Connaissez-vous l’expression « disease mongering », le « façonnage de maladie »?
Selon une édition spéciale de la revue médicale PLOS sur ce sujet en 2018, il s’agit de pratiques consistant à « “vendre des maladies” afin de promouvoir la vente de médicaments ».
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Dans l’article La stratégie de Knock, publié en 2017, le Collectif Formindep dénonce ces techniques lucratives qu’il décrit comme « un ensemble de pratiques destinées à accroître le marché d’un produit de santé par la création ou la modification d’entités nosographiques », ces dernières étant mieux connues sous le nom de « maladies ».
Créé en 2004, Formindep est une association française regroupant « des professionnels de santé, des patients et des citoyens soucieux de favoriser une formation professionnelle et une information, auprès du public, indépendantes, c’est-à-dire dégagées de toute influence d’organismes pouvant avoir d’autres finalités que l’intérêt seul des patients ».
Le Collectif ajoute dans l’article de 2017 :
« Ces pratiques visent à étendre le domaine de la maladie. Elles orientent les plans de recherche, soutiennent des actions de communication grand public, incitent les autorités sanitaires à lancer des campagnes de dépistage systématisé et biaisent la formation médicale continue et les recommandations de bonnes pratiques. » (Soulignements ajoutés)
Déjà-vu?
Formindep écrit que ces pratiques prenaient une telle ampleur il y a une dizaine d’années que le Parlement européen a commandé un rapport à ce sujet en 2012 : Disease Mongering (Pseudo-Disease Promotion) (Le façonnage de maladie (la promotion de pseudo-maladies).
Voici le résumé du rapport :
« Le façonnage de maladies est la promotion des pseudo-maladies par l’industrie pharmaceutique dans le but d’en tirer des avantages économiques. Les fabricants d’équipement médical, les compagnies d’assurance, les médecins ou les groupes de patients peuvent également l’utiliser pour réaliser des gains monétaires ou exercer une influence. Cette pratique a augmenté parallèlement à la “médicalisation” de la société et à la croissance du complexe pharmaceutique. En raison des investissements massifs dans le marketing et le lobbying, de l’utilisation abondante d’Internet et des médias, et de l’émergence de nouveaux marchés, la question devient préoccupante, et les décideurs devraient être conscients de ses dangers et de ses conséquences. » (Soulignements ajoutés)
Par croissance du complexe pharmaceutique, on précise plus loin que cela comprend « son pouvoir et son influence ». Un exemple cité de pseudo-maladie est le trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
Les auteurs du rapport notent plus loin que ce phénomène date des années 1990 :
« Un nombre croissant de publications médicales et scientifiques(en grande partie datant du début des années 90, mais plus particulièrement des dix dernières années) prouve l’émergence de ce phénomène. » (Soulignements ajoutés)
Ils concluent :
« Le façonnage de maladie (promotion des pseudo-maladies) est une réalité, compte tenu de la littérature scientifique disponible, en particulier dans les économies développées, les Etats-Unis, l’Australie et l’UE. » (Soulignements ajoutés)
Chez nous [Québec, Canada], on le sait, l’industrie est vénérée et les pilules ont la cote.
En avril 2021, TVA [réseau de télévision canadien privé en langue française] rapportait que Les Québécois sont « les champions des médicaments » au pays :
En 2019, un média de l’UQÀM, Pourquoi.media affirmait que le Québec était surmédicamenté en ce qui a trait au TDAH :
« Le Québec est un champion incontesté en ce qui a trait à la proportion d’adolescents qui consomment des médicaments reliés au trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Dans les faits, le taux de prévalence de consommation au Québec est trois fois plus élevé que dans le reste du Canada. Le taux de prévalence du TDAH chez les adolescents québécois, lui, est de deux à trois fois plus élevé que celui observé dans la population mondiale. » (Soulignements ajoutés)
On explique ce phénomène, entre autres, par l’accès plus facile aux médicaments en raison des assurances et à « une panoplie de professionnels de la santé […] en droit de porter un diagnostic selon leur propre grille d’analyse ».
Parmi les types de façonnages de maladie, le Collectif Formindep cite ceux-ci :
- « la transformation de facteurs de risque (hypercholestérolémie, hypertension artérielle, glycémie) en maladie définie par le franchissement de seuils de marqueurs (exemples : cholestérolémie, tension artérielle), indépendamment des caractéristiques cliniques du sujet. L’abaissement continu des valeurs considérées normales fait basculer mécaniquement un nombre croissant de personnes de l’état de santé à celui de malade et de client potentiel, et l’intensification des traitements accroît le marché par patient traité ;
- l’élargissement de la définition des maladies par l’élargissement des critères diagnostiques, la création de pré-maladies (exemples: trouble cognitif léger, pré-diabète, ostéopénie);
- la création de nouvelles entités nosographiques par le rassemblement de symptômes en syndromes et maladies (exemples: syndrome métabolique, fatigue chronique, fibromyalgie, maladie de Lyme chronique);
- la pathologisation de conditions normales (exemple : ménopause, ostéoporose liée à l’âge, timidité, fluctuations de la libido). » (Soulignements ajoutés)
Les auteurs ajoutent que les campagnes de sensibilisation des maladies sont des campagnes de marketing déguisées, permettant « aux firmes pharmaceutiques d’atteindre directement le consommateur, contournant ainsi l’interdiction qui leur est faite de communiquer sur leurs produits ». C’est ainsi que, selon eux, le mois d’octobre est devenu le mois rose de la sensibilisation au cancer du sein et que novembre est devenu Movember, un mois bleu dédié à la santé masculine.
« Le message délivré suit un schéma invariable : il existe une maladie sournoise, avançant sans symptômes ou sous des symptômes anodins et peu spécifiques, beaucoup plus répandue et grave qu’on ne le croit, qu’il faut dépister et traiter tôt. Nombre de ces campagnes s’accompagnent de pseudo-tests (questionnaires) de dépistage qui se caractérisent par leur faible valeur prédictive positive, multipliant les faux positifs et alarmant à tort la population [4]
Si les bénéfices d’un dépistage et d’une prise en charge précoce sont indéniables dans certains cas, de nombreux travaux ont remis en question l’utilité de ces campagnes et ont permis de mettre en évidence les problèmes de santé publique liés au surdiagnostic, au surtraitement et à la iatrogénèse qu’elles entraînent [5].
Toutes ces pratiques concourent à multiplier le nombre de personnes étiquetées “malades”, la proportion des personnes à traiter parmi elles, et pour chacune à accroître l’intensité du traitement. Il s’agit d’un disease mongering à visée purement quantitative, jouant sur la définition des maladies pour accroître les volumes de ventes. » (Soulignements ajoutés)
On ne peut faire autrement que penser aux « malades asymptomatiques » à la lecture de ces pratiques de façonnage de maladies.
Ce phénomène, le Dr. Sauveur Boukris l’avait déjà exploré dans son livre paru en 2013, La Fabrique de malades : Ces maladies qu’on nous invente.
Le résumé de ce livre regorge de parallèles avec la crise covid :
« Cholestérol, hypertension, cancer, dépression, ostéoporose, ménopause, etc. : et si l’on en faisait un peu trop ? L’excès de médecine nuirait-il à la santé ?
“Tout bien portant est un malade qui s’ignore”, disait le docteur Knock. Aujourd’hui, “tout bien portant est quelqu’un qui n’a pas eu de dépistage”. Des centaines de milliers de Français consultent à l’hôpital ou en cabinet pour pratiquer un bilan médical, radiologique ou biologique. Inquiets et prudents, ils pensent qu’il vaut mieux prévenir que guérir et comptent ainsi éviter une maladie silencieuse.
Dans ce livre, le docteur Boukris évoque la “médecine marketing” et montre comment on manipule médecins et malades en jouant sur les peurs, comment on médicalise nos vies pour pratiquer davantage d’examens biologiques, de radiographies et faire consommer toujours plus de médicaments.
Transformer des sujets bien portants en malades potentiels, tel est l’objectif de certains secteurs médicaux, privés ou publics, qui transmettent un message trompeur, lequel engendre de l’anxiété et génère un gâchis financier.
Surmédicalisation, surdiagnostic, surtraitement, ce document nous ouvre les yeux sur des pratiques du monde médico-industriel qui peuvent être nuisibles pour la santé et bouleverse de nombreuses idées reçues. » (Soulignements ajoutés)
Malgré toute la littérature pré-covid sur le façonnage de maladies, les journalistes n’ont pas abordé ce sujet pourtant révélateur des mécanismes trompeurs employés par une industrie qui commande la foi et envers laquelle trop de critiques sont qualifiées d’« antiscience » et de complotisme.
Douter des motivations profondes d’une industrie à but hautement lucratif n’a rien de complotiste. Au contraire, ces doutes sont fondés sur des phénomènes très bien documentés et répétitifs de manipulation, de fraude, de mensonges et de corruption, au point de satisfaire les critères du racket dans la loi américaine Racketeer Influenced and Corrupt Organizations Act (RICO) de 1970, comme l’explique Pete Gøtzsche dans Remèdes mortels et crime organisé. Comment l’industrie pharmaceutique a corrompu les services de santé, un livre publié aux Presses de l’Université Laval :
« Le racket consiste à commettre un certain type d’offense à plus d’une reprise. La liste des offenses qui constituent du racket inclut l’extorsion, la fraude, les infractions fédérales liées à la drogue, la corruption, les détournements de fonds, l’obstruction de la justice, l’obstruction de l’application de la loi, la subornation de témoins et la corruption politique. Les grosses pharmaceutiques s’adonnent si souvent à tout cela constamment qu’il ne peut y avoir aucun doute que son modèle d’affaires satisfait aux critères du crime organisé. » (Soulignements ajoutés)
Dans sa recension du livre, publiée sur le site de L’association canadienne de justice pénale, partenaire de la Société de criminologie du Québec, André Normandeau, criminologue et professeur à l’Université de Montréal écrit :
« Un rare livre criminologique écrit à la fois de façon populaire tout en étant bien assis sur la recherche de la vérité. Un jour, nous aurons besoin d’un autre Peter Gotzsche pour faire le procès scientifique de la pandémie du coronavirus, dit le Covic-19 (sic), en pensant aux lacunes “peut-être de nature criminelle” du monde médical et du monde politique qui n’ont pas prévu de façon satisfaisante la crise sanitaire que nous avons vécu en 2020 et qui n’ont pas préparé la réponse médicale à cette crise de façon appropriée, me semble-t-il. » (Soulignements ajoutés)
Alors que bon nombre de citoyens se retrouvent devant les tribunaux pour avoir désobéi aux règles arbitraires et antiscientifiques mises en place en 2020, l’industrie s’en tire avec des profits records et quelques questions embrassantes sur leurs injections de la part de députés qui font leur travail, comme on l’a vu en Australie le 3 août dernier (audiences intégrales).
Les représentants de Pfizer n’ont jamais répondu à la question « Pfizer a-t-il testé l’efficacité de son vaccin covid pour arrêter ou baisser la transmission du virus ? » :
Vidéo hallucinante à voir et diffuser sans modération !
2 cadres de Pfizer Australie refusant de répondre à la question d’un sénateur « #Pfizer a-t-il testé l’efficacité de son vaccin covid pour arrêter ou baisser la transmission du virus ? »
Embarras maximal !
Si révélateur ! pic.twitter.com/WzhWZM8hPo— Florian Philippot (@f_philippot) August 5, 2023
En 2023, le slogan « sûr et efficace » a perdu énormément de crédibilité et les représentants des pharmaceutiques ne font pas bonne figure lorsqu’ils tentent de le justifier… en répétant que leurs injections sont sûres et efficaces, malgré les preuves du contraire établies par de nombreux chercheurs indépendants qualifiés, comme le World Council for Health, Doctors for Covid Ethics et un groupe de chercheurs danois, ayant découvert des différences considérables dans l’incidence d’effets secondaires entre les lots d’injections, dont un provoquant des effets secondaires 1 fois sur 20.
Cette étude est bien vulgarisée par le Dr. John Campbell dans cette vidéo [en anglais] :
Comme l’explique Lynn Payer dans un livre avant-gardiste sur le sujet publié en 1992, Disease-Mongers: How Doctors, Drug Companies, and Insurers Are Making You Feel Sick (Les façonneurs de maladies : Comment les médecins, les sociétés pharmaceutiques et les assureurs vous font sentir malade) :
«Essayer de convaincre les gens qu’ils sont malades ou ceux qui sont légèrement malades qu’ils sont très malades, est très lucratif.»
Essayer de convaincre les gens qu’ils risquent d’être malade l’est peut-être encore plus.
Julie Lévesque
Julie Lévesque est journaliste indépendante. Découvrez son site Le tribunal de l’infaux.
Source : Lire l'article complet par Mondialisation.ca
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