dans le gouvernement de Lucien Bouchard.

« Lucien Bouchard disait : quand on est en politique, on a un sac de courage, on pige dedans. À un moment il n’y en a plus dans le sac. »

Selon le premier ministre, il faut bien choisir les raisons pour lesquelles piger dans le sac de courage.
 

« Habituellement on pige dans le sac en début de mandat. On est toujours en début de mandat, donc on va continuer de piger cet automne dans le sac de courage pour continuer à changer les choses au Québec », a-t-il dit.

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Source : Lire l'article complet par Le Devoir

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