par François Meylan
À contre pied de quelques va-t-en-guerre occidentaux, la Hongrie, à l’instar de la Bulgarie, refuse d’alimenter le conflit en livrant des armes à Kiev. Source d’inspiration pour la Suisse qui a déjà perdu sa neutralité ?
À l’heure où l’issue du conflit armé à haute intensité qui frappe l’Ukraine fait douter dans les chancelleries occidentales, les regards se tournent vers ceux qui ont su, dès le début du conflit, faire preuve de nuance et de prudence. À l’instar de la Hongrie, pays dans lequel, votre serviteur s’est rendu du 6 au 10 mars derniers. Plus précisément, dans la localité frontière de Záhony, sur l’affluent du Danube la rivière Tisza qui trace la frontière hongro-ukrainienne. Voir mon compte-rendu pour le média suisse «Bon pour la tête».
Environnement et sentiment de la population locale
Toutes les localités de la région telles que Györöcske, Komoró, Mándok, Tiszabezdéd ou encore Tuzsér sont bâties autour d’une église et chacune est munie de son bureau de poste. Le catholicisme y est omniprésent. Sans oublier une minorité calviniste de 20%. C’est dans cet environnement de campagne à la pluie généreuse et aux couchers de soleil bucoliques que je questionne quelques habitants. Il en ressort une indifférence généralisée au conflit qui frappe le voisin. Ici, personne ne croit que les Russes vont étendre la guerre au-delà des frontières ukrainiennes. Personne non plus n’exprime un semblant de sympathie avec le régime de Kiev. Mes interlocuteurs se reconnaissent dans la posture du Premier ministre hongrois Viktor Orbán qui a, dès le début du conflit, opté pour une position équilibrée face à la Russie. Il mesure sa critique. À la fois dénonçant l’agression et refusant d’appliquer les sanctions décidées par Washington et Bruxelles et qui pénaliseraient durement l’approvisionnement énergétique de son économie. À cet effet, tout comme le voisin autrichien, le gouvernement hongrois n’accepte pas le transit d’armes vers l’Ukraine sur son territoire. Toutefois, personne n’est dupe. Et les trois kilomètres de file de poids lourds qui attendent régulièrement devant la douane de Záhony pour s’engager sur le Tisza bridge, en direction du poste frontière de Tchop, pour rejoindre la ville ukrainienne d’Oujhorod, contiennent probablement quelques armes et autres systèmes.
Qu’en est-il dans nos médias mainstream ?
L’Agence France Presse (AFP) qui site le premier ministre hongrois :
«Si on regarde la réalité, il est évident qu’il n’y a pas de victoire pour les pauvres ukrainiens, sur le champ de bataille». (Viktor Orban)
Semble lui reprocher le refus d’aider militairement son voisin ukrainien et de réitérer ses appels à un cessez-le-feu. Cette agence alterne communication et propagande, fustige également Orban d’être l’un des rares dirigeants, voir le seul, au sein de l’Union européenne à ne pas avoir visité Kiev, depuis le début des hostilités. N’est-ce pas un jugement de valeur de la part de l’AFP ?
De son côté la chaîne TV d’informations en continu Euronews précise que la Hongrie est fortement dépendante des hydrocarbures russes. Non sans insister sur la solitude du pays au sein de l’Alliance atlantique.
Le quotidien helvétique lematin.ch, dans son édition du 23 mai 2023 cite ainsi : «Kiev ne peut pas gagner la guerre, estime le Premier ministre hongrois».
Effets de langage
Et à votre serviteur d’ajouter dans le média suisse «Bon pour la tête» : «Durant les quatre jours passés dans la région je n’ai rencontré aucun journaliste ni média. Je n’ai pas vu non plus ce que j’imaginais, au décollage du vol EasyJet Genève – Budapest. À savoir une frontière hyper militarisée avec des mouvements de troupes et une intense activité de part et d’autre. Certes, quatre jours d’observations sur le terrain ne sauraient permettre une quelconque généralisation. Je ne rapporte qu’un aperçu saisi au cours de la première quinzaine de mars 2023. Néanmoins, je comprends que sans une solide honnêteté intellectuelle et journalistique pour celles et pour ceux qui ont l’honneur et surtout la responsabilité de l’être, la «fabrication» de l’information peut être très aléatoire. À 1600 km de Genève ou à 1800 km de Paris, qui va venir, au temps où règne l’émotionnel et la dictature de l’immédiateté, vérifier une «news» produite à Záhony ?»
D’où l’épineuse question sur quoi se basent des agences telles que l’Agence France Presse (AFP) et consort pour nous dépeindre Victor Orban ? Est-ce que œuvrer pour le bien de sa population et refuser d’alimenter la guerre fait automatiquement de vous un nationaliste esseulé ?
Finalement, ce que semblent reprocher les médias pro euro-atlentistes au premier ministre hongrois et accessoirement aux autorités bulgares qui ont adopté la même attitude est, dans un premier temps, de voir les choses telles qu’elles sont. Ensuite, d’exprimer le sentiment dominant de leurs propres populations qui refusent de s’engager dans une guerre qui n’est pas la leur. La logique invite toute personne bien dans sa tête à nommer cela la «Démocratie» avec un grand «D». Mais les médias mainstream passés sous revue, véritables propagandistes de la guerre et du sang, qualifient les postures hongroises et bulgares de déficit démocratique.
Source : Lire l'article complet par Réseau International
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